Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 septembre 1998, présentée par M. Robert X demeurant ... représenté par Me DELAY, avocate inscrite au barreau de Lyon.
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 97 01590 en date du 2 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la COMMUNAUTE URBAINE DE LYON (COURLY) à lui payer la somme de 1.800.000 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 25 mai 1991, en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la faute qu'elle a commise dans la décision en date du 27 août 1990 par laquelle son président a exercé le droit de préemption pour l'acquisition d'un ensemble immobilier dont il est propriétaire 172-174 avenue Franklin Roosevelt à BRON ;
2°) de déclarer fautif le comportement de la COURLY et la condamner à lui payer la somme de 1.800.000 francs en réparation de son préjudice ;
3°) de condamner la COURLY à lui payer la somme de 10.000 francs en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
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classement cnij : 60-01-04-01
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2003 :
- le rapport de M.MILLET, premier conseiller ;
- les observations de Me Morel, avocat de la COURLY ;
- et les conclusions de M. BOUCHER, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de M. X :
Considérant que M. X demande la condamnation de la COMMUNAUTE URBAINE DE LYON (COURLY) à l'indemniser du préjudice qui serait résulté pour lui des irrégularités fautives dans l'exercice du droit de préemption qu'elle a mis en oeuvre à la suite de la déclaration d'intention d'aliéner l'ensemble immobilier sis n° 172-174 avenue Franklin Roosevelt à Bron dont il était propriétaire indivis avec sa fille ; que la demande de M. X est présentée en son nom personnel et pas au nom de l'indivision ; que M. X est irrecevable à agir en tant que mandataire de sa fille ; qu'en conséquence M. X n'est recevable à demander à être indemnisé qu'à concurrence de sa part dans l'indivision qui, compte tenu des pièces produites, s'élevait à 50 % en 1990 ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité :
En ce qui concerne la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement du Tribunal de Grande Instance de Lyon en date du 20 décembre 1990 fixant à 2 800 000 F le prix de l'ensemble immobilier ayant été notifié par les soins des consorts X à la COURLY seulement le 25 mars 1991, il n'est devenu définitif, conformément aux dispositions de l'article L.13-21 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, que le 10 avril 1991 ; que, par suite, conformément aux dispositions de l'article L.231-7 du code de l'urbanisme, la COURLY a pu régulièrement renoncer à l'acquisition de l'ensemble immobilier par lettre en date du 3 juin 1991 notifiée à M. X le 4 juin 1991 ; que, dès lors, ce dernier ne peut rechercher la responsabilité de la COURLY en se prévalant d'un exercice irrégulier de son droit à renoncer à l'acquisition ;
Considérant, par contre, que la motivation de l'arrêté en date du 27 août 1990 par lequel le président de la COURLY a décidé, à la demande de l'OPAC du Rhône, d'exercer son droit de préemption urbain sur le bien des consorts X ne répond pas aux exigences des dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme en se bornant à relever l'intérêt d'un tel exercice pour la mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat ; qu'il n'est pas contesté que cette décision est directement à l'origine du renoncement de l'acquéreur dès le 18 septembre 1990 ; que, par suite, M. X est fondé à se prévaloir de cette illégalité fautive pour rechercher la responsabilité de la COURLY ;
En ce qui concerne le préjudice :
Considérant que M. X évalue son préjudice consistant, d'une part, en une perte de chance de vendre le bien pour la somme de 2 800 000 F fixée dans la promesse de vente qui avait été passée avec l'acquéreur évincé et, d'autre part, des dommages et intérêts pour les démarches nécessitées par la recherche d'un nouvel acquéreur, à la somme de 1 800 000 F ; que cependant M. X, qui pouvait à nouveau disposer de son bien à partir du 4 juin 1991, n'établit ni avoir été dans l'impossibilité de le vendre au prix de 2 800 000 F fixé par le jugement du Tribunal de Grande Instance, ni même l'avoir remis en vente ; que, par suite, son préjudice indemnisable ne peut être que la perte de chance de disposer de la somme de 2 800 000 F entre la date de la décision illégale de préemption et la date de notification du renoncement de la COURLY, soit pendant un an environ ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'estimant à la somme de 300 000 F ; que compte tenu des droits de M. X dans l'indivision à la date de la décision de préemption, il y a lieu de condamner la COURLY à lui verser la somme de 150 000 F (22 867,35 euros) ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la totalité de sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative reprenant celles de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. X qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à la COURLY la somme qu'elle demande en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant, en revanche, que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la COURLY à payer à M. X la somme de 1000 euros au titre de ces dispositions ;
DÉCIDE :
ARTICLE 1er : Le jugement n° 9701590 du Tribunal administratif de Lyon en date du 2 juillet 1998 est annulé.
ARTICLE 2 : La COMMUNAUTE URBAINE DE LYON est condamnée à payer à M. X une somme de 22 867,35 euros (150 000 F).
ARTICLE 3 : La COURLY versera à M. X la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
ARTICLE 4 : Le surplus des conclusions de M. X et les conclusions de la COURLY tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
N° 98LY01668 - 4 -