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02/12/2013 | FRANCE | N°362276

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 02 décembre 2013, 362276


VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête enregistrée le 28 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Quentiny, représentée par la SCP Lesage, Orain, Page, Varin, Camus, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 1364 T du 27 juin 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2012 de la commission départementale d'aménagement commercial du Doubs autorisant la SAS Immobilière Carrefour à procéder à l'extension de 8600 m2 de la galeri

e marchande du centre commercial Carrefour à Chalezeule ;

2°) de mettre à la ...

VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête enregistrée le 28 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Quentiny, représentée par la SCP Lesage, Orain, Page, Varin, Camus, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 1364 T du 27 juin 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2012 de la commission départementale d'aménagement commercial du Doubs autorisant la SAS Immobilière Carrefour à procéder à l'extension de 8600 m2 de la galerie marchande du centre commercial Carrefour à Chalezeule ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SAS Immobilière Carrefour une somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2013, la SAS Immobilière Carrefour, représentée par la SELARL Letang et Associés, conclut au rejet du pourvoi et à ce que soit mise à la charge de la SA Quentiny la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Tanneguy Larzul, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public.

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

Sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 752-49 du code de commerce :

1. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) doivent comporter les mentions attestant du respect de la règle du quorum prévue par l'article R752-49 du code de commerce ou de ce que la convocation de ses membres a été accompagnée de l'envoi de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses délibérations, comme le prévoit ce même article.

Sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 752-51 du code de commerce :

2. Aux termes du quatrième alinéa de l'article R. 752-51 du code de commerce : " Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission nationale ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 752-16 du même code : " Pour les projets d'aménagement commercial, l'instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l'urbanisme et de l'environnement. ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les ministres intéressés, au sens de l'article R. 752-51 du code de commerce, sont ceux qui ont autorité sur les services chargés d'instruire les demandes, soit les ministres en charge du commerce, de l'urbanisme et de l'environnement. Le ministre de l'économie et des finances n'est donc pas au nombre des ministres intéressés au sens de cet article.

4. En outre, il résulte des dispositions combinées des articles 1er et 3 du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, de l'arrêté du 9 juillet 2008 portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et de l'arrêté du 26 janvier 2009 portant organisation de la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services, que l'adjoint au chef du service tourisme, commerce, artisanat et services et la sous directrice de la qualité du cadre de vie, dont les actes de délégation de signature ont été publiés au Journal officiel les 11 septembre et 3 juillet 2011, avaient, de ce fait, respectivement qualité pour signer, au nom du ministre chargé du commerce, d'une part, et des ministres chargés de l'urbanisme et de l'environnement, d'autre part, les avis des 15 et 25 juin 2012 recueillis par le commissaire du gouvernement au titre de l'article R. 752-51 du code de commerce ;

Sur la méconnaissance de l'article L 752-6 du code de commerce :

5. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement et de qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ".

6. Aux termes de l'article L. 752-6 du même code, issu de la même loi du 4 août 2008 : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. ".

7. Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752 6 du code de commerce.

En ce qui concerne le respect du 1° de l'article L. 752-6 du code de commerce :

8. En premier lieu, la société requérante soutient que le projet contesté porte atteinte à l'animation de la vie urbaine des centres-villes et centre-bourgs des communes environnantes. Il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que ce projet s'inscrit dans le cadre de la restructuration de la zone d'activité commerciale dites " des Marnières ", d'autre part, qu'il permet de diversifier et de rééquilibrer l'offre commerciale au profit de l'est de l'agglomération bisontine, diminuant ainsi le déplacement des clients de la zone de chalandise vers les autres pôles commerciaux de la région.

9. En second lieu, lorsque l'instruction fait apparaître que, pour satisfaire aux objectifs fixés par le législateur en matière de développement durable ou d'aménagement du territoire, des aménagements sont nécessaires, l'autorisation ne peut être accordée que si la réalisation de tels aménagements à la date de l'ouverture de l'ensemble commercial est suffisamment certaine.

10. En l'espèce, il n'est pas contesté que, d'une part, l'augmentation de la capacité de transport en commun et, d'autre part, les aménagements projetés, qui comprennent notamment la création de plusieurs carrefours giratoires, de carrefours à feux et le réaménagement d'une route départementale, permettront d'absorber les flux supplémentaires de véhicules engendrés par le projet. Il ressort des pièces du dossier que ces aménagements sont prévus par le dossier de réalisation des travaux de restructuration, par la communauté d'agglomération du Grand Besançon, de la zone d'activité commerciale dite " des Marnières " et que la SAS Immobilière Carrefour prendra en charge une partie de leur financement. Par une lettre du 3 octobre 2011, le président du conseil général a donné son accord au président de la communauté d'agglomération du Grand Besançon sur la répartition entre les collectivités territoriales concernées de la réalisation des aménagements rendus nécessaires par le projet. Au vu de l'ensemble de ces éléments, la réalisation des aménagements projetés doit être regardée comme suffisamment certaine. Par suite, la CNAC a correctement apprécié l'impact du projet contesté sur les flux de transports.

En ce qui concerne le respect des dispositions du 2° de l'article L. 752-6 du code de commerce :

11. En premier lieu, l'insertion dans le réseau de transports collectifs est au nombre des critères au vu desquels les commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, sont tenues d'apprécier les projets qui leur sont soumis. La société requérante ne peut donc utilement soutenir qu'un tel critère n'est pas pertinent.

12. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet contesté comprend notamment la réalisation de travaux permettant sa bonne insertion paysagère, la réalisation d'économies d'énergies, la limitation de la consommation d'eau, la gestion des déchets ainsi que des mesures visant à préserver l'écosystème. La décision attaquée n'a donc pas méconnu l'objectif fixé par le législateur en matière de développement durable et d'impact sur l'environnement.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Quentiny n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la SAS Immobilière Carrefour, qui n'est pas la partie perdante. En revanche, il y'a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SA Quentiny la somme de 3000 euros à verser à la SAS Immobilière Carrefour.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SA Quentiny est rejetée.

Article 2 : La SA Quentiny versera à la SAS Immobilière Carrefour la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SA Quentiny, à la SAS Immobilière Carrefour et à la Commission nationale d'aménagement commercial.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 02 déc. 2013, n° 362276
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Tanneguy Larzul
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 02/12/2013
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 362276
Numéro NOR : CETATEXT000028272392 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2013-12-02;362276 ?
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