Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 août 1995, présentée par la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN (F.E.N.E.C.), domicilié ... (Pyrénées-Orientales) et l'ASSOCIATION "CERDAGNE NOTRE TERRE" domiciliée Ferme Bilalte à Saillagouse (Pyrénées-Orientales), représentées par leur présidente en exercice ;
Les associations demandent à la cour :
- d'annuler le jugement du 27 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à ce que soit ordonné le sursis à exécution de l'arrêté du 6 février 1995 par lequel le maire de Sainte-Léocadie a accordé à la S.A. HICOFIS un permis de construire ;
- de prononcer le sursis à exécution demandé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n 87-502 du 8 juillet 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 1997 :
- le rapport de M. BEC, rapporteur ;
- les observations de Maître GRANDJEAN, avocat de la commune de Sainte-Léocadie et de la S.A. HICOFIS POLIGNAN INDUSTRIAL ;
- et les conclusions de M. BRENIER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 6 février 1995 dont les associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE" demandent qu'il soit ordonné le sursis à exécution, le maire de Sainte-Léocadie a délivré à la S.A. HICOFIS un permis de construire pour la réalisation de deux bâtiments de 24 logements à usage d'habitation ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Sainte-Léocadie :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la présidente des associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE", qui a produit les courriers et les accusés de réception correspondants, a bien notifié à la commune de Sainte-Léocadie et à la S.A. HICOFIS, dans les conditions prescrites par l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, le texte du recours formé devant la cour contre le jugement du 27 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant au sursis à exécution de l'arrêté du maire de Sainte-Léocadie accordant un permis de construire à la S.A. HICOFIS ; que, par suite, la commune de Sainte-Léocadie n'est pas fondée à soutenir que la requête des associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE" serait irrecevable ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution de l'arrêté du 6 février 1995 :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des pièces du dossier que l'avis de l'architecte des bâtiments de France, consulté au titre de l'article 13b de la loi du 31 décembre 1913, prescrivait une couverture en lauzes ; qu'en assortissant cette prescription d'une alternative constituée par l'emploi de bardeaux, matériau sans rapport avec la lauze préconisée par l'architecte des bâtiments de France, le permis de construire litigieux ne peut être regardé comme ayant été délivré conformément à l'avis de l'architecte des bâtiments de France ; que ce moyen, qui a trait à la légalité du permis, relève de la même cause juridique que les autres moyens soulevés à l'encontre du permis litigieux devant le tribunal administratif de Montpellier ; que les associations requérantes sont, par suite, recevables à l'invoquer pour la première fois en appel ; qu'un tel moyen paraît en l'état de l'instruction, sérieux et par suite de nature à justifier qu'il soit sursis à l'exécution du permis de construire litigieux ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L.145-3 du code de l'urbanisme : "L'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs et villages existants, sauf si le respect des dispositions prévues aux I et II ci-dessus ou la protection contre les risques naturels imposent la délimitation de hameaux nouveaux intégrés à l'environnement" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire litigieux a été accordé pour la construction d'un ensemble de logements situé à proximité d'un groupe de constructions récentes, dont la mairie, mais séparé du centre du village par des espaces non construits, entourant l'église de Sainte-Léocadie ; qu'ainsi, le projet pour lequel le permis a été accordé ne peut être regardé comme étant situé en continuité avec les secteurs urbanisés de la commune ; que, par suite, le moyen tiré de la violation par le permis litigieux de l'article L.145-3 du code de l'urbanisme paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et par suite de nature à justifier l'annulation du permis litigieux ; que l'exécution de ce permis serait de nature à porter aux intérêts que les associations requérantes ont pour objet de défendre un préjudice difficilement réparable ; que, par suite, les associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE" sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête, et à demander qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté en date du 6 février 1995 par lequel le maire de Sainte-Léocadie a accordé à la S.A. HICOFIS le permis de construire litigieux ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que la commune de Sainte-Léocadie et la S.A. HICOFIS succombent dans la présente instance ; que leur demande tendant à ce que les associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE" soient condamnées à leur verser une somme au titre des frais qu'elles ont exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête des associations "FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN" et "CERDAGNE NOTRE TERRE", il sera sursis à l'exécution de l'arrêté du maire de Sainte-Léocadie en date du 6 février 1995 accordant un permis de construire à la S.A. HICOFIS.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Sainte-Léocadie et de la S.A. HICOFIS tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.