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25/01/2021 | FRANCE | N°20BX04230

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 25 janvier 2021, 20BX04230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et leur assureur la MAIF ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert aux fins de rechercher l'origine des désordres affectant la maison dont ils sont propriétaires située 278 chemin du Philippou à Montauban (82000), décrire les travaux nécessaires pour y mettre fin, de fournir tous les éléments techniques de nature à permettre le cas échéant de dÃ

©terminer les responsabilités encourues et d'évaluer les préjudices subis.

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et leur assureur la MAIF ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert aux fins de rechercher l'origine des désordres affectant la maison dont ils sont propriétaires située 278 chemin du Philippou à Montauban (82000), décrire les travaux nécessaires pour y mettre fin, de fournir tous les éléments techniques de nature à permettre le cas échéant de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer les préjudices subis.

Par une ordonnance n° 1907244 du 10 décembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a ordonné l'expertise sollicitée.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2020, la commune de Montauban, la communauté d'agglomération Grand Montauban et la SMACL Assurances, représentées par Me E... (cabinet Vedesi), demandent au juge des référés de la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1907244 du 10 décembre 2020 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter la demande de M et Mme D... et de la MAIF ;

3°) subsidiairement, de confier également à l'expert désigné les missions :

- de rechercher la ou les causes susceptibles d'être à l'origine des fissures, des ruptures ainsi que de la corrosion affectant la canalisation d'eaux pluviales jouxtant la propriété des époux D... ;

- de rechercher les causes susceptibles d'être à l'origine de la présence d'eaux usées dans la canalisation d'eaux pluviales jouxtant la propriété des époux D... ;

4°) de mettre à la charge des demandeurs la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le premier juge a commis une erreur de droit dans l'appréciation de son office en estimant que la prescription de l'action au fond invoquée en défense relevait de la seule appréciation du juge du fond, et à tout le moins insuffisamment motivé son ordonnance en s'abstenant d'expliquer en quoi le caractère de dommages de travaux publics affectait sa réponse sur ce point ;

- il a omis de se prononcer sur le second moyen de défense tiré du caractère frustratoire de l'expertise du fait de l'impossibilité d'établir plusieurs années après les faits un lien de causalité entre les fissures de la maison et le stationnement allégué d'engins de chantier devant l'habitation des requérants ;

- la mesure d'expertise ne présente pas de caractère d'utilité pour cette raison et au regard des pièces établissant que les fissures sont antérieures aux travaux, et alors que le tribunal a rejeté la requête au fond des consorts D....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné, par décision du 1er décembre 2020, Mme F... C... pour statuer en application du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M.et Mme D... sont propriétaires depuis 2006 d'une maison située 278 chemin du Philippou à Montauban, dans le périmètre de la ZAC dite " des Bas Pays ". Des travaux d'installation d'un réseau d'assainissement ont été effectués en 2013 par la société Cousin Pradère à l'initiative de la société publique locale d'aménagement Montauban trois rivières aménagement (SPLA M3RA), concessionnaire de la ZAC, aux droits de laquelle vient, après résiliation de la concession, la communauté d'agglomération désormais dénommée Grand Montauban. M. et Mme D... ont déclaré le 1er juin 2014 des désordres sur les murs

de la dépendance de leur habitation. Le 17 avril 2015, l'expert de la société Saretec Dommage désigné par leur assureur a émis l'hypothèse que la cause pourrait en être une fuite sur le réseau enterré d'eaux pluviales longeant la façade de la dépendance, mais n'a pu confirmer cette hypothèse, et a rendu son rapport " en l'état " le 2 juin 2017 sans identifier de tiers responsable, alors que l'expert désigné par l'assureur de la commune avait estimé le 4 septembre 2015 que les dommages préexistaient aux travaux. M et Mme D..., qui ont saisi la commune et l'assureur de l'exécutant en janvier et octobre 2017 de demandes de réparation de la canalisation d'eaux pluviales qui aurait selon eux été écrasée par des véhicules lourds stationnant lors des travaux de mise en place du tout-à-l'égout, ont adressé le 30 mai 2018 à la commune de Montauban une demande d'indemnités à hauteur de 18 154,40 euros pour des travaux de reprise sur leur propriété et 1 062 euros pour les frais d'inspection et de recherche de fuite, puis ont saisi le 5 octobre 2018 le tribunal administratif de Toulouse d'une requête indemnitaire dirigée tant contre la commune que contre la communauté d'agglomération, qui a été rejetée par jugement du 1er octobre 2020.

2. Ils ont par ailleurs également demandé au tribunal de grande instance de Montauban de désigner un expert judiciaire pour déterminer les causes et origines des désordres constatés et évaluer le coût de leur réparation. Celui-ci s'étant déclaré incompétent le 31 janvier 2019, ils ont présenté la même demande au tribunal administratif de Toulouse le 19 décembre 2019. La communauté d'agglomération du Grand Montauban, la commune et leur assureur relèvent appel de l'ordonnance du 10 décembre 2020 qui a accueilli cette demande et désigné un expert.

3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de ces dispositions doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce titre, le juge des référés ne peut faire droit à une demande d'expertise formée à l'appui de prétentions dont il est établi qu'elles sont prescrites.

Sur la régularité de l'ordonnance :

4. Pour écarter l'exception de prescription invoquée en défense, le premier juge a relevé que " si la commune de Montauban, la communauté d'agglomération Grand Montauban et la SMACL Assurances contestent l'utilité de la mesure d'expertise sollicitée au motif que l'action au fond serait prescrite, cette question relève de la seule appréciation du juge du fond eu égard au caractère de dommages de travaux publics invoqué. " Toutefois, il résulte de ce qui a été rappelé au point 3 qu'il appartenait au juge des référés, avant d'ordonner l'expertise sollicitée, de prendre lui-même position sur la prescription invoquée, la circonstance que le litige intervienne en matière de travaux publics étant à cet égard sans incidence, et au demeurant non expliquée en l'espèce. Par suite, la commune de Montauban, la communauté d'agglomération Grand Montauban et la SMACL Assurances sont fondées à soutenir que le premier juge a méconnu son office et entaché son ordonnance, qui n'a au demeurant pas davantage répondu au moyen de défense tiré subsidiairement du caractère frustratoire d'une expertise portant sur des faits non décrits à la date de leur survenance, d'une insuffisance de motivation. Il y a lieu d'annuler l'ordonnance, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande des consorts D....

Sur l'utilité de l'expertise :

5. L'action indemnitaire engagée par M. et Mme D... a été rejetée par le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 1er octobre 2020 sans que le juge du fond ait été saisi d'une demande d'expertise, et l'appel sur ce jugement a été rejeté par une ordonnance n°20BX03881 du 21 janvier 2021 comme manifestement mal fondé. Dans ces conditions, l'expertise n'apparaît pas utile, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription invoquée en défense, ni de rechercher si les investigations demandées à l'expert étaient possibles.

6. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance attaquée doit être annulée et que la demande de M.et Mme D... doit être rejetée.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par la commune de Montauban, la communauté d'agglomération Grand Montauban et la SMACL Assurances sur ce fondement.

ORDONNE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1907244 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée.

Article 2 : La demande de M. et Mme D... et de la MAIF est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Montauban, la communauté d'agglomération Grand Montauban et la SMACL Assurances au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Montauban, à la communauté d'agglomération Grand Montauban,à la SMACL Assurances, à M. et Mme D..., à la MAIF, à la SAS Cousin Pradère, à la SA MMA Iard et à M. A... B..., expert.

Fait à Bordeaux, le 25 janvier 2021.

Le juge des référés,

Catherine C...

La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

2

No 20BX04230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 20BX04230
Date de la décision : 25/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-011-04 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction. Conditions.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCHOENACKER ROSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-01-25;20bx04230 ?
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