Vu la requête, enregistrée le 22 février 2007 au greffe de la Cour sous le n° 07BX00413, présentée pour Mme Lucienne X, demeurant ..., par la SCP Beauchard Bodin Demaison Garrigues Hidreau Lefevre ;
Elle demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Poitiers du 21 décembre 2006 en tant qu'il a limité à 5 000 euros le montant de l'indemnité mise solidairement à la charge de la société ASF, de la société Scetauroute et de la société Deschiron en réparation des troubles dans les conditions d'existence qu'elle a subis du fait des désordres occasionnés à son habitation à l'occasion de travaux de construction de l'autoroute A 837 ;
- de condamner solidairement l'Etat et les trois sociétés précitées à lui verser à ce titre une somme de 50 000 euros en portant ainsi de 58 693 euros à 108 693 euros le montant de l'indemnité totale devant lui être versée ;
- de les condamner à lui verser une somme de 4 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 Pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2008,
- le rapport de Mme Fabien, premier conseiller ;
- les observations de Me Bodin, de la SCP Bodin Demaison Garrigues Hidreau Lefèvre pour Mme X, de Me Carbonnier, de la SCP Carbonnier Lamaze Rasle et associés pour la société Autoroutes du Sud de la France, de Me Rossi pour la société Egis Route - Scetauroute et de Me Rainaud, collaborateur de la SCP Menegaire Loubeyre Fauconneau pour la société Deschiron ;
- et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par le jugement attaqué du 21 décembre 2006, le Tribunal administratif de Poitiers a condamné solidairement la société ASF, la société Scetauroute et la société Deschiron à verser une indemnité de 58 693 euros à Mme X en réparation des préjudices résultant pour cette dernière des désordres liés à l'exécution de travaux de construction de l'autoroute A 837 ; qu'il a condamné les sociétés ASF et Scetauroute à garantir, à hauteur respectivement de 40 % et de 60 %, la société Deschiron des sommes mises à la charge de cette dernière et a condamné la société Deschiron à garantir, à hauteur de 40 %, la société Scetauroute des sommes mises à la charge de cette dernière ; que Mme X fait appel de ce jugement en tant qu'il limite à 5 000 euros le montant de l'indemnité devant lui être versée au titre de la réparation des troubles dans ses conditions d'existence en demandant que le montant total de cette indemnité soit porté à 108 693 euros ; que, par la voie de l'appel incident, les sociétés ASF, Scetauroute et Deschiron concluent, à titre principal, à l'annulation du jugement attaqué et, à titre subsidiaire, à sa réformation en demandant une réduction de l'indemnité mise solidairement à leur charge ; que, par la voie de l'appel provoqué, elles demandent également la réformation de ce jugement en tant qu'il se rapporte aux obligations de garantie instituées entre elles ;
Sur le principe de la responsabilité solidaire :
Considérant qu'il résulte de l'instruction , et en particulier du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, que les fissures apparues sur la façade de la maison appartenant à Mme X sont imputables non à l'état préexistant de cet immeuble mais, d'une part, aux vibrations des compacteurs lourds mis en oeuvre lors de l'exécution des travaux de construction de l'A 837 et, d'autre part, au tassement des sols de fondation dû à ces vibrations ainsi qu'au pompage très important et soudain et au rabattement de la nappe phréatique consécutifs à ces travaux ; que la perte de potentialité du puits appartenant à la requérante est également due aux tassements et modifications de la nappe phréatique générés par ces travaux ; que les sociétés ASF, Egis Route-Scetauroute et Deschiron ne sont donc pas fondées à soutenir que les désordres constatés, et constitués par la perte du puits ainsi que par les fissures en façade et leurs conséquences intérieures ne seraient pas imputables aux travaux de construction de l'autoroute ; que Mme X étant tiers à l'opération de travaux publics, elles ne sauraient se prévaloir utilement de ce qu'elles n'ont pas commis de faute pour s'exonérer de leur responsabilité ; que, par suite, elles ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal les a condamnées solidairement à indemniser Mme X du préjudice résultant des désordres imputables aux travaux litigieux ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X a subi pendant plusieurs années des troubles dans ses conditions d'existence et notamment dans la jouissance de son immeuble et dans la perte en eau de son puits ; que le tribunal a fait une juste évaluation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 5 000 euros ; que, par suite, les conclusions de Mme X tendant à l'augmentation du montant de l'indemnité lui ayant été allouée à ce titre doivent être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des conclusions de l'expert, que les fissures provoquées par les travaux ont occasionné dans la maison de Mme X aussi bien des désordres extérieurs qu'intérieurs et ont affecté aussi bien les murs que le dallage ; que l'intéressée a droit à la prise en charge de l'ensemble des frais nécessaires à la réparation intégrale de ces désordres, et notamment à la réfection des peintures et revêtements muraux ainsi dégradés ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'auraient été retenus des frais ne se rapportant pas à la réparation des désordres précités ou qu'il aurait été procédé à une évaluation erronée de ces frais et notamment de ceux se rapportant au forage d'un nouveau puits ; que les sociétés ASF, Egis Route-Scetauroute et Deschiron ne sont en conséquence pas fondées à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a fixé à 53 693 euros le montant de l'indemnité due en réparation du préjudice matériel subi par Mme X ;
Sur les appels provoqués relatifs aux obligations réciproques de garantie :
Considérant que les conclusions de la société ASF, de la société Scetauroute et de la société Deschiron, enregistrées après l'expiration du délai d'appel, présentent le caractère d'appels provoqués ; que, dès lors qu'il n'est pas fait droit à l'appel principal de Mme X tendant à l'augmentation de l'indemnité mise solidairement à la charge de ces trois sociétés, la situation de ces dernières ne se trouve pas aggravée par le présent arrêt ; que, par suite, leurs conclusions tendant à la réformation du jugement en tant qu'il se rapporte aux garanties devant être réciproquement assurées par ces sociétés ne sont pas recevables ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, les sociétés ASF, Egis Route-Scetauroute et Deschiron, qui ne sont pas parties perdantes dans l'instance les opposant à Mme X soient condamnés à verser à cette dernière la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées à ce titre par les sociétés ASF, Egis Route-Scetauroute et Deschiron ;
DECIDE :
Article 1 : La requête présentée par Mme X ainsi que les conclusions présentées par les sociétés ASF, Egis Route-Scetauroute et Deschiron sont rejetées.
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07BX00413