Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 14 mars 1996, présentée pour Mme Z... domiciliée ... (Gironde) ;
Mme MEUNIER demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 7 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à ce que la S.A. Arnodin, la S.A. Grivetto et le département de la Gironde soient solidairement condamnés à lui payer une indemnité de 17 275 F en réparation des dommages causés à ses biens par des projections de peinture provenant des travaux de réfection du pont de Branne ;
- de faire droit à sa demande d'indemnité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 1998 :
- le rapport de Melle ROCA, rapporteur ;
- les observations de Maître X... de la SCP Boireau-Nunez, avocat de Mme Sophie Z... ;
- les observations de Maître BERLAND, substituant Maître LASSERRE, avocat du département de la Gironde ;
- les observations de Maître Y..., substituant Maître KAPPELHOFF-LANCON, avocat de la société Arnodin ;
- et les conclusions de M. VIVENS, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de l'appel :
Considérant que, contrairement à ce que prétend le département de la Gironde, la requête présentée par Mme MEUNIER comporte une motivation juridique ; qu'elle est, dès lors, recevable ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des nouveaux documents produits en appel dont le constat d'huissier dressé le 1er juillet 1991, que la maison d'habitation et le jardin de Mme MEUNIER ont été souillés par des projections de peinture et de sable décapant provenant des travaux de rénovation du pont de Branne, entrepris à l'initiative du département de la Gironde, maître de l'ouvrage, pendant la période allant du mois d'octobre 1990 au mois de juillet 1991 et confiés au terme d'un marché de travaux publics à la S.A. Arnodin qui a sous-traité le lot peinture à la S.A. Grivetto ; que Mme MEUNIER, qui a la qualité de tiers par rapport à cet ouvrage, est, dès lors, fondée à soutenir que la responsabilité solidaire du département de la Gironde, de l'entreprise Arnodin et de l'entreprise Grivetto est engagée à son égard en raison du préjudice anormal et spécial qu'elle a subi ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande à fin d'indemnité ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de statuer, par la voie de l'effet dévolutif, sur la demande présentée par Mme MEUNIER devant les premiers juges ;
Sur le préjudice :
Considérant que Mme MEUNIER s'est bornée à réclamer en première instance le paiement de la somme de 17 275 F correspondant au coût de réparation des dommages causés à son immeuble et à son jardin ; qu'elle n'est, dans ces conditions, pas recevable à solliciter en appel une indemnité prenant en compte le coût de réfection de la peinture de son véhicule automobile ;
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice matériel subi par la requérante lié aux dégradations causées à sa maison d'habitation et au jardin attenant en lui allouant à ce titre la somme non contestée de 17 275 F ;
Sur l'appel en garantie formé par le département de la Gironde :
Considérant que les conclusions d'appel en garantie présentées par le département de la Gironde à l'encontre de la société Grivetto ont été formulées pour la première fois en appel ; qu'elles sont, par suite, irrecevables ;
Considérant qu'il ressort des articles 3-2-1 et 3-2-4 du cahier des clauses techniques particulières annexé au marché conclu entre le département de la Gironde et la société Arnodin que celle-ci avait pour mission d'assurer en toutes circonstances une exécution correcte des travaux, et en particulier de prendre toutes les mesures nécessaires, telles la mise en place de toiles, de bâches, d'écrans de protection, pour éviter toutes projections sur le milieu environnant ; que la responsabilité des dommages allégués doit donc lui être attribuée ; que la société Arnodin, qui ne saurait se prévaloir de la faute de son sous-traitant, n'invoque aucune faute commise par le département susceptible d'atténuer sa responsabilité ; qu'il suit de là que le département de la Gironde est fondé à demander à être garanti en totalité par la société Arnodin des condamnations prononcées à son encontre ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société Grivetto, qui n'a pas la qualité de partie perdante à l'égard du département de la Gironde, soit condamnée à verser à ce dernier une somme au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a engagés ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 décembre 1995 est annulé.
Article 2 : Le département de la Gironde, la S.A. Arnodin et la S.A. Grivetto sont solidairement condamnés à verser à Mme MEUNIER la somme de 17 275 F.
Article 3 : La S.A. Arnodin garantira le département de la Gironde de la condamnation prononcée à son encontre par l'article 2 du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus de la requête de Mme MEUNIER et le surplus des conclusions incidentes du département de la Gironde sont rejetés.