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29/03/2023 | FRANCE | N°472424

France | France, Conseil d'État, 29 mars 2023, 472424


Vu la procédure suivante :

M. B... C... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à Nantes métropole et, le cas échéant, au préfet de la Loire-Atlantique, par substitution à la collectivité, de prendre, dans le respect du droit de grève, toutes les mesures nécessaires au maintien de la continuité du service public de l'élimination des ordures, dans le ressort de la commune de Nantes, notamment par réquisition d'agents, par la mise en place d'un di

spositif de collecte des ordures avec l'installation de conteneurs-pou...

Vu la procédure suivante :

M. B... C... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à Nantes métropole et, le cas échéant, au préfet de la Loire-Atlantique, par substitution à la collectivité, de prendre, dans le respect du droit de grève, toutes les mesures nécessaires au maintien de la continuité du service public de l'élimination des ordures, dans le ressort de la commune de Nantes, notamment par réquisition d'agents, par la mise en place d'un dispositif de collecte des ordures avec l'installation de conteneurs-poubelles mobiles de grande capacité ou de bennes supplémentaires, le nettoyage des voies publiques, le cas échéant par l'intermédiaire d'un opérateur privé et la prise de toutes mesures utiles pour garantir l'accès aux centres de traitement des déchets et en assurer le stockage. Il a également demandé que ces injonctions soient assorties d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir. Par une ordonnance n° 2303964 du 24 mars 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 et 28 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la minute de l'ordonnance attaquée ne comporte pas la signature du magistrat qui l'a rendue ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'absence de ramassage des ordures produites par l'exploitation de son établissement entraîne leur amoncellement et, ainsi, des risques de chute pour les piétons, des problèmes d'accès à son restaurant, des risques d'incendies en marge des manifestations, une prolifération des animaux nuisibles et des conséquences préjudiciables à sa santé et à celle de son épouse malade ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ;

- le défaut de ramassage des ordures sur le territoire de la collectivité est constitutif d'un péril grave et imminent et caractérise une carence de la part de Nantes métropole, autorité normalement compétente pour organiser ce ramassage et qui s'est abstenue de mettre en place un service minimum ;

- en raison de la carence de Nantes métropole, il appartient au préfet de la Loire-Atlantique, en vue de satisfaire aux obligations posées par les articles L. 541-1 et suivants du code de l'environnement, et en application de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, d'une part, de procéder à la réquisition ou au recrutement d'agents compte tenu de la menace à l'ordre public et, d'autre part, de prendre toutes les mesures accessoires de nature à garantir la continuité du service public d'enlèvement des ordures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. M. B... C... A..., qui possède et gère un restaurant à Nantes, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à Nantes Métropole et au préfet de la Loire-Atlantique de prendre, dans le respect du droit de grève, toutes les mesures nécessaires au maintien de la continuité du service public de l'élimination des ordures dans la ville, notamment par la réquisition d'agents. Par l'ordonnance du 24 mars 2023 qu'il attaque, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande.

3. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la minute de l'ordonnance attaquée ne porterait pas la signature du magistrat qui l'a rendue, en méconnaissance du premier alinéa de l'article R. 742-5 du code de justice administrative, manque en fait.

4. En second lieu, le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article.

5. Il ne ressort pas du dossier, notamment des photographies produites en première instance et en appel, que, depuis le déclenchement de la grève des éboueurs à Nantes et à la date de la présente ordonnance, les déchets issus de l'exploitation du commerce du requérant et qu'il entrepose à une dizaine de mètres de l'entrée de celui-ci seraient susceptibles de rendre dangereuse la circulation des piétons, d'entraver l'accès à l'établissement ou d'en détourner la clientèle potentielle en raison des nuisances visuelles et olfactives qu'ils provoquent. Il ressort à cet égard des énonciations non contestées sur ce point de l'ordonnance attaquée que les services de Nantes métropole procèdent à des opérations ponctuelles de ramassage, dont il a lui-même bénéficié en cours d'instance devant le juge des référés du tribunal administratif. En outre, si l'accumulation d'ordures ménagères entre deux opérations d'enlèvement est de nature à provoquer une recrudescence des rats, le requérant ne fait pas état de la présence de nuisibles à l'intérieur de son établissement ni n'indique en quoi la présence nocturne de ces derniers aux alentours affecterait de façon grave et immédiate ses intérêts. Il ne ressort pas davantage du dossier que le site litigieux serait particulièrement exposé au risque d'incendies susceptibles d'être provoqués en marge de manifestations organisées dans le cadre du mouvement social en cours, ni que l'embrasement des poubelles serait susceptible d'affecter le restaurant. Enfin, le requérant ne produit pas d'élément actualisé sur les conséquences sanitaires de la grève des éboueurs ni d'élément circonstancié concernant l'incidence, sur la santé fragile de son épouse ou sur la sienne, d'une accumulation de déchets aux abords de son restaurant.

6. Dans ces conditions, et en dépit des multiples et regrettables désagréments qu'occasionne cette grève pour sa conjointe et lui-même, l'existence, à la date de la présente ordonnance, d'une situation d'urgence impliquant qu'une mesure visant à sauvegarder le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé doive être prise dans un délai de quarante-huit heures, n'est pas établie.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter sa requête d'appel selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... C... A....

Fait à Paris, le 29 mars 2023

Signé : Alexandre Lallet


Synthèse
Numéro d'arrêt : 472424
Date de la décision : 29/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mar. 2023, n° 472424
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:472424.20230329
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