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22/03/2019 | FRANCE | N°18BX01781

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 22 mars 2019, 18BX01781


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...H...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 11 décembre 2017 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800043 du 11 avril 2018, le tribunal administratif de Poitiers à rejeter sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2018, M.H..., représenté par Me C...E..., demande à

la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 avril 2018 du tribunal administratif de Poitiers ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...H...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 11 décembre 2017 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800043 du 11 avril 2018, le tribunal administratif de Poitiers à rejeter sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2018, M.H..., représenté par Me C...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 avril 2018 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 11 décembre 2017 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour d'une durée d'un an dans un délai de quinze jours à compter de la notification du l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Vienne de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- les premiers juges ont omis de statuer sur son moyen tiré de l'incompétence du collège des médecins de l'OFII pour rendre un avis sur son état de santé ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur son moyen tiré du défaut de production du rapport médical ;

- les premiers juges ont également omis de statuer sur son moyen tiré du non respect et de la lenteur de la procédure d'examen de la demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade et de l'absence de certaines mentions obligatoires dans le contenu de l'avis médical rendu ;

- les premiers juges ont également omis de statuer sur son moyen tiré de ce que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur sa demande de titre de séjour ;

En ce qui concerne l'arrêté du préfet de la Vienne du 11 décembre 2017 :

- le moyen tiré de l'incompétence du signataire est abandonné ;

- le collège des médecins de l'OFII était incompétent pour rendre un avis sur son état de santé. La procédure est irrégulière dès lors que le préfet aurait dû saisir le médecin de l'agence régionale de santé et non le collège de médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration (OFII), sa demande ayant été réceptionnée par la préfecture le 3 octobre 2016 ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors que l'avis médical a été rendu le 31 août 2017 soit plus d'un an après l'introduction de sa demande et ne comporte pas les mentions obligatoires prévues par les dispositions des articles L. 313-11 11°, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

- Le préfet n'a pu s'assurer de la régularité de la composition du collège de médecins et vérifier que le médecin instructeur n'y siégeait pas. Il a de ce fait été privé d'une garantie.

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure. Le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur sa demande ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation. Il méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de son état de santé alors qu'il a été victime d'un infarctus en 2013 et souffre de troubles ophtalmiques et que les soins dont il a besoin ne sont pas disponibles dans son pays d'origine. Il justifie amplement de circonstances humanitaires exceptionnelles lui permettant d'obtenir un titre de séjour ;

- le refus de séjour porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire, comme la décision fixant le pays de renvoi, sont illégales en ce qu'elles méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2018, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.

Par ordonnance du 21 juin 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 août 2018 à 12 heures.

Par une lettre du 31 janvier 2019, la cour a, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, invité le préfet de la Vienne, à produire des pièces en vue de compléter l'instruction.

Le préfet de la Vienne a produit le 1er février 2019 les pièces complémentaires sollicitées en application des dispositions de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

M. B...H...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n°2018/009710 du 28 juin 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme F...pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M A...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.H..., de nationalité géorgienne, né le 1er avril 1957, serait entré en France le 25 septembre 2013 en compagnie de son épouse. Sa demande d'asile du 3 décembre 2013 a été rejetée le 17 août 2015 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 11 mars 2016. Le préfet de la Vienne a pris à son encontre le 17 mai 2016 un arrêté portant refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par une ordonnance de la présente cour. L'intéressé a sollicité, le 28 septembre 2016, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. M. H...relève appel du jugement du 11 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 décembre 2017 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé la Géorgie comme pays de renvoi.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que par un mémoire enregistré le 9 mars 2018 au greffe du tribunal administratif de Poitiers, M. H... a invoqué le moyen tiré de ce que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration était incompétent pour rendre un avis sur son état de santé, dès lors que sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade devait être instruite sous l'empire des anciennes dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le tribunal administratif de Poitiers n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant, et a ainsi entaché son jugement d'une omission à statuer. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués afférents à l'irrégularité du jugement attaqué, ce dernier doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. H...devant le tribunal administratif de Poitiers.

Sur la légalité de l'arrêté du 11 décembre 2017 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, l'arrêté vise les textes applicables à la situation M.H..., et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application. Il mentionne l'ensemble des éléments relatifs à ses conditions d'entrée en France et ses diverses demandes de titre séjour ainsi que l'ensemble des considérations de fait sur lesquelles le préfet s'est fondée pour lui refuser le titre de séjour qu'il sollicitait en raison de son état de santé. Le préfet a notamment précisé les éléments particuliers de sa situation, notamment la disponibilité en Géorgie des traitements nécessaires. En outre, la circonstance invoquée par l'intéressé selon laquelle l'autorité administrative n'aurait porté aucune appréciation quant à l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), à la supposer même établie, est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version issue du 3° de l'article 13 de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, en vigueur depuis le 1er janvier 2017 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 67 de la même loi : " (...) V. - L'article 5, le 3° de l'article 13, l'article 14, le 2° du I et le VIII de l'article 20 et le troisième alinéa du 6° du II de l'article 61 entrent en vigueur le 1er janvier 2017. VI.- la présente loi s'applique aux demandes pour lesquelles aucune décision n'est intervenue à sa date d'entrée en vigueur. Le 3° de l'article 13, l'article 14, le 2° du I de l'article 20 et le troisième alinéa du 6° du II de l'article 61 s'appliquent aux demandes présentées après son entrée en vigueur. " .

5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable aux faits de l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale (...). ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement ".

6. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

7. M. H...soutient que la demande de titre de séjour ayant été déposée le 28 septembre 2016 auprès des services de la préfecture, sa situation devait être examinée au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction applicable avant la loi du 7 mars 2016 et que par conséquent, son dossier médical devait être soumis à l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé et non à celle du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de titre de séjour, que cette dernière est datée du 28 septembre 2016 et que la préfecture de la Vienne l'a enregistrée le 3 octobre suivant. Or il est constant que le préfet a recueilli l'avis du collège de médecins de l'OFII, prévu par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile telles qu'issues de la loi du 7 mars 2016. Toutefois, la circonstance que le dossier médical de l'appelant a été soumis à tort à l'appréciation d'un collège de trois médecins et non à celle du seul médecin de l'agence régionale de santé n'a privé M. H...d'aucune garantie ni n'a exercé d'influence sur le sens de la décision prise par le préfet de la Vienne.

8. En troisième lieu, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

9. D'une part, il ne résulte ni du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni des articles R. 313-22 et R. 313-23 de ce code, ni de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé, ni d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.

10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation du directeur territorial de l'OFII de Poitiers en date du 31 janvier 2019 produite pour la première fois en appel, que le rapport médical sur l'état de santé de M. H...a été établi le 21 juillet 2017 par le docteur D...G...dont il ressort de l'avis du collège de médecins qui comporte la signature de l'ensemble des membres de ce collège, qu'elle ne faisait pas partie de ce collège. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile manque en fait.

11. En quatrième lieu, si M. H...fait valoir que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne lui a pas été communiqué, ni le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016, ni aucun autre texte, ne prévoit la communication à l'intéressé de cet avis, lequel a par ailleurs été versé au dossier par le préfet.

12. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration date du 31 août 2017, soit plus de trois mois avant l'édiction de la décision contestée. Si les dispositions précitées ont pour objet de permettre au préfet, auquel il incombe de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen de la demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de disposer d'une information complète sur l'état de santé d'un étranger malade, ni elles ni aucune autre ne restreignent la validité de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à une durée quelconque sous peine de caducité ou de nullité. De plus, M. H...n'établit ni même n'allègue que son état de santé aurait évolué entre la date de cet avis et l'édiction de l'arrêté. Par suite, la circonstance que l'arrêté litigieux se fonde sur un avis ancien de plus de trois mois est sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour.

13. En sixième lieu, M. H...n'établit ni même n'allègue avoir adressé au préfet de la Vienne, préalablement à l'arrêté litigieux, des documents lui permettant d'apprécier son état de santé. Dans ces conditions, le préfet de la Vienne ne pouvait que se fonder sur l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, la reprise des termes de l'avis dans l'arrêté en litige, ne permet pas à elle seule d'établir que le préfet se serait estimé lié par celui-ci et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.

14. Il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif saisi de l'affaire, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et de la possibilité d'y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et la possibilité d'en bénéficier effectivement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

15. En septième lieu, il ressort de l'avis émis le 31 août 2017 que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. H...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. En l'espèce, pour fonder le refus de titre de séjour opposé à l'intéressé, le préfet de la Vienne a estimé notamment que la Géorgie dispose des soins et équipements nécessaires au traitement de la pathologie dont il souffre. M. H...fait valoir qu'il a été victime d'un infarctus du myocarde en 2013 et qu'il a subi une greffe de la cornée ainsi qu'une cure chirurgicale de sa cataracte de l'oeil droit en 2015 et que les soins dont il a besoin ne sont pas disponibles dans son pays d'origine. Il se prévaut de deux attestations du 6 mai 2017 et 8 janvier 2018 d'un docteur en médecine des sports, d'un compte-rendu opératoire établi le 11 juin 2015, d'ordonnances médicales, d'un extrait statistique mondial de l'OMS et d'un extrait du site de l'ambassade de France en Géorgie. Cependant, aucun de ces documents ne se prononce sur la disponibilité de son traitement dans son pays d'origine. Ils ne permettent donc pas d'infirmer l'appréciation portée par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, appréciation au demeurant corroborée par les pièces produites par le préfet dans le cadre de la présente instance, notamment la liste des médecins et hôpitaux et centre de santé connus de l'ambassade de France en Géorgie. Dans ces conditions et alors que M. H...n'a invoqué, à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade, aucune circonstance humanitaire exceptionnelle, les éléments qu'il produit ne suffisent pas à établir qu'il ne pourrait bénéficier en Géorgie d'un traitement approprié. Par suite, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité le préfet de la Vienne n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. En huitième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".

17. M.H..., dont l'épouse a fait l'objet le même jour d'une mesure de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, ne se prévaut d'aucune attache particulière en France et ne démontre pas y avoir développé des liens d'une intensité telle qu'un retour dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 56 ans et dans lequel réside sa mère, porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de titre de séjour opposée à M. H...n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Il s'ensuit qu'elle n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, ladite décision ne saurait davantage être regardée comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.

18. En neuvième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.

19. Si le requérant fait valoir que le préfet s'est abstenu d'examiner la possibilité d'une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort de la demande de titre de séjour qu'elle ne se fondait que sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le préfet n'était pas tenu de statuer sur la possibilité d'une admission exceptionnelle au séjour de M. H...sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen doit, par suite, être écarté.

20. En dixième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative n'est tenue de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues notamment à l'article L. 313-11 du même code, auxquels elle envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Il résulte de ce qui précède que M. H...n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en s'abstenant de saisir la commission du titre de séjour ne peut, dès lors, qu'être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

21. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M.H..., la seule circonstance que le refus de titre de séjour soit assorti d'une obligation de quitter le territoire français ne permet pas d'établir que le préfet de la Vienne se serait cru à tort obligé d'édicter une obligation de quitter le territoire français.

22. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 17 du présent arrêt, M. H...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en l'obligeant à quitter le territoire français.

23. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français qui ne fixe pas le pays de destination.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

24. En premier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les motifs énoncés au point 17.

25. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". En vertu de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

26. Si M. H...soutient qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié en Géorgie, il résulte de ce qui précède qu'il ne l'établit pas. Dès lors, M. H...n'est pas fondé à soutenir que la désignation de la Géorgie comme pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. H...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 11 décembre 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1800043 du 11 avril 2018 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. H...devant le tribunal administratif de Poitiers et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...H...et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 20 février 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mars 2019.

Le rapporteur,

Paul-André A...Le président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX01781


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX01781
Date de la décision : 22/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : BONNEAU CELINE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-22;18bx01781 ?
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