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16/10/2014 | FRANCE | N°14BX00596

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 16 octobre 2014, 14BX00596


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2014, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301488 en date du 22 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 mai 2013 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

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) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjo...

Vu la requête, enregistrée le 22 février 2014, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301488 en date du 22 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 mai 2013 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous la même astreinte et à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié en matière de séjour et d'emploi ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

-le rapport de Mme Michèle Richer, président ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, fait appel du jugement du 22 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 mai 2013 du préfet des Hautes-Pyrénées refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué pris dans son ensemble :

2. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué, M. B...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté vise d'une part, les textes dont il fait application, notamment l'accord franco-marocain, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et d'autre part, comporte les éléments de fait relatifs à la situation personnelle et familiale de M. B..., notamment qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 28 décembre 2007 exécutée le 11 juin 2008, qu'il s'est maintenu de manière irrégulière en France et a exercé une activité professionnelle sans autorisation, qu'il est célibataire et sans charge de famille et n'établit pas qu'il serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; que l'arrêté fait mention de la promesse d'embauche dans une entreprise de nettoyage et précise que les documents joints par l'intéressé ne justifient pas d'une activité professionnelle suffisante et d'une présence en France suffisamment ancienne ; que le préfet n'avait pas à mentionner l'avis de la DIRECCTE dans la mesure où aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait au préfet de la saisir ; qu'ainsi le moyen tiré de la motivation insuffisante de l'arrêté attaqué doit être écarté ;

Sur la décision portant refus de séjour :

5. Considérant que si M. B...soutient que le préfet aurait entaché sa décision de refus de titre de séjour d'un vice de procédure, faute d'avoir consulté préalablement la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, en se prévalant d'une circulaire n° 2007/323 du 22 août 2007 du ministre du travail, ce texte est dépourvu de caractère règlementaire ; que, par suite, le moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

6. Considérant que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles " ; que l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

7. Considérant que si l'arrêté contesté se fonde sur l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal administratif, dans le jugement attaqué, a procédé d'office, comme il en avait le droit, à la substitution à ces dispositions des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé ; que si, en outre, les dispositions de l'article L. 313-14, en tant qu'elles permettent l'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié d'un ressortissant étranger justifiant de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, n'ont pas d'équivalent dans l'accord franco-marocain, ce qui fait donc obstacle à ce qu'une stipulation de cet accord leur soit substituée, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Pyrénées aurait pris la même décision en examinant la demande de M. B...sur le seul fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, dès lors que, d'une part, le requérant n'est pas titulaire d'un visa de long séjour, et que, d'autre part, il n'établit pas avoir présenté un contrat de travail visé par l'autorité compétente, en l'occurrence les services de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait au préfet de saisir ; que, par ailleurs, le requérant n'établit pas davantage, en tout état de cause, qu'il remplissait les conditions fixées, en vue d'une admission exceptionnelle au séjour, par la circulaire du 24 novembre 2009 ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que, pour l'application des dispositions et des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

9. Considérant que M. B...soutient qu'il vit en France de manière continue depuis le 1er avril 2008 et que son frère et sa soeur résident également en France ; que toutefois, célibataire et sans enfant, il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 22 ans et où réside sa mère ; qu'il ne peut se prévaloir d'une ancienneté de séjour depuis le 1er avril 2008 dans la mesure où il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement prise à son encontre le 28 décembre 2007 exécutée le 11 juin 2008 et que son passeport comporte notamment un tampon d'entrée le 5 mai 2012 sur le territoire français ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et ne méconnaît donc ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; que, par suite, la seule circonstance que le préfet n'a pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé M. B...qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder l'intéressé comme ayant été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

12. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, en prenant la décision l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale doit être écarté ;

14. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, en prenant la décision fixant le pays de renvoi, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N°14BX00596


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00596
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : MOURA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-10-16;14bx00596 ?
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