Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 par lequel le préfet de la Charente-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1801660 du 31 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 28 septembre et 8 octobre 2018, M.C..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 31 août 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ; le préfet n'a pas fait état de sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle et familiale ;
- l'arrêté ayant été pris moins d'un mois après la notification de l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile, l'administration ne lui a pas permis de faire valoir des éléments relatifs à sa situation ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par une ordonnance du 23 octobre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 novembre 2018.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...C..., ressortissant serbe, déclare être entré irrégulièrement en France avec sa conjointe et ses six enfants le 1er août 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par une décision du 29 décembre 2017, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 7 juin 2018, dont il a accusé réception le 15 juin suivant. Par un arrêté du 6 juillet 2018, le préfet de la Charente-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 31 août 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions en annulation :
2. En premier lieu, M. C...reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le magistrat désigné, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le magistrat désigné.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de la mesure d'éloignement attaquée que, contrairement à ce que soutient M.C..., le préfet de la Charente-Maritime s'est livré à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale.
4. En troisième lieu, à l'occasion du dépôt de sa demande d'asile, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux.
5. M. C...soutient que l'arrêté attaqué ayant été pris moins d'un mois après la notification de l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile, l'administration ne lui a pas permis de faire valoir des éléments relatifs à sa situation. Toutefois, et alors que l'intéressé ne pouvait ignorer que, dans l'hypothèse où -comme en l'espèce- la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui serait définitivement refusé, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'intéressé n'établit pas, ni même n'allègue, qu'il aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il aurait été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la décision attaquée. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne lui a pas permis de faire valoir des éléments relatifs à sa situation.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. C...déclare être entré sur le territoire français en 2017, à l'âge de 34 ans, avec sa conjointe et leurs six enfants. Ainsi, il ne justifie pas d'une durée significative de présence en France. De plus, rien ne fait obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en Serbie, eu égard à la minorité de ses cinq enfants et à la circonstance que sa conjointe et son fils majeur ont également fait l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par arrêt de ce jour de la cour administrative d'appel de Bordeaux. M.C..., qui n'a été admis à résider en France que le temps strictement nécessaire à l'examen de sa demande d'asile, n'établit pas une particulière intégration dans la société française. Quant à la circonstance que son demi-frère a obtenu la qualité de réfugié, elle ne suffit pas à lui conférer un droit au séjour. De plus, il n'établit pas avoir développé des liens d'une intensité particulière en France hors de cette cellule familiale. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne peut donc être regardée comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision était, à la date de son édiction, entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
8. En cinquième et dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
9. Ainsi qu'il a été dit au point 7, cinq des six enfants de M. C...sont, à la date de l'arrêté en litige, mineurs, et son fils majeur a également fait l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par arrêt de ce jour de la cour administrative d'appel de Bordeaux. La décision contestée n'a pas, par elle-même, pour effet de séparer M. C...ou sa conjointe de leurs enfants, la cellule familiale pouvant se reconstituer en Serbie, pays dont M. et Mme C...ont la nationalité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de 1'enfant doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président- rapporteur,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 avril 2019
Le premier-conseiller,
Paul-André BraudLe président,
Marianne B...
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX03546