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08/08/2018 | FRANCE | N°16BX01997

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 08 août 2018, 16BX01997


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Vices et Versa a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajouté ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1401458 du 14 avril 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17

juin 2016, la société Vices et Versa, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Vices et Versa a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajouté ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1401458 du 14 avril 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 juin 2016, la société Vices et Versa, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 avril 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le contrôle fiscal mis en oeuvre le 16 janvier 2010 n'a été précédé de l'envoi ni d'un avis de vérification préalable ni de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié alors que les opérations effectuées excèdent le champ du contrôle sur pièces et sont assimilables à une vérification de comptabilité inopinée ; l'heure d'intervention du contrôle, entre 2h45 et 3h30, démontre qu'il ne peut s'agir d'un contrôle de billetterie au sens de L. 26 du livre des procédures fiscales ;

- le dégrèvement dont l'administration a informé le tribunal dans un mémoire enregistré le 26 février 2013 n'a fait l'objet d'aucun avis qui lui aurait été directement notifié, de sorte que la procédure suivie postérieurement est viciée ;

- la lettre du 29 avril 2013 informant son gérant des conséquences financières de l'interlocution départementale n'a pas été signée par l'interlocuteur départemental lui-même, ce qui a pour effet d'entacher d'irrégularité l'avis de mise en recouvrement du 17 juin 2013 ;

- la reconstitution de recettes n'est pas justifiée dès lors que la comptabilité est régulière et probante ; les points reprochés sont mineurs ; le rejet de la comptabilité ne repose que sur l'absence de billetterie à l'entrée de l'établissement ; cette anomalie a été compensée par la distribution de cartes numérotées sur lesquelles sont notées toutes les consommations servies ; eu égard à l'activité réduite de la société en 2007 et 2008, l'absence d'inventaire des stocks est anodine ; pour 2009 les stocks ont fait l'objet d'un inventaire détaillé le 31 décembre 2009 ;

- le pourcentage de pertes et offerts aurait dû être fixé à 10 %.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 9 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 9 mai 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

-le code du commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caroline Gaillard ;

- et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Vices et Versa, qui exploite un bar discothèque sous l'enseigne Studio 21, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, à l'issue de laquelle ont été mis à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés d'un montant de 67 495 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009 La société Vices et Versa relève appel du jugement du 14 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la procédure d'imposition :

2. La société Vices et Versa reprend en appel, sans faire valoir d'argument nouveau et sans critique utile du jugement à cet égard, les moyens tirés de l'irrégularité de la notification de l'avis de mise en recouvrement initial émis le 14 octobre 2011 et de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement du 17 juin 2013. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

3. Aux termes de l'article L. 26 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration peuvent intervenir, sans formalité préalable et sans que leur contrôle puisse être retardé, dans les locaux professionnels des personnes soumises, en raison de leur profession, à la législation des contributions indirectes ou aux législations édictant les mêmes règles en matière de procédure et de recouvrement, pour y procéder à des inventaires, aux opérations nécessaires à la constatation et à la garantie de l'impôt et généralement aux contrôles qualitatifs et quantitatifs prévus par ces législations. (...) ". L'article L. 27 du même livre dispose que : " Quand il n'existe pas de dispositions particulières, les visites et vérifications prévues à l'article L. 26 ont lieu seulement dans les locaux affectés à l'exercice de la profession ou de l'activité qui fait l'objet du contrôle et dans les annexes et dépendances des mêmes locaux, pendant les intervalles de temps ci-après : 1° Pendant les mois de janvier, février, novembre et décembre, depuis 7 heures du matin jusqu'à 6 heures du soir (...) ".

4. La société Vices et Versa soutient que le 16 janvier 2010 à 2 heures 45 du matin, la brigade de contrôle et de recherches de Bordeaux s'est présentée au lieu et siège de son établissement en déclarant qu'elle allait procéder, en application de l'article L. 26 du livre des procédures fiscales, à un contrôle de la billetterie. Elle fait valoir que, compte tenu des modalités de cette intervention, ce contrôle correspond en réalité à une vérification de comptabilité inopinée, anticipant celle dont elle a été avisée officiellement le 26 mai 2010. Elle en déduit que cette dernière vérification se trouve entachée d'un vice de procédure substantiel entraînant sa nullité, dès lors qu'elle aurait dû se voir délivrer, dès le 16 janvier 2010, un avis de vérification de comptabilité et la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.

5. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal dressé le 1er mars 2010 à la suite du contrôle du 16 janvier 2010, lequel a été signé par le gérant de la société, que le service s'est limité aux seules constatations matérielles ayant permis de mettre en évidence les irrégularités affectant le fonctionnement de la billetterie, à savoir l'absence de journal de recettes de la billetterie et de caisse enregistreuse, et qu'il n'a nullement été procédé à des contrôles de cohérence entre les écritures comptables et les pièces justificatives. Dès lors, le contrôle en cause ne constitue pas un début de vérification de comptabilité.

6. Les irrégularités qui affectent les opérations de contrôle effectuées sur le fondement de l'article L. 26 du livre des procédures fiscale sont sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition, sauf si celle-ci a eu pour seule fin de permettre des redressements fiscaux en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, la circonstance que le contrôle de la billetterie du 16 janvier 2010 a eu lieu entre 2 heures 45 et 3 heures 30 du matin est sans influence sur la régularité des impositions contestées.

7. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 26 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le caractère non probant de la comptabilité :

8. Aux termes de l'article 290 quater du code général des impôts : " I Sur les lieux où sont organisés des spectacles comportant un prix d'entrée, les exploitants doivent délivrer un billet à chaque spectateur ou enregistrer et conserver dans un système informatisé les données relatives à l'entrée, avant l'accès au lieu du spectacle. Les modalités d'application du premier alinéa, notamment les obligations incombant aux exploitants d'un lieu de spectacles, ainsi qu'aux fabricants, importateurs ou marchands de billets d'entrée, sont fixées par arrêté. II Lorsqu'ils ne délivrent pas de billets d'entrée et qu'ils ne disposent pas d'un système informatisé prévu au I, les exploitants de discothèques et de cafés-dansants sont tenus de remettre à leurs clients un ticket émis par une caisse enregistreuse. (...) ". Aux termes de l'article R. 123-73 du code de commerce : " Tout commerçant tient obligatoirement un livre-journal, un grand livre et un livre d'inventaire ".

9. Il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal établi le 24 août 2010, que le vérificateur a relevé le défaut de présentation de certains documents ou pièces comptables, et notamment l'absence d'inventaire des stocks au 1er janvier 2007, au 31 décembre 2007 et au 31 décembre 2008, l'absence de caisse enregistreuse et de délivrance de billets, et l'absence de relevés journaliers et de détail des recettes, en méconnaissance des dispositions précitées des articles R. 123-73 du code de commerce et 290 quater du code général des impôts . La délivrance aux clients de l'établissement de cartes numérotées sur lesquelles étaient enregistrées leurs consommations et qui tenaient lieu de tickets de caisse ne saurait pallier l'absence de délivrance de billets d'entrée. Eu égard à la gravité de ces irrégularités, l'administration a pu rejeter la comptabilité présentée par la société Vices et Versa comme dépourvue de caractère probant.

En ce qui concerne la reconstitution de recettes :

10. Il résulte de l'instruction que le vérificateur, après avoir déterminé la proportion de recettes relatives à l'activité du bar et celle des droits d'entrée, a procédé à la reconstitution des recettes du bar à partir des achats de boissons consommées au titre de 2009. En l'absence de délivrance de billets d'entrée, le vérificateur a déterminé le ratio recettes des boissons servies sur les recettes totales, à partir d'un échantillon des encaissements effectués par carte bancaire et justifiés par une facture. La proportion des recettes du bar par rapport à celle des billets d'entrée a été établie à 77 %. A partir des achats de boissons revendus, il a déterminé les quantités vendues auxquelles il a appliqué un prix de vente à la dose ou à la bouteille afin de reconstituer les recettes taxables du bar. Suivant les éléments d'information fournis par le gérant de la société, il a retenu un taux de réfaction général de 5 % au titre des pertes et des consommations offertes aux clients. Le vérificateur a, en outre, retenu un pourcentage des offerts de boissons Red Bull de 50 % et un nombre de bouteilles de champagne de marque Lafitte offertes de 104 sur les 1 064 revendues au cours de l'année 2009.

11. La société Vices et Versa, qui ne conteste pas la méthode utilisée pour reconstituer ses recettes ni les données chiffrées retenues par le vérificateur, persiste à soutenir que le pourcentage retenu pour les pertes et offerts doit être porté à 10 % a minima pour tenir compte des usages de la profession. Toutefois, et alors qu'il a été tenu compte des particularités de fonctionnement de l'établissement, la société requérante n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré de la reconstitution des recettes pour la période en litige.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Vices et Versa n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société Vices et Versa la somme qu'elle réclame sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Vices et Versa est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vices et Versa et au ministre de l'action et des comptes publics.Copie en sera délivrée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 août 2018.

Le rapporteur,

Caroline Gaillard

Le président,

Marianne PougetLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 16BX01997


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01997
Date de la décision : 08/08/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : CABINET SIRIEZ - ADVEO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-08-08;16bx01997 ?
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