Vu la requête, enregistrée le 8 février 1994 au greffe de la cour présentée pour la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC représentée par son liquidateur, M. C..., ... (Haute Garonne) ;
La SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 septembre 1993, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos de 1985 à 1987 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; 19-04-02-01-03-01 C
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 1995 :
- le rapport de M. LOOTEN, conseiller ; - les observations de Me C..., liquidateur de la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC ; - et les conclusions de M. BOUSQUET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC a fait l'objet en 1988 d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1985, 1986 et 1987 ; que la vérificateur a constaté que l'entreprise avait réévalué son fonds de commerce mais n'en avait pas tiré les conséquences fiscales et avait partiellement compensé le profit comptable résultant de cette réévaluation en passant en pertes diverses créances clients dont le caractère irrécouvrable lui paraissait avéré ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " ... le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues à l'article R.211." ; qu'aux termes dudit article R. 211 : " ... les jugements et arrêts sont notifiés par les soins du greffe à toutes les parties à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ..." ;
Considérant que si l'accusé de réception de la lettre de signification du jugement attaqué a été retourné annoté de la mention "n'habite pas à l'adresse indiquée", il n'est pas sérieusement contesté que la société avait alors son siège à l'adresse indiquée au greffe du tribunal ; qu'il suit de là que la notification du jugement adressée à la société requérante le 15 novembre 1993 n'a pas fait courir le délai de l'appel et que la requête enregistrée au greffe de la cour le 8 février 1994, n'était pas tardive ;
Sur le caractère imposable de l'écart de réévaluation :
Considérant qu'il n'est pas contesté en appel qu'une écriture de réévaluation dégage un profit d'égal montant soumis à l'impôt dans les conditions de droit commun ; que la société requérante soutient cependant, dans le dernier état de ses écritures, que l'article 12 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 83-353 du 30 avril 1983 exclut la réévaluation du fonds de commerce et que par suite la décision de réévaluer la valeur comptable de son fonds de commerce ne lui serait pas opposable ; qu'il y a lieu d'ordonner un supplément d'instruction à l'effet de permettre à l'administration de présenter ses observations sur ce moyen ;
Sur le caractère déductible des pertes sur créances :
En ce qui concerne la créance Siteg :
Considérant que la société requérante n'établit pas avoir constaté comptablement la perte de la créance qu'elle détenait sur la société Siteg avant l'ouverture de l'exercice 1985 et avoir ainsi par erreur maintenu cette créance à son bilan d'ouverture de l'exercice 1985 ; qu'en outre, ladite société requérante, qui s'est bornée à une simple relance pour obtenir le paiement de cette créance, n'en établit pas le caractère irrécouvrable à la clôture de l'exercice 1985 ; qu'en tout état de cause, la société requérante, ne justifie pas d'une contrepartie de l'avantage qu'elle a consenti à la société Siteg ;
En ce qui concerne la créance S.A.R.L. Gonzales :
Considérant que la circonstance que la S.A.R.L. Gonzales a été mise en règlement judiciaire en 1985 ne pouvait faire regarder la créance que la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC détenait sur cette société comme irrécouvrable dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la clôture de cette liquidation n'est pas intervenue avant la fin de l'exercice 1985 et que la société requérante s'est bornée en 1985 à lui expédier une simple lettre de rappel ;
En ce qui concerne les créances S.A. S.N.I.M., S.A.R.L. Kostiw-Fourcade, S.A.R.L. Martin Rosset et
B...
:
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société requérante s'est bornée en 1985 à adresser une simple lettre de rappel à la S.A. S.N.I.M., dont la liquidation n'a été clôturée qu'en 1989, à la S.A.R.L. Kostiw-Fourcade, dissoute le 14 août 1987, à la S.A.R.L. Martin Rosset dont la société requérante ne précise pas la date de dissolution, à M. B... pour qui la date de clôture de la liquidation judiciaire n'a pas non plus été précisée ; qu'ainsi le caractère irrécouvrables des créances détenues sur chacun de ces débiteurs à la clôture de l'exercice 1985 n'est pas établi ;
En ce qui concerne les autres créances passées en pertes en 1985 :
Considérant que si la société requérante affirme que M. J... aurait disparu, elle ne fait état que d'une lettre de rappel expédiée le 15 avril 1985 ; que s'agissant des créances de la S.A.R.L. I.D.G., de Mme X..., de M. D..., de la S.A.R.L. Gaubert Dourdagne, de M. Y..., de M. E..., de la société Sacherie Toulousaine, la société requérante s'est bornée pour les deux premières de ces créances à une lettre de rappel expédiée pour la première en 1983 et pour la seconde en 1985 et ne fait état d'aucune diligence pour les autres ; que la société requérante reconnaît par ailleurs avoir renoncé volontairement à ces créances ; que s'agissant des créances sur les époux F..., MM. G..., H..., I..., la S.A.R.L. Café des négociants, Mme A..., la société requérante se borne à faire état de la mauvaise volonté de ces débiteurs ; qu'enfin, la circonstance que M. Z... soit décédé ne justifie pas du caractère irrécouvrable de la créance que la société requérante détenait sur lui ;
Considérant que pour l'ensemble des créances en litige, la société requérante n'établit pas que ces sommes étaient définitivement irrécouvrables à la clôture de l'exercice ; que dès lors les sommes en cause n'avaient pas le caractère de pertes définitives et ne pouvait en tout état de cause venir en diminution des profits réalisés par la société requérante en cours d'exercice ;
Sur les pénalités de taxation d'office :
Considérant en premier lieu que la décision de l'administration d'appliquer les pénalités de l'article 1733 1 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, pour les exercices clos en 1985 et 1986 et de l'article 1728 du même code pour l'exercice 1987, a été motivée par l'indication portée, au moins sur la notification de redressement du 19 décembre 1988, que faute d'avoir déférée à la mise en demeure d'avoir à déposer les déclarations de résultats dans le délai de trente jours après deuxième mise en demeure, la SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE DU LANGUEDOC encourait la taxation d'office de ses résultats ; que cette information a été réitérée, pour toutes les années en litige, dans la réponse aux observations du contribuable en date du 12 avril 1989 ;
Considérant en second lieu qu'il ressort de l'ensemble des dispositions du code général des impôts et notamment de son article 1736 que, jusqu'à l'entrée en vigueur de l'article 112 de la loi de finances pour 1993 du 30 décembre 1992, le législateur a entendu exclure l'obligation pour l'administration de suivre une procédure contradictoire ; que l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 susvisé invoqué par la société requérante, n'a pu avoir légalement pour effet de lui imposer une telle obligation non prévue par la loi ; que le moyen tiré par la société requérante de ce que l'instruction 13 A-1-84 du 4 juin 1984 prévoirait pour l'administration l'obligation d'informer le contribuable, lors de la motivation des pénalités, de ce qu'il dispose d'un délai de trente jours pour faire connaître ses observations ne peut être utilement soutenu sur le fondement de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 dès lors qu'une telle obligation n'est pas non plus prévue par la loi ; que l'instruction 13 L 2 92, du 25 février 1992, postérieure aux années en litige, ne saurait en tout état de cause être invoquée utilement ;
Considérant en troisième lieu que le moyen tiré par la société requérante d'une violation de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant, dès lors que cette disposition n'est, en tout état de cause, applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions ; que par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'établissement des pénalités de taxation d'office serait irrégulière ;
Article 1er : Il est ordonné, avant-dire-droit, un supplément d'instruction à l'effet de permettre à l'administration de présenter ses observations sur le moyen tiré de ce que l'article 12 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 83-353 du 30 avril 1983 excluerait la réévaluation du fonds de commerce et ferait obstacle à l'imposition de la plus-value réalisée lors de la réévaluation du fonds de commerce de la société requérante.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.