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07/01/2016 | FRANCE | N°14BX03089

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 07 janvier 2016, 14BX03089


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une lettre en date du 20 juin 2012, le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité (CTAC) de Bordeaux a avisé M.A..., ancien ouvrier de l'Etat du ministère de la défense, qu'il ne bénéficiait plus d'une indemnisation au titre de l'assurance chômage depuis le 5 novembre 2011, date à laquelle il a été admis à la retraite.

Par un jugement n° 1202886 du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a, sur la demande de M.A..., annulé cette décision et a enjoin

t au ministre de la défense de réexaminer le dossier de M.A....

Le pourvoi du min...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une lettre en date du 20 juin 2012, le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité (CTAC) de Bordeaux a avisé M.A..., ancien ouvrier de l'Etat du ministère de la défense, qu'il ne bénéficiait plus d'une indemnisation au titre de l'assurance chômage depuis le 5 novembre 2011, date à laquelle il a été admis à la retraite.

Par un jugement n° 1202886 du 10 octobre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a, sur la demande de M.A..., annulé cette décision et a enjoint au ministre de la défense de réexaminer le dossier de M.A....

Le pourvoi du ministre de la défense a été renvoyé devant la cour de céans par une décision du Conseil d'Etat n° 373883 du 20 octobre 2014.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 10 décembre 2013 au greffe du Conseil d'Etat, le ministre de la défense demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202886 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 octobre 2013 ;

2°) de rejeter la demande de M.A....

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 ;

- l'arrêté du 30 mars 2009 portant agrément de la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage et de son règlement général annexé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la restructuration des services et des établissements du ministère de la défense, M.A..., ouvrier de l'Etat, a, conformément à sa demande de départ volontaire, été rayé des contrôles le 3 juillet 2009 avec liquidation de sa pension différée au 5 juillet 2011, reportée ultérieurement au 5 novembre 2011 en application de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. A la suite de sa radiation des contrôles, M. A...a adressé une demande d'indemnisation au titre du chômage et a ainsi obtenu le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) à compter du 10 juillet 2009. Par un courrier du 20 juin 2012, le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité (CTAC) de Bordeaux a informé M.A..., en réponse à un courrier en date du 9 juin 2012, qu'après examen de son dossier, il ne bénéficiait plus d'une indemnisation au titre de l'assurance chômage depuis le 5 novembre 2011 en raison de son admission à la retraite. Le ministre de la défense relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 octobre 2013 annulant, à la demande de M.A..., la décision du commandant du CTAC de Bordeaux en date du 20 juin 2012 et enjoignant au ministre de la défense de réexaminer la situation de M.A.... Ce dernier demande, par la voie de l'appel incident, à ce qu'il soit enjoint au ministre de la défense de lui accorder le bénéfice de l'ARE du 5 novembre 2011 au 1er août 2012.

Sur l'appel principal :

2. Aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre. ". Aux termes de l'article 150 de la loi n° 2008-1425 susvisée dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Une indemnité de départ volontaire peut être attribuée, à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2014, dans des conditions définies par décret, aux ouvriers de l'Etat du ministère de la défense, lorsqu'ils quittent le service dans le cadre d'une restructuration ou d'une réorganisation (...) III. - L'octroi de l'indemnité de départ volontaire mentionnée au I ouvre droit à une indemnisation au titre du chômage dans les conditions prévues à l'article L. 5424-1 du code du travail (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du code du travail : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires (...) ". Il résulte de l'application combinée des dispositions précitées que M. A... pouvait prétendre à la suite de son départ volontaire du corps des ouvriers de l'Etat à une indemnisation au titre du chômage sous la forme d'un revenu de remplacement.

3. Aux termes de l'article L. 5421-4 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " Le revenu de remplacement cesse d'être versé : 1° Aux allocataires ayant atteint l'âge prévu à l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale justifiant de la durée d'assurance, définie au deuxième alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, requise pour l'ouverture du droit à une pension de vieillesse à taux plein ; 2° Aux allocataires atteignant l'âge prévu à l'article L. 161-17-2 du même code augmenté de cinq ans. ". Aux termes de l'article L.161-17-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors en vigueur : " L'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite mentionné au premier alinéa de l'article L. 351-1 du présent code, à l'article L. 732-18 du code rural et de la pêche maritime, au 1° du I de l'article L. 24 et au 1° de l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite est fixé à soixante-deux ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956. Cet âge est fixé par décret, de manière croissante à raison de quatre mois par génération et dans la limite de l'âge mentionné au premier alinéa du présent article, pour les assurés nés avant le 1er janvier 1956. ". Aux termes de l'article D. 161-2-1-9 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " L'âge prévu au second alinéa de l'article L. 161-17-2 est fixé à : (...) 3° Soixante ans et huit mois pour les assurés nés en 1952 (...) ".

4. Si le ministre de la défense soutient qu'en vertu du dispositif dérogatoire applicable aux " carrières longues ", l'âge d'ouverture des droits à pension de M. A...est de 59 ans et 4 mois, cette circonstance est sans incidence sur la détermination du terme du bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi, lequel est défini par les articles du code du travail et du code de la sécurité sociale mentionnés au point 3. Or, il ressort des pièces du dossier que M. A...est né le 5 juillet 1952 et, ainsi qu'il a été énoncé au point 1, qu'il a été radié des contrôles le 3 juillet 2009 pour être admis à la retraite à l'âge de 59 ans et 4 mois le 5 novembre 2011, date à laquelle il a cessé de bénéficier de l'allocation de retour à l'emploi. Il résulte cependant de l'application combinée des dispositions précitées au point 3 que M. A...pouvait prétendre au bénéfice de cette allocation jusqu'à l'âge de 60 ans et 8 mois. Par suite, le refus litigieux de verser à M. A...l'ARE en raison de son admission à la retraite méconnaît l'article L. 5421-4 du code du travail.

5. Toutefois, le ministre de la défense soutient, pour la première fois en appel, que la situation de M. A...relève de la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage.

6. Il résulte de l'article L. 5422-20 du code du travail que les mesures d'application du régime d'assurance chômage font l'objet d'un accord conclu et agréé dans les conditions prévues aux articles L. 5422-21 à L. 5422-23 et R. 5422-16 à R. 5422-17. Or la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage et son règlement général annexé ont été agréés par un arrêté du 30 mars 2009. Aux termes de l'article 1er de cet arrêté : " Sont rendues obligatoires, pour tous les employeurs et tous les salariés mentionnés à l'article L. 5422-13 du code du travail, les dispositions de la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage et de son règlement général annexé, à l'exception de l'article 9, premier paragraphe, second alinéa, du règlement général annexé à la convention susmentionnée. ". Aux termes de l'article 2 de ce même arrêté : " L'agrément des effets et des sanctions des accords visés à l'article 1er est donné pour la durée de validité dudit accord. ". Aux termes de l'article 9 de la convention du 19 février 2009 : " La présente convention est conclue pour une durée de deux ans débutant au jour de la publication de son arrêté d'agrément. Elle cessera de plein droit de produire ses effets à l'échéance de son terme. ". Aux termes de l'article 10 de cette convention : " Mesures transitoires § 1. Les dispositions de la présente convention, du règlement général annexé, des annexes à ce règlement et des accords d'application, s'appliquent aux salariés involontairement privés d'emploi dont la fin de contrat de travail est postérieure à sa date d'application, soit le jour de la publication de l'arrêté d'agrément de la présente convention (...) ".

7. Dans ces conditions, et eu égard au terme de son contrat de travail, qui est postérieur au 1er avril 2009, date de publication de l'arrêté du 30 mars 2009, les stipulations de cette convention sont applicables à la situation de M.A....

8. Aux termes de l'article 25 du règlement général annexé à la convention du 19 février 2009 : " § 2. L'allocation d'aide au retour à l'emploi n'est plus due lorsque l'allocataire cesse : a) De remplir la condition prévue à l'article 4 (c) du règlement (...) ". Aux termes de l'article 4 de ce règlement : " Les salariés privés d'emploi justifiant d'une période d'affiliation comme prévu à l'article 3 doivent : (...)c) Etre âgés de moins de 60 ans ; toutefois, les personnes qui, lors de leur 60e anniversaire, ne justifient pas du nombre de trimestres d'assurance requis (2) au sens des articles L. 351-1 à L. 351-5 du code de la sécurité sociale (tous régimes confondus), pour percevoir une pension à taux plein, peuvent bénéficier des allocations jusqu'à justification de ce nombre de trimestres et, au plus tard, jusqu'à l'âge de 65 ans (...) ". Il résulte de l'application combinée de ces dispositions que l'allocataire qui justifie du nombre de trimestres d'assurance requis pour percevoir une pension à taux plein cesse de bénéficier de l'ARE lorsqu'il atteint l'âge de 60 ans.

9. Il est constant que lorsque M. A...a été admis à la retraite le 5 novembre 2011 à l'âge de 59 ans et 4 mois, il justifiait du nombre de trimestres d'assurance requis pour percevoir une pension à taux plein. Dès lors, et en vertu de ce qui est indiqué au point 8, M. A...pouvait prétendre au versement de l'ARE jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge de soixante ans. Par suite, la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage ne saurait pas davantage fonder le refus litigieux de verser à M. A...l'ARE postérieurement à sa date d'admission à la retraite.

10. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la défense n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé pour erreur de droit la décision du commandant du CTAC de Bordeaux en date du 20 juin 2012.

Sur l'appel incident :

11. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

12. Dans sa demande de première instance, M. A...sollicitait le versement de l'allocation de retour à l'emploi du 5 novembre 2011 au 8 juin 2012. Pour la première fois en appel, M. A...sollicite en outre le versement de cette allocation du 8 juin 2012 au 1er août 2012. Toutefois le motif d'annulation retenu, qui se borne à indiquer que le refus de versement de l'ARE ne pouvait se fonder sur la date d'admission à la retraite de M. A...sans pour autant lui reconnaître le droit de percevoir cette allocation, implique seulement que le ministre de la défense réexamine la demande de M. A...au regard de l'ensemble des dispositions applicables, notamment des conditions de cumul de l'ARE et de la pension de retraite. Par suite, les conclusions à fin d'injonction tendant au versement de l'ARE doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de la défense et l'appel incident de M. A...sont rejetés.

Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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No 14BX03089


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à trois)
Numéro d'arrêt : 14BX03089
Date de la décision : 07/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : PREMIERE LIGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-01-07;14bx03089 ?
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