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06/10/2020 | FRANCE | N°19DA02445

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 06 octobre 2020, 19DA02445


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision en date du 29 août 2019 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais l'a maintenu en rétention administrative à la suite du dépôt d'une demande d'asile.

Par un jugement n° 1907514 du 19 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé la décision en date du 29 août 2019 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a maintenu M. B... en rétention administrative.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2019, le préfet du Pas-de-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision en date du 29 août 2019 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais l'a maintenu en rétention administrative à la suite du dépôt d'une demande d'asile.

Par un jugement n° 1907514 du 19 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé la décision en date du 29 août 2019 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a maintenu M. B... en rétention administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2019, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter, en conséquence, l'ensemble des conclusions de première instance de M. B....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 juillet 2019, le préfet du Pas-de-Calais a pris à l'encontre de M. D... B..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1999, un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, lui interdisant le retour sur le territoire français avant un délai d'un an et le plaçant en rétention administrative. Le 8 août 2019, M. B... a sollicité l'asile et déposé son dossier de demande d'asile le 29 août suivant. Par un arrêté du 29 août 2019, le préfet du Pas-de-Calais a maintenu le placement en rétention de l'intéressé. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement n° 1907514 du 19 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cette décision.

Sur le moyen retenu par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille :

2. Aux termes de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger placé en rétention en application de l'article L. 551-1 présente une demande d'asile, l'autorité administrative peut procéder pendant la rétention à la détermination de l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande conformément à l'article L. 742-1 et, le cas échéant, à l'exécution d'office du transfert dans les conditions prévues à l'article L. 742-5. Si la France est l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande et si l'autorité administrative estime, sur le fondement de critères objectifs, que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la mesure d'éloignement, elle peut prendre une décision de maintien en rétention de l'étranger pendant le temps strictement nécessaire à l'examen de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet ou d'irrecevabilité de celle-ci, dans l'attente de son départ. Cette décision de maintien en rétention n'affecte ni le contrôle du juge des libertés et de la détention exercé sur la décision de placement en rétention en application de l'article L. 512-1 ni sa compétence pour examiner la prolongation de la rétention en application du chapitre II du titre V du livre V. La décision de maintien en rétention est écrite et motivée. A défaut d'une telle décision, il est immédiatement mis fin à la rétention et l'autorité administrative compétente délivre à l'intéressé l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1. / (...) / La demande d'asile est examinée selon la procédure accélérée prévue à l'article L. 723-2. L'office statue dans les conditions prévues aux articles L. 723-2 à L. 723-16 dans un délai de quatre-vingt-seize heures. Il tient compte de la vulnérabilité du demandeur d'asile / (...) ".

3. Il ressort de ces dispositions que, hors le cas particulier où il a été placé en rétention en vue de l'exécution d'une décision de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, prise en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il doit en principe être mis fin à la rétention administrative d'un étranger qui formule une demande d'asile. Toutefois, l'administration peut maintenir l'intéressé en rétention, par une décision écrite et motivée, dans le cas où elle estime que sa demande d'asile a été présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été interpellé le 9 juillet 2019 par la police aux frontières du Pas-de-Calais, sans qu'il fût en mesure de justifier de la régularité de son séjour sur le territoire français. Il a été entendu le même jour par les services de police. Il ressort du procès-verbal d'audition, signé par l'intéressé et l'interprète en langue arabe, et produit pour la première fois en appel, que M. B... a indiqué souhaiter se rendre en Grande-Bretagne. Il n'a pas exprimé le souhait de déposer une demande d'asile en France et a précisé ne pas avoir demandé l'asile en Europe depuis son départ du Soudan qu'il a quitté " à cause de la misère ". Dès lors, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité en décidant le maintien en rétention de l'intéressé au motif que sa demande d'asile était dilatoire et présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la mesure d'éloignement. Par suite, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille s'est fondé sur ce motif pour annuler sa décision du 29 août 2019.

5. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille.

Sur les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Lille :

6. Eu égard au caractère réglementaire des arrêtés de délégation de signature, soumis à la formalité de publication, le juge peut, sans méconnaître le principe du caractère contradictoire de la procédure, se fonder sur l'existence de ces arrêtés alors même que ceux-ci ne sont pas versés au dossier. Par un arrêté du 18 décembre 2017, publié le même jour au recueil spécial n° 121 des actes administratifs de la préfecture du Pas-de-Calais, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. C... A..., chef du bureau de l'éloignement, à l'effet de signer notamment la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige ne peut qu'être écarté.

7. L'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le préfet a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

8. Le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

9. Il ressort des propres écritures de M. B... qu'il a été entendu pendant son audition par les services de police le 9 juillet 2019. Il a ainsi été mis en mesure, à cette occasion ou lors de son maintien en rétention, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il jugeait utiles, et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour au regard d'une demande d'asile. En outre, il n'est pas établi que l'intéressé aurait disposé d'autres informations tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure contestée et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction d'une telle mesure. Ainsi, la procédure suivie par le préfet du Pas-de-Calais n'a pas porté atteinte au principe fondamental du droit d'être entendu tel qu'énoncé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu tel que garanti par le principe général du droit de l'Union européenne doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 29 août 2019.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1907514 du 19 septembre 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

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N°19DA02445


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 19DA02445
Date de la décision : 06/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-06;19da02445 ?
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