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11/10/1994 | FRANCE | N°93LY00708

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 11 octobre 1994, 93LY00708


Vu, enregistrées au greffe de la cour le 10 mai et le 16 juin 1993, les requêtes présentées pour M. Y... demeurant ... (HAUTS-DE-SEINE) par Me BRAMBILLA, avocat au barreau de Grenoble ;
M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à payer à la commune de Seynod une indemnité de 324 307 francs ;
2°) de le mettre hors de cause ;
3°) à titre subsidiaire dans le cas où sa mise en cause serait maintenue, condamner solidairement la société SALIBAT, la société SOFRAMIR et

les sociétés SALINO et BROCHET TECHNIVERRIER représentées par leurs liquidate...

Vu, enregistrées au greffe de la cour le 10 mai et le 16 juin 1993, les requêtes présentées pour M. Y... demeurant ... (HAUTS-DE-SEINE) par Me BRAMBILLA, avocat au barreau de Grenoble ;
M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à payer à la commune de Seynod une indemnité de 324 307 francs ;
2°) de le mettre hors de cause ;
3°) à titre subsidiaire dans le cas où sa mise en cause serait maintenue, condamner solidairement la société SALIBAT, la société SOFRAMIR et les sociétés SALINO et BROCHET TECHNIVERRIER représentées par leurs liquidateurs, à le relever et garantir de la condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner la commune de Seynod à lui payer une somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
. Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 1994 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ;
- les observations de Me CAPDEVILLE substituant Me BRAMBILLA, avocat de M. Y... ;
- et les conclusions de M. GAILLETON, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Y..., architecte, conteste le jugement en date du 15 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a, sur le fondement de la responsabilité décennale, seul condamné à payer à la commune de Seynod une indemnité de 324 307 francs, en réparation des désordres affectant la couverture du centre administratif dont la commune lui a confié la conception et la maîtrise d'oeuvre de la réalisation ; qu'à titre principal il demande à être mis hors de cause ; qu'à titre subsidiaire il demande, d'une part, que le montant de l'indemnité allouée à la commune soit réduit et, d'autre part, que les sociétés SALINO et SALIBAT soient condamnées solidairement à le relever et le garantir de la condamnation prononcée à son encontre en ce qui concerne les désordres relatifs à la couverture en bardeaux de la salle du conseil municipal, les sociétés SALINO, SOFRAMIR et BROCHET TECHNIVERRIER étant tenues à la même garantie en ce qui concerne les désordres affectant les verrières ; que par appel incident la commune demande que l'indemnité que M. Y... a été condamné à lui payer soit portée à 407 307 francs ;
Sur la responsabilité décennale des constructeurs :
Considérant que les constructeurs ne contestent pas en appel que les désordres litigieux rendent l'ouvrage impropre à sa destination et sont en conséquence susceptibles d'engager leur responsabilité sur le fondement de la garantie décennale ;
En ce qui concerne la couverture de la salle du conseil municipal :
Considérant que les nombreuses infiltrations constatées se produisent le long des noues de la couverture ; que les noues en zinc dont la dilatation importante, provoquait des soulèvements des bardeaux participant aux entrées d'eau ont été à l'initiative de la commune, remplacées par des noues en paradienne sans que les infiltrations disparaissent totalement ; que l'expert a relevé que la persistance des infiltrations avait pour origine la défaillance de la couverture au voisinage des noues en raison de la forme générale de la toiture orientée plein sud qui entraîne une concentration de chaleur provoquant un gonflement des bardeaux s'accompagnant de l'élargissement des trous de passage des clous de fixation ; que l'expert qui ne constate pas de malfaçons dans la pose des bardeaux au regard du mode d'assemblage retenu, note que si cette technique était efficace en partie courante de toiture, elle aurait dû être complétée au voisinage des noues constituant des points aux contraintes particulières en raison de la présence de raccords et en l'espèce par l'exposition au sud, par le collage des parties apparentes des bardeaux ainsi d'ailleurs que le préconise le fabricant ;
Considérant que le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur le fondement de la garantie décennale n'est fondé à se prévaloir vis à vis du maître de l'ouvrage de l'imputabilité à un autre constructeur co-contractant du maître de l'ouvrage de tout ou partie des désordres litigieux et à demander que sa responsabilité soit écartée, que dans la mesure où les désordres ne lui sont également pas imputables ;

Considérant que s'il est vrai en l'espèce que comme le soutient M. Y..., l'entreprise SALINO puis l'entreprise SALIBAT spécialistes en la matière, auraient dû émettre des réserves en faisant notamment état des recommandations du fabricant, les désordres litigieux restent également imputables à un vice de conception originel incombant à M. Y... titulaire d'une mission complète de conception et de maîtrise d'oeuvre ; que M. Y... n'est en conséquence pas fondé à demander à être mis hors de cause et à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu sa responsabilité à l'égard de la commune en ce qui concerne les désordres affectant la couverture de la salle du conseil municipal ;
En ce qui concerne les verrières :
Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que les infiltrations le long des profilés et des noues ont pour origine des erreurs de conception relatives notamment au dimensionnement des verres et à l'espacement des supports intermédiaires ainsi qu'à des gardes trop faibles ; que s'il est vrai, comme le soutient M. Y..., que l'entreprise SALINO puis l'entreprise SALIBAT ont, par l'intermédiaire de leur sous-traitant la société BROCHET TECHNIVERRIER, proposé les plans de détail et n'ont émis aucune réserve, et que le vice de fabrication à l'origine de l'étoilement de certains verres ne lui est également pas imputable, les infiltrations litigieuses révèlent un défaut de conception d'ensemble incombant à l'architecte ; que par suite, même si pour partie certaines fêlures ont pour origine des travaux de reprise entrepris à l'initiative de la commune, M. Y... n'est pas fondé à demander à être mis hors de cause et à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a retenu sa responsabilité à l'égard de la commune en ce qui concerne les désordres affectant les verrières ;
Sur le préjudice :
Considérant que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs, comprend en règle générale la taxe sur la valeur ajoutée, à moins que le maître de l'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue à raison de ses propres opérations ; que s'il a été institué un fonds destiné à permettre le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les collectivités locales sur leurs dépenses d'investissement, cette circonstance qui ne modifie pas le régime fiscal des opérations desdites collectivités, ne fait pas obstacle à ce que la taxe sur la valeur ajoutée grevant les travaux de réfection soit incluse dans le montant de l'indemnité due par les constructeurs ; que M. Y... n'est en conséquence pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu la taxe sur la valeur ajoutée dans la base de l'indemnisation de la commune ;
En ce qui concerne la couverture de la salle du conseil municipal :

Considérant que les travaux de réfection évalués par l'expert à la somme non contestée de 75 000 francs toutes taxes comprises sont d'une mise en oeuvre délicate exigeant le suivi d'un maître d'oeuvre lors de leur réalisation ; que M. Y... n'est en conséquence pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu des honoraires de maîtrise d'oeuvre ; que le coût des mesures de protection des sondages ainsi que le montant de l'indemnité pour gêne d'exploitation ne sont pas contestés ; que M. Y... n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a condamné à payer à ce titre une indemnité de 103 307 francs à la commune qui n'a pas inclus dans sa demande le coût des travaux de remplacement de la noue et n'a donc pas fait une évaluation excessive de son préjudice ;
En ce qui concerne les verrières :
Considérant que tant M. Y... que la commune ne contestent pas la proposition de l'expert estimant que le remplacement de l'ensemble de la verrière est nécessaire pour remédier aux désordres litigieux ; que le coût des travaux estimé à 300 000 F TTC comprend des honoraires d'un maître d'oeuvre dont l'intervention est également, contrairement à ce que soutient M. Y..., nécessaire en raison de la complexité de l'ouvrage ; que la commune ne conteste pas que ladite somme de 300 000 francs correspond à la réalisation d'une structure en profilés aluminium représentant une importante amélioration par rapport à l'ouvrage prévu dans les marchés initiaux ; que la commune n'est par suite pas fondée à soutenir que le tribunal administratif, qui a par ailleurs pris en compte 4 000 francs de travaux annexes d'étanchement, a fait une évaluation insuffisante de son préjudice en retenant un abattement pour plus-value et en lui allouant une indemnité de 221 000 francs tenant compte également des félures accidentelles résultant de premiers travaux de refection qui constituent un fait du maître d'ouvrage atténuant la responsabilité des constructeurs ; que l'appel incident de la commune doit être rejeté ; que M. Y... n'est de son côté pas fondé à soutenir que le tribunal administratif a fait une évaluation excessive du préjudice de la commune ;
Sur les conclusions en garantie présentées par M. Y... :
Considérant que le lot n° 3 couverture-zinguerie a été attribué par la commune à la société SALINO qui, à la suite d'un dépôt de bilan a cessé son activité en cours de chantier ; que les travaux ont été achevés par la société SALIBAT qui a repris le matériel de la société SALINO mais ne peut être regardée comme venant aux droits de cette dernière société ;
En ce qui concerne la condamnation prononcée au titre des désordres affectant la couverture de la salle du conseil municipal :

Considérant que M. Y... demande à être garanti par les sociétés SALINO et SALIBAT ; que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, il ne ressort pas du rapport d'expertise que l'expert se soit trouvé dans l'impossibilité totale d'apprécier la qualité de l'exécution incombant aux entreprises du fait que des travaux de reprise avaient déjà été effectués lorsqu'il est intervenu ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ressort du rapport d'expertise que si le remplacement de la noue ne permet aucune constatation en ce qui concerne cet élément de l'ouvrage, aucune malfaçon ne peut être relevée pour la pose des bardeaux à l'encontre des entreprises ; que celles-ci auraient toutefois dû émettre des réserves en appelant l'attention sur les recommandations du fabricant pour les parties soumises à des contraintes particulières ; que les entreprises ont ainsi commis une faute engageant leur responsabilité à l'égard de l'architecte ; que M. Y... est en conséquence fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté son appel en garantie dirigé contre les sociétés SALINO et SALIBAT ; qu'il y a dès lors lieu d'annuler le jugement attaqué en tant que par son article 10 il a rejeté dans leur totalité, les conclusions d'appel en garantie de M. Y... ; qu'il sera fait une juste appréciation des responsabilités respectives en condamnant solidairement les sociétés SALINO et SALIBAT à relever et garantir M. Y... de 30 % de la condamnation prononcée à son encontre ;
En ce qui concerne la condamnation prononcée au titre des désordres affectant les verrières :
Considérant que M. Y... demande à être garanti par les sociétés SALINO, SOFRAMIR et BROCHET TECHNIVERRIER ;
Considérant que les sociétés SOFRAMIR et BROCHET TECHNIVERRIER sous-traitantes et fournisseurs des entreprises SALINO et SALIBAT n'étant pas liées contractuellement au maître d'ouvrage, l'appel en garantie dirigé contre elles par M. Y... ne peut, comme l'a jugé le tribunal administratif qu'être rejeté ; que la société SOFRAMIR ne peut comme elle demande, qu'être maintenue hors de cause ;
Considérant que M. Y... n'a pas en première instance appelé en garantie la société SALINO ; que ses conclusions dirigées contre la société SALINO pour la première fois en appel constituent une demande nouvelle qui n'est pas recevable et doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que M. Y... dont les conclusions sont rejetées en tant qu'elles tendent à voir réduire l'indemnité allouée à la commune de Seynod, ne peut prétendre à l'octroi à la charge de la commune d'une somme sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de rejeter la demande de la commune de Seynod tendant à l'octroi à la charge de M. Y... d'une somme sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 avril 1993 est annulé en tant que par son article 10 il a, entre autres dispositions, rejeté dans leur totalité les appels en garantie de M. Y....
Article 2 : Me X..., syndic à la liquidation des biens de la société SALINO et la société SALIBAT sont condamnés solidairement à relever et garantir M. Y... de 30 % de la condamnation d'un montant de 103 307 francs prononcée à son encontre au bénéfice de la commune de Seynod au titre des désordres affectant la couverture de la salle du conseil municipal.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.
Article 4 : L'appel incident de la commune de Seynod est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de M. Y... et de la commune de SEYNOD tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


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