Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés du 14 novembre 2018 du préfet de la Haute-Garonne ordonnant son transfert vers l'Italie et l'assignant à résidence.
Par un jugement n°1805488 du 27 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 14 novembre 2018 du préfet de la Haute-Garonne, a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder sans délai au réexamen de la situation de M. C...et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à son conseil.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 20 décembre 2018 sous le numéro 18BX04463, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 27 novembre 2018 ;
2°) de rejeter la demande de M.C....
Il soutient que :
- le requérant n'a pas formellement contesté la compétence des autorités italiennes dans ses écritures et soutenu que les autorités hongroises seraient compétentes, contrairement à ce qu'a retenu le magistrat désigné ;
- en tout état de cause, la Hongrie avait refusé la demande de reprise en charge ;
- il s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2019, M.C..., représenté par MeB..., conclut :
1°) à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) au rejet de la requête du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de prendre en charge M. C...dans l'attente que sa demande d'asile soit traitée ;
4°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
En ce qui concerne la décision portant transfert vers l'Italie :
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation au regard de la loi du 11 juillet 1979, en tant que le préfet n'a pas justifié la décision de transfert vers l'Italie et non la Hongrie, alors même que l'Italie a suspendu ses autorisations de laissez-passer ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle au regard de l'article 3 du règlement n°604/2013 en tant que la Hongrie est responsable de sa demande d'asile, et d'erreur de droit, l'Etat membre responsable ayant été saisi plus de trois mois après qu'il ait demandé l'asile en France ;
- il encourt un risque de traitement contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car les autorités italiennes vont le renvoyer en Hongrie où il existe des défaillances systémiques.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- elle porte atteinte à sa liberté d'aller et venir dès lors qu'il ne représente pas un trouble à l'ordre public et qu'il s'est toujours rendu aux convocations de la préfecture, ne présentant ainsi pas de risque de fuite ;
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de transfert ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation dès lors qu'il n'a pas pris en compte l'ensemble de sa situation personnelle, dont sa situation de vulnérabilité en méconnaissance de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par ordonnance du 31 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2019 à midi.
II. Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2018 sous le numéro du 18BX04464, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n°1805488 du 27 novembre 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse.
Il soutient que :
- il ressort de ses écritures dans sa requête au fond, dont il joint une copie, qu'il existe des moyens sérieux de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation, d'injonction et de condamnations accueillies par ledit jugement. Les conditions du sursis à exécution, prévu par l'article R. 811-15 du code de justice administrative, sont donc réunies.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2019 M.C..., représenté par MeB..., conclut :
1°) à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) au rejet de la requête du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de prendre en charge M. C...dans l'attente que sa demande d'asile soit traitée ;
4°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir les mêmes moyens que ceux soulevés dans l'instance n°18BX04463.
Par ordonnance du 31 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2019 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du
26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-674 QPC du 1er décembre 2017 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Sabrina Ladoire pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. A...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...C..., ressortissant pakistanais né le 25 octobre 1988, est entré en France le 22 février 2018 selon ses déclarations, et a déposé le 31 mai 2018 une demande d'asile. La consultation du fichier Eurodac a fait apparaître que ses empreintes digitales avaient déjà été relevées par les autorités hongroises le 17 juillet 2013 et par les autorités italiennes le 13 août 2013, lors de dépôts de demande d'asile. Après avoir adressé des demandes de reprise en charge aux autorités hongroises et italiennes, et après avoir recueilli le refus des autorités hongroises le 12 juillet 2018 et l'accord implicite des autorités italiennes le 26 juillet 2018, le préfet de la Haute-Garonne, par deux arrêtés du 14 novembre 2018, a ordonné le transfert de M. C...aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence. Par une première requête enregistrée sous le numéro 18BX004463, le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du 27 novembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 14 novembre 2018 et lui a enjoint de procéder sans délai au réexamen de la situation de M.C.... Par une seconde requête enregistrée sous le numéro 18BX04464, le préfet de la Haute-Garonne sollicite le sursis à exécution de ce jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes enregistrées sous les n°18BX04463 et 18BX04464 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
3. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président ".
4. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. C...à l'aide juridictionnelle.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Pour annuler l'arrêté du 14 novembre 2018 portant remise de M. C...aux autorités italiennes, et, par voie de conséquence, la mesure d'assignation à résidence du même jour, le premier juge a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 du règlement n° 604/2013 et du chapitre III de ce règlement au motif qu'au regard des pièces du dossier, la Hongrie, et non l'Italie, devait être regardée comme l'Etat membre responsable de la demande d'asile de M.C....
6. En vertu du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lorsqu'une telle demande est présentée, un seul Etat, parmi ceux auxquels s'applique ce règlement, est responsable de son examen. Cet Etat, dit Etat membre responsable, est déterminé en faisant application des critères énoncés aux articles 7 à 15 du chapitre III du règlement ou, lorsqu'aucun Etat membre ne peut être désigné sur la base de ces critères, du premier alinéa du paragraphe 2 de l'article 3 de son chapitre II. Si l'Etat membre responsable est différent de l'Etat membre dans lequel se trouve le demandeur, ce dernier peut être transféré vers cet Etat, qui a vocation à le prendre en charge. Lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI de ce même règlement.
7. Aux termes de l'article 7 du règlement n° 604/2013 : " (...) 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre (...) ". Aux termes de l'article 18 de ce règlement : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de: (...) b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du refus de reprise en charge des autorités hongroises produit pour la première fois en appel, que la première demande d'asile de M. C...a été enregistrée en Hongrie le 17 juillet 2013. Par conséquent, il résulte des dispositions précitées du 2 de l'article 7 du règlement n° 604/2013 que l'Etat membre responsable en vertu de ce règlement est effectivement la Hongrie. Cependant, il ressort également des pièces du dossier, et notamment du refus des autorités hongroises, que postérieurement au dépôt de cette demande d'asile, laquelle a été rejetée le 6 décembre 2013, M. C...a déposé une nouvelle demande d'asile le 13 août 2013 auprès des autorités italiennes qui ont accepté d'instruire cette demande. Par conséquent, nonobstant l'examen antérieur de la demande d'asile par les autorités hongroises, en instruisant la demande de M. C...les autorités italiennes ont, implicitement mais nécessairement, accepté de reprendre en charge sa demande d'asile. Ainsi, l'Italie doit être regardée comme étant, à compter de son accord implicite, devenue l'Etat membre responsable de la demande d'asile de M.C.... Dès lors, à la suite de cette reprise en charge par les autorités italiennes et de leur accord implicite à la demande de reprise en charge adressée par la France, il résulte du b) du 1 de l'article 18 du règlement n° 604/2013, que l'Etat à destination duquel M. C...doit être transféré pour la reprise en charge de sa demande d'asile est bien l'Italie.
9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 3 du règlement n° 604/2013 et du chapitre III de ce règlement pour annuler l'arrêté du 14 novembre 2018 ordonnant le transfert de M. C...vers l'Italie, et par voie de conséquence, l'arrêté du même jour l'assignant à résidence. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif de Toulouse et la cour.
Sur la légalité de l'arrêté de transfert :
10. En premier lieu, en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Est ainsi suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application. S'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre Etat membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet Etat, doit être regardée comme suffisamment motivée la décision de transfert à fin de reprise en charge qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'Etat en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.
11. En l'espèce, l'arrêté du 14 novembre 2018 indique que le relevé de ses empreintes décadactylaires a révélé qu'il avait introduit une demande d'asile en Hongrie le 2 juillet 2013 puis en Italie le 13 août 2013 et que les autorités hongroises et italiennes ont été saisies de demande de reprise en charge en application de l'article 18-1 b) du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dont le préfet énonce d'ailleurs expressément les termes. En outre, le préfet a fait mention du refus des autorités hongroises et de l'accord implicite des autorités italiennes par lequel ces dernières ont reconnu leur responsabilité. Ainsi, la décision comporte les éléments de fait ou de droit permettant d'identifier les critères retenus par le préfet pour déterminer l'État responsable de l'examen de la demande d'asile de l'intéressé, qui pouvait, à la seule lecture de l'arrêté en litige, connaître le critère retenu par l'administration pour s'adresser aux autorités italiennes et être, ainsi, mis à même d'en contester, le cas échéant, la pertinence. Par ailleurs, la critique du bien-fondé des motifs du transfert est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de cette décision. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté doit être écarté.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 23 du règlement (UE) n°604/2013 " 1. Lorsqu'un Etat membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b) c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre Etat membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre Etat membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9, paragraphe 5, du règlement (UE) n°603/2013. (...) 3. Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n'est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c'est l'État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l'examen de la demande de protection internationale (...) ".
13. A supposer même que le résultat positif Eurodac signifié par un courrier daté du 4 juin 2018 ait été notifié le jour même, il n'est pas contesté que les demandes de reprise en charge ont été adressées aux autorités hongroises et italiennes le 11 juillet 2018. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M.C..., le délai de deux mois prévu par le 2 de l'article 23 du règlement n° 604/2013 n'était pas expiré.
14. En troisième lieu, aux termes de l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013: " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. ". En vertu de l'article 17 de ce règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Cette possibilité doit en particulier être mise en oeuvre lorsqu'il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé courra, dans le pays de destination, un risque réel d'être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
15. M. C...soutient qu'il encourt un risque d'être soumis à un traitement contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que les autorités italiennes risquent " de le transférer en Hongrie, pays où il existe des défaillances systémiques ". Cependant M. C...n'établit ni même n'allègue que les autorités italiennes auraient définitivement rejeté sa demande d'asile ni qu'elles auraient pris une mesure d'éloignement à destination de la Hongrie. Dans ces conditions, le risque allégué ne peut, en tout état de cause, être regardé comme étant actuel et réel à la date de l'arrêté contesté. Par suite, le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, décider de ne pas faire application du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement n° 604/2013.
Sur la légalité de l'assignation à résidence :
16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'assignation à résidence serait privée de base légale en raison de l'illégalité de la mesure de transfert qui la fonde.
17. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : "I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) ".
18. M. C...soutient que la mesure d'assignation à résidence n'est pas fondée dès lors qu'elle ne se justifiait pas par une nécessité impérieuse relevant d'un trouble à l'ordre public, et qu'il ne présentait pas de risque de fuite et que cette décision porte atteinte à sa liberté d'aller et venir. D'une part, il résulte des dispositions précitées qu'il peut faire l'objet d'une mesure d'assignation à résidence alors même que sa présence ne constitue pas une menace à l'ordre public et qu'il ne présente pas de risque de fuite. D'autre part, en ne précisant pas en quoi l'assignation à résidence litige, qui selon la décision n° 2017-674 QPC du 1er décembre 2017 du Conseil constitutionnel ne peut être regardée comme une mesure privative de liberté, porterait une atteinte disproportionnée à sa liberté d'aller et venir alors que cette mesure est limitée dans le temps à une durée de quarante-cinq jours, M. C...n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
19. En dernier lieu, M. C...ne peut utilement se prévaloir de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel concerne le placement en rétention.
20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé ses arrêtés du 14 novembre 2018. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C...à fin d'injonction et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
Sur la demande de sursis à exécution :
21. Le présent arrêt statuant au fond sur les conclusions du préfet de la Haute-Garonne, ses conclusions à fin de sursis à exécution ont perdu leur objet.
DECIDE :
Article 1er : M. C...est admis provisoirement à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse n°1805488 du 27 novembre 2018 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentées par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête enregistrée sous le n°18BX04464.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
M. Manuel Bourgeois, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 30 avril 2019.
Le rapporteur,
Paul-André A...Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No18BX04463-18BX04464