Vu la requête, enregistrée le 17 mai 1999 au greffe de la cour, présentée pour M. Erick X, demeurant ..., par la société civile professionnelle Faivre, Jeay-Faivre, Martin De La Moutte, avocats au barreau de Toulouse ;
M. X demande à la cour :
1° de réformer le jugement du 22 février 1999 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné conjointement et solidairement la société Compagnie générale des eaux et la société La Garonne à lui payer la somme de 71 370 F, qu'il estime insuffisante, en réparation des préjudices qu'il a subis du fait des désordres affectant l'immeuble lui appartenant au n° 1 bis de la rue Périssé, à Toulouse ;
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Classement CNIJ : 67-02-01-01 C+
67-02-02-03
67-03-04
2° de condamner solidairement la société Compagnie générale des eaux et la société La Garonne à lui payer, d'une part, la somme de 236 465, 59 F au titre des travaux de remise en l'état de l'immeuble et la somme de 125 000 F en réparation de la perte de jouissance arrêtée au 31 octobre 1998, avec actualisation au jour de l'arrêt à intervenir par application de l'index BT01 depuis le 1er août 1998, d'autre part, la somme de 14 359, 76 F au titre du remboursement du coût des mesures conservatoires qu'il a prises et celle de 25 326 F correspondant à des honoraires d'architecte, enfin, la somme de 50 000 F à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une somme de 50 000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
3° de condamner les sociétés précitées aux entiers dépens, y compris les honoraires de l'expert commis par le président du tribunal administratif de Toulouse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2004 :
- le rapport de M. Bayle, conseiller ;
- les observations de Me Jeay de la SCP Jeay-Faivre pour M. X ;
- les observations de Me Taburiau-Ducoin substituant Me Carcy pour la société La Garonne ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que l'immeuble situé au n° 1 de la rue Périssé, à Toulouse, que M. X a acquis le 7 février 1992, était alors affecté de fissures sur les faces sud et est ; que, selon le rapport d'une expertise amiable réalisée le 7 novembre 1991 et aux opérations de laquelle M. X a participé en sa qualité de futur acquéreur, l'état de l'immeuble ne rendait pas nécessaire des mesures conservatoires mais imposait une reprise des fondations du fait de la déstabilisation du sous-sol ; qu'à la demande du requérant, la société La Garonne , intervenant pour le compte de la société Compagnie générale des eaux, concessionnaire du réseau d'évacuation des eaux usées, a posé le 27 novembre 1991 au droit de l'immeuble, qui n'était pas raccordé à ce réseau, une boîte de branchement reliée à celui-ci et dotée d'une sortie ; qu'il est constant que ces travaux ont nécessité une fouille au centre de la chaussée et le creusement d'une tranchée perpendiculaire à l'immeuble jusqu'à à peine plus de trente centimètres de l'angle sud-est de l'immeuble ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Toulouse le 22 juillet 1992 et remis le 2 mai 1994, qui n'est pas entaché d'insuffisance, que ces travaux ont provoqué des mouvements du sol, déjà instable, lesquels se sont traduits par une fuite de l'alimentation en eau potable, l'éclatement de la boîte de branchement, un affaissement du trottoir et une obstruction de la sortie des eaux pluviales de la propriété ; qu'en favorisant le déversement des eaux dans le sous-sol, ces dégâts ont provoqué la fissuration importante de l'angle sud-est de la maison constatée en juin 1992 ; qu'il ne ressort pas des éléments au dossier que les travaux de branchement privé à l'égout aient contribué à ces désordres ; qu'ainsi, les responsabilités de la société Compagnie générale des eaux et de la société La Garonne sont engagées à l'égard de M. X, qui avait la qualité de tiers par rapport audits travaux ; que, toutefois, ces travaux ont seulement aggravé les désordres dont l'immeuble était déjà affecté ; que le tribunal administratif de Toulouse n'a pas fait une évaluation erronée de la part de responsabilité des sociétés précitées dans les désordres issus des travaux d'installation de la boîte de branchement, en la fixant à 50 % des conséquences dommageables ; qu'il suit de là que les conclusions de la requête sur ce point et les conclusions incidentes de la société Compagnie générale des eaux et de la société La Garonne tendant à leur mise hors de cause ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort du rapport d'expertise ordonné le 26 août 1996 et remis le 28 août 1998 que les nouveaux désordres constatés sur l'immeuble de M. X résultent du déversement des eaux usées sous l'immeuble, du fait de fuites de la canalisation privée d'évacuation, qui ont pour origine les déformations du terrain à la suite des travaux de la société La Garonne ; que, toutefois, ces derniers désordres n'ont été rendus possibles que par l'absence de travaux de reprise des fondations, dont la nécessité a été confirmée par le rapport d'expertise déposé au greffe du tribunal administratif le 2 mai 1994 et qui étaient évalués à la somme de 58 000 F hors taxes ; que M. X, qui s'est vu allouer une provision de 50 000 F par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif du 21 octobre 1996, au titre de la créance qu'il tenait sur les sociétés dont il recherche la responsabilité, n'établit pas avoir été dans l'impossibilité technique ou financière d'entreprendre ces travaux ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a écarté la responsabilité de la société Compagnie générale des eaux et de la société La Garonne dans l'aggravation des désordres survenus après le dépôt du premier rapport d'expertise ;
Sur les préjudices :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport de l'expertise ordonnée le 22 juillet 1992 que les frais de remise en l'état de l'immeuble s'élèvent à la somme de 111 715 F, comme les ont évalués les premiers juges ; qu'il n'est pas allégué que cette somme corresponde à d'autres travaux que ceux qui étaient nécessaires pour remédier aux désordres constatés en juin 1992, ni que les procédés envisagés n'étaient pas les moins onéreux possibles ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la société La Garonne , l'amélioration de l'état de l'immeuble ne justifie pas un abattement de vétusté ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X, qui a été informé des travaux utiles pour remettre en l'état son immeuble une première fois par le rapport de l'expertise amiable réalisée le 7 novembre 1991 et une seconde fois par le rapport de l'expertise judiciaire du 2 mai 1994, ne peut demander réparation des réductions de loyers qu'il a dû consentir à raison des désordres constatés en juin 1992 que, compte tenu du délai raisonnable pour exécuter ces travaux, pour la période échue au 31 décembre 1994 ; qu'il n'est pas contesté qu'à cette date, la perte financière résultant des réductions de loyers était de 31 025 F ;
Considérant, en troisième lieu, que le requérant demande la condamnation des sociétés à lui rembourser, d'une part, les honoraires qu'il a versés à un architecte, d'un montant de 25 360 F, d'autre part, la somme de 14 359, 76 F correspondant à diverses factures réglées à des artisans ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces produites que les prestations et travaux en cause n'ont porté que sur les travaux utiles pour remédier aux désordres constatés en juin 1992 ;
Considérant, en quatrième lieu, que, si le requérant demande le versement d'une indemnité de 50 000 F en réparation des sacrifices consentis sur son temps de travail et sur ses loisirs pour défendre ses intérêts, il ne justifie pas d'un tel préjudice ;
Considérant qu'il résulte de tout de qui précède, d'une part, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, compte tenu du partage de responsabilité, le tribunal administratif a fixé à la somme de 71 370 F la réparation qui lui était due conjointement et solidairement par la société Compagnie générale des eaux et la société La Garonne , d'autre part, que les conclusions des appels incidents de la société Compagnie générale des eaux et de la société La Garonne tendant à la réduction des demandes indemnitaires du requérant ne sauraient être accueillies ;
Sur les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : Les dépens comprennent les frais d'expertise ... Ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il a y lieu de laisser à la charge de la société Compagnie générale des eaux et de la société La Garonne les frais de l'expertise ordonnée le 22 juillet 1992 ; qu'en revanche, il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander réparation des désordres survenus après le dépôt du premier rapport d'expertise ; que cette circonstance justifie que les frais de la seconde expertise soient mis à la charge du requérant ; que, dès lors, la société La Garonne est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée à payer ces derniers frais solidairement avec la société Compagnie générale des eaux ;
Sur les conclusions indemnitaires de la société Compagnie générale des eaux :
Considérant que, si la société Compagnie générale des eaux demande la condamnation de M. X à réparer le préjudice qui résulterait pour elle du caractère abusif de la procédure, il ne résulte pas de l'instruction que la conduite de M. X justifie qu'il soit condamné à payer à la société une indemnité à ce titre ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées par M. X, par la société Compagnie générale des eaux et par la société La Garonne ne peuvent qu'être rejetées, ces trois parties étant tenues aux dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Les frais de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Toulouse le 17 octobre 1996 sont mis à la charge définitive de M. X.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 22 février 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : La requête de M. Erick X, les conclusions de la société Compagnie générale des eaux et le surplus des conclusions de la société La Garonne sont rejetées.
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N° 99BX01172