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27/07/2018 | FRANCE | N°16BX02056,16BX02100

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 27 juillet 2018, 16BX02056,16BX02100


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Atena a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la réduction, à hauteur respectivement de 7 888 euros, de 8 440 euros, de 15 330 euros et de 15 363 euros, des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014, à raison d'un entrepôt situé Quai de la Grye, à La Rochelle, et de la décharger de la majoration de 5 % appliquée au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1302108, 1501564 du 28 avril 2016, l

e tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes.

Procédure devant la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Atena a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la réduction, à hauteur respectivement de 7 888 euros, de 8 440 euros, de 15 330 euros et de 15 363 euros, des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014, à raison d'un entrepôt situé Quai de la Grye, à La Rochelle, et de la décharger de la majoration de 5 % appliquée au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1302108, 1501564 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée le 23 juin 2016 sous le n° 16BX02056, et des mémoires enregistrés les 4 août 2016 et 26 mai 2017, la SAS Atena, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il rejette ses conclusions relatives à la cotisation foncière des entreprises des années 2013 et 2014 ;

2°) de faire droit à ses conclusions à fin de décharge partielle des cotisations foncières des entreprises au titre de 2013 et 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration ne justifie pas de la légalité et du fondement de la pénalité de 462 euros relative à l'année 2014 ;

- comparer l'entrepôt n° 14 avec le local-type n° 58 est incohérent ; ils diffèrent par la surface, la localisation, la qualité des matériaux et l'état général ; les zones de commercialités différent également ; à tout le moins convenait-il d'appliquer un coefficient de pondération par application de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts ;

- l'administration a accordé des dégrèvements de taxe foncière au propriétaire du hangar, le Grand Port Maritime de La Rochelle au titre des années 2011 à 2014 en appliquant au tarif du local-type n° 58 une pondération de 20 % ; il convenait qu'elle procède de même en l'espèce ;

- en revanche, le local-type n° 137 aurait fort bien pu servir de local de comparaison ; il fait partie de la même catégorie 2 et est également situé au port de La Pallice ; un autre entrepôt de même dimension a été évalué par comparaison avec ce local-type ;

- dès lors que le local-type n° 58 n'existe plus depuis 2014 et que l'administration refuse la référence au local-type n° 137, seule la méthode d'évaluation directe peut être retenue, à défaut de termes de comparaison adéquats ;

- de plus ses entrepôts forment un groupement topographique incluant notamment le hangar Finamur, qui peut servir de référence ; il est en effet situé à proximité, et les deux bâtiments sont affectés à la même activité de stockage ;

- la valeur vénale à retenir est ainsi celle du coût de reconstruction du hangar n° 14, soit 259 163 euros ; le taux d'intérêt correspondant au taux des placements immobiliers des locaux commerciaux à La Rochelle au 1er janvier 1970 est de 6 % ; les abattements à retenir sont de 50 % au titre de la dépréciation immédiate du bien, quand bien même le local à évaluer n'est pas un silo à grains, de 10 % au titre de sa vétusté et de 10 % pour tenir compte de sa superficie, de sa situation et de son affectation ; ces abattements sont justifiés alors même que le local peut être affecté au stockage de tout type de produit ; la valeur locative au 1er janvier 1970 ressort ainsi à 3 527 euros ; ces critères d'évaluation sont inspirés des décisions de plusieurs experts.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 novembre 2016 et 30 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la pénalité de 462 euros concerne la cotisation pour 2012 ;

- le procès-verbal de révision quinquennale des évaluations foncières signé le 25 septembre 1972 consacre pour la première fois une délimitation en zones de commercialité ; les locaux types sont répertoriés selon leur destination ;

- dans la catégorie des ateliers et hangars, le local-type n° 58 est le seul qui se rapproche du local à évaluer par sa destination et sa superficie ; son choix se justifie aussi par la similarité, en 1970, de la situation d'activité ; le contexte économique réel est aujourd'hui inversé par rapport à la situation des zones de commercialité définies en 1972 ; de plus, les différences de situation géographique et d'état ont été prises en considération par l'application d'un coefficient d'ajustement dont la valeur n'est pas contestée ; le local-type n° 58 n'était pas démoli au 1er janvier 2014 ;

- le local-type n° 137 n'a pas la même affectation que le local à évaluer ; ainsi sa prise en compte n'est pas pertinente, quand bien même il se situe dans la même zone de commercialité ;

- la configuration et la superficie des locaux priment sur la situation dès lors que les locaux se situent dans la même localité ;

- si le local Finamur a été évalué par voie d'appréciation directe c'est en raison de sa dimension hors norme ; le local à évaluer ne présente pas les mêmes caractéristiques ; au demeurant l'évaluation directe proposée est entachée d'une erreur d'appréciation du taux d'abattement, dans la mesure où la requérante se réfère à un silo à grain, activité qui entraîne une dépréciation plus rapide des structures, les locaux ayant par ailleurs reçu un aménagement propre, ce qui n'est pas le cas du hangar 14 ; la prise en compte de la vétusté ou de la superficie du local n'est pas justifiée ;

- le local n° 14 ne forme pas un groupement topographique avec le hangar Finamur ;

- la société ne peut se prévaloir de l'abattement de 20 % pratiqué pour le calcul des bases de la taxe foncière à laquelle a été assujetti le propriétaire du bâtiment.

Par une ordonnance en date du 3 juillet 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 9 août 2017 à 12 heures.

Une note en délibéré, présentée pour la SAS Atena, a été enregistrée le 7 juillet 2018.

II) Par une requête enregistrée le 28 juin 2016 sous le n° 16BX02100, et des mémoires enregistrés les 4 août 2016, 26 mai 2017 et 12 juin 2018, la SAS Atena, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il rejette ses conclusions relatives à la cotisation foncière des entreprises des années 2011 et 2012 ;

2°) de faire droit à ses conclusions à fin de décharge partielle des cotisations foncières des entreprises au titre de 2011 et 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- comparer l'entrepôt n° 14 avec le local-type n° 58 est incohérent ; ils diffèrent par la surface, la localisation, la qualité des matériaux et l'état général ; les zones de commercialités différent également ; à tout le moins convenait-il d'appliquer un coefficient de pondération par application de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts ;

- l'administration a accordé des dégrèvements de taxe foncière au propriétaire du hangar, le Grand Port Maritime de La Rochelle au titre des années 2011 à 2014 en appliquant au tarif du local-type n° 58 par application d'une pondération de 20 % ; il convenait qu'elle procède de même en l'espèce ;

- en revanche, le local-type n° 137 aurait fort bien pu servir de local de comparaison ; il fait partie de la même catégorie 2 et est également situé au port de La Pallice ; un autre entrepôt de même dimension a été évalué par comparaison avec ce local-type ;

- dès lors que le local-type n° 58 n'existe plus depuis 2014 et que l'administration refuse la référence au local-type n° 137, seule la méthode d'évaluation directe peut être retenue, à défaut de termes de comparaison adéquats ;

- de plus ses entrepôts forment un groupement topographique incluant notamment le hangar Finamur, qui peut servir de référence ; il est en effet situé à proximité, sur la même parcelle cadastrale EZ ; les deux bâtiments sont affectés à la même activité de stockage ;

- la valeur vénale à retenir est ainsi celle du coût de reconstruction du hangar 14, soit 259 163 euros ; le taux d'intérêt correspondant au taux des placements immobiliers des locaux commerciaux à La Rochelle au 1er janvier 1970 est de 6 % ; les abattements à retenir sont de 50 % au titre de la dépréciation immédiate du bien, quand bien même le local à évaluer n'est pas un silo à grains, de 10 % au titre de sa vétusté et de 10 % pour tenir compte de sa superficie, de sa situation et de son affectation ; ces abattements sont justifiés alors même que le local peut être affecté au stockage de tout type de produit ; la valeur locative au 1er janvier 1970 ressort ainsi à 3 527 euros ; ces critères d'évaluation sont inspirés des décisions de plusieurs experts ;

- s'agissant de la majoration de 5 % de l'acompte appliqué au titre de 2012, elle est fondée à se prévaloir des mentions du § 40 du BOFIP BOI-IF-CFE-40-10, qui permet au contribuable de réduire son acompte lorsqu'il a demandé le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée de sa CET de l'année précédente ; dès que l'application de cette mesure conduit à un acompte de CFE inférieur à 3 000 euros, elle était dispensée de tout paiement d'acompte.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 novembre 2016 et 30 juin 2017, le ministre de l'action et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le procès-verbal de révision quinquennale des évaluations foncières signé le 25 septembre 1972 consacre pour la première fois une délimitation en zones de commercialité ; les locaux types sont répertoriés selon leur destination ;

- dans la catégorie des ateliers et hangars, le local-type n° 58 est le seul qui se rapproche du local à évaluer par sa destination et sa superficie ; son choix se justifie aussi par la similarité, en 1970, de la situation d'activité ; le contexte économique réel est aujourd'hui inversé par rapport à la situation des zones de commercialité définies en 1972 ; de plus, les différences de situation géographique et d'état ont été prises en considération par l'application d'un coefficient d'ajustement dont la valeur n'est pas contestée ; le local-type n° 58 n'était pas démoli au 1er janvier 2014 ;

- le local-type n° 137 n'a pas la même affectation que le local à évaluer ; ainsi sa prise en compte n'est pas pertinente, quand bien même il se situe dans la même zone de commercialité ;

- la configuration et la superficie des locaux priment sur la situation dès lors que les locaux se situent dans la même localité ;

- si le local Finamur a été évalué par voie d'appréciation directe c'est en raison de sa dimension hors norme ; le local à évaluer ne présente pas les mêmes caractéristiques ; au demeurant l'évaluation directe proposée est entachée d'une erreur d'appréciation du taux d'abattement, dans la mesure où la requérante se réfère à un silo à grain, activité qui entraîne une dépréciation plus rapide des structures, les locaux ayant par ailleurs reçu un aménagement propre, ce qui n'est pas le cas du hangar 14 ; la prise en compte de la vétusté ou de la superficie du local n'est pas justifiée ;

- le local n° 14 ne forme pas un groupement topographique avec le hangar Finamur ;

- la société ne peut se prévaloir de l'abattement de 20 % pratiqué pour le calcul des bases de la taxe foncière à laquelle a été assujetti le propriétaire du bâtiment.

Par une ordonnance en date du 12 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 juin 2018 à 12 heures.

Un mémoire présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, enregistré le 26 juin 2018, n'a pas été communiqué.

Une note en délibéré, présentée pour la SAS Atena, a été enregistrée le 6 juillet 2018.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SAS Atena.

Considérant ce qui suit :

1. La société Atena exploite des bâtiments à usage d'entrepôts de stockage d'engrais dans l'enceinte du Grand Port Maritime de La Rochelle. Elle conteste l'évaluation de la valeur locative retenue par l'administration pour le hangar dit n° 14, situé sur le quai de la Grye, et relève appel des deux jugements du 28 avril 2016 par lesquels le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à la réduction des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 à 2014 à raison de ce hangar, sur la base de cette valeur locative.

2. Les requêtes n° 16BX02056 et 16BX02100 de la société Atena présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

3. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base : 1° la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière (...) La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) ".

4. En premier lieu, aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 324 A de l'annexe III au code : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts on entend : / 1° Par propriété normalement destinée à une utilisation distincte : / a. En ce qui concerne les biens autres que les établissements industriels l'ensemble des sols terrains et bâtiments qui font partie du même groupement topographique et sont normalement destinés à être utilisés par un même occupant en raison de leur agencement ; (...) / 2° Par fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte lorsqu'ils sont situés dans un immeuble collectif ou un ensemble immobilier : / a. Le local normalement destiné à raison de son agencement à être utilisé par un même occupant (...) ".

5. La société Atena fait valoir que le bâtiment " Finamur ", qui constitue son principal entrepôt de stockage d'engrais, a vu sa valeur locative évaluée par l'administration selon la méthode d'appréciation directe visée au 3° de l'article 1498 du code général des impôts. Elle soutient que, dès lors que ses trois autres hangars de stockage, dont notamment le hangar n° 14, forment avec cet immeuble " Finamur " un même groupement topographique, l'administration a commis une erreur de droit en n'appréciant pas globalement la valeur locative de cet ensemble immobilier selon la même méthode. Cependant, il résulte de l'instruction que le hangar considéré, bâti sur une parcelle cadastrée EZ 0021, est situé à plus de 250 mètres de l'immeuble " Finamur ", implanté sur une parcelle cadastrée EZ 0071, et séparé de celui-ci par une voie de circulation et par un terrain supportant un site d'extraction de sables et graviers exploité par une société tierce. Dans ces conditions, il ne peut être regardé comme constituant avec ce bâtiment " Finamur ", dont la superficie hors norme de plus de 15 000 m2 avait justifié le recours à la méthode d'appréciation directe, un même groupement topographique au sens de l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts impliquant le recours à une méthode unique d'évaluation de la valeur locative. La société requérante ne peut par ailleurs se prévaloir utilement, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction référencée BOI-IF-TFB-20-10-10-30-150 du 12 décembre 2012, qui ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait ici application.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / - soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date ; / - soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales. 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III à ce code : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. / II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 324 Y à 324 AC, au regard de l'affectation, de la situation, de la nature de la construction, de son importance, de son état d'entretien et de son aménagement. / Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision ". Et aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III au même code : " La valeur locative cadastrale des biens (...) est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ". Et aux termes de l'article 324 AB de la même annexe : " Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, dans l'hypothèse où la valeur locative d'un local est déterminée par comparaison, les termes de comparaison retenus doivent être constitués par des immeubles précisément identifiés, situés par priorité sur le territoire de la commune, et dont la valeur locative a été déterminée au moyen de l'une des deux méthodes prévues au b. du 2° de l'article 1498. Si les conditions cumulativement posées par ces dispositions, c'est-à-dire la condition de location à la date légale de référence, ainsi que les conditions de similarité des immeubles et d'analogie de leurs communes d'assiette, ne sont pas remplies, la méthode par comparaison doit être écartée et celle par appréciation directe appliquée.

8. La cotisation foncière des entreprises due à raison du hangar n° 14 exploité par la société Atena a été établie par comparaison avec le local-type n° 58 du procès-verbal de révision foncière du 25 septembre 1972 de la commune de La Rochelle, dont il n'est pas contesté qu'il était loué au 1er janvier 1970, date légale de référence. Il s'agit d'un bâtiment répertorié dans la catégorie " ateliers et hangars ", qui est un entrepôt de stockage construit en 1964, d'une superficie pondérée de 2 040 m2, implanté à proximité du canal de Rompsay, à l'Est du centre-ville de La Rochelle. La société Atena critique le choix de ce local-type comme terme de comparaison, faisant valoir que ses caractéristiques sont éloignées de celles de son propre hangar de stockage, qui a une superficie de 6 200 m2 et est situé sur le domaine du Grand Port Maritime de la Rochelle, à l'Ouest de la ville. Elle prône la comparaison avec le local-type n° 137, d'une superficie de 5 885 m2 et situé dans la même zone de commercialité que son hangar.

9. Il résulte, d'une part, de l'instruction que le choix par l'administration de la référence au local-type n° 58 procède d'une démarche de rationalisation et d'homogénéisation des valeurs locatives de l'ensemble des hangars situés au sein du Grand Port Maritime de La Rochelle. Ce local-type, qui a ainsi servi à l'évaluation de la valeur locative de la plupart des entrepôts implantés sur le domaine du Grand Port Maritime, est le seul à usage de stockage de grand volume figurant dans la catégorie " ateliers et hangars " du procès-verbal de 1972. Il présente ainsi, de par sa nature et ses caractéristiques essentielles, un terme de comparaison adéquat pour l'application du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, alors même qu'il ne se situe pas dans la zone de commercialité du Grand Port. Et il constitue, contrairement à ce que soutient la société requérante, une référence d'évaluation de son immeuble plus pertinente que le local-type n° 137 dès lors que celui-ci est à usage non pas d'entrepôt mais d'atelier de construction navale, affectation qui suppose l'existence d'aménagements spécifiques. La société Atena ne saurait à cet égard se prévaloir utilement de ce qu'un bâtiment exploité par une société tierce dans l'enceinte du Grand Port Maritime a fait l'objet d'une évaluation par référence à ce local n° 137. Enfin, la circonstance que le local-type n° 58 a été détruit en décembre 2014 n'est pas de nature à faire obstacle à sa prise en compte par l'administration, y compris en ce qui concerne la détermination de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises au titre de 2014, dès lors que cette base est déterminée au 1er janvier de l'année d'imposition.

10. A supposer, d'autre part, que, comme le soutient la société Atena, la superficie plus importante de son hangar doive justifier une modération du tarif de 3,20 euros au m2 correspondant au local-type n° 58, par application de l'article 324 AA précité de l'annexe III au code général des impôts, cette modération est en tout état de cause compensée par la moindre vétusté dudit hangar et par la circonstance, non sérieusement contestée, qu'il est situé dans une zone bien plus accessible à la circulation et au stationnement des véhicules de fret. Ainsi, s'il existe effectivement, entre le local-type retenu et les installations de la société Atena quelques différences en termes de superficies, de localisation géographique et de consistance ou d'entretien des bâtiments, il ne résulte pas de l'instruction que ces différences seraient, en l'espèce, de nature à justifier un ajustement du prix au m2 favorable à la société requérante, quelle que soit la nature des produits stockés dans son hangar. Par suite, et sans que celle-ci puisse utilement faire valoir que le propriétaire dudit hangar a bénéficié en ce qui le concerne d'un abattement de 20 % sur la valeur locative retenue pour la détermination de la taxe foncière dont il est redevable, elle n'établit pas le bien-fondé de sa demande d'ajustement de la valeur locative de référence.

11. Dès lors que, ainsi qu'il vient d'être dit, l'administration a pu à bon droit procéder à l'évaluation de la base imposable du hangar n° 14 par comparaison avec un local-type de référence, en application du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, l'argumentation de la société Atena tendant à la mise en oeuvre d'une évaluation de la valeur locative de ce hangar par voie d'appréciation directe ne peut être accueillie.

12. Enfin, si la société Atena persiste à contester en appel la majoration de 5 % appliquée au titre de l'année 2012 au montant de l'acompte qu'elle s'est abstenue, à tort, de verser, elle n'assortit pas son argumentation sur ce point d'éléments de fait ou de droit nouveaux ou de critique utile des motifs pertinents retenus par les premiers juges pour l'écarter et qu'il y a ainsi lieu pour la cour d'adopter.

13. Il résulte de ce qui précède que la société Atena n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société Atena la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de la société Atena sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Atena et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience publique du 5 juillet 2018 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président-rapporteur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juillet 2018.

Le premier assesseur,

Marie-Pierre BEUVE DUPUY

Le président-rapporteur,

Laurent POUGET Le greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16BX02056, 16BX02100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02056,16BX02100
Date de la décision : 27/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. POUGET L.
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET SCHOLTES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-07-27;16bx02056.16bx02100 ?
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