Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le département du Nord a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille de prescrire une expertise, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, portant sur les désordres affectant le centre de prévention et d'action sociale de Marcq-en-Baroeul.
Par une ordonnance n° 1902915 du 21 août 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 septembre 2019, M. E... G... et M. F... A..., architectes, représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de rejeter la demande présentée par le département du Nord devant le tribunal administratif ;
3°) en tout état de cause, de les mettre hors de cause ;
4°) de mettre à la charge du département du Nord une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Le département du Nord a fait construire un centre de prévention et d'action sociale à Marcq-en-Baroeul. La décision de réception de l'ouvrage est intervenue le 27 août 1998 avec effet au 10 juillet 1998, les quelques réserves émises ayant été levées. Des travaux de réfection de la toiture ont été confiés en 2012 à la société SMAC, qui les a sous-traités à la société Leroy Reynald. M. G... et M. A..., architectes, relèvent appel de l'ordonnance du 21 août 2019 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande d'expertise présentée par le département du Nord, relative aux désordres affectant ce centre de prévention et d'action sociale.
Sur les conclusions d'appel principal de M. G... et M. A... :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". L'utilité d'une mesure d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, qui sont irrecevables, qui se heurtent à la prescription. De même, il ne peut faire droit à une demande d'expertise permettant d'évaluer un préjudice, en vue d'engager la responsabilité d'une personne publique, en l'absence manifeste de lien de causalité entre le préjudice à évaluer et la faute alléguée de cette personne.
3. Si le département du Nord n'a effectivement, comme le soutiennent les appelants, produit aucune pièce à l'appui de sa demande d'expertise, il avait décrit de manière précise lesdits désordres dont la réalité a été confirmée par les pièces du dossier de première instance, notamment une télécopie datée du 10 juin 2011, produite par la société SMAC qui s'est vu confier les travaux de réfection de la toiture du bâtiment en 2012, faisant état qu'une " énième fuite avait été constatée au-dessus du local du photocopieur ", obligeant le département à solliciter un devis auprès de cette société. Des désordres affectaient ainsi le bâtiment avant l'intervention de la société SMAC. Selon le département, des infiltrations d'eau persistent depuis l'intervention de cette société. L'existence de désordres de nature à justifier une action contentieuse devant la juridiction administrative est ainsi établie. Les différentes pièces relatives à la réception de l'ouvrage en 1998, produites devant le tribunal, permettent également de tenir comme établie l'intervention du cabinet d'architecte G... et de la société Ramery, titulaire du marché de maîtrise d'oeuvre, au stade de l'opération initiale de construction.
4. M. G... et M. A... soutiennent également qu'aucune action en responsabilité décennale n'est possible à leur encontre dès lors que la réception de l'ouvrage est intervenue avec effet au 10 juillet 1998. Il ressort des pièces du dossier, et en l'absence de tout acte interruptif intervenu au cours des dix années suivant la réception, que le délai pour une action en responsabilité décennale à l'encontre de la maîtrise d'oeuvre était expiré le 3 avril 2019 lorsque le greffe du tribunal administratif a enregistré la requête du département du Nord. Toutefois, peuvent être appelées en qualité de parties à une expertise ordonnée sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, les personnes qui ne sont pas manifestement étrangères au litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action qui motive l'expertise. En outre, le juge du référé peut appeler à l'expertise en qualité de sachant toute personne dont la présence est de nature à éclairer ses travaux. Dans ces conditions, la présence aux opérations d'expertise des architectes, chargés de la maîtrise d'oeuvre de l'opération de construction du centre de prévention et d'action sociale apparaît utile, notamment au regard de la conception de l'ouvrage et en particulier de la toiture, objet des désordres. Par suite, M. G... et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Lille les a attraits aux opérations d'expertise. Leurs conclusions tendant à être mis hors de cause doivent être rejetées.
5. Il résulte de ce qui précède que M. G... et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande d'expertise présentée par le département du Nord.
Sur les conclusions de la société Ramery Bâtiment :
6. Les conclusions présentées par la société Ramery Bâtiment ont été enregistrées plus de quinze jours après que l'ordonnance de référé lui a été notifiée le 27 août 2019 et sont donc intervenues après l'expiration du délai d'appel prévu par l'article R. 533-1 du code de justice administrative. Elles sont en outre dirigées, non pas contre l'appelant principal, mais contre le département du Nord et présentent ainsi le caractère d'un appel provoqué. Dès lors que les conclusions de la requête de M. G... et M. A... ne sont pas accueillies, la société Ramery Bâtiment, dont la situation n'est pas aggravée, n'est pas recevable à demander, par la voie d'un appel provoqué, l'annulation de l'ordonnance attaquée.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des requérants et de la société Ramery Bâtiment présentées contre le département du Nord qui n'est pas partie perdante à la présente instance.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de M. G... et M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Ramery Bâtiment sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. E... G... et M. F... A..., architectes, à la société Ramery Bâtiment, au département du Nord, à la société SMAC, à la société Denis, à la société Allianz Iard, à la société Leroy Reynald, et à M. D... C..., expert.
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N°19DA02093