Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2007 au greffe de la Cour sous le n°07BX00719, présentée pour l'OFFICE FRANCAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES (OFPRA), dont le siège est 201 rue Carnot à Fontenay Sous Bois Cedex (94136), par le cabinet d'avocats Latournerie, Milon et Czamanski ;
Il demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du 1er février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 26 juillet 2006 refusant d'instruire la demande d'asile de Mlle X et lui a enjoint de procéder à cette instruction ;
- de rejeter la demande de première instance présentée par Mme X ;
Il fait valoir que la demande d'asile présentée par Mlle X le 10 janvier 2006 a donné lieu à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour qui a été retirée par le préfet, celui-ci décidant d'engager une procédure de réadmission en Espagne ; que l'OFPRA a en conséquence informé l'intéressée le 9 février 2006 qu'il suspendait l'instruction de sa demande d'asile ; que le juge des référés du Tribunal administratif de Limoges a suspendu l'exécution de la décision préfectorale du 16 mars 2006 refusant l'admission provisoire au séjour et a enjoint au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; qu'à la suite du courrier de Mlle X du 12 juillet 2006 demandant l'exécution de cette ordonnance à l'OFPRA, ce dernier a répondu le 26 juillet 2006 que l'ordonnance n'emportait pas comme conséquence la reprise de l'instruction de la demande d'asile avant que le tribunal ne se prononce sur le fond ; que l'OFPRA se trouve désormais saisi de la demande d'asile présentée par Mlle X à la suite de l'annulation par le tribunal du refus d'admission provisoire de séjour ; que, pour autant et en vertu de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'OFPRA était en juillet 2006 incompétent pour instruire la demande de Mlle X dès lors que son autorisation provisoire de séjour avait été retirée sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il n'a d'ailleurs pas pris de décision mais seulement informé l'intéressée de cette incompétence ; que l'ordonnance du juge des référés n'impliquait nullement la reprise de l'instruction dès lors que l'autorisation provisoire de séjour délivrée sur injonction du juge des référés ne saurait valoir autorisation au sens de l'article L. 741-1 permettant la saisine de l'OFPRA, le juge des référés ne pouvant se prononcer sur la question de fond du pays compétent ; qu'ainsi , l'OFPRA étant en situation de compétence liée, l'incompétence du signataire de la prétendue décision est dépourvue d'influence sur sa légalité ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 février 2008, présenté pour Mlle X par Me Malabre ;
Elle demande à la Cour :
- de rejeter la requête de l'OFPRA ;
- de condamner l'OFPRA à verser à son conseil une somme de 2392 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elle fait valoir que la requête est irrecevable à défaut de capacité à agir en justice du secrétaire général et d'autorisation du conseil d'administration de l'OFPRA ; qu'il y a non-lieu à statuer dès lors que l'OFPRA a depuis rejeté la demande d'asile par une décision faisant d'ailleurs l'objet d'un recours devant la commission de recours des réfugiés ; que le juge administratif de droit commun est bien compétent dès lors que la compétence de la commission des recours des réfugiés est limitée aux décisions de l'OFPRA statuant au fond sur les demandes d'asile ou de protection subsidiaire ; que le refus d'instruire une demande d'asile constitue bien une décision ; que la décision du 26 juillet 2006 est entachée d'incompétence ; qu'elle est entachée d'illégalité interne dès lors notamment que l'exécution du refus d'admission provisoire au séjour du 16 mars 2006 sur lequel l'OFPRA se fondait a été suspendue par ordonnance du juge des référés et depuis annulée et que cette décision préfectorale était elle-même entachée d'illégalité interne et externe ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 mai 2008, présenté pour l'OFPRA qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens en faisant valoir en outre que le secrétaire général de l'Office a reçu délégation du directeur général par décision du 3 avril 2006 ;
Vu les mémoires, enregistrés les 27 mai et 28 mai 2008, présentés pour Mlle X qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;
Vu la décision en date du 13 novembre 2007 admettant Mlle X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2008,
le rapport de Mme Fabien, premier conseiller;
les observations de Me Latournerie pour l'OFPRA ;
et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES (OFPRA) fait appel du jugement en date du 1er février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 26 juillet 2006 refusant d'instruire la demande d'asile de Mlle X et lui a enjoint de procéder à l'instruction de ladite demande ;
Sur la fin de non recevoir opposée par Mlle X et tirée du non-lieu en appel :
Considérant que si, par décision postérieure à l'introduction de la requête, l'OFPRA a rejeté la demande d'asile de Mlle X, cette circonstance ne rend pas sans objet l'appel de l'OFPRA à l'encontre du jugement attaqué annulant le refus d'instruire ladite demande et lui enjoignant de procéder à son instruction ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que le refus d'instruire une demande d'asile constitue un acte faisant grief susceptible de recours pour excès de pouvoir ; que l'OFPRA n'est en conséquence pas fondé à soutenir que la demande d'annulation de cette décision était irrecevable ;
Sur le fond :
Considérant que si l'OFPRA produit en appel deux décisions de son directeur général des 3 avril et 3 mai 2006, publiées au journal officiel du 30 juin 2006, donnant, en cas d'empêchement de M. Kuhn-Delforge, délégation à M. Cravero, chef de division, à l'effet de signer tous actes visés à l'article 40 du code de procédure pénale ainsi que toutes réponses aux demandes de réquisition de l'autorité judiciaire se rapportant aux attributions des services placés sous son autorité, les refus d'instruire une demande d'asile ne sont pas au nombre des décisions ainsi visées ; que, par suite, l'OFPRA n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Limoges a jugé que la décision du 26 juillet 2006 avait été prise par une autorité incompétente ;
Considérant que l'OFPRA soutient, à titre subsidiaire, qu'il aurait eu compétence liée pour rejeter la demande d'asile de Mlle X en application des dispositions de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'office statue sur les demandes d'asile dont il est saisi. Il n'est toutefois pas compétent pour connaître d'une demande présentée par une personne à laquelle l'admission au séjour a été refusée pour le motif prévu au 1° de l'article L. 741-4... » ; que l'article L 741-4 du même code dispose que : « Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat ... » ;
Considérant que par décision en date du 16 mars 2006, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler l'admission provisoire de Mlle X au séjour au titre de l'asile en se fondant sur les dispositions précitées du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a prononcé sa réadmission en Espagne ; que, par décision du 9 février 2006, l'OFPRA indiquait à l'intéressée qu'il ne procédait en conséquence pas à l'instruction de sa demande d'asile ; que par ordonnance du 3 juillet 2006, le juge des référés du Tribunal administratif de Limoges a suspendu l'exécution de la décision préfectorale du 16 mars 2006 en enjoignant au préfet de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mlle X ;
Considérant que dès lors que l'exécution du refus d'admission provisoire au séjour de Mlle X, pris par le préfet en application des dispositions du 1° de l' article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fondant le refus de l'OFPRA de procéder à l'instruction de la demande d'asile de l'intéressée, était suspendue par le juge des référés, l'OFPRA n'avait pas compétence liée pour refuser le 26 juillet 2006 de faire droit à la demande présentée par Mlle X tendant à la reprise de l'instruction de sa demande d'asile ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'OFPRA n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a annulé la décision du 26 juillet 2006 ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par Mlle X et tirée de l'irrecevabilité de la requête, les conclusions de cette dernière tendant à l'annulation de ce jugement doivent être rejetées :
Sur l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'OFPRA une somme de 1 300 euros, sous réserve que Maître Malabre, avocat de Mlle X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;
DECIDE
Article 1 : La requête de l'OFPRA est rejetée.
Article 2 : L'OFPRA versera une somme de 1 300 euros à Me Malabre sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
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07BX00719