Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au directeur territorial de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de lui rétablir le bénéfice des conditions matérielles d'accueil et le versement de l'allocation pour demandeur d'asile dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'ordonnance à venir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2003781 du 22 mai 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 et 19 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler l'ordonnance du 22 mai 2020 ;
3°) de faire droit à sa demande de première instance ;
4°) de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le juge de première instance a commis une erreur de droit en méconnaissant les dispositions de l'article L. 744-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'arrêté de transfert pris à l'encontre du requérant est devenu caduc ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'a pas contrôlé, conformément à son office, les circonstances entourant la suspension ou le retrait des conditions matérielles d'accueil ;
- la décision prise par l'OFII porte une atteinte grave et manifestement illégale à son droit à l'asile eu égard à son caractère disproportionné, dès lors qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 744-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 et 22 juin 2020, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas présenté d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Les parties ont été informées, sur le fondement de l'article 9 de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, de ce qu'aucune audience ne se tiendrait et de ce que la clôture de l'instruction serait fixée le 22 juin 2020 à 16 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte de l'instruction que M. B..., ressortissant gambien, né le 20 février 1991, a présenté une demande d'asile enregistrée selon la procédure dite " Dublin " le 12 mars 2019 sur le territoire français et a bénéficié des conditions matérielles d'accueil proposées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), conformément aux dispositions des articles L. 744-1 et L. 744-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par décision du 6 février 2020, notifiée le 20 février 2020, l'OFII a procédé à la suspension du bénéfice de ces conditions matérielles d'accueil, en raison de l'absence de présentation du requérant aux autorités compétentes les 21 et 28 novembre 2019 dans le cadre de son assignation à résidence. Après avoir demandé en vain leur rétablissement, M. B... a saisi, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'OFII de lui rétablir le bénéfice des conditions matérielles d'accueil et de lui verser l'allocation pour demandeur d'asile. Il relève appel de l'ordonnance du 22 mai 2020 rejetant cette demande.
Sur l'office du juge des référés :
2. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".
3. D'une part, les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative confèrent au juge administratif des référés le pouvoir d'ordonner toute mesure dans le but de faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale par une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public. Il résulte tant des termes de cet article que du but dans lequel la procédure qu'il instaure a été créée que doit exister un rapport direct entre l'illégalité relevée à l'encontre de l'autorité administrative et la gravité de ses effets au regard de l'exercice de la liberté fondamentale en cause.
4. D'autre part, si la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur demande, est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile, le caractère grave et manifestement illégal d'une telle atteinte s'apprécie en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et de la situation du demandeur. Ainsi, le juge des référés ne peut faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative en adressant une injonction à l'administration que dans le cas où, d'une part, le comportement de celle-ci fait apparaître une méconnaissance manifeste des exigences qui découlent du droit d'asile et où, d'autre part, il résulte de ce comportement des conséquences graves pour le demandeur d'asile, compte tenu notamment de son âge, de son état de santé ou de sa situation de famille. Il incombe au juge des référés d'apprécier, dans chaque situation, les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée.
Sur la demande en référé :
5. En vertu de l'article L. 744-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil prévues à l'article L. 744-1 est subordonné : / (...) 2° Au respect des exigences des autorités chargées de l'asile, notamment en se rendant aux entretiens, en se présentant aux autorités et en fournissant les informations utiles afin de faciliter l'instruction des demandes. (...) ". Aux termes de l'article D. 744-34 du même code : " Le versement de l'allocation prend fin, sur demande de l'Office français de l'immigration et de l'intégration : / (...) 2° A compter de la date à laquelle l'attestation de demande d'asile a été retirée par l'autorité administrative ou n'a pas été renouvelée en application de l'article R. 742-3 ; (...) ".
6. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'OFII l'a fait valoir devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, que M. B... n'est plus titulaire d'une attestation de demande d'asile en cours de validité depuis le 11 décembre 2019, compte tenu de l'absence de renouvellement de la dernière attestation qui lui avait été délivrée, le 12 août 2019, par le préfet des Bouches-du-Rhône. Par suite et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la légalité de la décision du 6 février 2020 par laquelle l'OFII a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil initialement accordées à M. B..., qui ne demande pas la suspension de cette décision, il résulte en tout état de cause des dispositions précitées de l'article D. 744-34 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'OFII n'a pas porté d'atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile en refusant de rétablir le bénéfice des conditions matérielles et le versement de l'allocation de demandeur d'asile à M. B... dès lors que celui-ci n'est plus titulaire d'une attestation de demande d'asile valide.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire, que l'appel de M. B... ne peut être accueilli. Il y a donc lieu de rejeter sa requête, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.