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14/10/2019 | FRANCE | N°18BX03322

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 14 octobre 2019, 18BX03322


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Transport posthume de Mayotte (TPM) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte de condamner la commune de Mamoudzou à lui verser une provision de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et moral tiré de l'illégalité fautive commise par la commune de Mamoudzou en négligeant son obligation de créer une chambre funéraire, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance n° 1

801038 du 27 août 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a reje...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Transport posthume de Mayotte (TPM) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte de condamner la commune de Mamoudzou à lui verser une provision de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et moral tiré de l'illégalité fautive commise par la commune de Mamoudzou en négligeant son obligation de créer une chambre funéraire, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance n° 1801038 du 27 août 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté la demande de la société TPM.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2018, la société Transport posthume de Mayotte, représentée par Me A..., demande au juge d'appel des référés :

1°) d'annuler cette ordonnance en date du 27 août 2018 ;

2°) de condamner la société Transport posthume de Mayotte à lui verser une provision de 300 000 euros, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de la société Transport posthume de Mayotte une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de la commune de Mamoudzou d'édifier une chambre funéraire sur son territoire constitue une carence fautive dès lors que depuis qu'elle a tenté en 2008 d'obtenir un permis de construire pour édifier une chambre funéraire aucune initiative privée n'a été mise en oeuvre ;

- les cellule réfrigérée du centre hospitalier et les infrastructures existantes ne répondent pas aux nécessités du service et ne sont pas suffisantes au regard de la population de Mayotte ;

- elle est contrainte d'assurer ce service à l'aide d'un container réfrigéré, entreposé en zone résidentielle avec les risques sanitaires et nuisances que cela comporte ;

- son préjudice financier s'analyse comme une perte de chance correspondant à la différence entre les opérations qu'elle a effectuées et celles qu'elle aurait pu effectuer si une telle structure de chambre funéraire avait été mise en place, cours depuis l'année 2010 et peut être estimé au regard de l'évolution de la population de Mayotte à 940 154 euros au total ;

- son préjudice moral résultant de l'atteinte à sa réputation et au trouble dans l'exercice de la profession peut être estimé à 50 000 euros ;

- ces éléments justifient que lui soit versée une provision d'un montant de 300 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné, par une décision du 2 septembre 2019, M. Pierre Larroumec, président de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. La société Transport posthume de Mayotte (TPM) relève appel de l'ordonnance en date du 27 août 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Mamoudzou soit condamner au versement d'une provision d'un montant 300 000 euros en réparation du préjudice financier et moral subi en raison de l'illégalité fautive commise par la commune qui a négligée son obligation de créer une chambre funéraire sur son territoire.

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant.

3. Aux termes de l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales : " Le service extérieur des pompes funèbres est une mission de service public comprenant : 1° Le transport des corps avant et après mise en bière ; 2° L'organisation des obsèques ; 3° Les soins de conservation ; 4° La fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ; 5° la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaire (5° supprimé par ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005) 6° La gestion et l'utilisation des chambres funéraires ; 7° La fourniture des corbillards et des voitures de deuil ; 8° La fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l'exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d'imprimerie et de la marbrerie funéraire. Cette mission peut être assurée par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée. Les communes ou leurs délégataires ne bénéficient d'aucun droit d'exclusivité pour l'exercice de cette mission. Elle peut être également assurée par toute autre entreprise ou association bénéficiaire de l'habilitation prévue à l'article L. 223-23 ". Aux termes de l'article R. 2223-29 du même code : " Après la fermeture du cercueil, effectuée conformément aux dispositions de l'article R. 2213-20, celui-ci peut être déposé temporairement dans un édifice cultuel, une chambre funéraire, au crématorium, à la résidence du défunt ou celle d'un membre de sa famille, dans les conditions prévues aux articles R. 2213-33 et R. 2213-35. Le cercueil peut également être déposé dans un caveau provisoire, le cas échéant après accord du propriétaire du caveau, dans l'attente de l'inhumation définitive. L'autorisation du dépôt est donnée par le maire de la commune du lieu du dépôt, après vérification que les formalités prescrites par l'article R. 2213-17 et par les articles 78 et suivants du code civil ont été accomplies (...). ". Aux termes de l'article R. 2223-74 de ce code : " La création ou l'extension d'une chambre funéraire est autorisée par le préfet. Le dossier de demande de création ou d'extension d'une chambre funéraire comprend obligatoirement : - une notice explicative ; - un plan de situation ; - un projet d'avis au public détaillant les modalités du projet envisagé. L'avis est ensuite publié, à la charge du demandeur, dans deux journaux régionaux ou locaux. Le préfet consulte le conseil municipal, qui se prononce dans un délai de deux mois, et recueille l'avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. La décision intervient dans le délai de quatre mois suivant le dépôt de la demande. En l'absence de notification de la décision à l'expiration de ce délai, l'autorisation est considérée comme accordée. L'autorisation ne peut être refusée qu'en cas d'atteinte à l'ordre public ou de danger pour la salubrité publique. Dans les mêmes cas, le préfet peut, après mise en demeure, ordonner la fermeture provisoire ou définitive de la chambre funéraire. Le maire de la commune concernée est informé ".

4. La société TPM, entreprise de pompe funèbre exerçant sur l'ensemble du territoire de Mayotte, soutient que le refus de la commune de Mamoudzou, depuis l'année 2008, d'édifier une chambre funéraire sur son territoire depuis l'année 2008 constitue une carence fautive à l'origine d'un préjudice financier et moral. Il ressort des pièces du dossier que la société TPM a sollicité le 3 juillet 2008 une autorisation d'édifier une service mortuaire composé de salles d'autopsie, de préparation, de conservation et de présentation des corps. Par un courrier en date du 11 décembre 2008, le maire de la commune de Mamoudzou a informé la société TPM qu'il avait été procédé au retrait du permis de construire tacite qui lui avait été accordé au motif que le terrain d'assiette figurait en zone ND du plan d'occupation des sols de la commune, en précisant toutefois que l'intérêt général du projet de bâtiment mortuaire de la société TPM n'était pas remis en cause. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des courriers de la société TPM, en date du 10 avril 2014 et du 5 avril 2018, adressés respectivement au préfet de Mayotte et l'informant de son projet d'édifier un établissement funéraire à Mamoudzou, et au maire de la commune de Mamoudzou le mettant en demeure de construire une chambre funéraire sur le territoire de la commune, que la société requérante aurait présenté un dossier de demande de création de chambre funéraire depuis l'année 2008. Au surplus, comme l'a relevé le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, la tradition et les préceptes religieux dominants dans le département de Mayotte prévoient une inhumation sans délai des corps sans passer par une chambre funéraire. Dans ces conditions, au regard des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, l'obligation invoquée par la société TPM ne présente pas, en l'état de l'instruction, un caractère non sérieusement contestable au sens de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui précède que la société TPM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. La commune de Mamoudzou n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par la société TPM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne sauraient être accueillies.

ORDONNE

Article 1er : La requête de la société Transport posthume de Mayotte (TPM) est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Transport posthume de Mayotte (TPM) et à la commune de Mamoudzou.

Fait à Bordeaux, le 14 octobre 2019

Le juge d'appel des référés

Pierre Larroumec

La République mande et ordonne au ministre en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 18BX03322


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 18BX03322
Date de la décision : 14/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : PATRIMONIO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-14;18bx03322 ?
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