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18/05/2018 | FRANCE | N°412059

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre jugeant seule, 18 mai 2018, 412059


Vu la procédure suivante :

M. C...A...et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4 800 euros en réparation des préjudices résultant de leur absence de relogement jusqu'au 7 avril 2016, somme à actualiser à la date du jugement à intervenir et à assortir des intérêts au taux légal à compter de la date de leur demande préalable. Par un jugement n° 1605487 du 17 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 200 euros, tous inté

rêts compris et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Par un p...

Vu la procédure suivante :

M. C...A...et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4 800 euros en réparation des préjudices résultant de leur absence de relogement jusqu'au 7 avril 2016, somme à actualiser à la date du jugement à intervenir et à assortir des intérêts au taux légal à compter de la date de leur demande préalable. Par un jugement n° 1605487 du 17 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 200 euros, tous intérêts compris et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 3 juillet et le 2 octobre 2017, M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs conclusions ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à verser à leur avocat, la SCP Marc Lévis, au titre des dispositions des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat des consortsA... ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif que M. A... a été reconnu comme prioritaire et devant être relogé en urgence dans un logement répondant à ses besoins et ses capacités par une décision de la commission de médiation de Paris du 20 juin 2014 rendue au titre du I de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; qu'en l'absence de proposition de relogement dans le délai imparti, il a recherché l'indemnisation des préjudices résultant de la non-exécution de la décision de la commission de médiation ; que, par le jugement attaqué du 17 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris, a retenu la responsabilité de l'Etat et condamné celui-ci à verser à M. A...la somme de 200 euros ;

2. Considérant que, lorsqu'une personne a été reconnue comme prioritaire et comme devant être logée ou relogée d'urgence par une commission de médiation, en application des dispositions de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation, la carence fautive de l'Etat à exécuter cette décision dans le délai imparti engage sa responsabilité à l'égard du seul demandeur, au titre des troubles dans les conditions d'existence résultant du maintien de la situation qui a motivé la décision de la commission, alors même que l'intéressé n'a pas fait usage du recours en injonction contre l'Etat prévu par l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; que ces troubles doivent être appréciés en fonction des conditions de logement qui ont perduré du fait de la carence de l'Etat, de la durée de cette carence et du nombre de personnes composant le foyer du demandeur pendant la période de responsabilité de l'Etat, qui court à compter de l'expiration du délai de trois ou six mois à compter de la décision de la commission de médiation que les dispositions de l'article R. 441-16-1 du code de la construction et de l'habitation impartissent au préfet pour provoquer une offre de logement ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en limitant l'indemnisation allouée au requérant à la somme de 200 euros, alors que la situation qui avait justifié la décision de la commission de médiation perdurait et que M. A... justifiait de ce fait de troubles dans ses conditions d'existence lui ouvrant droit à réparation dans les conditions indiquées au point 2, le tribunal administratif a dénaturé les faits de l'espèce ; que, dès lors, M. et Mme A...sont fondés à demander, dans cette mesure, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'annulation du jugement qu'il attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...est hébergé depuis le 13 mai 2013 avec sa femme et ses deux enfants dans un logement de deux pièces de 36 m² dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, sous couvert de contrats renouvelés de six mois en six mois ; que compte tenu de ces conditions de logement, qui ont perduré du fait de la carence de l'Etat, de la durée de cette carence et du nombre de personnes vivant au foyer pendant la période en cause, M. A...vivant en couple avec ses deux enfants mineurs, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence dont la réparation incombe à l'Etat en condamnant celui-ci à verser au requérant une somme de 3 500 euros tous intérêts compris au jour de la présente décision ;

6. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, la SCP Marc Levis, avocat du requérant, peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Marc Levis renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SCP Marc Levis ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris du 17 mars 2017 est annulé en tant qu'il a fixé à 200 euros l'indemnité due par l'Etat à M. A....

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A...une somme de 3 500 euros tous intérêts compris au jour de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Marc Levis, avocat du requérant, la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C...A..., à Mme B... A...et au ministre de la cohésion des territoires.


Synthèse
Formation : 5ème chambre jugeant seule
Numéro d'arrêt : 412059
Date de la décision : 18/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 mai. 2018, n° 412059
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:412059.20180518
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