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21/08/2017 | FRANCE | N°15BX04167

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 21 août 2017, 15BX04167


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Etche Rivières a sollicité en qualité de promoteur de la commission départementale d'aménagement commercial de la Charente l'autorisation de création d'un ensemble commercial de 4 211 m² de surface de vente comportant 1140 m² de surface alimentaire et 3 071 m² de surface non alimentaire au lieudit " La fosse Pacaud " à Rivières.

Cette commission a donné le 23 avril 2015 un avis défavorable

Sur recours présenté par la société Etche Rivières, la commission nationale d'aménagement comm

ercial a, le 23 septembre 2015, autorisé le projet, pour lequel a été demandé un permis de cons...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Etche Rivières a sollicité en qualité de promoteur de la commission départementale d'aménagement commercial de la Charente l'autorisation de création d'un ensemble commercial de 4 211 m² de surface de vente comportant 1140 m² de surface alimentaire et 3 071 m² de surface non alimentaire au lieudit " La fosse Pacaud " à Rivières.

Cette commission a donné le 23 avril 2015 un avis défavorable

Sur recours présenté par la société Etche Rivières, la commission nationale d'aménagement commercial a, le 23 septembre 2015, autorisé le projet, pour lequel a été demandé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qui a été délivré le 3 août 2015.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2015, et un mémoire enregistré le 22 mars 2017, la société Distribution Casino France demande à la cour d'annuler " la décision " de la commission nationale d'aménagement commercial du 23 septembre 2015 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis lui fait grief car elle exploite un magasin Casino sur la commune de Rivières ;

- les avis des ministres n'ont pas été régulièrement recueillis ;

- le dossier était incomplet faute de préciser la classe des futurs magasins, de comporter une présentation visuelle du projet et d'informer suffisamment sur les flux de livraisons ;

- le projet ne contribuera pas à l'animation des centres-bourgs ;

- il va entrainer une forte imperméabilisation des sols ;

- les conséquences sur le réseau viaire n'ont pas été correctement estimées par l'avis, alors qu'une forte augmentation de trafic va impacter la RN 141 et la D 6 et que la desserte en transports en commun est inexistante ;

- l'architecture du bâtiment et l'aménagement des abords ne permettent pas une bonne insertion dans l'environnement, et aucun recours aux énergies renouvelables n'est envisagé ;

- le projet, éloigné des lieux de vie, n'améliore pas le confort d'achat des consommateurs ;

- le projet n'est donc pas conforme aux critères de l'article L.752-6 du code de commerce.

Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2016, la société Etche Rivières conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Distribution Casino France d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est irrecevable alors que la société Distribution Casino France n'était pas partie à " l'instance devant la CNAC " et ne démontre pas une atteinte à ses conditions d'exploitation et par suite son intérêt pour agir, et subsidiairement que l'ensemble des moyens ne sont pas fondés.

Par lettres du 14 avril 2017, les parties ont été informées que la solution du litige était susceptible de reposer sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de la requête dirigée contre un avis de la CNAC, seul le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pouvant être attaqué.

Par un mémoire enregistré le 28 avril 2017, la société Distribution Casino France souligne que la demande de la société Etche Rivières, enregistrée le 5 février 2015 par la préfecture, était en cours d'instruction devant la CDAC à la date d'entrée en vigueur du décret du 12 février 2015 et devait donc, en application de l'article 4 I de ce décret, être instruite comme une demande ne nécessitant pas de permis de construire, donnant lieu à une décision et non un avis de la CNAC, par suite susceptible d'être attaquée devant la cour comme il résulte du titre de la décision et des voies de recours notifiées. Ne pas le reconnaître porterait atteinte à son droit à un procès équitable au sens de l'article 6§2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et au principe général du droit de sécurité juridique.

Par un mémoire enregistré le 12 juin 2017, la société Etche Rivières soutient qu'en vertu du III de l'article 36 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 toute décision de la CNAC délivrant une autorisation d'exploitation commerciale sollicitée avant le 15 février doit être qualifiée d'avis, quelle que soit sa dénomination. Aucune atteinte au procès équitable n'est caractérisée alors qu'un recours est possible contre le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (...) et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens. 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens (...) ".

2. Aux termes de l'article L.425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...)A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire ". L'article L.752-17 du code de commerce, dans sa version issue de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, prévoit que : " Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial./ La Commission nationale d'aménagement commercial émet un avis sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6 du présent code, qui se substitue à celui de la commission départementale. (...) ". La même loi du 18 juin 2014 prévoit que la décision unique par laquelle l'autorité compétente octroie un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, d'une part par les personnes mentionnées au I de l'article L. 752-17 du code de commerce, au nombre desquelles figurent notamment les professionnels dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour le projet, est susceptible d'être affectée par celui-ci et, d'autre part, par les personnes mentionnées à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, au nombre desquelles figurent notamment celles pour lesquelles la construction est de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elles détiennent ou occupent régulièrement. Enfin, le Ill de l'article 36 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques prévoit que:" Pour tout projet nécessitant un permis de construire, l'autorisation d'exploitation commerciale, en cours de validité, dont la demande a été déposée avant le 15 février 2015 vaut avis favorable des commissions d'aménagement commercial".

3. Il découle des dispositions rappelées au point 2 que les tiers concurrents commerciaux, qui sont au nombre des personnes visées à l'article L.752-17 du code de commerce, ne peuvent présenter de recours pour excès de pouvoir qu'à l'encontre d'un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, et non à l'encontre de l'avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial, lequel a un caractère préparatoire et ne peut être directement contesté que par l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, qui en est destinataire. Dans ces conditions, la demande de la société Distribution Casino France, qui est dirigée exclusivement contre la " décision " de la commission nationale d'aménagement commercial, laquelle vaut avis en application des dispositions interprétatives de la loi du 6 août 2015, est manifestement irrecevable et ne peut donc qu'être rejetée selon les modalités prévues par les dispositions précitées du code de justice administrative, sans qu'y fassent obstacle les principes de sécurité juridique ni le droit à un procès équitable au sens de l'article 6§2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la société Distribution Casino France disposait du droit de contester, dans les délais légalement applicables , le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qui a pu être délivré.

4. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Distribution Casino France est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Etche Rivières au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Distribution Casino France et à la société Etche Rivières. Copie en sera adressée à la commission nationale d'aménagement commercial.

Fait à Bordeaux, le 21 août 2017.

Catherine GIRAULT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

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No 15BX04167


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