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30/03/2020 | FRANCE | N°439687

France | France, Conseil d'État, 30 mars 2020, 439687


Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire rectificatif et un mémoire, enregistrés les 20, 21 et 30 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Efinovia demande au Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des décisions implicites du

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire rectificatif et un mémoire, enregistrés les 20, 21 et 30 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Efinovia demande au Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des décisions implicites du

23 février 2020 par lesquelles la garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé, d'une part, d'établir la voie de recours permettant au juge administratif, même d'office, de fixer un délai d'exécution des éléments contraignants de la décision C (2015) 5394 du 4 août 2015 de la Commission européenne et de prononcer une astreinte contre les personnes destinataires de cette décision, dans des conditions effectives et équivalentes aux voies de recours des articles L. 911-4 et L. 911-5 du code de justice administrative et, d'autre part, d'indemniser la société requérante en raison de l'absence d'une telle voie de recours donnant lieu à la décision, qui lui est préjudiciable, du 19 novembre 2019, n° 430753 par laquelle le Conseil d'Etat a rejeté son pourvoi en cassation ;

2°) d'enjoindre à la ministre d'adresser, dans un délai de huit jours à compter de la notification de la présente ordonnance, l'acte d'acceptation de la cession de la créance professionnelle, prévu par l'article L.313-29 du code monétaire et financier, à la banque Raiffeisen ;

3°) de prononcer une astreinte de 2 000 euros par jour, à l'encontre de l'Etat, s'il n'est pas justifié de l'exécution de ce qui précède dans les délais impartis, à charge pour la ministre de communiquer au président du tribunal administratif une copie de l'acte justifiant des mesures prises pour exécuter l'ordonnance du juge des référés ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que les décisions contestées ont pour effet de priver la société requérante, son directeur général et sa famille de ressources financières, alors même que celui-ci doit, à très brèves échéances, faire face à des charges incompressibles ; la circonstance que celui-ci ait la possibilité de chercher une autre source de rémunération, sans succès à ce stade, n'est pas de nature à retirer à la situation son caractère urgent ;

- il existe des doutes sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;

- elles sont entachées de vices de légalité interne et externe, tous opérants ;

- elles sont entachées d'un vice de légalité externe en ce que la demande formulée par la requérante les 23 et 30 décembre 2019 est complète, régulière et ne souffre d'aucun vice de forme ou de procédure ;

- elles souffrent d'une illégalité externe tirée de la méconnaissance de l'obligation de signature ;

- la deuxième décision contestée souffre de plusieurs illégalités externes tirées, en premier lieu, de la méconnaissance du " droit à communication ", en deuxième lieu, de l'obligation de procédure contradictoire préalable, enfin, de l'obligation de motivation ;

- les décisions contestées sont entachées de vices communs d'illégalité interne, tirés de la méconnaissance, en premier lieu, de l'obligation de mise en oeuvre des dispositions du droit de l'Union européenne prévue par l'article 88-1 de la Constitution du 4 octobre 1958, en deuxième lieu, des stipulations des articles 13 et 19 du traité sur l'Union européenne et de l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, enfin, du devoir de coopération loyale et des principes d'effectivité et d'équivalence ;

- la deuxième décision contestée est entachée de vices supplémentaires d'illégalité interne, suffisants pour justifier sa suspension, quand bien même la première décision ne pouvait être suspendue, et tirés d'une méconnaissance de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment ses arrêts Köbler, C-224/01 du 30 septembre 2003, Simmenthal C-106/77 du 7 mars 1978, Foto-Frost C-314/85 du 22 octobre 1987 et Costanzo

C-103/88 du 22 juin 1989 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". L'article L313-29 du code monétaire et financier dispose que " Sur la demande du bénéficiaire du bordereau, le débiteur peut s'engager à le payer

directement : cet engagement est constaté, à peine de nullité, par un écrit intitulé : "Acte d'acceptation de la cession ou du nantissement d'une créance professionnelle". Dans ce cas, le débiteur ne peut opposer à l'établissement de crédit ou à la société de financement ou du FIA mentionné à l'article L. 313-23 les exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le signataire du bordereau, à moins que l'établissement de crédit ou la société de financement ou le FIA mentionné à l'article L. 313-23, en acquérant ou en recevant la créance, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur. "

2. Il ressort des pièces du dossier que la société Efinovia a demandé au Conseil d'Etat, par une requête n° 430753 introduite le 9 mai 2019, d'une part, de prononcer à l'encontre de l'Etat une astreinte fixée à la somme de 1 000 000 euros par jour, à compter du 23 mai 2019, en vue de la faire figurer comme une entreprise non bénéficiaire dans le groupe de contrôle prévu par le plan d'évaluation présenté par la France à la Commission européenne et examiné par cette dernière dans sa décision du 4 août 2015 et, d'autre part, de liquider, à titre provisoire ou avant-dire droit dès le 30 mai 2019, une partie du produit de l'astreinte en sa faveur, pour un montant de 2 000 000 euros et, à titre subsidiaire, de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, tout en prononçant une astreinte provisoire de 1 000 000 euros par jour. Par une décision en date du 19 décembre 2019, le Conseil d'Etat a rejeté cette requête. S'estimant, par ailleurs, bénéficiaire d'une créance sur l'Etat d'un montant de 276 millions, la société requérante a souhaité céder le 11 mars 2020 à la banque Raffeisen la partie de cette créance correspondante à la rémunération due à M. B... A..., son dirigeant, pour un montant de 720 000 euros. Elle a sollicité du garde des sceaux, ministre de la justice, l'acte d'acception prévu par l'article L. 313-29 du code monétaire et financier.

3. Par la présente requête, la société Efinova demande au juge des référés du Conseil d'Etat, en premier lieu, de suspendre les décisions implicites du 23 février 2020 par lesquelles la garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé, d'une part, d'établir la voie de recours permettant au juge administratif, même d'office, de fixer un délai d'exécution des éléments contraignants de la décision C (2015) 5394 du 4 août 2015 de la Commission européenne et de prononcer une astreinte contre les personnes destinataires de cette décision et, d'autre part, d'indemniser la société requérante en raison de l'absence d'une telle voie de recours ayant conduit à la décision du Conseil d'Etat rejetant , du 19 novembre 2019, rejetant sa requête . Elle demande, en second lieu, que soit enjoint à la garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder à l'acceptation de la cession de la créance professionnelle mentionnée ci-dessus.

4. La société requérante soutient que les décisions litigieuses sont entachées de vices de légalité interne et externe en ce que sa demande formulée les 23 et 30 décembre 2019 était complète et régulière, que les réponses ministérielles implicites méconnaissent l'obligation de signature, le droit à communication, l'obligation de procédure contradictoire préalable et celle de motivation ; qu'elles méconnaissent, en outre, l'obligation de mise en oeuvre des dispositions du droit de l'Union européenne prévue par l'article 88-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ainsi que les stipulations des articles 13 et 19 du traité sur l'Union européenne et de l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et méconnaissent également tant le devoir de coopération loyale que les principes d'effectivité et d'équivalence et la jurisprudence de la

Cour de justice de l'Union européenne.

5. Aucun de ces moyens n'est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de ces décisions. Par suite, il y a lieu de rejeter la requête de la société Efinovia selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la société Efinovia est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Efinovia.

Copies en sera adressée à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 439687
Date de la décision : 30/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2020, n° 439687
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:439687.20200330
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