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17/12/2001 | FRANCE | N°96LY01360;97LY02897;97LY03000

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 17 décembre 2001, 96LY01360, 97LY02897 et 97LY03000


I) Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 juin 1996 sous le n 96LY01360, présentée pour la COMMUNE DE VICHY, représentée par son maire en exercice par la SCP PEIGNOT-GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
La COMMUNE DE VICHY demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 941029 en date du 9 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a déclarée entièrement responsable des conséquences dommageables du vol de timbres de collection dont M. X... a été victime dans la nuit du 26 au 27 juin 1993 et a prescrit une

expertise afin d'évaluer le préjudice subi ;
2 ) de rejeter la dem...

I) Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 juin 1996 sous le n 96LY01360, présentée pour la COMMUNE DE VICHY, représentée par son maire en exercice par la SCP PEIGNOT-GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
La COMMUNE DE VICHY demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 941029 en date du 9 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a déclarée entièrement responsable des conséquences dommageables du vol de timbres de collection dont M. X... a été victime dans la nuit du 26 au 27 juin 1993 et a prescrit une expertise afin d'évaluer le préjudice subi ;
2 ) de rejeter la demande de M. X... devant le tribunal administratif ;
II) Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 décembre 1997 sous le n 97LY02897, présentée pour M. Philippe X... demeurant ... par Me GUILLAUME, avocat au barreau de Paris ;
M. X... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 941029 en date du 21 octobre 1997 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné la COMMUNE DE VICHY à lui payer, outre intérêts à compter du 16 février 1984, une indemnité de 516 186 francs ;
2 ) de porter cette indemnité à 646 186 francs ;
III) Vu, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 décembre 1997 sous le n 97LY03000, présentée pour la COMMUNE DE VICHY représentée par son maire en exercice, par la SCP PEIGNOT-GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
La COMMUNE DE VICHY demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 941029 en date du 21 octobre 1997 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamnée à payer à M. X..., outre intérêts au taux légal à compter du 16 février 1994 une indemnité de 516 186 francs ;
2 ) de rejeter la demande de M. X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2001 :
- le rapport de M. FONTBONNE, président,
- les observations de Me Y..., substituant la SCP PEIGNOT GARREAU, avocat de la COMMUNE DE VICHY, et de Me GUILLAUME, avocat de M. X... ;

- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont relatives au même dommage ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la responsabilité :
Considérant que la demande présentée au tribunal administratif par M. X... tendait à obtenir réparation du préjudice que lui a causé le vol de feuilles de timbres exposés dans le cadre du congrès de l'académie européenne d'études philatéliques et postales qui s'est tenu à Vichy du 26 au 28 juin 1993 ; qu'il entendait engager la responsabilité de la commune tant au titre d'une faute dans l'organisation de l'exposition que du non respect des engagements contractuels pris à son égard ; que, par le jugement en date du 9 avril 1996, le tribunal administratif a retenu la responsabilité entière de la commune au motif que la faute qu'elle a commise dans l'organisation de l'exposition est à l'origine du refus de l'assurance d'indemniser M. X... ;
Considérant que la COMMUNE DE VICHY soutient qu'elle a apporté son soutien matériel, financier et moral à cette manifestation sans être responsable de son organisation laquelle a été assurée par une association indépendante dénommée EUROPHIL 93 constituée dans ce seul but ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les bulletins d'inscription étaient à retourner par les exposants à la mairie à l'attention de M. Broustine, commissaire général du congrès ; que la COMMUNE DE VICHY, dont les services techniques ont confectionné les vitrines de l'exposition, s'est chargée de la location de la salle dans le bâtiment du casino où a eu lieu le congrès et de la souscription du contrat d'assurances ; que le maire a adressé aux personnalités du monde philatélique des courriers leur indiquant qu'ils seraient pendant ces journées les hôtes de la municipalité ; que l'association EUROPHIL 93, constituée pour l'occasion entre des personnes n'ayant aucun lien avec la municipalité si ce n'est M. Broustine, adjoint comme membre du bureau mais s'intéressant à titre personnel à la philatélie, n'a joué qu'un rôle très limité dans l'organisation matérielle du congrès ; que, dans ces conditions, et eu égard à
l'intérêt général d'ordre culturel et touristique que présentait cette manifestation, un contrat de droit public s'est formé entre la commune et M. X... lorsque ce dernier a retourné le bulletin d'inscription en indiquant les pièces qu'il présenterait à l'exposition ;
Considérant que l'existence d'un contrat entre la commune et M. X... excluant qu'il exerce pour obtenir réparation de son préjudice d'autres actions que celles procédant de ce contrat, c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a retenu la responsabilité de la commune sur le fondement d'une faute quasi-délictuelle ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande de M. X... en tant qu'elle entend engager la responsabilité contractuelle de la commune ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'alors que le bulletin d'inscription à l'origine de la formation du contrat mentionne que le site du congrès fera l'objet de mesures de surveillance particulièrement poussées, la commune, en installant des vitrines sans dispositif de verrouillage et en ne s'assurant pas de la mise en place d'autres mesures de surveillance que celle d'un seul vigile à l'extérieur d'un bâtiment représentant un périmètre important, a commis dans l'exécution du contrat une faute directement à l'origine du vol et engageant sa responsabilité ;
Considérant que la COMMUNE DE VICHY ne peut, pour voir sa responsabilité écartée ou atténuée, invoquer une faute de son co-contractant qui au regard des mesures de protection annoncées n'a commis aucune imprudence en lui confiant la garde de pièces rares ; que la commune qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, avait pris en charge l'organisation matérielle du congrès, et avait confié à l'association EUROPHIL 93 le soin de mettre en place le gardiennage, ne peut davantage utilement invoquer à l'égard de la victime la faute que ladite association a commise en n'engageant qu'un seul vigile ; que par suite, sans qu'il y ait lieu de rechercher si les mesures de protection étaient ou non conformes à celles exigées par la compagnie d'assurances de la commune qui a refusé de couvrir le vol au motif de leur insuffisance, la COMMUNE DE VICHY n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 9 avril 1996, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a déclarée entièrement responsable de conséquences dommageables du vol commis au préjudice de M. X... ;
Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte du rapport de l'expertise prescrite par le tribunal administratif que la valeur des pièces volées peut être évaluée à 645 000 francs si elles étaient exemptes de traces de charnière sur la gomme et à 515 000 francs dans la négative ; que, contrairement à ce que soutient la commune, l'expert n'a pas effectué cette évaluation par référence à ses propres collections mais en utilisant la documentation spécialisée disponible et des photographies ; que M. X... produit des attestations circonstanciées de deux personnes spécialistes en la matière qui indiquent avoir eu l'occasion d'examiner sa collection en constatant l'absence de traces de charnières sur la gomme ; que dans ces conditions, à défaut pour la commune d'apporter le moindre élément en sens contraire, M. X... doit être regardé comme établissant que les pièces volées, faisant partie d'un lot dont il avait souligné la grande valeur en retournant le bulletin d'inscription, étaient exemptes de défauts ; que le préjudice ainsi subi par M. X..., étant entièrement constitué le jour du vol, qui en a été le fait générateur, la commune ne peut invoquer une prétendue faute de la victime qui aurait aggravé le préjudice et consistant à avoir, malgré l'assistance que la compagnie d'assurances de la commune était disposée à lui accorder, refusé une transaction avec les auteurs du vol lui proposant le rachat de la collection pour 250 000 francs ; que M. X... est par suite fondé à demander que l'indemnité qui lui a été allouée à ce titre par le tribunal administratif soit portée de 515 000 francs à 645 000 francs ; que, contrairement à ce que soutient la commune, les frais exposés pour 1 186 francs par M. X... pour diffuser aux négociants spécialisés une circulaire les avertissant du vol, ont été à bon droit retenus pour le tribunal administratif dans le préjudice subi ; que la COMMUNE DE VICHY doit être condamnée à payer à M. X... une indemnité de 646 186 francs ;
Sur les intérêts :
Considérant que selon l'article 1153 du code civil, les intérêts sont dus à compter du jour de la sommation de payer, c'est à dire à compter de la date de réception de la demande d'indemnité en principal adressée à l'administration ; que, par suite, les intérêts sont dûs à compter du 22 février 1994, date de réception par la commune de la demande d'indemnité présentée par M. X..., alors même que la demande de versement des intérêts serait postérieure ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code administratif d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative reprenant celles de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que M. X... qui n'est pas la partie perdante soit condamné à payer à la COMMUNE DE VICHY une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu de condamner la COMMUNE DE VICHY à payer à M. X... une somme de 6 000 francs ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner la COMMUNE DE VICHY à payer une somme à l'association EUROPHIL 93 ;
Article 1er : La requête n 97LY01360 de la COMMUNE DE VICHY dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 9 avril 1996 est rejetée.
Article 2 : La somme de 516 186 francs que la COMMUNE DE VICHY a été condamnée à verser à M. X... par le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 21 octobre 1997 est portée à 646 186 francs. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 22 février 1994.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont- Ferrand du 21 octobre 1997 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : La COMMUNE DE VICHY est condamnée à payer à M. X... une somme de 6 000 francs sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête n 97LY03000 de la COMMUNE DE VICHY et les conclusions de l'association EUROPHIL 93 tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 96LY01360;97LY02897;97LY03000
Date de la décision : 17/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-01-02-02 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE POUR FAUTE


Références :

Code civil 1153
Code de justice administrative L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. FONTBONNE
Rapporteur public ?: M. BOURRACHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2001-12-17;96ly01360 ?
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