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14/03/2018 | FRANCE | N°17BX02589

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 14 mars 2018, 17BX02589


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...A...a obtenu du maire de la commune de l'Entre-Deux un permis de construire tacite le 28 avril 2016 pour le changement de destination du rez-de-jardin du bâtiment qu'il avait construit sur la parcelle cadastrée AO 382 au lieu-dit Grand Fond, pour en faire un point de vente de produits agricoles. Le préfet de La Réunion a déféré ce permis, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux, devant le tribunal administratif de La Réunion, qui les a annulés par jugement n° 1600973 du 24 mai 2017.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2017, M. A...deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...A...a obtenu du maire de la commune de l'Entre-Deux un permis de construire tacite le 28 avril 2016 pour le changement de destination du rez-de-jardin du bâtiment qu'il avait construit sur la parcelle cadastrée AO 382 au lieu-dit Grand Fond, pour en faire un point de vente de produits agricoles. Le préfet de La Réunion a déféré ce permis, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux, devant le tribunal administratif de La Réunion, qui les a annulés par jugement n° 1600973 du 24 mai 2017.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2017, M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de rejeter la demande du préfet ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le déféré était tardif : le permis tacite était exécutoire dès l'expiration du délai d'instruction ; le délai de recours s'achevait soit le 29 juin 2016, soit le 18 juillet 2016 ; la demande de retrait du 20 juin 2016 n'a pu prolonger le délai ;

- le premier juge n'a répondu à aucun des moyens soulevés au regard de la théorie de la connaissance acquise, et n'a pas motivé le rejet des pièces apportées pour conforter le lien du bâtiment avec une exploitation agricole ;

- rien n'interdit que des activités de vente de produits agricoles soient développées en zone A du plan local d'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, " les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens. (...) Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement (...) "

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient M.A..., la théorie de la connaissance acquise ne trouve pas à s'appliquer pour la computation du délai ouvert au préfet pour contester un permis de construire tacite, qui part de la transmission en préfecture du dossier complet de demande afférent à une telle autorisation. Par suite, le tribunal n'était en tout état de cause pas tenu de répondre à un tel moyen inopérant.

3. Le tribunal a longuement détaillé les conditions dans lesquelles M. A...a été condamné par arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis du 8 août 2013, devenu irrévocable, à démolir le bâtiment qu'il avait érigé, dont les caractéristiques ne répondaient à aucune vocation agricole, et a rappelé la nature des pièces produites, pour conclure qu'elles n'étaient pas de nature " à caractériser l'existence d'une exploitation agricole, pas plus que d'une activité de vente de produits locaux en lien avec une exploitation agricole ". M.A..., qui omet sciemment de rappeler le contexte historique dans lequel s'inscrit sa demande de permis de construire, ne peut sérieusement soutenir que le tribunal aurait ainsi insuffisamment motivé l'annulation du permis pour méconnaissance de l'article A.1.2 du règlement du plan local d'urbanisme.

Sur la recevabilité du déféré :

4. Après avoir rappelé l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, le tribunal a retenu " que le dossier de permis de construire tacite a été transmis à la sous-préfecture de Saint-Pierre le 17 mai 2016 ; que par un courrier reçu en mairie le 23 juin 2016, soit dans le délai de deux mois suivant sa transmission, le préfet de La Réunion a exercé à l'encontre de cette décision un recours gracieux régulièrement notifié en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme qui a prorogé le délai de recours contentieux ; que le recours gracieux ayant été rejeté par un courrier du maire de la commune de l'Entre-Deux reçu le 29 juin 2016, un nouveau délai de deux mois a commencé à courir à compter du 30 juin 2016 ; que le déféré préfectoral introduit le 30 août 2016 n'est donc pas tardif ".

5. M. A...ne critique pas utilement ce raisonnement en rappelant qu'un permis de construire tacite est exécutoire à la date à laquelle il est acquis, ce qui est sans effet sur le délai de recours du préfet, ni en soutenant contre les principes acquis en la matière que la demande de retrait présentée le 20 juin 2016 n'aurait pas suspendu le délai d'exercice du recours contentieux, alors qu'elle l'a interrompu comme l'a jugé à bon droit le tribunal. Il ne peut pas davantage se référer aux règles applicables au recours de tiers ayant eu connaissance d'un permis, qui n'ont pas vocation à s'appliquer aux déférés préfectoraux, ni faire abstraction du nouveau délai recommençant à courir pour le préfet à compter de la décision expresse du maire rejetant son recours gracieux. Par suite, il n'est manifestement pas fondé à soutenir que la demande du préfet était tardive.

Sur le bien-fondé de l'annulation :

6. Pour contester la méconnaissance du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme interdisant les constructions, ouvrages et travaux non nécessaires à une activité agricole, M. A... se borne à réitérer son affirmation selon laquelle les pièces qu'il a produites devant le tribunal justifieraient du lien du bâtiment qu'il tente de régulariser avec une activité agricole. Toutefois le constat d'huissier en date du 15 novembre 2016, postérieur à la décision attaquée, se borne à constater la présence de serres d'orchidées et d'un verger sur la parcelle en cause, et le relevé d'exploitation de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion au 1er août 2016 également postérieur à la décision attaquée, ne permet pas davantage de caractériser la nécessité du bâtiment pour une activité agricole. Par ailleurs, l'extrait Kbis produit démontre aussi que M. A...a une activité de vente de meubles et antiquités, et la demande de permis, qui n'a pour objet que de modifier le rez-de-jardin pour le transformer en boutique de vente de produits agricoles, mentionne que le rez-de-chaussée est " conservé en zone ouverte non close pour le stockage de produits non inflammables ", ce qui ne caractérise pas nécessairement une activité agricole.

7. Dans ces conditions, et alors que M. A...ne conteste pas que le bâtiment ne répondait pas aux conditions posées par l'article A 2.2.5 du règlement du plan local d'urbanisme de l'Entre-Deux, admettant sous condition : " A l'exception du secteur Apf, les constructions, ouvrages et travaux à destination agro-touristique, dès lors que les activités engendrées constituent un prolongement de l'acte de production ou ont pour support l'exploitation. Il peut notamment s'agir de locaux de vente de produits de la ferme, de locaux d'accueil et d'hébergement touristique ou de restauration, d'activités de loisirs, etc. Ces constructions doivent être aménagées dans les bâtiments à usage d'habitation existants de l'exploitation, dans les bâtiments techniques n'ayant plus d'affectation agricole ou en dehors de ces bâtiments mais dans l'environnement du corps de ferme (rayon de 20 mètres environ) et dans la limite totale de 170 m² de SHOB par exploitation agricole ", sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée comme manifestement mal fondée, ensemble et par voie de conséquence ses conclusions au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B...A..., à la commune de l'Entre-Deux et au ministre de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Fait à Bordeaux le 14 mars 2018.

Le président,

Catherine GIRAULT

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

4

No 17BX02589


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX02589
Date de la décision : 14/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS PHILIPPO PRESSECQ

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-14;17bx02589 ?
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