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29/07/2020 | FRANCE | N°18BX03652

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 29 juillet 2020, 18BX03652


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une réclamation du 28 août 2014, transmise d'office au tribunal administratif de la Guyane par le directeur des services fiscaux de la Guyane en application de l'article

R. 199-1 du livre des procédures fiscales, M. E... F..., en qualité de débiteur solidaire de la Sarl Auto Import, a demandé, d'une part, la décharge de l'obligation de payer les cotisations de taxe professionnelle au titre des années 2004, 2008 et 2009, de taxe d'habitation au titre de l'année 2008 et d'impôt sur les société

s au titre de l'exercice clos en 2003, d'autre part, la décharge des cotisations...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une réclamation du 28 août 2014, transmise d'office au tribunal administratif de la Guyane par le directeur des services fiscaux de la Guyane en application de l'article

R. 199-1 du livre des procédures fiscales, M. E... F..., en qualité de débiteur solidaire de la Sarl Auto Import, a demandé, d'une part, la décharge de l'obligation de payer les cotisations de taxe professionnelle au titre des années 2004, 2008 et 2009, de taxe d'habitation au titre de l'année 2008 et d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2003, d'autre part, la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002, mises à la charge de cette société.

Par un jugement n° 1500594 du 28 juin 2018, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 octobre 2018 et 7 août 2019, M. E... F..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 juin 2018 du tribunal administratif de la Guyane ;

2°) de prononcer les décharges demandées à hauteur de la somme totale de

141 613 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. F... soutient que :

- le jugement est irrégulier car le sens des conclusions du rapporteur public n'a pas été correctement renseigné ;

- le rapporteur public n'a pas communiqué ses conclusions pour lui permettre de présenter utilement une note en délibéré, ce qui méconnaît le principe du contradictoire ;

- le transfert de la réclamation préalable au tribunal administratif n'est pas motivé ;

- dans le cadre de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, le dirigeant solidairement poursuivi a le droit de faire examiner le bien-fondé ou la régularité de l'établissement des créances fiscales visées dans la demande du comptable public, et l'autorité relative de chose jugée n'est pas opposable aux personnes qui n'ont pas été parties à l'instance ;

- s'agissant de l'impôt sur les sociétés, les avis de mise en recouvrement sont entachés d'erreurs ;

- seules les déclarations 2000 et 2002 ont été déposées en retard, pour des raisons indépendantes de la volonté de la société, et les amortissements et provisions ont été mentionnés dans des documents comptables établis dans les délais ;

- le véhicule Mercedes a bien été vendu et ne faisait plus partie des stocks ;

- les frais et honoraires versés aux SARL Presles et Antilles investissement ont bien été soumis à l'impôt sur le revenu et aucun acte anormal de gestion n'est démontré ;

- les charges réintégrées par le vérificateur sont justifiées ;

- s'agissant de la taxe d'habitation, si un dégrèvement de 1 104 euros est intervenu, aucun frais ni majoration n'a été dégrevé ;

- s'agissant de la taxe professionnelle, le montant réclamé n'est pas justifié ;

- s'agissant de l'impôt sur les sociétés 2003, l'imposition a fait l'objet d'un paiement intégral ;

- s'agissant de la taxe professionnelle 2008 et 2009, les impositions ont été réglées ;

- à titre subsidiaire, la cour prescrira une expertise afin de connaitre les impositions encore susceptibles de lui être réclamées ;

- s'agissant des intérêts, majorations et frais appliqués aux impositions payées, il y a lieu de les annuler.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 mai et 28 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête, et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 31 octobre 2019 à 12 heures.

Par lettre du 24 juin 2020, les parties ont été informées, en application de l'article

R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour est susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions tendant au dégrèvement de la cotisation de taxe d'habitation de l'année 2008, cette imposition ayant été intégralement dégrevée par une décision du 29 octobre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme K...,

- les conclusions de M. G... H....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 25 janvier 2013, le tribunal de grande instance de Cayenne, sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, a déclaré M. E... F..., gérant de la SARL Auto Import, solidairement responsable du paiement des impositions restant dues par la société, pour un montant total de 147 429,36 euros, et consistant en des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt au titre des années 2000 à 2003, de taxe professionnelle des années 2004, 2008 et 2009 et de taxe d'habitation de l'année 2008. M. F... relève appel du jugement du 28 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant, d'une part, dans le cadre du contentieux de l'établissement de l'impôt, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt au titre des années 2000 à 2002 et, d'autre part, dans le cadre du contentieux du recouvrement de l'impôt, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés de l'année 2003, de taxe professionnelle des années 2004, 2008 et 2009 et de taxe d'habitation de l'année 2008.

Sur les conclusions relatives à la taxe d'habitation au titre de l'année 2008 :

2. Aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'État relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'État, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ". Aux termes de l'article R. 811-1 du même livre : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 4° Sur les litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ".

3. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 29 octobre 2014, antérieure à la requête de M. F... devant la présente cour, l'administration a prononcé le dégrèvement de la cotisation de taxe d'habitation de l'année 2008, d'un montant de 1 104 euros, et des majorations de recouvrement de 365 euros. Les conclusions de la requête relatives à cette imposition sont, par suite, entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance et doivent, en conséquence, être rejetées.

Sur la régularité du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne (...) ". La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public.

5. En indiquant aux parties, dans un délai dont il n'est pas contesté qu'il était raisonnable, qu'il conclurait au rejet au fond de la requête de M. F..., le rapporteur public devant le tribunal administratif de la Guyane les a informées du sens de ses conclusions en indiquant les éléments du dispositif de la décision qu'il comptait proposer à la formation de jugement d'adopter. Il a ainsi, en tout état de cause, respecté les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même qu'il n'a pas précisé le raisonnement adopté. Le moyen tiré de ce que le jugement aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière doit, par suite, être écarté.

6. En second lieu, le rapporteur public, qui a pour mission d'exposer les questions que présente à juger le recours sur lequel il conclut et de faire connaître, en toute indépendance, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l'espèce et les règles de droit applicables ainsi que son opinion sur les solutions qu'appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction à laquelle il appartient, prononce ses conclusions après la clôture de l'instruction à laquelle il a été procédé contradictoirement. L'exercice de cette fonction n'est pas soumis au principe du caractère contradictoire de la procédure applicable à l'instruction. Il suit de là que, pas plus que la note du rapporteur ou le projet de décision, les conclusions du rapporteur public - qui peuvent d'ailleurs ne pas être écrites - n'ont à faire l'objet d'une communication préalable aux parties. Le rapporteur public n'est pas davantage tenu de les communiquer après l'audience, lorsque l'un des parties lui en fait la demande. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'une telle communication doit être écarté.

Sur la soumission d'office au tribunal administratif de la réclamation préalable :

7. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : " L'administration peut soumettre d'office au tribunal la réclamation présentée par un contribuable. Elle doit en informer ce dernier ".

8. Ces dispositions ni aucune autre n'imposent à l'administration de motiver la décision de soumettre d'office au tribunal administratif la réclamation préalable d'un contribuable. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de transmettre d'office la réclamation de M. F... au tribunal administratif de la Guyane doit être écarté.

Sur les conclusions relatives à l'établissement des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des années 2000 à 2002 :

En ce qui concerne l'autorité de chose jugée :

9. Les codébiteurs solidaires sont réputés se représenter mutuellement dans toute instance relative à la dette, de sorte que le jugement rendu à l'encontre de l'un d'eux a autorité de chose jugée à l'égard de tous les autres, y compris ceux qui n'auraient acquis la qualité de débiteur solidaire qu'au cours de cette instance. Cependant, ce principe ne concerne pas le cas où le fait générateur de la solidarité, tel qu'une décision de justice, serait postérieur à la date à laquelle l'instance engagée par l'un des autres codébiteurs a abouti à une décision de justice définitive.

10. En l'espèce, le jugement du 19 décembre 2007 du tribunal administratif de la Guyane, statuant sur la demande de la SARL Auto Import tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2000 à 2002, confirmé par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 24 novembre 2009, est antérieur au jugement du 25 janvier 2013, rectifié le 14 février 2013, par lequel le tribunal de grande instance de Cayenne a condamné solidairement M. F..., en sa qualité de gérant, au paiement des impôts dus par la société. Dès lors, l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif ne peut être opposée à M. F.... Par suite, ce dernier est fondé à soutenir que c'est à tort que, dans le jugement attaqué, les premiers juges se sont fondées sur l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 19 décembre 2007 pour rejeter sa demande.

11. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. F... devant la cour et devant le tribunal administratif de la Guyane.

En ce qui concerne les erreurs affectant les avis d'imposition :

12. Aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de redressement contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai. "

13. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la SARL Auto Import a fait l'objet, l'administration a pris en compte, au stade de l'interlocution départementale, certaines observations de la société et lui a notifié, par courrier du

5 janvier 2004, le détail des redressements maintenus au titre des trois années en cause, conformément aux dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, et alors même qu'au titre des années 2000 et 2001 la société avait été imposée d'office pour absence de dépôt de ces déclarations malgré l'envoi d'une mise en demeure. Si M. F... soutient que les avis d'imposition adressés à la SARL Auto Import au titre des trois années en cause comportent des montants supérieurs à ceux figurant dans le tableau " conséquences financières du contrôle " annexé au courrier du 5 janvier 2004, toutefois, dans celui-ci l'administration s'est bornée à mentionner le montant des droits et pénalités résultant des rectifications opérées pendant la vérification de comptabilité de la société, alors que les avis d'imposition reçus par la société indiquaient, outre ces sommes, les écarts de liquidation de l'impôt sur les sociétés constatés à la suite du dépôt par la société, pendant la vérification de comptabilité, de ses déclarations. Par suite, M. F... n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, réclamer à la SARL Auto Import, dans les avis d'imposition litigieux, des sommes supérieures à celles mentionnées dans le courrier adressé à la société à la suite de l'interlocution départementale.

En ce qui concerne les amortissements et provisions :

14. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment: (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise (...) 5° Les provisions (...) à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ". Il résulte de ces dispositions que ne peuvent être déduits du bénéfice imposable que les amortissements et les provisions qui ont été effectivement inscrits dans les écritures comptables à la clôture des exercices concernés. Il appartient au contribuable de justifier que cette inscription a été effectuée avant l'expiration du délai imparti pour souscrire la déclaration des résultats annuels de l'entreprise.

15. À l'issue de la vérification de comptabilité de la SARL Auto Import, le vérificateur a réintégré aux résultats imposables des exercices clos en 2000 et 2002 des dotations aux amortissements et des provisions au motif que les déclarations de résultats annuels ayant été déposées avec retard pour chacun de ces deux exercices, la société ne justifiait pas de l'inscription en comptabilité des amortissements et provisions avant l'expiration du délai imparti pour souscrire les déclarations.

16. Il est constant que la SARL Auto Import n'a déposé ses déclarations de résultats, pour l'exercice clos le 31 décembre 2000, que le 15 mars 2002, après réception d'une mise en demeure du 31 juillet 2001, et, s'agissant de l'exercice clos le 31 décembre 2002, que le 1er juillet 2003, après réception d'une mise en demeure du 9 mai 2003.

17. En premier lieu, si M. F... soutient, s'agissant du dépôt de la déclaration de l'année 2000, que le retard est dû au vol du matériel informatique de la société dans la nuit du 26 au 27 janvier 2001, il ne l'établit pas en se bornant à produire un récépissé de déclaration de vol par effraction de divers matériels informatiques entre le 26 et le 27 janvier 2001, alors que le défaut de dépôt de déclaration dans les délais a été constaté au titre des trois exercices en cause. De même, s'agissant de l'année 2002, la circonstance que la déclaration de résultats aurait été déposée dans le délai fixé par une mise en demeure qui lui aurait été adressée le 18 mai 2003 ne peut être invoquée, dès lors qu'il est constant, ainsi qu'il a été rappelé au point 16, que la déclaration de résultats a été déposé après l'expiration du délai légal de déclaration.

18. En second lieu, M. F... soutient que les amortissements et provisions ont été inscrits en comptabilité avant l'expiration du délai de déclaration, et que les grands livres auraient été établis, s'agissant de l'année 2000, le 26 février 2001, et, s'agissant de l'année 2002, le 23 avril 2003, dates mentionnées sur les extraits du grand livre produits devant les premiers juges. Toutefois, ces documents ne peuvent être regardés comme ayant date certaine, alors que, de surcroît, lors de la vérification de comptabilité, la société a produit des grands livres comportant des dates différentes, postérieures à l'expiration des délais de déclaration.

En ce qui concerne les stocks :

19. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient ".

20. Il résulte de l'instruction que, lors de la vérification de comptabilité de la SARL Auto import, le vérificateur a relevé que la société avait vendu un véhicule de marque Mercedes en 2000 mais que, la vente ayant été annulée, elle avait comptabilisé dans les écritures de l'exercice une perte de créance. Constatant que la société avait omis de comptabiliser ce véhicule dans les stocks, le vérificateur l'a réintégré dans les stocks de chacun des exercices contrôlés.

21. Si M. F... soutient que le véhicule a bien été vendu en 2000 et ne devait par suite plus figurer dans les stocks et qu'il se trouvait sur le parking des locaux de la SARL Auto Import parce qu'un détective privé l'a ramené, il n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations, alors qu'il est constant que la carte grise du véhicule est restée au nom de la société jusqu'à sa mise au rebut en octobre 2003.

En ce qui concerne les commissions et honoraires :

22. Aux termes de l'article 238 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en cause : " Les personnes physiques et les personnes morales qui n'ont pas déclaré les sommes visées au premier alinéa du 1 de l'article 240 perdent le droit de les porter dans leurs frais professionnels pour l'établissement de leurs propres impositions. Toutefois, cette sanction n'est pas applicable, en cas de première infraction, lorsque les intéressés ont réparé leur omission, soit spontanément, soit à la première demande de l'administration, avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite. (...) ". Aux termes de l'article 240 du même code : " 1. Les personnes physiques qui, à l'occasion de l'exercice de leur profession versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations, doivent déclarer ces sommes dans les conditions prévues aux articles 87,87 A et 89. (...) 2. Les dispositions des 1 et 1 bis sont applicables à toutes les personnes morales ou organismes, quel que soit leur objet ou leur activité, y compris les administrations de l'État, des départements et des communes et tous les organismes placés sous le contrôle de l'autorité administrative. ".

23. Il résulte de l'instruction que lors de la vérification de comptabilité de la SARL Auto import, le vérificateur a relevé que la société avait déduit de son bénéfice des commissions et honoraires versés à des tiers. Constatant qu'elle n'avait pas souscrit la déclaration DAS 2 prévue par les dispositions rappelées ci-dessus, malgré l'envoi d'une mise en demeure, le vérificateur a pu à bon droit réintégrer aux résultats de la société les commissions et honoraires en cause, nonobstant les circonstances, à les supposer même établies, que ces commissions et honoraires auraient bien été déclarés à l'impôt sur le revenu par les bénéficiaires et qu'ils auraient été versés dans l'intérêt de l'entreprise.

En ce qui concerne les autres charges :

24. Il résulte de l'instruction que, lors de la vérification de comptabilité dont la SARL Auto Import a fait l'objet, le vérificateur a réintégré aux résultats des exercices contrôlés des charges qu'il a regardées comme n'étant pas justifiées.

25. En premier lieu, si M. F... produit une facture Air Guyane pour un montant de 9 600 F, cette facture, datée du 13 décembre 1999, ne peut, en vertu de la règle de l'indépendance des exercices, venir en déduction du résultat de l'exercice clos le

31 décembre 2000.

26. En deuxième lieu, si M. F... soutient que la somme de 3 000 F portée en déduction en 2000 correspond aux intérêts d'un emprunt de 100 000 F que lui a accordé M. D... et qu'une attestation de ce dernier a été produite pendant le contrôle, il résulte toutefois de l'instruction que l'administration a adressé à M. D... un courrier du

28 août 2003, notifié le 2 septembre 2003, lui demandant de confirmer l'existence d'un prêt et du remboursement d'intérêt pour un montant de 3 000 F, et que M. D... n'a jamais confirmé l'existence de ce prêt.

27. En troisième lieu, M. F... soutient que la somme de 20 000 F comptabilisée en charge de l'exercice 2000 constitue une créance irrécouvrable auprès de M. B... C.... Toutefois, en se bornant à produire trois courriers de relance adressés par lettre simple au débiteur, il n'établit pas le caractère irrécouvrable de cette créance au titre de l'exercice 2000.

28. Enfin, M. F... soutient que la somme de 446,37 euros portée en charge au titre de l'année 2002 correspond à une facture Air Caraïbes et a produit devant les premiers juges une " attestation de déplacement ", rédigée le 13 octobre 2003 par le " directeur du Revenue Management ", attestant que M. F... a effectué un aller-retour

Pointe-à-Pitre/Saint-Domingue en août 2002. Toutefois, l'administration a refusé la déductibilité de cette charge au motif que la SARL Auto Import n'entretenait aucune relation commerciale avec Saint-Domingue. Si M. F... soutient que la SARL Auto Import avait le projet d'installer un établissement secondaire de location de véhicules à Saint-Domingue, il n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations.

29. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2000 à 2002.

Sur les conclusions relatives au recouvrement des cotisations d'impôt sur les sociétés de l'année 2003 et de taxe professionnelle des années 2004, 2008 et 2009 :

30. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L.252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt (...) ". Aux termes de l'article R. 281-1 du même livre, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire. / Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, en premier lieu, au chef du service du département ou de la région dans lesquels est effectuée la poursuite (...) ". Aux termes de l'article R.281-3-1 du même livre : " La demande prévue à l'article R. 281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée, selon le cas, au directeur départemental des finances publiques, au responsable du service à compétence nationale ou au directeur régional des douanes et droits indirects dans un délai de deux mois à partir de la notification : /a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ; / b) De tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation de payer ou le montant de la dette ; /c) Du premier acte de poursuite permettant d'invoquer tout autre motif. ".

31. Pour rejeter comme irrecevable la demande de M. F..., les premiers juges ont relevé que, si la réclamation préalable du 2 septembre 2014 soumise d'office au tribunal administratif indiquait introduire une contestation de recouvrement s'agissant de des cotisation d'impôt sur les sociétés 2003 et de taxe professionnelle 2004, 2008 et 2009, aucun acte de poursuite n'avait été notifié à l'intéressé. Contrairement à ce que soutient M. F..., le jugement du 25 janvier 2013 par lequel le tribunal de grande instance de Cayenne l'a déclaré solidairement responsable du paiement des impositions restant dues par la SARL Auto Import ne peut être regardé comme un acte de recouvrement lui ouvrant droit de saisir le juge du recouvrement de l'impôt.

32. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté comme irrecevables ses conclusions présentées dans le cadre du contentieux du recouvrement.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. F... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

Mme I... J..., présidente de la cour,

M. Éric Rey-Bèthbéder, président de chambre,

Mme K..., présidente-assesseure.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.

La rapporteure,

K... La présidente de la cour,

Brigitte J...

La greffière,

Caroline Brunier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX03652 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03652
Date de la décision : 29/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Demandes et oppositions devant le tribunal administratif.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CABINET PATRICK HERROU

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-29;18bx03652 ?
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