Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS Eiffage Génie civil Antilles, venant aux droits de la SAS Eiffage travaux publics Antilles, représentée par la SELARL " Cheysson, Marchadier et Associés ", a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique (CAESM) à lui verser, à titre de provision, la somme de 77 840,20 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal eux-mêmes capitalisés, en paiement de 4 factures restées impayées au titre de l'exécution du lot n° 1 " traitement de l'H2S arrivant sur les postes de refoulement PR1/PR2/PR4/PR5, suppression du PR7, peinture intérieure et extérieure des ouvrages existants " du marché de réaménagement de la chaine des postes de refoulement de Rivière la Manche à Ducos.
Par une ordonnance n°1800570 du 13 décembre 2018, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2018, la SAS Eiffage Génie civil Antilles, représentée par la SARL " Cheysson, Marchadier et Associés ", demande au juge des référés de la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la CAESM une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'article 13.2.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux de 2009 prévoit qu'il appartient au maître d'oeuvre de déterminer le montant de l'acompte mensuel à régler à partir du décompte mensuel transmis par le titulaire du marché ;
- en application du marché, la maîtrise d'oeuvre était assurée par le maître d'ouvrage ; par suite, les factures en litige ont bien été notifiées à la CAESM, maître d'ouvrage, en tant que maître d'oeuvre ;
- la CAESM a nécessairement admis les sommes dont le paiement était réclamé puisqu'elle ne les a jamais contestées ;
- par suite, en relevant que la société Eiffage aurait dû notifier ses demandes de paiement au maître d'ouvrage, le juge des référés a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande en référé provision ;
- par ailleurs, les quatre demandes d'acomptes ont fait l'objet d'un mandatement de la part de la CAESM, ce qui implique nécessairement que le maître d'ouvrage a vérifié le service fait et validé le montant des états d'acomptes ;
- dès lors, ses créances ne sont pas sérieusement contestables.
La présidente de la cour a désigné M. Naves, président de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics;
- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux et l'annexe à cet arrêté ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique (SICSM), a, par un acte d'engagement signé le 15 mars 2016 et notifié le 15 avril 2016, confié à la SAS Eiffage travaux publics Antilles, devenue Eiffage génie civil Antilles, la réalisation du lot n° 1 " traitement de l'H2S arrivant sur les postes de refoulement PR1/PR2/PR4/PR5, suppression du PR7, peinture intérieure et extérieure des ouvrages existants ", du marché de réaménagement de la chaine des postes de refoulement de Rivière la Manche à Ducos, pour un montant total de 278 199,43 euros TTC. Quatre des huit demandes d'acompte qu'elle a présentées au paiement, sont restées impayées, pour une somme totale de 77 840,20 euros TTC. Ayant vainement formé par courrier du 4 juillet 2018 une réclamation à la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique (CAESM), substituée de plein droit au SICSM au terme d'un arrêté préfectoral en date du 2 décembre 2015, la SAS Eiffage génie civil Antilles a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant par application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner la CAESM à lui verser, à titre de provision, la somme de 77 840,20 euros TTC. La société relève appel de l'ordonnance du 13 décembre 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation est non sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.
3. Si l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde, arrêté lors de l'établissement du décompte définitif, détermine les droits et obligations définitifs des parties, cette règle ne fait toutefois pas obstacle, eu égard notamment au caractère provisoire d'une mesure prononcée en référé, à ce qu'il soit ordonné au maître d'ouvrage de verser au titulaire d'un tel marché une provision au titre d'une obligation non sérieusement contestable lui incombant dans le cadre de l'exécution du marché, alors même que le décompte général et définitif n'aurait pas encore été établi. Lorsque le maître de l'ouvrage ne procède pas au versement d'acomptes auxquels a droit le titulaire du marché, ce dernier peut demander au juge des référés le versement d'une provision représentative de tout ou partie de leur montant.
4. Aux termes de l'article 97 du code des marchés publics applicable à la date de signature du marché : " Les opérations effectuées par le titulaire d'un marché qui donnent lieu à versement d'avances ou d'acomptes, à règlement partiel définitif, ou à paiement pour solde, sont constatées par un écrit établi par le pouvoir adjudicateur ou vérifié et accepté par lui. " Aux termes de l'article 11 du cahier des clauses administrative générales applicables aux marchés de travaux : " 11.1. / Le règlement des comptes du marché se fait par des acomptes mensuels et un solde établis et réglés comme il est indiqué à l'article 13. ". Aux termes de cet article 13 : " 13.1. Demandes de paiement mensuelles : / 13.1.1. Avant la fin de chaque mois, le titulaire remet sa demande de paiement mensuelle au maître d'oeuvre, sous la forme d'un projet de décompte. / (...) 13.1.8. / Le projet de décompte mensuel établi par le titulaire constitue la demande de paiement ; cette demande est datée et mentionne les références du marché. / Le titulaire envoie cette demande de paiement mensuelle au maître d'oeuvre par tout moyen permettant de donner une date certaine. / 13.1.9. / Le maître d'oeuvre accepte ou rectifie le projet de décompte mensuel établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte mensuel. / (...) 13.2.1. / A partir du décompte mensuel, le maître d'oeuvre détermine le montant de l'acompte mensuel à régler au titulaire. / (...) 13.2.2. / Le maître d'oeuvre notifie par ordre de service au titulaire l'état d'acompte mensuel et propose au représentant du pouvoir adjudicateur de régler les sommes qu'il admet. / Cette notification intervient dans les sept jours à compter de la date de réception de la demande de paiement mensuelle du titulaire. ".
5. En premier lieu, la société requérante, par les quatre factures intitulées " DÉCOMPTE N°05 DES TRAVAUX ARRETÉS - 30 juin 2017 ", pour une somme de 29 761,28 euros TTC, " DÉCOMPTE N°06 DES TRAVAUX ARRETÉS - 31 juillet 2017 " pour une somme de 16 177,08 euros TTC, " DÉCOMPTE N°07 DES TRAVAUX ARRETÉS AU 29 août 2017 " pour une somme de 22 308,41 euros TTC et " DÉCOMPTE N°08 DES TRAVAUX ARRETÉS - OCTOBRE 2017 " pour une somme de 9 553,43 euros TTC qu'elle produit, ne justifie pas que la CAESM, prise en sa qualité de maître d'oeuvre, a réceptionné et admis ces sommes.
6. En second lieu la production par la requérante de la copie de la preuve de dépôt le 9 juillet 2018 au bureau de poste de sa réclamation préalable du 4 juillet 2018 n'établit pas davantage la réception et la validation par le maître d'oeuvre de ces sommes.
7. Enfin, en se bornant à soutenir, par un moyen nouveau en appel, que les quatre demandes d'acomptes ont fait l'objet d'un mandatement de la part de la CAESM, ce qui implique nécessairement que le maître d'ouvrage a vérifié le service fait et validé le montant des états d'acomptes, sans assortir son moyen d'éléments de nature à en établir la réalité, la SAS Eiffage Génie civil Antilles ne démontre pas que ses des demandes de paiement mensuelles ont été effectivement transmises et reçues par la maîtrise d'oeuvre chargée de leur instruction.
8. Dans ces conditions l'existence de l'obligation dont se prévaut la société requérante ne peut être regardée comme présentant un caractère non sérieusement contestable au sens des dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Il en résulte que cette société n'est pas fondée à se soutenir que, c'est à tort, que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Martinique a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article R. 541-1 du code de justice administrative doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de la SAS Eiffage Génie civil Antilles est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SAS Eiffage Génie civil Antilles et à la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique.
Fait à Bordeaux, le 7 octobre 2019
Le juge d'appel des référés,
Dominique NAVES
La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
N° 18BX04462 2