Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1801865 du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées les 12 novembre 2018 et 18 janvier 2019, M.A..., représenté par Me D...dit Labaquère, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, tout en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français a été prise en violation de son droit d'être entendu préalablement et des droits de la défense. Il s'est présenté à plusieurs reprises au guichet mais a été empêché de faire état de son cancer et de déposer une demande de titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade ;
- cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation dès lors que le préfet ne fait pas état de son état de santé et de celui de son épouse, qu'il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il serait exposé à des traitements visés à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'il est porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. De plus, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas motivé le choix du délai de trente jours pour quitter le territoire français ;
- le préfet des Hautes-Pyrénées a entaché la décision contestée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale dès lors que sa fille, qui réside régulièrement sur le territoire français, est handicapée et a besoin de la présence de ses parents, qu'atteint d'un cancer, il ne peut pas voyager et qu'il risque pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est bien intégré sur le territoire français et que s'y trouve le centre de ses attaches familiales ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- cette décision est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est menacé par son ancien gendre dans son pays d'origine. L'appréciation portée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile ne lie pas le préfet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2018, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le droit d'être entendu implique seulement que l'intéressé soit informé qu'une décision défavorable est susceptible d'être prise à son encontre. Il n'établit pas avoir été privé de la possibilité de présenter des éléments pertinents susceptibles d'influer sur le contenu de cette décision ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée en droit et en fait ;
- les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur d'appréciation sont infondés dès lors que l'appelant est arrivé en France de façon irrégulière, le 20 juillet 2016, accompagné de son épouse, dont la demande de titre de séjour a été rejetée, et de leurs deux enfants majeurs et, qu'ainsi, la cellule familiale était déjà constituée dans le pays d'origine ;
- le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant ;
- la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée en droit et en fait ;
- le moyen tiré de l'illégalité de cette décision en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français est infondé ;
- le requérant ne fournit aucun élément ayant force probante permettant de considérer qu'il établit encourir effectivement des risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine.
Par ordonnance du 26 novembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 janvier 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. B...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...A..., ressortissant macédonien né le 1e octobre 1957, est entré irrégulièrement en France le 20 juillet 2016 accompagné de sa femme et de leurs deux enfants. Le 26 août 2016, il a déposé une demande d'asile. Sa demande a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 28 mars 2017 puis par décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 7 novembre 2017. En conséquence, le préfet des Pyrénées-Atlantiques, par un arrêté du 24 juillet 2018, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 octobre 2018 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. ( ...)".
3. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. A...à l'aide juridictionnelle.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, M. A...reprend en appel, dans des termes identiques, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de la méconnaissance du droit d'être entendu. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. M. A...se prévaut de ce qu'il est bien intégré sur le territoire français où il a établi le centre de ses attaches familiales. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'appelant est entré en France à l'âge de 59 ans et que son épouse et deux de leurs enfants ont également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le même jour. En outre, s'il fait valoir qu'une de ses filles réside régulièrement sur le territoire français et est handicapée et nécessite ainsi la présence de ses parents, il n'apporte aucun élément au soutien de cette allégation alors au demeurant que cette dernière est arrivée en France en 2015 et n'a donc pu bénéficier du concours de ses parents avant leur entrée sur le territoire national en 2016. Enfin, si M. A...soutient qu'il ne peut voyager en raison du cancer dont il souffre, les certificats médicaux versés au dossier, s'ils attestent qu'il souffre d'un adénocarcinome de prostate de score 6 de Gleason ISUP 1 de stade pT1, se bornent à indiquer, pour un seul d'entre eux, que ses pathologies sont " très gênantes lors des déplacements sur de longue distance ". Ainsi, et eu égard également à la durée de son séjour en France, l'obligation de quitter le territoire français en litige n'a pas portée une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, le préfet n'a méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni n'a commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de M.A....
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
7. En premier lieu, l'arrêté vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne le rejet de la demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, la circonstance que la Macédoine figure sur la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs et ajoute que l'intéressé n'apporte aucun élément ayant force probante de nature à établir qu'il serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, l'arrêté énonce les considérations de droit et de fait fondant la décision fixant le pays de destination qui est donc suffisamment motivée.
8. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
9. En troisième et dernier lieu, M. A...reprend en appel, dans des termes identiques, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse apportée par les premiers juges, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 24 juillet 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président- assesseur,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
Mme Caroline Gaillard, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2019.
Le rapporteur,
Paul-André B...Le président- assesseur
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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18BX03898