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10/06/2013 | FRANCE | N°336886

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 10 juin 2013, 336886


Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 25 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'arrêt n° 08PA06041 du 10 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé par son article 1er l'ordonnance n° 0814572/12-1 du 2 octobre 2008 du président du tribunal administratif de Paris et statué par la voie de l'évocation, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant, d'une part, à l'an

nulation des décisions des 21 mars et 8 juillet 2008 par lesquelles l'Ag...

Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 25 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'arrêt n° 08PA06041 du 10 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé par son article 1er l'ordonnance n° 0814572/12-1 du 2 octobre 2008 du président du tribunal administratif de Paris et statué par la voie de l'évocation, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant, d'une part, à l'annulation des décisions des 21 mars et 8 juillet 2008 par lesquelles l'Agence nationale pour l'indemnisation des français d'outre-mer (ANIFOM) a refusé de procéder à la restitution des sommes prélevées sur les indemnisations dont il a bénéficié et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'ANIFOM de procéder, dans un délai d'un mois, au réexamen de sa demande de restitution de ces sommes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'ANIFOM la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 ;

Vu la loi n° 70-632 du 15 juillet 1970 ;

Vu la loi n° 78-1 du 2 janvier 1978 ;

Vu la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 ;

Vu le décret n° 2005-539 du 26 mai 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Hassan, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de M. A...et à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat de l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés : " I.- Sont restituées aux bénéficiaires des indemnisations ou en cas de décès à leurs ayants droit les sommes prélevées sur les indemnisations par l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer et affectées au remboursement partiel ou total des prêts au titre des dispositions suivantes : / 1° L'article 46 de la loi n° 70-632 du 15 juillet 1970 relative à une contribution nationale à l'indemnisation des Français dépossédés de biens situés dans un territoire antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France ; / 2° Les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article 3 de la loi n° 78-1 du 2 janvier 1978 relative à l'indemnisation des Français rapatriés d'outre-mer dépossédés de leurs biens (...) " ; qu'il résulte des dispositions de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 et de l'article 3 de la loi du 2 janvier 1978 que certains prêts accordés aux rapatriés sont le cas échéant déduits de l'indemnisation et du complément d'indemnisation que les articles 1er de ces lois instituent ; que, notamment, aux termes du dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 2 janvier 1978, " Lorsque le bénéficiaire du complément est un ayant droit de la personne dépossédée, ces déductions s'appliquent aux dettes dont il est personnellement responsable et à celles dont la personne dépossédée était elle-même responsable. Les déductions correspondant à ces dernières sont opérées au prorata des parts successorales " ; qu'il résulte des dispositions du décret du 26 mai 2005, pris pour l'application des dispositions de l'article 12 de la loi du 23 février 2005 citées ci-dessus, que les sommes à restituer sont celles qui sont mentionnées comme ayant été déduites sur les décisions qui ont été notifiées aux bénéficiaires de l'indemnisation et du complément d'indemnisation ;

2. Considérant qu'il ressort de l'ensemble des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les grands-parents du requérant avaient bénéficié de prêts de réinstallation qu'il avait recueillis dans leur succession avec ses deux frères ; que les montants correspondants, en capital et en intérêts, qui restaient dus au titre de ces prêts ont été déduits, sur le fondement des dispositions du dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 2 janvier 1978, des compléments d'indemnisation qui lui ont été versés ; qu'estimant que l'intéressé ne pouvait obtenir la restitution de ces sommes sur le fondement des dispositions déjà citées de l'article 12 de la loi du 23 février 2005, l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (ANIFOM) a refusé de faire droit à la demande de restitution présentée par M.A..., par une décision du 21 mars 2008, confirmée le 8 juillet 2008 ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 10 décembre 2009 en tant que, après avoir annulé l'ordonnance du 2 octobre 2008 du président du tribunal administratif de Paris, il rejette sa demande d'annulation de ces décisions de refus ;

3. Considérant que, pour rejeter la requête de M.A..., la cour a jugé qu'une déduction ne pouvait avoir été imputée sur ses droits à indemnisation " qu'à raison de prêts qui lui auraient été personnellement consentis, et non à raison de sa seule qualité de descendant et d'héritier de titulaires de tels prêts " ; qu'il résulte, cependant, des dispositions du dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 2 janvier 1978 que lorsque l'ayant droit de la personne dépossédée demande à bénéficier du complément d'indemnisation, ses droits à indemnisation sont, le cas échéant, diminués du montant correspondant aux dettes contractées par la personne dépossédée ; que, par suite, en jugeant que M. A...pouvait légalement être privé de la restitution prévue par l'article 12 de la loi du 23 février 2005 dans la mesure où aucune déduction n'avait pu être préalablement imputée sur ses droits à indemnisation à raison de sa seule qualité de descendant et d'héritier de titulaires de tels prêts, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que, par suite, M. A...est fondé à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêt attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en statuant sur la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Paris ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être exposé ci-dessus qu'en rejetant la demande de M. A...tendant au bénéfice de la mesure de restitution prévue par le I de l'article 12 de la loi du 23 février 2005 au motif qu'il n'avait jamais sollicité à titre personnel l'octroi d'un prêt susceptible de le faire entrer dans le champ d'application des articles 46 de la loi du 15 juillet 1970 et 3 de la loi du 3 janvier 1978, le directeur général de l'ANIFOM a méconnu ces dispositions, peu important la circonstance que l'ANIFOM n'aurait pas pris elle-même la décision de déduire le montant restant dû d'un tel prêt de l'indemnisation qui lui a été accordée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ;

7. Considérant que l'exécution de la présente décision implique que la demande de M. A...soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à l'ANIFOM de procéder à ce réexamen dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ANIFOM le versement de la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par M. A... au titre de l'ensemble de la procédure et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées au même titre par l'ANIFOM ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 10 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : Les décisions du directeur général de L'ANIFOM des 21 mars et 8 juillet 2008 sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au directeur général de l'ANIFOM de procéder au réexamen de la demande de M. A...dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : L'ANIFOM versera à M. A...une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l'ANIFOM tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 336886
Date de la décision : 10/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2013, n° 336886
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Claude Hassan
Rapporteur public ?: Mme Delphine Hedary
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER ; SCP MEIER-BOURDEAU, LECUYER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:336886.20130610
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