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14/12/2010 | FRANCE | N°10BX01340

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 14 décembre 2010, 10BX01340


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juin 2010, présentée par le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME ;

Le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1000352 du 5 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 11 janvier 2010, en tant qu'il a refusé de délivrer une carte de séjour à M. X au titre de l'asile, qu'il a obligé ce dernier à quitter le territoire français et qu'il a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

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Vu les autres pi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juin 2010, présentée par le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME ;

Le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1000352 du 5 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 11 janvier 2010, en tant qu'il a refusé de délivrer une carte de séjour à M. X au titre de l'asile, qu'il a obligé ce dernier à quitter le territoire français et qu'il a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 2010-687 du 24 juin 2010 relatif à l'organisation et aux missions des services de l'Etat dans la région et les départements d'Ile-de-France ;

Vu l'arrêté du 12 mars 2009 portant régionalisation de l'admission au séjour des demandeurs d'asile dans la région Poitou-Charentes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2010 :

le rapport de M. Katz, premier conseiller ;

et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que M. X, ressortissant camerounais entré en France irrégulièrement en 2008, a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 décembre 2008, confirmée le 9 décembre 2009 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par ailleurs, M. X a sollicité une autorisation de séjour en vue de signer un contrat d'apprentissage, en se prévalant d'un contrat de jeune majeur signé avec le conseil général de la Charente-Maritime ; que par un même arrêté du 11 janvier 2010, le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME a, premièrement, rejeté cette demande de titre de séjour en qualité de titulaire d'un contrat jeune majeur , deuxièmement, rejeté la demande de titre de séjour formée par l'intéressé au titre de l'asile, troisièmement, fait obligation à M. X de quitter le territoire français et, quatrièmement, fixé le pays à destination duquel l'intéressé serait renvoyé ; que le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME interjette appel du jugement du 5 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté en date du 11 janvier 2010, en tant qu'il a refusé de délivrer une carte de séjour à M. X au titre de l'asile, qu'il a obligé ce dernier à quitter le territoire français et qu'il a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Sur la décision rejetant la demande de titre de séjour au titre de l'asile :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève de l'autorité administrative compétente ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 741-1 du même code : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève du préfet de département et, à Paris, du préfet de police./ Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police, pour exercer cette mission dans plusieurs départements ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 12 mars 2009 portant régionalisation de l'admission au séjour des demandeurs d'asile dans la région Poitou-Charente, pris en application des dispositions précitées : Lorsqu'un étranger se trouvant à l'intérieur du territoire de l'un des départements de la région Poitou-Charentes (Vienne, Charente, Charente-Maritime et Deux-Sèvres) demande à bénéficier de l'asile, l'autorité administrative compétente pour l'examen de sa demande d'admission au séjour est le préfet de la Vienne. Le préfet de la Vienne reçoit de l'étranger sollicitant l'asile les pièces produites à l'appui de sa demande en application de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il lui délivre l'autorisation provisoire de séjour prévue au premier alinéa de l'article R. 742-1 du même code et lui refuse l'admission au séjour dans les cas prévus à l'article L. 741-4 du même code ; qu'aux termes de l'article 2 du même arrêté : Les préfets des départements de la Vienne, de la Charente, de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres demeurent compétents pour les demandes d'asile présentées par des étrangers dont une première demande a fait l'objet d'un rejet définitif, pour la décision de refus de séjour qui peut être prise, en application du dernier alinéa de l'article R. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'encontre de l'étranger qui ne peut justifier de l'enregistrement de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides au plus tard à l'expiration de la durée de validité de son autorisation provisoire de séjour, pour la délivrance et le renouvellement du récépissé prévu au premier alinéa de l'article R. 742-2 du même code, ainsi que pour la mise en oeuvre des articles R. 742-3 à R. 742-6 du même code à l'égard des étrangers domiciliés dans leur département ; qu'enfin, selon l'article 3 dudit arrêté : Le présent arrêté entre en vigueur le 1er mai 2009 ;

Considérant que le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision par laquelle le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME a rejeté la demande d'admission au séjour de M. X au titre de l'asile au motif, soulevé d'office, tiré de ce que seul le préfet de la Vienne était compétent pour prendre cette décision ;

Considérant toutefois que, comme indiqué ci-dessus, la demande d'asile présentée par M. X a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 décembre 2008, laquelle décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 9 décembre 2009 ; qu'ainsi, à la date de la décision contestée du 11 janvier 2010, le rejet de la demande d'asile de M. X avait acquis un caractère définitif ; que, dès lors, le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME, qui en vertu des dispositions de l'article 2 de l'arrêté précité demeurait compétent pour les demandes d'asile présentées par des étrangers dont une première demande a fait l'objet d'un rejet définitif, était compétent pour prendre la décision contestée ; que, par suite, le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision de refus de titre de séjour opposée à M. X, ainsi que la mesure d'éloignement prise à l'encontre de l'intéressé et la décision fixant le pays de destination de cette mesure ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Poitiers ;

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

Considérant que par un arrêté du 27 novembre 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME a donné à M. Julien Charles, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer notamment les décisions refusant l'admission au séjour des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. Julien Charles, signataire de l'arrêté contesté du 11 janvier 2010, n'aurait pas été compétent pour ce faire manque en fait ;

Considérant que la décision précitée du 11 janvier 2010 mentionne les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision manque en fait et doit être écarté ;

Considérant que l'arrêté contesté vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé ne remplissait par ailleurs aucune condition pour être autorisé au séjour ; qu'ainsi M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait été prise sans que soit examinée sa demande au regard du fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif au titre de séjour en qualité d'étudiant ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il a fait preuve d'une volonté d'intégration dans la société française et qu'il a obtenu de bon résultats scolaires en France, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire sans enfant et n'était présent sur le territoire français que depuis deux ans à la date de la décision contestée ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la décision de refus de titre de séjour en date du 11 janvier 2010 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME pouvait ainsi, pour ce seul motif, et sans erreur de droit, refuser de délivrer un titre de séjour à M. X sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, il ressort des pièces du dossier que l'acte de naissance qu'il a fourni à la préfecture en vue de l'obtention d'un titre de séjour, mentionnant qu'il serait né en 1989, est un faux, l'intéressé étant né, selon deux de ses déclarations, en 1984 ; que, dès lors, en estimant que cet acte de naissance était un faux, le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME n'a commis aucune erreur de fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. ; que M. X ne justifie d'aucune considération humanitaire ni d'aucun motif exceptionnel ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que M. X soutient que la mesure d'éloignement est, par elle-même, contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, l'intéressé, qui ne fait valoir aucune autre circonstance que celles rappelées ci-dessus, n'établit pas que la mesure d'éloignement contestée porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant que l'arrêté contesté comporte les considérations de droit qui en constituent le fondement, ainsi que la nationalité de M. X et les éléments de fait qui motivent la décision de refus de séjour servant de fondement à la mesure d'éloignement et à la décision fixant le pays de destination ; qu'il précise en outre qu'il ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement doit être écarté ;

Considérant que la seule circonstance que le PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME ait mentionné la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 décembre 2008 et la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 9 décembre 2009 dans l'arrêté contesté, ne saurait suffire à établir que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence en fixant le Cameroun comme pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Considérant que si M. X soutient qu'il a fait l'objet de violences au Cameroun en raison de son orientation sexuelle et qu'il risque l'emprisonnement en cas de retour dans son pays d'origine, le seul mandat d'arrêt qu'il verse au dossier, dont l'authenticité est incertaine compte tenu notamment de la date de naissance de l'intéressé qui y est mentionnée, ne suffit pas à faire regarder ces allégations comme établies ; que, dans ces conditions, la décision fixant le pays de destination n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME en date du 11 janvier 2010 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de ces articles font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande, au profit de son avocat, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 5 mai 2010 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. X à fin d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10BX01340


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX01340
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. David KATZ
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MATRAT-SALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-12-14;10bx01340 ?
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