Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... F... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier d'Armentières à l'indemniser des préjudices consécutifs à sa prise en charge médicale dans cet établissement à compter du 19 septembre 2013 et à lui verser une somme de 37 080,50 euros, assortie des intérêts au taux légal capitalisés à compter du dépôt de sa requête, outre une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Appelée en la cause, la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres a demandé la condamnation du centre hospitalier d'Armentières à lui verser la somme de 17 178,64 euros au titre des débours exposés pour Mme F..., assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande avec capitalisation, la somme de 1 055 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1606224 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a partiellement fait droit à la demande de Mme F..., a condamné le centre hospitalier d'Armentières à lui verser à une somme de 1 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016 et capitalisation à compter du 23 août 2017, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 19DA01717 le 24 juillet 2019 et le 3 avril 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, représentée par Me A... D..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins de remboursement des débours exposés en faveur de Mme F... ;
2°) de condamner le centre hospitalier d'Armentières à lui verser la somme de 17 178,64 euros au titre de ses débours définitifs, avant application du taux de perte de chance, cette somme étant assortie des intérêts à taux légal à compter du 29 septembre 2016, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;
3°) de condamner le centre hospitalier d'Armentières à lui verser la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller,
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,
- et les observations de Me B... E... représentant Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 19DA01717 et n° 19DA01735 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. Le 14 juin 2013, Mme F..., alors âgée de cinquante-trois ans, a consulté au centre hospitalier d'Armentières pour bilan d'un kyste ovarien droit, découvert de manière fortuite. Le gynécologue qui la suivait de manière habituelle, le docteur Bizet, lui a prescrit une intervention chirurgicale pour exérèse du kyste, par voie d'abord coelioscopique. L'intervention a eu lieu le 19 septembre 2013 au centre hospitalier d'Armentières, par deux opérateurs. Mais le lendemain, il a été constaté un écoulement verdâtre au niveau de la cicatrice sous-ombilicale, justifiant une reprise chirurgicale qui a eu lieu le jour-même par laparotomie médiane et qui a mis en évidence une plaie du grêle. Les suites de cette deuxième intervention ont été normales et la sortie de l'hôpital a eu lieu le 27 septembre suivant après ablation des drainages de redon et de la lame de drainage. Toutefois, le 29 septembre 2013, Mme F... a de nouveau été hospitalisée en raison d'un abcès de paroi ayant entraîné l'ablation de quelques agrafes, une irrigation, un méchage, le port d'une ceinture ventrale de maintien et une antibiothérapie. Le 2 avril 2014, une éventration de la paroi abdominale à collet large a été diagnostiquée. Une quatrième intervention a alors été programmée le 17 juin 2014 pour cure d'éventration avec mise en place d'une prothèse intra-péritonéale. Les suites opératoires ont été simples. Par une ordonnance du 18 août 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a désigné un expert médical, le docteur Jeu, qui a déposé son rapport le 12 décembre 2015. Estimant sa prise en charge au centre hospitalier d'Armentières fautive, Mme F... a saisi le tribunal administratif de Lille qui, par jugement du 29 mai 2019, a fait partiellement droit à sa demande en condamnant le centre hospitalier d'Armentières à lui verser à une somme de 1 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016 et capitalisation à compter du 23 août 2017 et a rejeté les demandes présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres. La caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, d'une part, Mme F..., d'autre part, estimant que la responsabilité du centre hospitalier d'Armentières doit être engagée pour faute médicale et manquement à son devoir d'information, relèvent appel de ce jugement.
Sur la responsabilité du centre hospitalier d'Armentières :
En ce qui concerne les fautes médicales :
3. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction et, en particulier, du rapport d'expertise du docteur Jeu que si le gros volume et l'épaississement présentés par le kyste ovarien de Mme F..., qui était ménopausée, justifiaient l'indication opératoire d'exérèse posée le 14 juin 2013, dès lors qu'il pouvait comporter des cellules cancéreuses, il n'a pas été procédé à un contrôle d'imagerie jusqu'à l'intervention réalisée trois mois plus tard. Cette omission, qui peut être regardée comme une négligence fautive, n'a toutefois pas entraîné de conséquences sur l'état de santé de Mme F... dès lors qu'il ressort du rapport d'expertise que ce contrôle supplémentaire n'aurait pas permis de mettre en évidence l'absence de kyste et l'existence simplement d'un pseudo kyste, ce constat n'ayant pu être effectué qu'à la suite de l'intervention chirurgicale. Il suit de là que cette absence d'imagerie est sans lien avec l'aggravation de l'état de santé de la requérante consécutive à l'intervention du 19 septembre 2013. Dès lors, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que, par cette omission, le centre hospitalier d'Armentières a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard.
5. En deuxième lieu, il résulte également du rapport d'expertise du docteur Jeu que le dossier chirurgical de Mme F... révèle une minimisation des antécédents chirurgicaux de la patiente qui avait déjà subi six interventions chirurgicales abdominales et même une septième intervention, pour abdominoplastie. Toutefois, il résulte également du rapport d'expertise, qui n'est pas sérieusement contredit sur ce point, que, dans une telle situation d'un abdomen multi-opéré, l'indication d'exérèse du kyste, y compris par voie coelioscopique, était sur le principe conforme aux règles de l'art et aux données acquises de la science à l'époque considérée. Au surplus, il n'est pas sérieusement contredit que le chirurgien qui a prescrit l'intervention et l'a réalisée avec un confrère, connaissait les antécédents chirurgicaux de l'appelante dès lors qu'il suivait Mme F... depuis de nombreuses années. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que, par cette minimisation des antécédents chirurgicaux de la patiente, le centre hospitalier d'Armentières n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité.
6. En troisième lieu, s'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise, qu'au cours de l'intervention du 19 septembre 2013, le chirurgien a perforé l'intestin grêle de Mme F..., organe de voisinage non concerné par le geste chirurgical, cette lésion peut résulter soit d'une plaie le long du trocart optique lors de la mise en place de ce dernier, soit de l'embrochage d'une anse intestinale encore collée à la paroi par le fil de suture de l'orifice de trocart. Quelle que soit l'hypothèse retenue, l'expert a exclu, sans être sérieusement contredit par les appelants, la maladresse fautive de l'opérateur alors que celui-ci, qui était expérimenté et avait pris soin d'être accompagné d'un confrère, a fourni des explications conformes aux bonnes pratiques et qu'en outre, l'obésité de la patiente et les nombreuses adhérences présentes dans la zone de l'abdomen liées aux interventions chirurgicales antérieures majoraient le risque de blessure. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont, dans les circonstances particulières de l'espèce, considéré que la plaie opératoire survenue lors de l'intervention du 19 septembre 2013 devait être regardée comme en lien avec une maladresse non fautive du chirurgien. Il suit de là que cette maladresse dans l'exécution du geste coelioscopique n'est pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier d'Armentières.
7. En dernier lieu, s'il résulte du rapport d'expertise une confusion dans la présentation du compte-rendu opératoire qui ne précise pas la technique de mise en place des différents trocarts et la technique de fermeture de coelioscopie, cette négligence, qui n'est pas constitutive d'un manquement aux règles de l'art ni d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service, n'a eu aucune incidence sur l'aggravation de l'état de santé de Mme F.... Dès lors, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que, par cette imprécision dans l'établissement du compte-rendu opératoire du 19 septembre 2013, le centre hospitalier d'Armentières a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard.
En ce qui concerne le défaut d'information de la patiente :
8. En application de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. En cas d'accident, le juge qui constate que le patient n'avait pas été informé du risque grave qui s'est réalisé doit notamment tenir compte, le cas échéant, du caractère exceptionnel de ce risque, ainsi que de l'information relative à des risques de gravité comparable qui a pu être dispensée à l'intéressé, pour déterminer la perte de chance qu'il a subie d'éviter l'accident en refusant l'accomplissement de l'acte.
9. En l'espèce, l'indication d'une intervention pour exérèse du kyste ovarien par voie d'abord coelioscopique a été posée au centre hospitalier d'Armentières lors de la consultation du 14 juin 2013. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise et des dires qui y sont annexés, que cette voie présente un risque grave de blessure organique, ce risque étant connu et qualifié de " redouté et redoutable ". Dès lors, les risques associés au choix de la voie d'abord coelioscopique, majorés par l'obésité de la patiente qui présentait un abdomen multi-opéré, devaient être portés à la connaissance de Mme F.... Or, en se bornant à alléguer que Mme F... a reçu lors de l'entretien du 14 juin 2013 toutes les explications nécessaires sur l'intervention à venir, et qu'elle a été destinataire de la lettre de consultation adressée par le docteur Bizet à son médecin traitant, le centre hospitalier n'établit pas avoir porté à la connaissance de Mme F... les risques de cette voie coelioscopique en comparaison avec la laparotomie. Dès lors, le manquement à cette obligation d'information est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier d'Armentières dans la mesure où il a privé Mme F..., qui disposait d'une possibilité raisonnable de refuser la voie d'abord coelioscopique, d'une chance de se soustraire au risque lié à ce type d'intervention.
Sur les préjudices résultant du manquement au devoir d'information :
En ce qui concerne la perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé :
S'agissant de la fraction du préjudice indemnisable :
10. La faute commise par les praticiens d'un hôpital au regard de leur devoir d'information du patient n'entraîne pour ce dernier que la perte d'une chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé. La réparation du dommage résultant de cette perte doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice qui tient compte du rapprochement entre, d'une part, les risques inhérents à l'acte médical et, d'autre part, les risques encourus en cas de renoncement à cet acte. Lorsque le patient a droit à une réparation partielle des conséquences dommageables d'un accident en raison de la perte de chance qui a résulté pour lui d'un manquement, par les praticiens, à leur devoir d'information, il convient pour le juge de déterminer le montant total du dommage puis de fixer la fraction de ce dommage mise à la charge de l'hôpital à raison de la perte de chance résultant pour le patient de ce manquement au devoir d'information.
11. En l'espèce, il résulte de l'instruction que dûment éclairée, Mme F... aurait pu raisonnablement refuser la voie d'abord coelioscopique afin de réduire le risque de plaie viscérale en cours d'intervention. Selon le rapport d'expertise, qui n'est pas contredit sur ce point, une voie d'abord conventionnelle transverse n'aurait pas permis d'éviter totalement ce risque de lésion mais aurait permis de le réduire significativement et, en tout cas, aurait permis au chirurgien de repérer immédiatement la lésion et la réparer dans la suite immédiate de l'intervention. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de la chance perdue par Mme F... de se soustraire au risque qui s'est réalisé en l'évaluant à 50 % des différents chefs de préjudice subis par l'intéressée.
S'agissant de l'évaluation des préjudices de Mme F... :
12. Il résulte de l'instruction que la date de consolidation de l'état de santé de Mme F... peut être fixée au 17 octobre 2014.
Quant aux préjudices patrimoniaux :
13. Il résulte du rapport d'expertise que Mme F... a eu besoin, avant consolidation, de l'assistance d'une tierce personne à raison de deux heures par jour les 27 et 28 septembre 2013 puis du 2 octobre 2013 au 12 novembre 2013, du 24 juin 2014 au 24 juillet 2014, soit pendant soixante-seize jours. Cette aide lui a été apportée par son entourage familial. En se fondant sur un taux horaire moyen de rémunération, tenant compte des charges patronales, fixé à 13 euros, il sera fait une juste appréciation du coût de l'assistance par une tierce personne non spécialisée pour cette période en la fixant à la somme de 1 976 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 988 euros.
Quant aux préjudices extra-patrimoniaux temporaires :
14. Il résulte de l'instruction que Mme F... a présenté un déficit fonctionnel temporaire qui a été total pendant les périodes d'hospitalisation du 19 septembre 2013 au 1er octobre 2013, puis du 16 au 23 juin 2014, l'hospitalisation du 19 septembre 2013 pour l'intervention initiale n'engageant pas la responsabilité du centre hospitalier. Le déficit fonctionnel temporaire a donc été total pendant vingt jours. Mme F... a subi également un déficit fonctionnel temporaire qui a été partiel, à hauteur de 75 %, du 2 octobre 2013 au 11 novembre 2013, soit pendant quarante et un jours, à hauteur de 50 % du 12 novembre 2013 au 12 décembre 2013 et du 24 juin 2014 au 24 juillet 2014, soit pendant soixante-deux jours et à hauteur de 10 % du 13 novembre 2013 au 15 juin 2014 et du 25 juillet 2014 au 16 octobre 2014, soit pendant deux-cent-quatre-vingt-dix-neuf jours. En se fondant sur un taux de 13 euros par jour, soit un montant mensuel de 400 euros, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 451,45 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 725,72 euros.
15. Mme F... a subi des souffrances qui ont été évaluées par le rapport d'expertise à 4 sur une échelle de 7, en raison des hospitalisations cumulées pendant trois semaines, de l'apparition d'une fistule du grêle, d'un abcès à évacuer, de la survenue d'une éventration, de deux interventions chirurgicales complémentaires sous anesthésie, suivies de soins locaux. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 7 200 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 3 600 euros.
16. Mme F... a subi un préjudice esthétique temporaire qui a été évalué à 3 sur une échelle de 7, en raison des deux interventions chirurgicales complémentaires qui ont rendu nécessaire une réouverture en laparotomie sus-ombilicale, un méchage, des pansements abdominaux pendant plusieurs semaines et le port d'une ceinture abdominale. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 3 000 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 1 500 euros.
Quant aux préjudices extra-patrimoniaux permanents :
17. Il ressort du rapport d'expertise que Mme F..., âgée de cinquante-quatre ans à la date de la consolidation, présente un déficit fonctionnel permanent de 2 % correspondant à la légère fragilité de la paroi abdominale due à un abdomen cicatriciel sans éventration clinique et à la majoration du syndrome dépressif préexistant. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 000 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 500 euros.
18. Mme F... a subi un préjudice esthétique permanent qui a été évalué à 2 sur une échelle de 7, en raison d'une cicatrice abdominale sus-ombilicale, visible à 3 mètres. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 800 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 900 euros.
En ce qui concerne le préjudice d'impréparation :
19. Indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus lors d'une intervention ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a pu subir du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité. S'il appartient au patient d'établir la réalité et l'ampleur des préjudices qui résultent du fait qu'il n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité d'un accident, la souffrance morale qu'il a endurée lorsqu'il a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention doit, quant à elle, être présumée.
20. En l'espèce, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, Mme F... n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe, la réalité et l'ampleur des préjudices qui résulteraient du fait qu'elle n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité de la survenue du risque qui s'est réalisée. En revanche, elle est fondée à obtenir réparation du préjudice moral lorsqu'elle a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention et en particulier la lésion du grêle qui est survenue et l'éventration consécutive à la reprise. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en confirmant la somme de 1 000 euros allouée par les premiers juges.
21. Il résulte de tout ce qui précède que la somme de 1 000 euros que le jugement attaqué a condamné le centre hospitalier d'Armentières à verser à Mme F... doit être portée à 9 213,72 euros.
22. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016, date d'enregistrement de la demande au tribunal. Mme F... est, en outre, fondée à solliciter leur capitalisation en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil à compter du 22 août 2017, date à laquelle a été due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle.
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres :
En ce qui concerne les débours exposés en faveur de Mme F... :
23. La caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, par le relevé de ses débours définitifs du 2 novembre 2016, justifie avoir supporté pour Mme F... en raison des complications survenues à la suite de l'intervention initiale, des frais hospitaliers pour l'hospitalisation du 22 septembre 2013 au 1er octobre 2013 d'un montant de 8 460 euros et pour l'hospitalisation du 16 juin 2014 au 23 juin 2014, d'un montant de 6 720 euros, des frais médicaux du 27 septembre 2013 au 15 octobre 2014 d'un montant de 1 470, 05 euros et des frais pharmaceutiques du 23 septembre 2013 au 18 août 2016 d'un montant de 574,09 euros, dont à déduire des franchises de 45,50 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu de condamner le centre hospitalier d'Armentières à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, au titre de ses débours définitifs, la somme de 8 589,32 euros.
24. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2016, date de la première demande devant le tribunal. La caisse est, en outre, fondée à solliciter leur capitalisation en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil à compter du 29 septembre 2017, date à laquelle a été due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle.
En ce qui concerne l'indemnité forfaitaire de gestion :
25. La caisse primaire d'assurance maladie de Flandres a droit, par application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, à une indemnité forfaitaire de gestion dont le montant maximum est fixé par l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2020, à la somme de 1 091 euros. Il y a donc lieu de condamner le centre hospitalier d'Armentières à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres la somme de 1 091 euros.
Sur les frais liés à l'instance :
26. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières le versement à Mme F... d'une somme de 1 500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier d'Armentières est condamné à verser à Mme F... est portée à 9 213,72 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016. Les intérêts seront capitalisés à compter du 22 août 2017, date à laquelle a été due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 2 : Le jugement n° 1606224 du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il rejette les conclusions indemnitaires de la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres.
Article 3 : Le centre hospitalier d'Armentières est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres la somme de 8 589,32 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2016. Les intérêts seront capitalisés à compter du 29 septembre 2017, date à laquelle a été due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 4 : Le centre hospitalier d'Armentières versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres est rejeté.
Article 6 : Le jugement du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 7 : Le centre hospitalier d'Armentières versera, d'une part, à Mme F..., d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N°19DA01717,19DA01735