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11/04/2017 | FRANCE | N°17BX00035

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 11 avril 2017, 17BX00035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fertinagro a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau la condamnation de l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 4 524 194 euros correspondant au crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a demandé le remboursement en novembre 2015.

Par une ordonnance n° 1602210 du 23 décembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 5 janvier 2017 et un mémoire enregistré le 8 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fertinagro a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau la condamnation de l'Etat à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 4 524 194 euros correspondant au crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a demandé le remboursement en novembre 2015.

Par une ordonnance n° 1602210 du 23 décembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 janvier 2017 et un mémoire enregistré le 8 février 2017, la société Fertinagro, représentée par Me B...et MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Pau du 23 décembre 2016 ;

2°) de condamner l'Etat au paiement d'une provision de 4 524 194 euros ou, subsidiairement, de 1 909 361,58 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des douanes ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du président de la cour portant désignation de M. de Malafosse, président de chambre, en qualité de juge des référés et de tout recours présentés sur le fondement des dispositions du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis de mise en recouvrement du 19 novembre 2015 émis par l'administration des douanes, la société Fertinagro a été rendue débitrice d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée à l'importation s'élevant à 4 524 194 euros. La société a présenté au titre du mois de novembre 2015 une demande de remboursement de crédit de taxe à hauteur de cette somme. Le 27 janvier 2016, elle a introduit une réclamation contentieuse en vue d'obtenir le dégrèvement desdits rappels. Le 8 septembre 2016, l'administration des douanes a émis un avis à tiers détenteur qui a permis de recouvrer la somme de 409 361,58 euros ; la société a ensuite effectué, le 4 octobre 2016, un paiement à hauteur de 1 500 000 euros. La demande de remboursement de crédit de taxe a été finalement rejetée le 4 novembre 2016. La société a alors saisi le 17 novembre 2016 le juge des référés du tribunal administratif de Pau afin qu'il lui accorde une provision de 4 524 194 euros. La société Fertinagro fait appel de l'ordonnance du 23 décembre 2016 rejetant cette demande.

Sur la demande de provision :

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

3. Aux termes des dispositions de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable [...] / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : [...] / b) Celle qui est due à l'importation ; ... ".

4. La mise en recouvrement, le 19 novembre 2015, du rappel de taxe à l'importation d'un montant de 4 524 194 euros a rendu ce montant exigible. C'est d'ailleurs cette exigibilité qui a conduit l'administration des douanes à émettre le 8 septembre 2016 un avis à tiers détenteur qui a permis un recouvrement partiel de la créance. Lorsque la société a effectué ensuite spontanément un paiement à hauteur de 1 500 000 euros, le rappel de taxe était toujours exigible. Si, en effet, la société avait préalablement contesté le rappel de taxe, cette circonstance n'a pas eu, par elle-même, pour effet de suspendre l'exigibilité de l'impôt. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'à hauteur de 2 616 983,42 euros, la société Fertinagro a obtenu en novembre 2016, en application de l'article 348 du code des douanes, le bénéfice du sursis de paiement des rappels de taxe dont il s'agit. Par suite, à hauteur de cette somme, l'exigibilité de la taxe dont elle demande la déduction a été suspendue de sorte que, dans cette mesure, le crédit de taxe qu'elle invoque ne peut être regardé comme une créance non sérieusement contestable. En revanche, pour le surplus, c'est-à-dire la différence entre le montant de taxe mis en recouvrement (4 524 194 euros) et la fraction de ce montant pour laquelle la société bénéficie du sursis de paiement (2 616 983,42 euros), soit la somme de 1 907 210,60 euros, les conditions de déduction requises par les dispositions précitées du I de l'article 271 du code général des impôts sont satisfaites. Rien ne fait donc obstacle, en l'état du dossier tel qu'il est soumis au juge des référés, à ce que, à hauteur de cette somme de 1 907 210,60 euros, le crédit de taxe revendiqué soit regardé comme une créance non sérieusement contestable.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Fertinagro est fondée à demander, d'une part, que l'Etat lui verse une provision de 1 907 210,60 euros, d'autre part, que l'ordonnance qu'elle conteste soit réformée en ce sens.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser une provision de 1 907 210,60 euros à la société Fertinagro.

Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Pau du 23 décembre 2016 est réformée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société Fertinagro sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 17BX00035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 17BX00035
Date de la décision : 11/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-11;17bx00035 ?
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