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31/12/2018 | FRANCE | N°16BX03993,17BX00801

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 31 décembre 2018, 16BX03993,17BX00801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de Pau de leur accorder la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008, ainsi que le report intégral sur l'année 2009 de la réduction d'impôt dont ils avaient bénéficié au titre de l'année 2008 et dont l'administration n'a admis qu'un report plafonné.

Par un jugement avant dire droit n° 1402557 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Pau ordonné un

e mesure d'instruction complémentaire, réservant la question du report de la réduction ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de Pau de leur accorder la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008, ainsi que le report intégral sur l'année 2009 de la réduction d'impôt dont ils avaient bénéficié au titre de l'année 2008 et dont l'administration n'a admis qu'un report plafonné.

Par un jugement avant dire droit n° 1402557 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Pau ordonné une mesure d'instruction complémentaire, réservant la question du report de la réduction d'impôt de 2008 sur 2009, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par un jugement du 19 janvier 2017, il a également rejeté les conclusions relatives au report de la réduction d'impôt.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

I/ Par une requête enregistrée le 13 décembre 2016 sous le n° 16BX03993, et un mémoire enregistré le 11 mai 2018, M. et MmeC..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit du 13 octobre 2016 du tribunal administratif de Pau ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales imposait à l'administration de les informer de l'origine des renseignements recueillis, ce qu'elle n'a pas fait en l'espèce ; ce défaut d'information est révélé par les disparités quant aux dates d'exercice du droit de communication mentionnées par l'administration fiscale d'une part et par les attestations d'EDF d'autre part ; ils ne sont pas détenteurs des demandes de raccordement et des attestations " Consuel " ; les formulaires de droit de communication des 27 octobre 2011 et 31 août 2011 ne permettent pas d'identifier les sociétés en nom collectif (SNC) exploitantes ayant fait l'objet du droit de communication, ou leur lien avec les attestations EDF les concernant ; il n'est donc pas établi que les renseignements qui leur sont opposés sont issus de ces procédures ;

- la procédure de demande de renseignements mise en oeuvre, par son ampleur et les investigations menées, excède les possibilités offertes à l'administration par l'article L. 81 du livre des procédures fiscales ; la mise en oeuvre du droit de communication a donc été irrégulière ; en effet, les attestations ont été élaborées à une grande échelle par EDF à la demande de l'administration, ce qui a nécessité un travail de recensement et de recoupement ; or l'administration pouvait seulement exiger la communication de documents existants ;

- cette circonstance atteste d'une méconnaissance du principe de loyauté des débats et d'administration de la preuve, qui s'impose à l'administration ;

- l'administration a violé les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en obtenant de manière contraignante des informations dont il était impossible aux contribuables de disposer ;

- les attestations et les informations qu'elles contiennent leur sont donc inopposables ; elles ne sont opposables qu'aux SNC en raison du principe d'indépendance des procédures de contrôle ; de surcroît ces attestations ne sont pas signées et sont dépourvues de force probante ;

- la condition d'exploitation effective des investissements ne constitue pas une condition de réalisation du fait générateur de la réduction d'impôt ; cette interprétation n'est pas conforme aux dispositions de l'article 199 undecies B du code général et des impôts et de l'article 95 Q de l'annexe II au code ; elle est également contraire à la jurisprudence du Conseil d'Etat et à la volonté du législateur ;

- le raccordement au réseau ne constitue pas la date de réalisation des immobilisations ; il résulte de l'avis du Conseil d'Etat du 13 avril 2006 que les investissements productifs sont des immobilisations corporelles neuves et amortissables ; la doctrine administrative lie le point de départ de l'amortissement à la mise en service ;

- les SNC louent les centrales aux sociétés locataires avant leur raccordement au réseau et le coût de raccordement ne fait pas partie du prix de vente des centrales ; l'administration ne peut logiquement considérer que les centrales doivent être livrées raccordées au réseau ;

- ils sont en tout état de cause fondés à se prévaloir de l'instruction 5 B-2-07 du 30 janvier 2007.

Par des mémoires enregistrés les 31 mai 2016 et 2 juillet 2017, le ministre du budget et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest), conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 15 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 juillet 2018 à 12h00.

Un mémoire présenté pour M. et Mme C...le 7 décembre 2018 n'a pas été communiqué.

II/ Par une requête enregistrée le 20 mars 2017 sous le n° 17BX00801, M. et Mme C..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 janvier 2017 du tribunal administratif de Pau ;

2°) de leur accorder une réduction supplémentaire d'impôt sur le revenu de 22 055 euros au titre de l'année 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la remise en cause du prix d'acquisition des centrales photovoltaïques retenu comme valeur d'inscription à l'actif doit être établie en fonction de leur valeur vénale à la date de leur acquisition, en 2008, et non en 2009 ; or, pour justifier du prix du marché en 2008, l'administration n'a produit aucune facture ;

- le prix moyen pratiqué n'a pas été établi pour des centrales de gamme et de puissance comparables commercialisées dans le département ; les termes de comparaison retenus ne sont pas pertinents ;

- la seule présentation de quatre factures par l'administration, qui supporte la charge de la preuve, ne permet pas d'établir que le prix d'acquisition a été surévalué ; elle n'a effectué son droit de communication qu'auprès d'un seul fournisseur ; elle n'a pas fait connaître sa méthode de calcul ; de ce qu'il apparaît, cette méthode est viciée et n'est pas pertinente ; aucune des factures qu'elle présente ne comprend le coût de maintenance et du service après-vente des centrales ;

- les dispositions du 17ème alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts ne permettaient pas à l'administration de procéder à la correction de la valeur d'inscription à l'actif des immobilisations acquises par les SNC ;

- l'administration connaissait la problématique de la surfacturation avant l'examen de leur réclamation et avant même l'envoi de la proposition de rectification ; elle ne pouvait donc limiter le quantum de leur demande en faisant jouer la compensation prévue à l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ;

- les informations issues de la vérification de comptabilité de la société SFER leurs sont inopposables ; il en va de même des propositions de rectification adressées aux SNC Sungest 46 à 50 ;

- l'administration ne peut tenir compte d'une valeur corrigée des immobilisations sans avoir corrigé les valeurs d'inscription à l'actif des immobilisations chez les sociétés Sungest 46 à 50.

Par un mémoire enregistré le 31 mai 2017, le ministre du budget et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest), conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 28 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mai 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ;

- le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et MmeC..., associés des sociétés en nom collectif (SNC) Sungest 46 à 50 et Sunenergy 13 à 15, ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies du code général des impôts, des réductions d'impôt afférentes à des investissements réalisés à La Réunion par l'intermédiaire de ces sociétés, consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à d'autres sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique. L'administration fiscale a remis partiellement en cause la réduction d'impôt afférente à l'année 2008 et relative à l'investissement réalisé par l'intermédiaire des SNC Sungest 46 à 50, n'admettant son report sur l'année 2009 que de manière plafonnée au regard du prix normal du marché, et elle a remis en cause intégralement la réduction dont avaient bénéficié les contribuables au titre de 2009 s'agissant de l'investissement réalisé par l'intermédiaire des SNC Sunenergy 13 à 15. M. et Mme C...relèvent appel des jugements des 13 octobre 2016 et 19 janvier 2017 par lesquels le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009 pour un montant de 76 700 euros en droits et pénalités et, d'autre part, à l'octroi d'une réduction supplémentaire d'impôt de 22 055 euros au titre de la même année.

2. Les requêtes nos 16BX03993 et 17BX00801 de M. et Mme C...présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur la remise en cause de la réduction d'impôt imputée sur l'impôt sur le revenu dû au titre de 2009 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l' article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

4. Il résulte des termes de la proposition de rectification du 22 octobre 2012 que les demandes adressées par l'administration à EDF dans le cadre de son droit de communication avaient pour objet d'obtenir des informations sur l'existence et les dates de raccordement effectif des installations concernées au réseau public d'électricité, et que les attestations d'EDF jointes à la proposition de rectification se limitaient à récapituler des données issues de documents de service d'EDF qui n'ont nécessité ni retraitement ni investigations particulières de la part de l'opérateur et qui entraient ainsi dans la catégorie des documents de service au sens des dispositions de l'article L. 83 précitée du livre des procédures fiscales. En outre, les demandes de communication adressées par l'administration fiscale à EDF ont pu régulièrement porter sur plusieurs années d'imposition non prescrites. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration aurait irrégulièrement obtenu d'EDF, dans l'exercice du droit de communication, la production de témoignages écrits destinés à être exploités à leur encontre.

5. De plus, l'administration n'était pas tenue d'indiquer les modalités d'exercice du droit de communication, notamment la date des demandes de communication, et la circonstance qu'une erreur matérielle ait pu, le cas échéant, être commise par EDF sur les dates des différentes demandes de communication était sans incidence sur l'obligation d'information qui pèse sur l'administration. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que, pour établir les motifs et le montant des redressements contestés, l'administration aurait eu recours à d'autres éléments ni qu'elle aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers. Il en résulte que l'administration s'est régulièrement acquittée de son obligation d'information au sens de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en annexant à la proposition de rectification les attestations d'EDF indiquant la teneur des informations demandées avec une précision suffisante et mentionnait l'identité du tiers qui avait communiqué à l'administration les renseignements en cause, en l'occurrence la date de demande de raccordement et les SNC exploitantes ayant demandé un raccordement.

6. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. ". Aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'État, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'État, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel (...). ".

7. Il résulte de ces dispositions que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales a seulement pour objet de lui permettre, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement, au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela ne nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Ce droit de communication ne s'exerce que sur des documents de service que les personnes destinataires des demandes de l'administration fiscale détiennent du fait de leur activité. Un document de service au sens des dispositions précitées de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales s'entend de tout document ou donnée élaboré dans le cadre des missions de l'organisme à raison desquelles celui-ci est regardé comme soumis au contrôle de l'autorité administrative.

8. En l'occurrence, les demandes adressées par l'administration à Electricité de France dans le cadre de son droit de communication ont eu pour seul objet d'obtenir des informations sur les dates auxquelles les dossiers de demande de raccordement des installations concernées au réseau public d'électricité ont été regardés comme complets, les dates de réception par Electricité de France du certificat du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité et les dates de raccordement effectif des installations concernées au réseau public d'électricité. Ces données brutes, reportées dans les tableurs fournis par l'administration à Electricité de France, étaient détenues par celle-ci dans le cadre de ses obligations de service et n'ont nécessité ni retraitement de données ni investigations particulières de la part de l'opérateur. Ainsi, alors même qu'ils ont été remis à quatre reprises à l'administration sous forme d'un tableau, les documents et renseignements transmis par Electricité de France constituent des documents de service au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 83 précité du livre des procédures fiscales. Le contenu des attestations délivrées par l'opérateur se limitait également à des données issues de documents de service. La circonstance que la qualité du signataire ne figurait pas sur les attestations établies par Electricité de France n'interdisait pas à l'administration fiscale de relever les informations qui y figuraient pour proposer les rectifications dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire. En outre, leur exploitation par l'administration fiscale ne saurait être regardée comme contraire au principe de loyauté. Par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que l'administration aurait excédé les pouvoirs que lui confère le droit de communication mentionné à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales.

9. En troisième lieu, l'imposition litigieuse ne procède pas du rehaussement du résultat imposable des sociétés en nom collectif à l'origine des investissements mais résulte uniquement du contrôle sur pièces des déclarations de revenus des associés, lesquels ont au demeurant bénéficié des garanties de la procédure contradictoire de rectification. La remise en cause d'une réduction d'impôt sur le revenu à l'occasion d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus d'associés de sociétés relevant de l'article 8 du code général des impôts n'imposait pas au service de procéder préalablement à la vérification de comptabilité des sociétés ayant réalisé l'investissement éligible au régime de faveur. Ainsi à supposer que les requérants aient entendu soulever un moyen tiré de ce qu'en opposant à l'associé les erreurs comptables qui auraient été commises par les sociétés lors de l'inscription à l'actif des immobilisations litigieuses sans avoir suivi préalablement la procédure de vérification de comptabilité, le service aurait violé le principe d'indépendance des procédures d'imposition, ce moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

10. Enfin, M. et Mme C...ne peuvent utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et invoquer, sur ce fondement, l'atteinte au principe d'égalité des armes pour contester la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu devant le juge de l'impôt, dès lors que ces stipulations ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

11. D'une part, aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant (...) une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige: " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".

12. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.

13. Il résulte de l'instruction et n'est pas contesté par les contribuables qu'à la date du 31 décembre 2009 aucun certificat de conformité n'avait été délivré pour les SNC Sunenergy 13 à 15 par l'organisme agréé que constitue le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité au cours de l'année 2009. Si M. et Mme C...soutiennent que ces conditions ne seraient pas requises par les textes en vigueur, ces faits, tels que rappelés par l'administration, constituent des indices de l'absence de livraison effective des équipements photovoltaïques et ne révèlent pas que le service aurait entendu ajouter aux dispositions de la loi fiscale des conditions qui n'y figurent pas. Pour leur part, les contribuables n'apportent aucun élément de nature à infirmer le constat sur lequel s'est fondée l'administration, qui n'a pas fondé le redressement contesté sur la comptabilité des sociétés en participation, ainsi qu'il a été dit, mais sur les faits décrits ci-dessus. Dans ces conditions, les installations photovoltaïques en cause ne pouvant ni être effectivement exploitées ni être productives de revenus à la date du 31 décembre 2009, l'administration a pu à bon droit estimer que les investissements déclarés par les requérants ne pouvaient être regardés comme ayant été effectivement réalisés au cours de l'année 2009 et remettre en cause la réduction d'impôt au titre de cette année.

14. D'autre part, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 148 de l'instruction référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, laquelle ne comporte, en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application ci-dessus.

Sur le report en 2009 de la réduction d'impôt initialement imputée sur l'impôt dû au titre de 2008 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

15. L'administration est en droit à tout moment de la procédure contentieuse de procéder, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, à une substitution de base légale, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition. Dans le cas où l'administration a utilisé des documents ou des renseignements obtenus de tiers pour fonder le redressement au titre de la nouvelle base légale dont elle se prévaut au cours de la procédure contentieuse, il lui appartient d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur de ces documents ou de ces renseignements, dans des délais permettant à l'intéressé d'en demander, le cas échéant, la communication et le mettant à même, après celle-ci, de présenter utilement ses observations.

16. A supposer que M. et Mme C...doivent être regardés comme contestant les conditions dans lesquelles l'administration procédé à un report partiel sur l'année 2009 de la réduction d'impôt afférente aux SNC Sungest 46 à 50 dont ils avaient bénéficié au titre de 2008, il résulte de l'instruction que le principe de ce report a été porté à leur connaissance par le service au moyen d'une décision en date du 24 mai 2013. Toutefois, après avoir substitué le dix-septième alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'article 16 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer au vingtième alinéa du même article initialement retenu comme fondement de la rectification, elle a limité le montant de ces investissements à la somme de 16 716 euros au motif que le prix d'acquisition de ces centrales photovoltaïques était supérieur au prix du marché. Il ressort des termes de cette décision que le service a informé M. et Mme C...de ce que des factures obtenues auprès du principal concurrent de la société Sfer, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication lors de la procédure de vérification de comptabilité de cette société auprès de laquelle les centrales photovoltaïques en cause avaient été acquises par les SNC susmentionnées dont les contribuables sont associés, lui avaient permis de déterminer le prix de revient moyen des centrales photovoltaïques par Watt-crête qui s'élevait en 2008 à 5,85 euros. Elle a ainsi fait connaître aux contribuables la méthode de calcul utilisée afin de déterminer la valeur vénale des centrales photovoltaïques. L'administration a joint à son mémoire du 10 novembre 2016 produit devant le tribunal les quatre factures émises en 2008 par la société Tenesol ainsi qu'un tableau recensant dix-huit factures obtenues auprès d'autres fournisseurs de La Réunion dans le cadre de l'exercice du droit de communication. Par suite, M. et Mme C...étaient suffisamment informés de l'origine et de la teneur des renseignements sur lesquels l'administration s'était appuyée pour retenir le nouveau fondement légal justifiant la remise en cause partielle de la réduction d'impôt et ont ainsi été mis à même de présenter utilement leurs observations au cours de la procédure contentieuse. En tout état de cause, ils ne peuvent se plaindre qu'en leur qualité de souscripteurs au capital des SNC, ils n'étaient pas en mesure de débattre de la valeur vénale des centrales photovoltaïques.

17. En outre, M. et MmeC..., qui avaient bénéficié des garanties de la procédure de rectification contradictoire concernant l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2008, n'ont pas été privés des garanties inhérentes à la nouvelle base légale retenue par le service, même si le report partiel de la réduction d'impôt sollicitée au titre de l'année 2009 n'a pas donné lieu à une proposition de rectification. L'administration n'était pas tenue au préalable de contrôler la comptabilité des SNC dont les requérants étaient associés, ni d'informer ces sociétés de la remise en cause de la valeur vénale des centrales photovoltaïques.

En ce qui concerne le calcul de la réduction :

18. En premier lieu, aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande. ". Il résulte de ces dispositions que la compensation n'est légalement possible qu'entre les dégrèvements et les insuffisances ou omissions affectant les impositions relatives à des revenus d'une même année.

19. En admettant le principe de la réduction d'impôt dont entendaient bénéficier les contribuables, non pas au titre de l'année 2008 sollicitée, mais au titre de l'année 2009 au cours de laquelle les investissements en cause ont été considérés comme réalisés, l'administration n'a pas entendu effectuer une compensation au sens des dispositions précitées de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, mais a seulement tiré les conséquences, sur l'imposition primitive due au titre de 2009, de la circonstance que les conditions pour bénéficier de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts étaient remplies au titre de ladite année. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration a méconnu ces dispositions doit être écarté comme inopérant.

20. En second lieu, le I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 16 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer prévoit, que " Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...), dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale (...) / La réduction d'impôt est de 50 % du montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport, d'installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique. Les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. (...) Ces taux sont majorés de dix points pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d'énergie renouvelable (...) / Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 (...) ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement (...) ". L'article 95 K de l'annexe II au code général des impôts prévoit que les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B sont " les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article ". Aux termes du 1 de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat minoré des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des coûts directement engagés pour la mise en état d'utilisation du bien (...) ".

21. Il résulte de ces dispositions que le montant des investissements productifs à prendre en compte pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier un associé d'une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 du code général des impôts est en principe calculé à partir de la valeur pour laquelle l'immobilisation en cause est inscrite au bilan de cette société en application de l'article 38 quinquies de l'annexe III à ce code. Toutefois, l'administration peut apporter la preuve que cette valeur est surévaluée par rapport au prix normal du marché. Dans ce cas, elle peut se fonder sur la valeur de l'immobilisation rectifiée, quand bien même cette rectification n'est pas opérée dans la comptabilité de la société, non seulement pour remettre en cause la déductibilité du montant des amortissements pratiqués par la société qui en est propriétaire, mais aussi pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier l'associé de la société en application de l'article 199 undecies B.

22. D'une part, il résulte de l'instruction que l'administration, pour évaluer le montant de la réduction d'impôt dont les requérants sont en droit de bénéficier par report sur l'année 2009 au cours de laquelle est intervenu le raccordement au réseau électrique, a pris en considération, ainsi qu'il lui appartenait de le faire, le prix normal du marché non pas en 2009 mais bien en 2008, année d'acquisition des matériels.

23. D'autre part, pour démontrer que le prix des centrales photovoltaïques facturé par la société Sfer aux SNC dont les requérants étaient associés était supérieur au prix du marché, le service s'est notamment fondé sur quatre factures produites en première instance par l'administration et émanant de la société Tenesol, qui est l'un des principaux concurrents de la société Sfer, et concernant la vente en 2008 de quatre centrales photovoltaïques d'une puissance maximale de 18 620, 35 200 et 36 000 watts-crêtes pour deux d'entre elles correspondant respectivement au prix de 108 927 euros hors taxes, 205 920 euros hors taxes et 210 600 euros hors taxes. De ces quatre termes de comparaison, le service a déduit un prix de revient moyen par watt-crête de 5,85 euros. Une comparaison a ensuite été établie entre ce prix, confirmé par les informations communiquées par d'autres fournisseurs dans le cadre de l'exercice du droit de communication, et le prix de revient moyen par watt-crête facturé par la société SFER aux SNC dont les requérants étaient associés pour des centrales photovoltaïques d'une puissance de 108 000 watts crêtes et qui s'élevait à 13,43 euros. L'administration a ainsi suffisamment justifié de la réalité de la surfacturation tandis que les requérants se bornent à contester la méthode retenue par l'administration et la précision ou la pertinence des éléments qu'elle a produits sans apporter d'éléments justifiant cette différence de prix ni proposer de méthode de calcul alternative. Par suite, le moyen selon lequel l'administration n'apporte pas la preuve d'une surfacturation ne peut qu'être écarté.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

M. David Katz, premier conseiller,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 décembre 2018.

Le premier conseiller,

David KATZ Le président,

Laurent POUGET Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N os 16BX03993, 17BX00801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03993,17BX00801
Date de la décision : 31/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. POUGET L.
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SELARL DGM et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-31;16bx03993.17bx00801 ?
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