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30/04/2019 | FRANCE | N°430051

France | France, Conseil d'État, 30 avril 2019, 430051


Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration d'indiquer le ou les centres d'accueil pour demandeurs d'asile susceptibles de l'accueillir soit dans le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile, soit dans le cadre du dispositif d'hébergement d'urgence, dans un délai de quarante-huit heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 100 eur

os par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'enjoindre...

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration d'indiquer le ou les centres d'accueil pour demandeurs d'asile susceptibles de l'accueillir soit dans le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile, soit dans le cadre du dispositif d'hébergement d'urgence, dans un délai de quarante-huit heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de mettre à sa disposition un hébergement d'urgence adapté pour elle et ses enfants dans un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 1902891 du 5 avril 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 19 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

3°) de faire droit à sa demande de première instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à

Me Fabienne Giolet, avocat de MmeB..., en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75-I de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que, atteinte d'une maladie dégénérative, elle vit seule avec ses cinq enfants dont l'un, âgé de cinq ans, souffre d'un retard mental nécessitant une prise en charge adaptée ;

- une atteinte grave et manifestement illégale est portée à son droit à un hébergement d'urgence, corollaire du droit d'asile, dès lors qu'aucune solution d'hébergement ne lui a été proposée depuis six mois ;

- l'ordonnance contestée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'elle a considéré que l'extrême vulnérabilité de sa situation ainsi que de celle de ses enfants était compensée par le bénéfice de l'allocation majorée de demandeur d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive (UE) n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". L'article L. 522-3 de ce code prévoit que le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. A cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée.

2. Il résulte de l'instruction que MmeB..., ressortissante syrienne, entrée en France en septembre 2018, a sollicité l'asile le 8 octobre 2018 en même temps que ses trois enfants majeurs et ses deux enfants mineurs. Elle a accepté l'offre de prise en charge proposée le même jour par l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Elle perçoit l'allocation pour demandeur d'asile additionnelle majorée. Elle a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de constater l'atteinte grave et manifestement illégale qu'auraient portée l'Office et le préfet des Bouches-du-Rhône à son droit de bénéficier d'un hébergement d'urgence. Par une ordonnance du 5 avril 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

3. Si, d'une part, la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur demande, est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile, le caractère grave et manifestement illégal d'une telle atteinte s'apprécie en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et de la situation du demandeur. Ainsi, le juge des référés, qui apprécie si les conditions prévues par l'article L. 521-2 du code de justice administrative sont remplies à la date à laquelle il se prononce, ne peut faire usage des pouvoirs qu'il tient de cet article en adressant une injonction à l'administration que dans le cas où, d'une part, le comportement de celle-ci fait apparaître une méconnaissance manifeste des exigences qui découlent du droit d'asile et où, d'autre part, il résulte de ce comportement des conséquences graves pour le demandeur d'asile, compte tenu notamment de son âge, de son état de santé ou de sa situation de famille.

4. Il appartient, d'autre part, aux autorités de l'Etat de mettre en oeuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique et sociale. Une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette tâche peut faire apparaître, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée. Il incombe au juge des référés d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée.

5. Le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B...au motif qu'il résultait de l'instruction que sa situation ainsi que celle de ses enfants caractérisaient certes une vulnérabilité eu égard à l'absence de solution d'hébergement et à son état de santé ainsi que celui d'un de ses enfants mineurs, mais que ces circonstances ne permettaient pas de considérer que la requérante et ses enfants devaient être regardés comme prioritaires, pour l'accès à un hébergement stable, sur les autres familles se trouvant dans une situation similaire. Il en a déduit que, eu égard à l'absence de disponibilité de places adaptées à une famille composée de quatre adultes et de deux enfants, au versement de l'allocation majorée de demandeur d'asile et au suivi médical dont bénéficie son enfant mineur, l'intéressée n'apportait pas d'éléments justifiant d'une atteinte grave et manifestement illégale à ses libertés fondamentales au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. La requérante n'apporte en appel aucun élément de nature à infirmer la solution ainsi retenue par le juge des référés de première instance.

6. Il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel de Mme B... ne peut être accueilli. Il y a donc lieu de rejeter sa requête, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75-I de la loi du 10 juillet 1991, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sans qu'il y ait lieu d'admettre l'intéressée au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A...B....

Copie en sera adressée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 430051
Date de la décision : 30/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 avr. 2019, n° 430051
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:430051.20190430
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