Vu, enregistrés au greffe de la cour les 8 décembre 1992 et 28 juillet 1993, la requête et le mémoire complémentaire, présentés pour la SNC M. X... qui a son siège social ..., représentée par sa gérante en exercice, par Me CHESNE, avocat ;
La SNC M. X... demande à la cour :
- de réformer le jugement du 1er octobre 1992 en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre respectivement des années 1979 à 1981, et de l'année 1982
- de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 1994 :
- le rapport de Mme LAFOND, conseiller ;
- les observations de Me CHESNE, avocat de la SNC M. X... ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;
§ Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision du 29 octobre 1993, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des impôts chargé de la direction des vérifications nationales et internationales a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 19 833 francs, des pénalités afférentes au complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SNC M. X... au titre des années 1979 à 1982 ; qu'en conséquence, les conclusions de la requête de la SNC M. X... relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
§Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte des mentions du jugement attaqué du tribunal administratif de Nice que les avis d'audience ont été notifiés aux parties ; que, cette mention fait foi jusqu'à preuve contraire qui n'est pas rapportée en l'espèce ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit, dès lors, être écarté ;
§Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, qu'aux termes de l'article L 57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée." ; qu'aux termes de l'article L. 48 du même livre : "- Lorsque des redressements sont envisagés à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration doit indiquer aux contribuables qui en font la demande les conséquences de leur acceptation éventuelle sur l'ensemble des droits et taxes dont ils sont ou pourraient devenir débiteurs. Dans ce cas, une nouvelle notification est faite aux contribuables qui disposent d'un délai de trente jours pour y répondre."
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, le contribuable peut demander, dans le délai de trente jours à compter de la notification de redressement qui lui a été adressée en vertu de l'article L. 57, à connaître les conséquences de son acceptation éventuelle ; que, si elle est saisie d'une telle demande, l'administration doit indiquer ces conséquences au contribuable par une nouvelle notification qui fait courir un second délai de trente jours pendant lequel il peut faire parvenir son acceptation ou formuler ses observations ; qu'en l'absence de réponse du contribuable à l'issue de cette procédure, l'administration n'est pas tenue d'aviser le contribuable du maintien des redressements envisagés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de sa comptabilité, les redressements qui sont à l'origine des impositions contestées ont été notifiés à la société requérante le 16 décembre 1983 ; que, par lettre du 12 janvier 1984, celle-ci a demandé à l'administration de lui indiquer les conséquences de son acceptation éventuelle ; que, le 17 janvier 1984, le vérificateur a adressé à la société une notification ayant pour objet de lui faire connaître les indications qu'elle avait demandées en vertu de l'article L. 48 précité ; que la société n'ayant pas répondu à ladite notification dans le délai qui lui était imparti, l'administration n'était pas tenue de répondre aux observations formulées au delà de ce délai et de lui adresser une nouvelle notification pour l'informer du maintien des redressements envisagés ; qu'en conséquence, le moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 57, 2ème alinéa n'est pas fondé ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la notification du 20 novembre 1984 comportait de nouveaux redressements ou était fondée sur des motifs nouveaux ; que, par suite, eu égard au caractère superfétatoire de celle-ci, la circonstance que la société requérante ait formulé des observations auxquelles l'administration n'a pas répondu n'est pas de nature à vicier la procédure d'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions précitées de l'article L. 48 que celles-ci ne sont applicables que dans le cadre d'une procédure de redressement intervenue à la suite d'une vérification de compatibilité ; que, dans le cas des sociétés visées à l'article 8 du code général des impôts qui n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, si la procédure de vérification est suivie directement entre l'inspecteur et lesdites sociétés, ce sont les membres desdites sociétés qui sont personnellement soumis à l'impôt pour la part leur revenant dans les bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la notification du 17 janvier 1984 serait irrégulière en ce qu'elle ne comportait pas les conséquences de l'acceptation éventuelle de la société sur l'impôt sur le revenu ou sur l'impôt sur les sociétés dont ses membres pouvaient devenir débiteurs doit être écarté ;
Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort également des dispositions précitées de l'article L. 48 que le législateur n'a pas entendu imposer à l'administration fiscale d'indiquer les pénalités dont les impositions seraient éventuellement assorties ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégularité de la notification du 17 janvier 1984 en ce qu'elle n'indiquait pas les pénalités doit également être écarté ;
§Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts alors en vigueur : "1. la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération." ; que, selon l'article 223 de l'annexe II au code général des impôts, pris, sur le fondement de l'article 273 du même code, pour l'application de l'article 271 précité : "1. La taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est celle qui figure sur les factures d'achats qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ... 2. La déduction ne peut être opérée que si les entreprises ne sont pas en possession desdites factures ..." ; enfin, que l'article 210, IV de l'annexe II audit code prévoit qu'en cas de cession d'un bien autre qu'un immeuble, constituant une immobilisation pour le bénéficiaire de la cession, celui-ci peut opérer la déduction de la taxe ayant initialement grevé le bien diminué d'un cinquième par année civile ou fraction d'année civile sous réserve que le cédant lui délivre une attestation mentionnant le montant de la taxe qu'il est en droit de déduire ;
Considérant que la SNC M. X... qui demande la déduction de la taxe afférente à des achats de matériels d'occasion qu'elle aurait effectués auprès de la SNC X... et Cie a produit, en photocopie, des duplicatas, non datés, de factures émanant de cette société X... et Cie, et d'attestations délivrées par cette dernière mentionnant le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, accompagnées des listes de matériels cédés ; qu'elle n'a pas été en mesure de présenter les originaux de ces documents ; que, dès lors, nonobstant la circonstance que le vérificateur aurait constaté, lors d'un contrôle fiscal effectué chez le fournisseur, que le double des documents en cause était bien en sa possession et que les ventes correspondantes avaient bien été déclarées, la société requérante n'est pas fondée à contester les redressements s'élevant à 418 678 francs et correspondant aux déductions litigieuses ;
Considérant, d'autre part, que la SNC M. X... n'établit pas que les "frais sur impayés" qui ont donné lieu à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée de 1 374 francs revêtent le caractère de dommages et intérêts ;
§Sur les pénalités :
Considérant que pour contester les pénalités maintenues à sa charge, la SNC M. X... soutient que les avis de mise en recouvrement des 24 novembre et 17 décembre 1987 sont insuffisamment motivés tant au regard de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, qu'au regard de la loi du 11 juillet 1979, et par suite, irréguliers ;
Considérant, en premier lieu, que l'avis de mise en recouvrement du 17 décembre 1987 ne mentionne pas de pénalités ; que celles litigieuses figurent sur l'avis du 24 novembre 1987 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales : "-L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte 1°) Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2°) Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance ..." ; qu'il résulte de l'examen de l'avis du 24 novembre 1987 qu'il comporte toutes les mentions prévues par l'article R 256-1 précité ; qu'en conséquence, le moyen tiré de ce que ledit avis de mise en recouvrement méconnaîtrait les prescriptions de cet article n'est pas fondé ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, issu de l'article 42 I de la loi n° 86.1318 du 30 décembre 1986 : "- Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable." ; qu'il résulte de l'instruction que, par lettre du 9 avril 1984, l'administration a fait connaître à la SNC M. X... les motifs qui justifiaient l'application de l'amende fiscale de 100 % ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ladite amende a été établie selon une procédure irrégulière ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 108 de la loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 portant loi de finances pour 1993 : "I. Sauf dispositions contraires, les règles de procédure fiscale ne s'appliquent qu'aux formalités accomplies après leur date d'entrée en vigueur, quelle que soit la date de mise en recouvrement des impositions. II. Les dispositions du I s'appliquent aux formalités accomplies avant la publication de la présente loi." ; qu'en vertu de cette disposition interprétative, les prescriptions de l'article 81.IV de la loi n° 86.1717 du 30 décembre 1986 qui prévoient le visa de l'inspecteur principal en cas d'application des majorations ou de l'amende prévues aux article 1729 et 1731 du code général des impôts n'étaient pas applicables en l'espèce dès lors que la lettre de motivation a été adressée à la SNC M. X... antérieurement à leur date d'entrée en vigueur ; que la société ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction du 6 Mai 1988 référencée 13 N. 3.88 dès lors que, en tant qu'elle concerne la procédure d'imposition, celle-ci ne peut être regardée comme portant interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A ;
Considérant, en dernier lieu, qu'eu égard à l'importance que revêt la facturation en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ce que la société requérante ne pouvait ignorer, et au montant des déductions de taxe sur la valeur ajoutée que cette dernière a pratiquées en l'absence des originaux des factures et des attestations correspondantes, dont la production annoncée, n'a jamais été effectuée, l'administration établit la mauvaise foi de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC M. X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté le surplus de sa demande ;
Article 1er : A concurrence de la somme de dix neuf mille huit cent trente trois francs (19 833 francs) en ce qui concerne les pénalités afférentes au complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SNC M. X... au titre des années 1979 à 1981, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SNC M. X....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SNC M. X... est rejeté.