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20/12/1994 | FRANCE | N°93LY00742

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 20 décembre 1994, 93LY00742


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 18 mai 1993, présentée par M. Michel Y... demeurant "Le Galoubet", 46, quai Charles-De-Gaulle (83150) Bandol ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 11 février 1993 du tribunal administratif de Nice, en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1981 à 1984, demeurant à sa charge après une réduction en droits et pénalités prononcée par l'administration en cours d'instance ;
2°) de prononce

r la décharge de ces impositions ;
3°) jusqu'à ce qu'il ait été statué au f...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 18 mai 1993, présentée par M. Michel Y... demeurant "Le Galoubet", 46, quai Charles-De-Gaulle (83150) Bandol ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 11 février 1993 du tribunal administratif de Nice, en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1981 à 1984, demeurant à sa charge après une réduction en droits et pénalités prononcée par l'administration en cours d'instance ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond, d'en prononcer le sursis à exécution ;
. Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 1994 :
-le rapport de M. RICHER, conseiller ;
- les observations de Me HERROU, avocat de M. Y... ;
- et les conclusions de M. GAILLETON, commissaire du gouvernement ;

Sur les limites du litige :
Considérant que, postérieurement à l'introduction de la requête devant la cour, l'administration a prononcé le 24 septembre 1993 un dégrèvement de 206 100 F portant sur la majoration appliquée au redressement de l'année 1981 ; que pour ce montant les conclusions de la requête de M. Y... sont devenues sans objet ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R.190-1 du livre des procédures fiscales : "Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial de l' administration des impôts dont dépend le lieu de l'imposition ; qu'aux termes de l'article L.199 du même livre : "En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif" ; qu'enfin, aux termes de l'article R.199-1 dudit livre: "L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation ( ...) Toutefois le contribuable qui n'a pas reçu de décision de l'administration dans le délai de six mois ( ...) peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai" ; que ces dispositions font obstacle à la recevabilité devant le tribunal administratif, d'une demande qui n'a pas été précédée d'une réclamation au service des impôts ;
Considérant que si, le 6 octobre 1987, M. Y... a adressé à l'administration une réclamation portant uniquement sur les redressements procédant de la taxation d'office d'une partie de ses revenus, en application des dispositions de l'article L.69 du livre des procédures fiscales et que ce n'est que postérieurement à l'enregistrement, le 29 juillet 1988, de sa demande devant le tribunal administratif, que l'intéressé a adressé aux services fiscaux, le 21 décembre 1989, une seconde réclamation portant sur les redressements procédant de la rectification d'office mise en oeuvre sur le fondement des dispositions alors applicables de l'article L.75 du livre des procédures fiscales ; que si cette seconde réclamation était postérieure à l'enregistrement de la demande devant le tribunal, elle a été suivie, le 29 janvier 1990 et le 2 juillet 1990, de mémoires présentés au tribunal administratif qui ont eu pour effet, après l'expiration du délai de six mois suivant la réclamation demeurée sans réponse adressée à l'administration, de saisir régulièrement le tribunal du litige ;
Sur la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la vérification de situation fiscale personnelle :

Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que, lorsque l' administration demande à un contribuable faisant l'objet d'une vérification de situation fiscale personnelle, de lui communiquer les relevés de ses comptes bancaires ou d'autres documents ou renseignements relatifs à cette situation, elle serait tenue d'informer ce contribuable du caractère non contraignant de cette demande ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que la vérification de situation fiscale personnelle se trouverait entachée d'une irrégularité faute pour le vérificateur d'avoir fait mention d'un tel caractère facultatif ;
En ce qui concerne les demandes de justificatifs :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, l'administration, si elle a réuni des éléments permettant d'établir qu'un contribuable dispose de revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, peut lui adresser des demandes de justifications, et, en particulier, l'interroger, le cas échéant, sur l'origine de sommes portées, au cours des années d'imposition en litige, au crédit de ses comptes bancaires ou autres, ou sur celles des ressources à l'aide desquelles il apparaît qu'il ait pu, au cours des mêmes années, financer des dépenses de toute nature d'un montant supérieur à celui de ses disponibilités dégagées ; que la régularité de la mise en oeuvre de la procédure susmentionnée s'apprécie en fonction des indices en la possession de l'administration au moment où elle formule des demandes de justifications ou d'explications et non pas compte tenu des éléments ultérieurement portés à sa connaissance ; qu'est ainsi inopérant le moyen tiré de ce que le vérificateur aurait inclus dans une balance espèces ou dans des crédits bancaires des sommes susceptibles de ne pas constituer des revenus, alors que ces mêmes sommes constituent des éléments de la demande de justificatifs ;
Considérant que, dans le cadre de la vérification de situation fiscale personnelle d'ensemble de M. Y..., le vérificateur a établi pour les années 1981, 1983 et 1984, des balances comportant, d'une part, les espèces disponibles, d'autre part, les espèces utilisées ; que la comparaison entre les espèces disponibles et les espèces utilisées laisse apparaître pour les années 1983 et 1984 d'importants excédents de ces dernières espèces ; que, dès lors, l'administration disposait d'éléments permettant d'établir que le contribuable pouvait avoir des revenus plus importants que ceux qu'il avait déclarés ; qu'elle était donc en droit, pour ce seul motif, et sans qu'il fut nécessaire par ailleurs de relever un écart important entre les crédits bancaires et les revenus déclarés, ou d'établir une balance globale de trésorerie, de lui demander des justifications en application de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; qu'en outre, pour l'année 1981, les crédits bancaires supérieurs de plus de quinze fois aux revenus déclarés par M. Y... légitimaient également l'envoi de telles demandes de justifications ;
En ce qui concerne la taxation d'office :

Considérant que les 3 et 4 septembre 1985, le vérificateur a adressé à M. Y... au titre de chacune des quatre années vérifiées, des demandes de justifications concernant l'origine de crédits bancaires et les discordances constatées entre les disponibilités dégagées en espèces et les disponibilités employées en espèces, après prise en compte des dépenses de train de vie courant ; que malgré une prorogation du délai de réponse jusqu'au 16 novembre, ce n'est que le 22 novembre 1985 que le contribuable a fourni des explications ou justifications en réponse à ces demandes ; que, par suite, et dès lors qu'il n'a pas été répondu dans le délai imparti, l' administration était en droit de taxer d'office l'intéressé à l'impôt sur le revenu en application des dispositions de l'article L.69 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des redressements :
En ce qui concerne la taxation d'office :
Considérant, en premier lieu, que pour expliquer l'origine de chèques d'un montant total de 549 347,16 F crédités à son compte bancaire, M. Y... a produit une attestation du Crédit agricole de la Somme faisant état de la négociation de bons de caisse pour un montant de 531 273 F le 14 mai 1981 et du règlement du solde, s'élevant à 18 074,16 F, du prix d'un appartement ; que, d'une part, la mention du bordereau de remise de chèques hors place n'est pas corroborée par l'attestation de la Caisse régionale en date du 21 mars 1986, faisant état d'un remboursement par caisse au bureau d'Amiens, laquelle ne permet pas non plus de connaître l'identité du souscripteur des bons anonymes en cause ; que, d'autre part, il ne résulte pas de l'attestation notariée établie par Me X..., faisant état de la vente d'une villa en 1980, que la somme de 18 074, 16 F correspondrait au solde du paiement du prix de cette villa ;
Considérant, en second lieu, que M. Y... a justifié le versement en espèces d'une somme de 650 000 F sur son compte bancaire le 22 avril 1983 par la circonstance qu'il aurait conservé par devers lui le produit de la vente d'or effectuée par son père en 1981, qui lui aurait été remis par celui-ci ; que si l'administration a admis, au vu des justificatifs produits par l'intéressé, les explications relatives à cette vente, il ressort de l'attestation en date du 17 avril 1987 du Crédit agricole de la Somme que le produit de cette vente, a, à concurrence de 675 000 F, été payé sous la forme d'un chèque de banque libellé au profit de M. Michel Y... et figurant au crédit de son compte bancaire en date du 17 juin 1981 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ladite somme aurait alors été retirée pour être conservée en espèces ; que, par suite, M. Y... n'apporte pas la preuve de l'origine de la somme de 650 000 F créditée à son compte le 22 avril 1983 ;
En ce qui concerne les bénéfices rectifiés d'office :

Considérant que pour rattacher à la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux une partie seulement des sommes d'origine inexpliquée du contribuable, l'administration s'est fondée sur la circonstance que l'intéressé ne percevait pas de revenus étrangers à son activité professionnelle ; qu'alors qu'elle n'a pas pour autant écarté le principe de la taxation d'office de revenus regardés comme étant d'origine indéterminée, l'administration n'a fourni aucun élément permettant de connaître selon quels critères ou quelle méthode elle a pu déterminer le montant des revenus identifiables comme provenant de l'activité commerciale ; que, par suite, M. Y... doit être regardé comme apportant la preuve de l'absence de bien-fondé des impositions procédant de la rectification d'office ; que, dans ces conditions, il est fondé à demander au titre de chacune des années 1981 à 1984 la décharge des droits s'élevant respectivement à 102 940, 112 757, 167 000 et 116 000 francs ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête qui sont devenues sans objet et que M. Y... n'est que partiellement fondé à demander la décharge du surplus des impositions demeurant en litige ;
Article 1er : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête relatives à l'imposition de l'année 1981 à hauteur de la somme de 206 100 francs.
Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu mis à la charge de M. Y... au titre des années 1981 à 1984 sont respectivement réduites de 102 940 francs, 112 757 francs, 167 000 francs et 116 000 francs .
Article 3 : M. Y... est déchargé des droits correspondant aux bases mentionnées à l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 à 3 ci-dessus.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 93LY00742
Date de la décision : 20/12/1994
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - RECLAMATIONS AU DIRECTEUR - DELAI.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - FORMES ET CONTENU DE LA DEMANDE.


Références :

CGI Livre des procédures fiscales R190-1, L69, L75, L16


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. RICHER
Rapporteur public ?: M. GAILLETON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1994-12-20;93ly00742 ?
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