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28/06/2013 | FRANCE | N°360232

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 28 juin 2013, 360232


Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par l'Association des producteurs de cinéma, dont le siège est au 37 rue Etienne Marcel à Paris (75001), et le Syndicat des producteurs indépendants, dont le siège est 40 rue Louis Blanc à Paris (75010) ; l'Association des producteurs de cinéma, et le syndicat des producteurs indépendants demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2011-1904 du 19 décembre 2011 relatif au dépôt légal ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros

au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres...

Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par l'Association des producteurs de cinéma, dont le siège est au 37 rue Etienne Marcel à Paris (75001), et le Syndicat des producteurs indépendants, dont le siège est 40 rue Louis Blanc à Paris (75010) ; l'Association des producteurs de cinéma, et le syndicat des producteurs indépendants demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2011-1904 du 19 décembre 2011 relatif au dépôt légal ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 mai 2013, présentée par l'association des producteurs de cinéma ;

Vu la Constitution, notamment son article 34 ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code du cinéma et de l'image animée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Michel Bart, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposés par le ministre de la culture ;

1. Considérant que les requérants soutiennent que le décret qu'ils attaquent est entaché d'incompétence au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du code du patrimoine comme de celles de l'article 34 de la Constitution ;

2. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 132-1 du code du patrimoine dispose que : " le dépôt légal consiste en la remise du document à l'organisme dépositaire " et prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe : " a) Les conditions dans lesquelles il peut être satisfait à l'obligation de dépôt légal par d'autres moyens, (...) / ; b) Les modalités d'application particulières à chaque catégorie de personnes mentionnées à l'article L. 132-2, (...) ; / c) Les exceptions à l'obligation de dépôt (...) ; / d) Les modalités selon lesquelles une sélection des documents à déposer peut être faite lorsque les objectifs définis à l'article L. 131-1 peuvent être atteints sans que la collecte et la conservation de la totalité des documents soient nécessaires " ; qu'aux termes de l'article 13 du décret attaqué, codifié à l'article R. 132-28-1 du code du patrimoine : " Pour les documents cinématographiques sous forme de fichier numérique entrant dans les prévisions de l'article R. 132-26, deux exemplaires sont déposés : un exemplaire numérique répondant à des prescriptions techniques fixées par décision du président du Centre national du cinéma et de l'image animée prise sur le fondement du 2° de l'article L. 111-3 du code du cinéma et de l'image animée et un exemplaire sur support photochimique conforme aux prescriptions de l'article R. 132-28. " ; qu'au regard des objectifs poursuivis par le législateur, il était loisible au pouvoir réglementaire de déterminer les formes sous lesquelles les oeuvres cinématographiques doivent être déposées afin d'assurer une meilleure conservation ; qu'en prévoyant que les oeuvres cinématographiques numériques seront simplement déposées sous forme photochimique le pouvoir réglementaire n'a pas méconnu la compétence qu'il tirait de l'article L. 132-1 du code du patrimoine ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer " l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ", la circonstance que le décret attaqué crée une obligation source de dépense n'a pas pour effet de créer une imposition ; que le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait l'article 34 de la Constitution ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L 111-2 du code du cinéma et de l'image animée, le centre national du cinéma et de l'image animée a pour mission : " 5° De collecter, conserver, restaurer et valoriser le patrimoine cinématographique. A ce titre, il exerce notamment les missions relatives au dépôt légal qui lui sont confiées par le titre III du livre Ier du code du patrimoine ; il reçoit en dépôt les documents cinématographiques et les biens culturels se rapportant à la cinématographie qui lui sont confiés et procède, en propre ou pour le compte de l'Etat, à des acquisitions destinées à enrichir les collections dont il a la garde " ; que ces dispositions ont pour objet de préciser les missions qui incombent au centre national du cinéma et de l'image animée dès lors qu'il a préalablement reçu en dépôt les documents cinématographiques qui lui sont confiés au titre du dépôt légal, qu'elles n'ont ni pour objet, ni pour effet d'imposer au centre national du cinéma et de l'image animée de prendre en charge le coût résultant des obligations liées au dépôt légal d'une oeuvre, dont la responsabilité incombe aux personnes qui produisent des documents cinématographiques ; que contrairement à ce que soutiennent les requérants, le décret n'a ainsi pas eu pour objet de transférer aux déposants la charge financière, incombant au centre national du cinéma et de l'image animée, de conservation des oeuvres ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret serait entaché pour ces motifs d'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ;

6. Considérant que les producteurs disposant dès l'origine d'un document photochimique et ceux qui doivent produire ultérieurement à leurs frais un tel document ne sont pas placés dans la même situation ; que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que les obligations découlant pour eux du décret attaqué soient elles- mêmes différentes ; que, d'ailleurs, il résulte des pièces du dossier que la quasi-totalité des documents cinématographiques sont aujourd'hui produits en version numérique ; qu'ainsi l'obligation de déposer un document sur support photochimique a vocation à peser de manière identique sur l'ensemble des producteurs de cinéma ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation du principe d'égalité ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'Association des producteurs de cinéma et du Syndicat des producteurs indépendants est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Association des producteurs de cinéma, au Syndicat des producteurs indépendants, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 360232
Date de la décision : 28/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2013, n° 360232
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Michel Bart
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:360232.20130628
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