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10/07/2018 | CEDH | N°001-184491

CEDH | CEDH, AFFAIRE FONDATION ZEHRA ET AUTRES c. TURQUIE, 2018, 001-184491


DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE FONDATION ZEHRA ET AUTRES c. TURQUIE

(Requête no 51595/07)

ARRÊT

STRASBOURG

10 juillet 2018

DÉFINITIF

03/12/2018

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.







En l’affaire Fondation Zehra et autres c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Robert Spano, président,
Paul Lemmens,
Ledi Bianku,
Işıl

Karakaş,
Valeriu Griţco,
Jon Fridrik Kjølbro,
Stéphanie Mourou-Vikström, juges,
et de Hasan Bakırcı, greffier adjoint de section,

Après en avoir délib...

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE FONDATION ZEHRA ET AUTRES c. TURQUIE

(Requête no 51595/07)

ARRÊT

STRASBOURG

10 juillet 2018

DÉFINITIF

03/12/2018

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Fondation Zehra et autres c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Robert Spano, président,
Paul Lemmens,
Ledi Bianku,
Işıl Karakaş,
Valeriu Griţco,
Jon Fridrik Kjølbro,
Stéphanie Mourou-Vikström, juges,
et de Hasan Bakırcı, greffier adjoint de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 12 juin 2018,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 51595/07) dirigée contre la République de Turquie et dont Zehra Eğitim ve Kültür Vakfı (Fondation Zehra pour l’éducation et la culture), une fondation de droit turc (« la fondation requérante »), et MM. Gıyasettin Bingöl, Yasin Yıldırım, Hüseyin Daşkın, Zekeriya Özbek, Cesim Yıldırım et Abdullah Şahin, des ressortissants turcs, membres fondateurs de la fondation requérante (« les requérants »), ont saisi la Cour le 16 novembre 2007 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. La fondation requérante et les requérants ont été représentés par Me O. Cengiz, avocat à Ankara. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.

3. La fondation requérante et les requérants allèguent en particulier avoir été victimes d’une violation de l’article 11 de la Convention en raison de la dissolution de la fondation requérante et, en conséquence, de son inactivité entre 2005 et 2013, et de la non-restitution de certains de ses biens immobiliers lors de son rétablissement en 2013. Se basant sur les mêmes faits, ils se plaignent aussi d’une violation des articles 6 et 13 de la Convention et de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention.

4. Le 14 novembre 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. La fondation requérante avait son siège à Istanbul à l’époque des faits. MM. Gıyasettin Bingöl, Yasin Yıldırım, Hüseyin Daşkın, Zekeriya Özbek, Cesim Yıldırım et Abdullah Şahin, nés respectivement en 1962, en 1960, en 1954, en 1950, en 1954 et en 1966, résident respectivement à Bursa, à Istanbul, à Eskişehir, à Istanbul, à Van et à Diyarbakır.

A. La dissolution de la fondation requérante

6. Par un acte authentique du 24 janvier 1989, les requérants créèrent une fondation d’utilité publique qu’ils dénommèrent Zehra Eğitim ve Kültür Vakfı et dont le siège fut fixé à Eskişehir.

7. Le 1er mars 1990, les requérants demandèrent au tribunal de grande instance d’Eskişehir d’enregistrer la fondation requérante au registre des fondations en vertu de l’ancien article 74 du code civil.

8. Les statuts de la fondation requérante étaient joints à la demande. Leur article 3 énonçait les buts de la fondation requérante, qui étaient notamment les suivants :

« – créer une entraide sociale, culturelle et économique entre les membres de la fondation, et, le cas échéant, contribuer au développement scientifique, social et économique de la Turquie ;

– assurer un enseignement à différents degrés aux jeunes, en restant fidèle aux valeurs nationales et spirituelles, en préparant leur intégration, de la maternelle à l’université, dans des établissements publics ou privés, et en accordant des bourses à ceux qui intègrent de tels établissements ; subvenir à leurs besoins alimentaires et à leur hébergement, ouvrir des cours d’enseignement du Coran et des cours d’art ainsi que des centres d’enseignement ; favoriser l’envoi d’étudiants à l’étranger en vue de leur spécialisation et accorder des bourses à ceux qui s’y trouvent ; ouvrir des camps de vacances pour les vacances d’été et les vacances semestrielles, et supporter les coûts de ces structures ;

– créer toutes sortes d’établissements de bienfaisance et culturels tels que des établissements d’enseignement, des foyers d’étudiants (yurt), des grandes mosquées tout comme des petites mosquées (mescit), des salles de conférences, des bibliothèques, des laboratoires, des centres de recherche, des centres d’hébergement et d’éducation pour les indigents (maisons de repos, hôpitaux et lieux similaires) ;

– mettre sur pied des groupes de discussion, et organiser des conférences, des séminaires, des débats scientifiques ainsi que toutes sortes de réunions culturelles et religieuses dans des salles fermées ou en plein air ;

– aider les membres de la fondation ainsi que leurs proches dans les situations telles que les mariages, les naissances, les accidents et les décès, et, en fonction des besoins des membres, leur accorder des prêts sans intérêts ;

– réaliser tout autre service conforme aux buts de la fondation. »

9. Par une décision du tribunal de grande instance d’Eskişehir du 16 novembre 1990, le siège de la fondation requérante fut transféré à Istanbul.

10. Le 18 janvier 2000, sur demande du ministère de l’Intérieur, le conseil de l’inspection auprès de la direction générale des fondations nomma trois inspecteurs pour examiner la situation et les activités de la fondation requérante.

11. Le 24 mai 2001, les inspecteurs présentèrent leur rapport. Celui-ci concluait que la fondation requérante avait agi en violation de l’article 74 § 2 de l’ancien code civil, dans la mesure où elle-même et ses structures locales auraient dissimulé, lors de leur création, leurs buts véritables et auraient mené par la suite des activités illégitimes sortant du cadre de leur objet social et des buts fixés dans les statuts.

12. Le 19 juillet 2001, s’appuyant sur les conclusions du rapport des inspecteurs, la direction générale des fondations intenta, devant le tribunal de grande instance de Fatih (Istanbul), une action visant à la dissolution de la fondation requérante et au transfert de ses biens à la direction générale des fondations. Elle demanda que les dirigeants de la fondation requérante fussent privés du droit de faire partie de la direction de toute fondation quelle qu’elle fût.

13. À l’audience du 17 juillet 2002, la fondation requérante présenta ses observations en réponse au rapport des inspecteurs. Elle ne demanda pas de délai supplémentaire pour présenter d’autres observations.

14. Le 29 juillet 2005, à la demande du tribunal de grande instance, un groupe de trois experts présenta un nouveau rapport sur la fondation requérante.

15. Par un jugement du 20 décembre 2005, le tribunal de grande instance ordonna la dissolution de la fondation requérante et la liquidation de ses biens ainsi que le transfert du restant des biens immobiliers à la direction générale des fondations. On peut résumer comme suit la manière dont le tribunal a procédé ainsi que les principaux motifs de son jugement :

– le tribunal a analysé les faits et les preuves présentés dans le rapport des inspecteurs et dans le rapport des experts sans être lié par leurs conclusions ;

– il a pris en considération les textes parus dans le Zehra Bülteni, la publication officielle de la fondation requérante, mais il a écarté du dossier les propos diffusés par des magazines ou écrits dont le lien avec la fondation requérante n’avait pas été établi ;

– il a considéré que les écrits publiés dans ce bulletin au nom de la fondation requérante engageaient juridiquement celle-ci ;

– il a examiné les autres textes publiés dans ce bulletin par d’autres personnes pour savoir s’ils liaient ou non la fondation requérante, et si celle-ci soutenait des buts cachés différents de ceux fixés par ses statuts ;

– il a constaté que, selon le bulletin, la fondation requérante prévoyait la création d’une université Medresetü-z Zehra – but non prévu dans les statuts –, aux fins de promouvoir les idéaux de Said Nursi[1] ;

– il a observé que les textes parus dans le bulletin se référaient à la révolte de Said Nursi contre le régime actuel, et qu’ils abondaient dans le sens de la suggestion de ce dernier selon laquelle le bonheur et la prospérité des Kurdes passaient par la création d’un État kurde fondé sur la charia ; il a noté que, selon les articles en question, la loi de la République en vigueur sur l’enseignement avait pour résultat la formation d’individus uniformisés dans la pensée laïque et pluraliste, et que la création de trois universités dans les départements où vivaient majoritairement les citoyens d’origine kurde (Van, Diyarbakır, Bitlis) serait à même de répondre aux exigences d’une véritable éducation islamique du peuple kurde ;

– il a observé aussi que les articles parus dans le bulletin reprochaient régulièrement aux écoles de la République de ne pas se concentrer suffisamment sur l’enseignement des sciences islamiques, qu’ils se limitaient à promouvoir des idées et principes laïques prônés principalement par Atatürk, qu’ils considéraient que les principes de laïcité et de démocratie pluraliste protégés par la Constitution étaient indésirables et devaient être remplacés par l’ordre sacré islamique, et qu’ils défendaient l’idée selon laquelle la création de ces universités kurdes islamiques avait pour but de combler ce manque ;

– il a relevé que les articles rédigés au nom de la fondation requérante montraient clairement que celle-ci avait pour but à court terme de donner une éducation islamique et non laïque aux seules personnes d’origine kurde, ce qui, d’après le tribunal, répondait au but ultime de la fondation requérante, à savoir la création d’un État théocratique et totalitaire, avec un système basé sur la charia et avec une population d’origine kurde, et ce suivant les préceptes exposés dans les livres de Said Nursi ; toujours selon le tribunal, la création de l’université Medresetü-z Zehra était, pour la fondation requérante, une étape dans le projet de remplacement de l’État actuel et de son régime démocratique par un État théocratique et totalitaire ;

– enfin, il a estimé que les écrits publiés dans le bulletin prônaient une distinction entre les citoyens d’origine turque et les citoyens d’origine kurde, et qu’ils présentaient ces derniers comme des opprimés ne pouvant s’émanciper qu’en mettant en œuvre les principes et les idées islamistes.

16. Le tribunal conclut que le but véritable, non déclaré, de la fondation requérante était de diffuser le dessein de Said Nursi, à savoir créer un État kurde fondé sur la charia et faire l’apologie des enseignements de Said Nursi en tant qu’opposant au régime républicain et en tant que défenseur d’un État théocratique. Pour le tribunal, pareils buts d’une fondation étaient contraires au régime démocratique pluraliste sauvegardé par la Constitution, et ils visaient à l’imposition des principes de charia à toute la société et à l’instauration des règles de droit prescrites par ces principes.

17. Le 20 mars 2006, la fondation requérante, se référant à la jurisprudence de la Cour relative aux articles 10 et 11 de la Convention, se pourvut en cassation contre le jugement du 20 décembre 2005. Elle soutenait en particulier que les écrits évoqués dans le jugement du tribunal de grande instance n’émanaient pas des membres de son conseil d’administration.

18. Par un arrêt du 27 novembre 2006, la Cour de cassation confirma le jugement du tribunal de grande instance eu égard au contenu du dossier, aux preuves ayant fondé le jugement et à la loi. La fondation requérante forma un recours en rectification d’arrêt.

19. Par un arrêt du 17 mai 2007, notifié à la fondation requérante le 22 juin 2007, la Cour de cassation rejeta ce recours pour absence de motif valable en vertu des dispositions du code de procédure civile.

B. L’action pénale engagée contre les membres de la fondation requérante

20. À une date non précisée, une action pénale fut intentée contre les requérants et les autres membres de la fondation requérante pour des faits commis entre le 16 novembre 1990 et le 14 juillet 1998, qui auraient porté atteinte au souvenir d’Atatürk, dénigré la République de Turquie, son parlement et son identité, incité le peuple à la haine par le biais d’une discrimination basée sur la religion et sur l’origine ethnique, et constitué une association de malfaiteurs.

21. Le 11 janvier 2008, le procureur de la République de Fatih rendit une décision de non-lieu en raison de la prescription des faits.

C. Rétablissement de la fondation requérante et restitution de ses biens immobiliers

22. Le 19 septembre 2013, les fondateurs toujours en vie de la fondation dissoute saisirent le tribunal de grande instance d’Istanbul d’une demande de réenregistrement de leur fondation sur le fondement de la loi no 6495, promulguée le 2 août 2013 et modifiant la loi no 5737 sur les fondations.

23. Par un arrêt du 30 janvier 2014, le 21e tribunal de grande instance d’Istanbul ordonna le réenregistrement de la fondation requérante, notant que celle-ci avait révisé ses statuts initiaux et supprimé le but relatif à l’ouverture de cours d’enseignement du Coran, lesquels relevaient, selon le tribunal, de la compétence exclusive de la direction des affaires religieuses. À la suite de ce réenregistrement, les vingt-deux biens immobiliers de la fondation requérante sur les vingt-cinq qui avaient été transférés au Trésor public lors de la dissolution furent restitués à la fondation requérante, conformément aux modifications législatives du 2 août 2013. Les trois autres biens immobiliers non restitués à la fondation requérante avaient entre-temps été mis à la disposition d’autres services publics.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

A. La Constitution

24. Les dispositions pertinentes en l’espèce de la Constitution en vigueur à l’époque en question se lisaient ainsi :

Article 13

« Les droits et libertés fondamentaux peuvent être limités par la loi en conformité avec la lettre et l’esprit de la Constitution, dans le but de protéger l’indivisibilité de l’État, la souveraineté nationale, l’ordre public, la sûreté publique, l’intérêt général, et la moralité et la santé publiques, ainsi que pour les raisons spéciales mentionnées dans les articles de la présente Constitution.

Les limitations générales et spéciales concernant les droits et libertés fondamentaux ne peuvent être interprétées en contradiction avec les principes de l’ordre démocratique et social, et ne peuvent être utilisées pour des buts autres que ceux qui leur ont été assignés.

Les limitations générales et spéciales qui sont mentionnées dans cet article sont valables pour tous les droits et libertés fondamentaux reconnus par la présente Constitution. »

Article 14 § 1

« Aucun des droits et libertés mentionnés dans la Constitution ne peut être exercé dans le but de porter atteinte à l’intégrité territoriale de l’État et à l’unité de la nation, de mettre en péril l’existence de l’État turc et de la République, de supprimer les droits et libertés fondamentaux, de confier la direction de l’État à un seul individu ou à un groupe ou d’assurer l’hégémonie d’une classe sociale sur d’autres classes sociales ou d’établir une discrimination fondée sur la langue, la race, la religion ou l’appartenance à une secte religieuse, ou d’instituer par tout autre moyen un ordre étatique fondé sur de telles conceptions et opinions (...) »

Article 24 § 1

« Chacun a droit à la liberté de conscience, de croyance et de conviction religieuse. Les prières, les rites et les cérémonies religieux sont libres à condition qu’ils ne violent pas les dispositions de l’article 14. Nul ne peut être contraint de participer à des prières ou à des cérémonies et rites religieux ou de divulguer ses croyances et ses convictions religieuses ; nul ne peut être blâmé ou inculpé à cause de ses croyances ou convictions religieuses (...) »

Article 33 §§ 1 et 5

« Chacun a le droit de fonder une association sans demander d’autorisation préalable. Pour fonder une association, il suffit de transmettre les informations et les documents requis par la loi à l’autorité compétente. Si cette dernière constate néanmoins que les informations et les documents qui lui ont été transmis sont contraires à la loi, elle saisit le tribunal aux fins de l’arrêt provisoire de l’activité de l’association ou de la dissolution définitive de celle-ci.

(...)

Les dispositions de cet article s’appliquent de la même manière aux fondations. »

B. Le statut des fondations (vakıflar)

25. Pour un aperçu historique des fondations (vakıf) dans le système juridique de l’Empire ottoman et, à partir de 1923, dans celui de la République de Turquie, la Cour renvoie à l’arrêt Fener Rum Erkek Lisesi Vakfı c. Turquie (no 34478/97, §§ 23-30, 9 janvier 2007).

26. À l’époque des faits, lors de l’enregistrement de la fondation requérante, l’article 74 § 2 de l’ancien code civil, tel que modifié par la loi no 903 du 13 juillet 1967, était libellé comme suit :

« Les fondations qui ont été créées contrairement à la loi, à la moralité et aux mœurs publiques ou aux intérêts de la nation, ou celles qui ont été créées pour soutenir une idée politique ou une race déterminée ou les membres d’une communauté déterminée ne peuvent être enregistrées. »

L’article 81/A de l’ancien code civil disposait :

« Une fondation dont les buts se révèlent impossibles à réaliser est dissoute d’office. »

27. Le code civil du 17 février 1926 a été amendé par la loi no 4721, adoptée le 22 novembre 2001 et entrée en vigueur le 8 décembre 2001. Les dispositions relatives aux fondations se trouvent dans les articles 101 à 117 du nouveau code civil (Özbek et autres c. Turquie, no 35570/02, § 18, 6 octobre 2009).

28. En droit turc, une fondation est une affectation de biens, de droits ou de ressources à la réalisation d’une œuvre d’intérêt général et à but non lucratif. Une personne morale est créée à cette fin et [les statuts](http://www.associatis.com/asp/as_modele2.asp?np=obl10statut_ass&nv=20040203170711) de la fondation doivent être approuvés dès lors que ces biens, droits ou ressources sont gérés directement par la fondation (articles 101‑117 du nouveau code civil).

L’article 101 § 4 du nouveau code civil est libellé comme suit :

« Les fondations qui ont été créées contrairement aux principes fixés par la Constitution de la République ainsi qu’aux principes fondamentaux de la Constitution, au droit et à la moralité, à l’unité et aux intérêts de la nation, ou celles qui ont été créées pour soutenir une race déterminée ou les membres d’une communauté déterminée ne peuvent être enregistrées. »

C. L’article 6 du règlement no 7/1066 relatif aux fondations créées sur le fondement des dispositions du code civil du 25 juillet 1970

« Les cas qui ne donnent pas droit à enregistrement :

Article 6 – Les fondations qui ont été créées contrairement à la loi, à la moralité et aux mœurs publiques ou aux intérêts de la nation, ou celles qui ont été créées pour soutenir une idée politique ou une race déterminée ou les membres d’une communauté déterminée ne peuvent être enregistrées. »

29. La loi no 6495, promulguée le 2 août 2013 et modifiant la loi no 5737 sur les fondations, autorise le rétablissement des fondations dissoutes . sur demande de leurs fondateurs toujours en vie - et la restitution de leur biens qui ont été transférés au Trésor public lors de la dissolution et qui sont toujours gérés par la Direction générale des fondations.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 11 DE LA CONVENTION

30. Les requérants et la fondation requérante se plaignent d’avoir été victimes d’une violation de l’article 11 de la Convention en raison de la dissolution de la fondation requérante et, par conséquent, de son inactivité entre 2005 et 2013. Sous l’angle du même article, ils se plaignent aussi que, lors du rétablissement de la fondation requérante en 2013, les biens immobiliers qui avaient appartenu aux fondateurs décédés entre-temps et qui ont été attribués à des services publics autres que la direction générale des fondations n’aient pas été restitués à la fondation requérante.

L’article 11 de la Convention se lit ainsi, en ses passages pertinents :

« 1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association (...)

2. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. (...) »

A. Sur la recevabilité

31. Le Gouvernement est d’avis que la fondation requérante et ses fondateurs n’ont plus la qualité de victime au motif que la fondation, qui avait été dissoute en 2005, a été rétablie en 2013 et qu’une très grande majorité de ses biens lui a été restituée.

32. Les requérants et la fondation requérante contestent cette thèse du Gouvernement. Ils mettent l’accent sur la période 2005-2013, pendant laquelle la fondation requérante n’aurait pu mener ses activités, et sur la non-restitution d’une partie des biens immobiliers dont la fondation requérante aurait disposé avant sa dissolution, en 2005, lors de son rétablissement, en 2013.

33. La Cour rappelle qu’une décision ou une mesure favorable au requérant ne suffit en principe à le priver de sa qualité de « victime » aux fins de l’article 34 de la Convention que si les autorités nationales reconnaissent, explicitement ou en substance, puis réparent la violation alléguée de la Convention (voir, entre autres, Gäfgen c. Allemagne [GC], no 22978/05, § 115 , CEDH 2010, Eckle c. Allemagne, 15 juillet 1982, § 66, série A no 51, Dalban c. Roumanie [GC], no 28114/95, § 44, CEDH 1999‑VI, Siliadin c. France, no 73316/01, § 62, CEDH 2005‑VII, et Scordino c. Italie (no 1), no 36813/97, § 180, 29 juillet 2004). En ce qui concerne la réparation adéquate et suffisante pour remédier au niveau national à la violation d’un droit garanti par la Convention, la Cour considère généralement qu’elle dépend de l’ensemble des circonstances de la cause, eu égard en particulier à la nature de la violation de la Convention qui se trouve en jeu (Gäfgen, précité, § 116). Par ailleurs, selon la jurisprudence constante de la Cour, la notion de « victime » doit être interprétée de façon autonome et indépendante des notions internes telles que celles concernant l’intérêt ou la qualité pour agir (Vallianatos et autres c. Grèce [GC], nos 29381/09 et 32684/09, § 47, CEDH 2013 (extraits), et Gorraiz Lizarraga et autres c. Espagne, no [62543/00](https://hudoc.echr.coe.int/eng#%7B%22appno%22:%5B%2262543/00%22%5D%7D), § 35, CEDH 2004‑III). En effet, par « victime », l’article 34 de la Convention désigne la ou les victimes directes ou indirectes de la violation alléguée (SARL du Parc d’Activités de Blotzheim c. France, no [72377/01](https://hudoc.echr.coe.int/eng#%7B%22appno%22:%5B%2272377/01%22%5D%7D), § 20, 11 juillet 2006). Ainsi, l’article 34 vise non seulement la ou les victimes directes de la violation alléguée, mais encore toute victime indirecte à qui cette violation causerait un préjudice ou qui aurait un intérêt personnel valable à obtenir qu’il y soit mis fin (Vallianatos et autres, précité, § 47).

34. Dans la présente affaire, la Cour observe en premier lieu que les activités de la fondation requérante ont été interrompues pendant plus de sept ans, du 27 novembre 2006, date de l’arrêt de cassation confirmant la dissolution de la fondation requérante, au 30 janvier 2014, date du jugement de tribunal ordonnant son rétablissement. Pendant cette période, la fondation requérante et ses fondateurs n’ont pas pu se livrer à leurs activités.

35. La Cour note par ailleurs que lors de son réenregistrement en janvier 2014, la fondation requérante n’a pu continuer exister en conservant ses statuts initiaux puisqu’elle s’était vue imposer, en quelque sorte, une révision consistant en la suppression du but relatif à l’ouverture de cours d’enseignement du Coran.

36. La Cour observe aussi que, à la suite de son réenregistrement le 30 janvier 2014, la fondation requérante n’a pas pu récupérer trois biens immobiliers (sur les vingt-cinq biens immobiliers transférés au Trésor public lors de la dissolution) qui avaient été attribués à des services publics autres que la direction générale des fondations. Même si les fondateurs encore en vie au 30 janvier 2014 n’étaient pas les propriétaires des biens immobiliers qui sont restés à la disposition des services publics, ils ont dû poursuivre, de même que la fondation requérante, leurs activités à partir de 2014 avec moins de biens immobiliers à leur disposition qu’avant la dissolution.

37. La Cour estime que, même si, en permettant le réenregistrement de la fondation requérante en 2014 et la restitution de la majeure partie de ses biens immobiliers, les autorités nationales peuvent passer pour avoir partiellement redressé, implicitement et en substance, une éventuelle violation de la Convention, elles n’ont accordé aux requérants et à la fondation requérante ni une réparation pour le dommage moral qu’ils disent avoir subi pendant plus de sept années d’inactivité ni une réparation pour les trois biens immobiliers restés à la disposition des services publics.

38. Il s’ensuit que les requérants et la fondation requérante peuvent toujours se prétendre victimes d’une violation de l’article 11 au sens de l’article 34 de la Convention.

39. Par ailleurs, constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Sur l’existence d’une ingérence

40. Se référant à ses constats exposés aux paragraphes 34‑39 ci-dessus, la Cour estime qu’il y a eu ingérence dans l’exercice par les requérants et la fondation requérante de leur droit à la liberté d’association, au sens du paragraphe 2 de l’article 11. L’ingérence en cause consiste en une dissolution, laquelle a conduit à une interruption des activités de la fondation requérante pendant plus de sept ans, et en la non-restitution de certains de ses biens.

2. Sur la justification de l’ingérence

a) « Prévue par la loi »

41. Le Gouvernement expose que les juridictions nationales se sont fondées sur l’article 74 § 2 et l’article 81/A de l’ancien code civil en vigueur à l’époque des faits, dispositions qui sont, selon lui, accessibles, claires et prévisibles.

Les requérants et la fondation requérante ne semblent pas contester ce point.

42. La Cour accepte, à l’instar du Gouvernement, que les mesures litigieuses étaient prescrites par la loi, à savoir l’article 74 § 2 et l’article 81/A de l’ancien code civil (quant à la dissolution de la fondation requérante) ainsi que par les dispositions de la loi no 6495 promulguée le 2 août 2013 et modifiant la loi no 5737 (quant aux modalités du rétablissement de la fondation dissoute).

b) But légitime

43. Les requérants et la fondation requérante soutiennent que la véritable raison de la dissolution de celle-ci a été l’intervention des militaires au sein du pouvoir politique le 28 février 1997 (mémorandum des forces armées demandant au parti politique Refah de quitter la coalition au gouvernement). Cette intervention aurait été accompagnée d’une campagne visant à neutraliser toute organisation non gouvernementale non conforme à leur modèle de société.

44. Le Gouvernement indique que, selon les constats opérés par les juridictions nationales, la dissolution de la fondation requérante avait pour but de faire obstacle à ses activités visant à l’instauration d’un ordre social contraire aux principes de la démocratie pluraliste, et basé sur la charia et sur la discrimination fondée sur l’origine ethnique.

45. La Cour considère qu’il n’est pas suffisamment démontré par les requérants et la fondation requérante que la dissolution de celle-ci avait été motivée par des raisons autres que celles exposées dans leurs décisions par les autorités judiciaires. Elle peut admettre que la dissolution de la fondation poursuivait plusieurs des buts légitimes énumérés à l’article 11 de la Convention : la protection des droits et libertés d’autrui, la défense de l’ordre et le maintien de la sûreté publique.

c) « Nécessaire dans une société démocratique »

i. Les parties

46. Les requérants et la fondation requérante soutiennent que la procédure ayant abouti à la dissolution de celle-ci, en 2006, avait été conçue et orchestrée par les membres de l’organisation « secrète » Ergenekon, ce qui expliquerait pourquoi les juridictions ont choisi d’appliquer la sanction la plus dure, à savoir la dissolution. Or, selon les requérants et la fondation requérante, celle-ci ne faisait pas partie des mouvements islamistes violents et elle ne prônait aucunement l’usage de la force. Les requérants et la fondation requérante en veulent pour preuve le rapt et le meurtre, en 1999, du fondateur et premier président, I.Y., par le groupe islamiste armé Hezbollah. Ils précisent que la grande famille théologique à laquelle la fondation requérante aurait appartenu, le mouvement Nur (poursuivant les préceptes du théologien Said Nursi), n’a jamais été violente, qu’elle se montrait souvent apolitique et qu’elle se concentrait sur l’autodiscipline spirituelle de l’être humain. Ils ajoutent que les activités d’enseignement que la fondation requérante envisageait de développer s’inspiraient du projet de Said Nursi concernant Medreset-uz Zehra sur son seul plan intellectuel et qu’elles n’avaient rien d’illégal. Ils estiment que, même si elles avaient conclu à l’illégalité de ces projets, les autorités nationales auraient dû donner à la fondation requérante la possibilité de remédier à une telle situation. En appliquant d’emblée la sanction la plus lourde, les autorités nationales n’auraient pas réagi de manière proportionnée à leur but déclaré.

47. Le Gouvernement indique que, selon la loi en vigueur à l’époque des faits, les fondations dont les buts se révélaient impossibles à réaliser étaient dissoutes d’office. Il se réfère aussi aux considérations exposées dans le jugement rendu le 20 décembre 2005 par le tribunal de grande instance de Fatih (Istanbul).

ii. L’appréciation de la Cour

α) Principes généraux

48. Tout en se référant à sa jurisprudence pertinente en l’espèce concernant la liberté d’association (Gorzelik et autres c. Pologne [GC], no 44158/98, §§ 92-93, CEDH 2004‑I, avec la jurisprudence qui y est citée), la Cour rappelle que le droit qu’énonce l’article 11 de la Convention inclut celui de créer une fondation (Özbek et autres c. Turquie, no 35570/02, 6 octobre 2009, § 34). La possibilité pour les citoyens de créer une personne morale, dotée d’un patrimoine à son service dans le cas d’une fondation, afin d’agir collectivement dans un domaine d’intérêt commun constitue un des aspects les plus importants du droit à la liberté d’association, sans quoi ce droit se trouverait dépourvu de toute signification (Sidiropoulos et autres c. Grèce, 10 juillet 1998, § 40, Recueil des arrêts et décisions 1998‑IV).

– Démocratie pluraliste et formations protégées par l’article 11

49. La Cour rappelle avoir indiqué à plusieurs reprises que la démocratie représente sans nul doute un élément fondamental de l’ordre public européen, et qu’elle se présente comme l’unique modèle politique envisagé par la Convention et le seul qui soit compatible avec elle. C’est pourquoi les articles 8, 9, 10 et 11 de la Convention requièrent d’apprécier les ingérences dans l’exercice des droits qu’ils consacrent à l’aune de ce qui est « nécessaire dans une société démocratique ». La seule forme de nécessité capable de justifier une ingérence dans l’un de ces droits est donc celle qui peut se réclamer de la « société démocratique » (Parti communiste unifié de Turquie et autres c. Turquie, 30 janvier 1998, § 45, Recueil 1998‑I, et Gorzelik et autres, précité, § 89).

50. Parmi les caractéristiques d’une « société démocratique », la Cour attache une importance particulière au pluralisme, à la tolérance et à l’esprit d’ouverture. Elle réaffirme dans le contexte de l’article 11 que, à l’instar des partis politiques, les associations et les fondations créées à des fins diverses, notamment la protection du patrimoine culturel ou spirituel, la poursuite de divers buts sociaux ou économiques, la proclamation et l’enseignement d’une religion, la recherche d’une identité ethnique ou l’affirmation d’une conscience minoritaire, sont importantes pour le bon fonctionnement de la démocratie. En effet, le pluralisme repose aussi sur la reconnaissance et le respect véritables de la diversité et de la dynamique des traditions culturelles, des identités ethniques et culturelles, des convictions religieuses, et des idées et concepts artistiques, littéraires et socio-économiques. Il est tout naturel, lorsqu’une société civile fonctionne correctement, que les citoyens participent dans une large mesure au processus démocratique par le biais d’associations au sein desquelles ils peuvent se rassembler avec d’autres et poursuivre de concert des buts communs. De plus, la mise en œuvre du principe de pluralisme étant impossible si une formation protégée par l’article 11 n’est pas en mesure d’exprimer librement ses idées et ses opinions, la Cour a également reconnu que la protection des opinions et de la liberté de les exprimer au sens de l’article 10 de la Convention constitue l’un des objectifs de la liberté d’association (Gorzelik et autres, précité, §§ 90‑92).

– Éducation dans une société démocratique selon la Convention et ses Protocoles

51. L’article 9 de la Convention et la seconde phrase de l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention, lus en combinaison avec l’article 10 de la Convention, dès lors qu’ils visent à sauvegarder la possibilité d’un pluralisme éducatif, impliquent que l’État, en s’acquittant de ses fonctions en matière d’éducation et d’enseignement, veille à ce que les informations ou connaissances figurant au programme soient diffusées de manière objective, critique et pluraliste, permettant aux élèves de développer un sens critique à l’égard notamment du fait religieux dans une atmosphère sereine, préservée de tout prosélytisme. Cette obligation des États fait partie de leur mission de garantir, dans le respect de l’article 9 de la Convention, en restant neutres et impartiaux, l’exercice des divers religions, cultes et croyances. Leur rôle est de contribuer à assurer l’ordre public, la paix religieuse et la tolérance dans une société démocratique. Cela concerne les relations entre croyants et non-croyants comme les relations entre les adeptes des divers religions, cultes et croyances (Lautsi et autres c. Italie [GC], no 30814/06, § 62, CEDH 2011 (extraits), Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark, 7 décembre 1976, §§ 50‑53, série A no 23, et Hasan et Eylem Zengin c. Turquie, no 1448/04, §§ 51‑52, 9 octobre 2007).

– La possibilité d’apporter des restrictions et le contrôle de la Cour

52. La liberté d’association n’est toutefois pas absolue et il faut admettre que lorsqu’une association ou une fondation, par ses activités ou les intentions qu’elle déclare dans son programme, met en danger les institutions de l’État ou les droits et libertés d’autrui, l’article 11 ne prive pas les autorités d’un État du pouvoir de protéger ces institutions et personnes. Cela découle à la fois du paragraphe 2 de l’article 11 et des obligations positives qui incombent à l’État en vertu de l’article 1 de la Convention de sauvegarder les droits et libertés des personnes relevant de sa juridiction (Gorzelik et autres, précité, § 94, et Refah Partisi (Parti de la prospérité) et autres c. Turquie [GC], nos 41340/98 et 3 autres, §§ 96‑103, CEDH 2003‑II).

53. Compte tenu du lien très clair existant entre la Convention et la démocratie, aucune formation ne doit être autorisée à se prévaloir des dispositions de la Convention pour affaiblir ou détruire les idéaux et valeurs d’une société démocratique. Le pluralisme et la démocratie se fondent sur un compromis exigeant des concessions diverses de la part des individus ou groupes d’individus, qui doivent parfois accepter de limiter certaines des libertés dont ils jouissent afin de garantir une plus grande stabilité du pays dans son ensemble (Refah Partisi, précité, § 99, et Petersen c. Allemagne (déc.), no 39793/98, CEDH 2001‑XII).

54. Il en découle nécessairement qu’une formation (parti politique, association, fondation, etc.) dont les responsables incitent à recourir à la violence ou proposent un projet politique qui ne respecte pas la démocratie ou qui vise la destruction de celle-ci ainsi que la méconnaissance des droits et libertés qu’elle reconnaît peut être sanctionnée pour ces motifs selon les critères établis par le paragraphe 2 de l’article 11 (voir, Kalifatstaat c. Allemagne (déc.), no 13828/04, 11 décembre 2006, mutatis mutandis, Yazar et autres c. Turquie, nos 22723/93 and 2 others, § 49, CEDH 2002-II).

55. La Cour souligne que la liberté d’association se distingue sur ce point de la liberté d’expression.

Elle rappelle que, sous réserve du paragraphe 2 de l’article 10, la liberté d’expression vaut non seulement pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent (Handyside c. Royaume‑Uni, 7 décembre 1976, § 49, série A no 24). En effet, lorsque l’expression des opinions n’incite pas à la violence et ne produit pas un discours de haine, les États contractants ne peuvent restreindre le droit du public à en être informé, même en se prévalant des buts énoncés au paragraphe 2 de l’article 10, à savoir la protection de l’intégrité territoriale, la sécurité nationale, la défense de l’ordre ou la prévention du crime (Nedim Şener c. Turquie, no 38270/11, § 116, 8 juillet 2014, et Sürek c. Turquie (no 4) [GC], no 24762/94, § 60, 8 juillet 1999). En particulier, pour ce qui est de la promotion du régime canonique islamique, la charia, la Cour rappelle que, même s’il est difficile à la fois de se déclarer respectueux de la démocratie et des droits de l’homme et de soutenir un régime fondé sur la charia, et même si celle-ci se démarque nettement des valeurs de la Convention, le simple fait de défendre la charia dans un débat ouvert au public, sans en appeler à la violence pour l’établir, ne saurait passer pour un « discours de haine » (Gündüz c. Turquie, no 35071/97, § 50-52, CEDH 2003‑XI). En effet, la Cour estime que la légitimité et la force de la démocratie pluraliste proviennent du fait que, en principe, c’est dans le cadre du débat public pluraliste que la démocratie combat les idées antidémocratiques.

56. Sous l’angle de l’article 11 de la Convention, les États disposent en outre d’un droit de regard sur la conformité du but et des activités d’une association avec les règles fixées par la législation, notamment les règles qui visent à empêcher une formation politique ou sociale de concentrer ses efforts sur la réalisation d’un objectif consistant à saper les fondements de la démocratie pluraliste elle-même. Il en va de même quant à la possibilité pour les États de restreindre l’utilisation du patrimoine d’une fondation lorsque celui-ci sert à financer des activités contraires à ses statuts et tendant à la réalisation d’un modèle de société incompatible avec les principes de la démocratie pluraliste préconisée par la Convention.

Les États doivent cependant user de ce droit d’une manière qui se concilie avec leurs obligations au titre de la Convention et sous réserve du contrôle par les organes de celle-ci. En conséquence, les exceptions visées à l’article 11 de la Convention appellent une interprétation stricte, seules des raisons convaincantes et impératives pouvant justifier des restrictions à la liberté d’association. Lorsqu’elle exerce son contrôle, la Cour n’a point pour tâche de se substituer aux juridictions internes compétentes, mais de vérifier sous l’angle de l’article 11 les décisions que celles-ci ont rendues en vertu de leur pouvoir d’appréciation. Il ne s’ensuit pas qu’elle doive se borner à rechercher si l’État défendeur a usé de ce pouvoir de bonne foi, avec soin et de façon raisonnable : il lui faut considérer l’ingérence litigieuse en tenant compte de l’ensemble de l’affaire pour déterminer si elle était « proportionnée au but légitime poursuivi » et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier apparaissent « pertinents et suffisants ». Ce faisant, la Cour doit se convaincre que les autorités nationales ont appliqué des règles conformes aux principes consacrés par l’article 11 et ce, de surcroît, en se fondant sur une appréciation acceptable des faits pertinents (Gorzelik et autres, précité, §§ 94-96, et Magyar Keresztény Mennonita Egyház et autres c. Hongrie, nos 70945/11 et 8 autres, §§ 78‑80, CEDH 2014 (extraits)).

β) Application des principes susmentionnés à l’espèce

– Besoin social impérieux

En général

57. La Cour examinera d’abord si l’on peut considérer que les mesures incriminées – à savoir le fait que la fondation requérante est restée inactive pendant plus de sept ans à la suite de sa dissolution et qu’elle n’a donc pu disposer, durant cette période, de son patrimoine pour financer ses activités, et le fait que, lors de son rétablissement, elle ne s’est pas vu restituer la totalité de ses biens immobiliers – répondaient à l’époque des faits à un « besoin social impérieux » pour atteindre les buts légitimes poursuivis.

58. La Cour observe tout d’abord que les publications litigieuses, telles que celles prises en considération par les juridictions nationales intervenues en l’espèce (paragraphes 15 et 16 ci-dessus), montraient que le patrimoine de la fondation requérante, avant sa dissolution, était destiné à financer la création d’établissements d’enseignement secondaire ou supérieur, qui auraient eu pour mission de préparer des cadres aptes à l’instauration d’un État fondé sur le régime de la charia, en remplacement d’un État au régime démocratique, laïque et pluraliste, et composé de ressortissants d’origine kurde.

Imputabilité

59. Comme les requérants et la fondation requérante soutiennent entre autres que les publications litigieuses ne reflétaient pas les positions de la fondation requérante, la Cour examinera en premier lieu l’imputabilité à la fondation requérante des contenus de ces publications. Les parties devant la Cour s’accordent à dire que les statuts de la fondation requérante ne mentionnaient aucunement comme but la création d’un État séparé, fondé sur le régime de la charia. La fondation requérante a été dissoute sur la base d’écrits publiés dans son bulletin officiel, Zehra Bülteni, écrits dont le lien avec la fondation requérante n’est pas contesté par celle-ci. Par ailleurs, les juridictions nationales intervenues dans cette affaire ont procédé à un examen sélectif des parutions litigieuses et elles n’ont pas pris en compte celles dont l’imputabilité à la fondation requérante était douteuse.

60. La Cour considère que la vision et les objectifs de la fondation requérante, tels qu’exposés dans les textes parus dans son bulletin officiel, pouvaient sans aucun doute être imputés à celle-ci. Les explications théoriques et spécifiques données dans cette publication sur les objectifs de la fondation requérante pouvaient raisonnablement être perçues comme la conception par celle-ci de ses activités futures, et non comme l’opinion personnelle des auteurs des écrits en question. La Cour observe qu’il n’a jamais été précisé dans le bulletin que les opinions exposées ne reflétaient pas celles de la fondation requérante ou qu’elles ne traduisaient que l’opinion personnelle de leurs auteurs.

Les motifs de dissolution

61. La Cour note ensuite que les motifs que les juridictions nationales ont invoqués pour ordonner la dissolution de la fondation requérante se résument principalement en ce que, d’après leur contenu, les textes publiés par la fondation requérante auraient eu clairement comme objectifs ultimes la mise en place, notamment pour les personnes d’origine kurde, d’un système étatique basé sur la charia et l’ouverture d’établissements d’enseignement servant ce dessein. La Cour relève que, aux yeux des juridictions nationales, ces deux points étaient le signe d’une nette opposition aux principes de laïcité et de démocratie pluraliste. Elle estime qu’aucun élément du dossier ne permet de penser que les juridictions nationales ont procédé à une interprétation des faits non pertinente et non raisonnable.

62. Quant à l’objectif de la fondation requérante visant à l’instauration d’un régime religieux basé sur la charia et méconnaissant les principes de laïcité et de démocratie pluraliste, la Cour rappelle qu’elle a déjà reconnu ce qui suit : « (...) la charia, reflétant fidèlement les dogmes et les règles divines édictés par la religion, présente un caractère stable et invariable. Lui sont étrangers des principes tels que le pluralisme dans la participation politique ou l’évolution incessante des libertés publiques. (...) Il est difficile à la fois de se déclarer respectueux de la démocratie et des droits de l’homme et de soutenir un régime fondé sur la charia, qui se démarque nettement des valeurs de la Convention » (Kalifatstaat, décision précitée, Refah Partisi, précité, § 123). Selon la Cour, une fondation dont l’action a pour but véritable l’instauration de la charia dans un État partie à la Convention peut difficilement passer pour une association conforme à l’idéal démocratique sous-jacent à l’ensemble de la Convention.

63. Quant aux activités de la fondation requérante visant à la création d’établissements d’enseignement ayant pour but de contrer la promotion des principes de laïcité et de démocratie pluraliste – principes qualifiés d’indésirables dans les textes du bulletin, selon les tribunaux –, la Cour estime que les autorités judiciaires, lorsqu’elles ont pris les mesures incriminées, peuvent passer pour avoir rempli leur obligation de veiller à ce que le programme d’éducation nationale soit organisé « de manière objective, critique et pluraliste, permettant aux élèves de développer un sens critique à l’égard notamment du fait religieux dans une atmosphère sereine, préservée de tout prosélytisme » (paragraphe 50 ci-dessus).

64. La Cour estime qu’il n’est pas nécessaire de procéder à une appréciation séparée des constats des tribunaux établissant que la fondation requérante prônait une discrimination en consacrant son modèle d’État théocratique aux personnes d’origine kurde. Elle observe que l’objectif de fonder un État pour les citoyens d’origine kurde n’a jamais été présenté séparément de celui d’instaurer la charia comme modèle de société, ce dernier objectif étant l’élément dominant dans les activités de la fondation requérante.

65. Quant à la thèse des requérants et de la fondation requérante selon laquelle la dissolution de celle-ci n’était pas justifiée au motif qu’aucun de ses membres fondateurs n’a été condamné au pénal pour des actes illégaux, la Cour rappelle que, depuis l’abrogation en 1991 de l’article 163 de l’ancien code pénal turc, l’expression des idées et opinions contraires au principe de laïcité n’est plus passible de sanctions pénales en Turquie. La Cour estime que cette situation est en conformité avec sa jurisprudence sur la liberté d’expression, selon laquelle, dans les démocraties pluralistes, même les idées se démarquant d’un régime démocratique peuvent être exprimées dans des débats ouverts au public tant qu’elles ne produisent pas un discours de haine ou qu’elles n’incitent pas à la violence (voir paragraphe 54 ci-dessus). Cela dit, cette interprétation de la liberté d’expression n’empêche pas les États contractants de prendre des mesures pour s’assurer qu’une fondation ne met pas son patrimoine au service d’un projet politique de l’enseignement qui serait contraire aux valeurs de la démocratie pluraliste et qui méconnaîtrait les droits et libertés garantis par la Convention (voir paragraphe 55 ci‑dessus).

Moment opportun

66. Quant au moment opportun de l’intervention par les autorités nationales, la Cour estime que, dès lors que les activités de la fondation requérante, y compris les textes qu’elle a publiés et diffusés en son nom, avaient montré que celle-ci poursuivait un objectif autre que ceux déclarés dans ses statuts, les autorités pouvaient légitimement intervenir pour mettre fin à cette divergence. Il n’était pas nécessaire d’attendre la réalisation de l’objectif caché de la fondation requérante, à savoir créer des établissements d’enseignement et propager auprès des étudiants des idées opposées au régime démocratique pluraliste.

Examen global du besoin social impérieux

67. Partant, la Cour admet que les juridictions nationales, qui ont procédé à une évaluation détaillée de l’affaire en se basant, entre autres, sur plusieurs rapports d’inspection ou d’expertise et en appliquant les critères établis par la jurisprudence pertinente de la Cour quant à l’article 11 de la Convention, n’ont pas outrepassé leur marge d’appréciation lorsqu’elles ont finalement estimé qu’il existait un besoin social impérieux – pour sauvegarder la nature spécifique de l’éducation dans une société démocratique pluraliste, et défendre ainsi l’ordre public et protéger les droits d’autrui – d’empêcher la fondation requérante de réaliser son projet caché tendant à mettre en œuvre des activités d’enseignement secondaire et universitaire dans le but ultime d’instaurer un régime fondé sur la charia.

– Proportionnalité de la mesure

68. Il reste à la Cour à déterminer si l’interruption des activités de la fondation requérante pendant plus de sept ans et la non-restitution à celle-ci de certains biens lors de son rétablissement étaient proportionnées aux buts légitimes poursuivis.

69. Les requérants et la fondation requérante soutiennent que, dans l’hypothèse où il était nécessaire de lancer un avertissement à la fondation requérante relativement à ses activités, les autorités n’étaient pas obligées d’opter pour une mesure aussi radicale que la dissolution. Ils estiment en effet qu’elles auraient pu faire rectifier la ligne des activités futures de la fondation requérante en recourant à des moyens plus légers prévus à cette fin par la loi. Ils ajoutent que, même si la loi a autorisé ultérieurement le rétablissement de la fondation requérante, l’État n’a pas permis à celle-ci de récupérer l’intégralité des biens dont elle disposerait avant sa dissolution.

70. Le Gouvernement estime que la situation de la fondation requérante a été rétablie.

71. La Cour rappelle que la nature et la lourdeur des ingérences sont aussi des éléments à prendre en considération lorsqu’il s’agit de mesurer leur proportionnalité (voir, par exemple, Sürek c. Turquie (no 1) [GC], no 26682/95, § 64, CEDH 1999-IV). Elle rappelle en outre que le degré d’ingérence autorisé par le paragraphe 2 de l’article 11 ne saurait être considéré dans l’abstrait, mais qu’il doit être apprécié dans le contexte particulier de l’affaire (Gorzelik et autres, précité, § 105).

72. En l’espèce, la Cour relève que, sept ans après sa dissolution, la fondation requérante a demandé, avec succès, son réenregistrement au registre des fondations en vertu d’une nouvelle loi permettant le rétablissement des fondations dissoutes. La fondation requérante a aussi récupéré, toujours sur le fondement de la nouvelle loi, la grande majorité des biens dont elle disposait avant sa dissolution. Seuls les biens qui avaient été attribués aux autres services publics n’ont pas été restitués, en raison de l’impossibilité de les réattribuer à la fondation requérante sur la base des nouveaux objectifs résultant des statuts révisés. Les biens non restitués continuent d’être utilisés par différents services d’intérêt général. Dès lors que la fondation requérante a dû rester inactive seulement pendant une période limitée, que la majeure partie de ses biens lui a été restituée et que les quelques biens restés à la disposition des services publics l’ont été après une sélection fondée sur un critère objectif prévu par la loi, la Cour considère que la mesure incriminée n’était pas disproportionnée aux buts poursuivis.

– Conclusion de la Cour quant à l’article 11 de la Convention

73. En conséquence, la Cour conclut que les ingérences en cause dans la présente affaire correspondaient à un « besoin social impérieux », qu’elles étaient « proportionnées aux buts visés » et qu’elles pouvaient donc être considérées comme « nécessaires dans une société démocratique » au sens de l’article 11 § 2 de la Convention.

74. Il n’y a donc pas eu violation de l’article 11 de la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DES ARTICLES 6 ET 13 DE LA CONVENTION ET DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1 À LA CONVENTION

75. Invoquant les articles 6 et 13 de la Convention, les requérants et la fondation requérante soutiennent que les juridictions nationales ont fait une application erronée de la législation interne sur le fondement d’un rapport d’expertise défavorable à la fondation requérante plutôt que sur celui d’une autre expertise favorable, et ce sans motivation détaillée, et qu’elles ont ainsi porté atteinte à leurs droits à un procès équitable et à un recours effectif.

Eu égard à ses conclusions sur le terrain de l’article 11 de la Convention, la Cour estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner séparément la recevabilité et le fond de ces griefs.

76. Les requérants et la fondation requérante soutiennent en outre que la non-restitution de certains de ses biens à la fondation requérante lors du rétablissement de cette dernière a emporté violation de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention.

Il convient de relever que les mesures dont se plaignent les requérants ne sont que des effets secondaires de la dissolution de la fondation Zehra qui, comme la Cour vient de le constater, n’enfreint pas l’article 11. La non‑restitution des biens immobiliers appartenant à un fondateur décédé et ayant été attribués à d’autres services publics est une ingérence justifiée au sens de l’article 1 du Protocole no 1, pour les mêmes motifs que ceux menant à la non-violation de l’article 11. Dès lors, il n’y a pas lieu d’examiner séparément ces griefs en détails (voir, mutatis mutandis, Refah Partisi, précité, § 139).

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

1. Déclare, à l’unanimité, le grief tiré de l’article 11 de la Convention recevable ;

2. Dit, à l’unanimité, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 11 de la Convention ;

3. Dit, par six voix contre une, qu’il n’est pas nécessaire d’examiner séparément la recevabilité et le fond des griefs tirés des articles 6 et 13 de la Convention et de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 10 juillet 2018, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Hasan BakırcıRobert Spano
Greffier adjointPrésident

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l’exposé de l’opinion séparée du juge Lemmens.

R.S.
H.B.

OPINION PARTIELLEMENT DISSIDENTE
DU JUGE LEMMENS

J’ai voté avec la majorité pour le constat de non-violation de l’article 11 de la Convention.

Étant parvenu à cette conclusion, je ne peux pas me rallier à la décision de la majorité selon laquelle il n’est pas nécessaire d’examiner séparément la recevabilité et le fond des griefs tirés des articles 6 et 13 de la Convention et de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention (paragraphes 75-76 de l’arrêt). Quand la Cour n’a pas constaté de violation dans le cadre d’un premier grief (en l’espèce le grief tiré de l’article 11 de la Convention), elle ne peut pas, à mon avis, se dispenser d’examiner, fût-ce sommairement, d’autres griefs.

Par ailleurs, l’examen des griefs laissés sans réponse ne pose selon moi pas beaucoup de problèmes.

En ce qui concerne les griefs fondés sur les articles 6 et 13 de la Convention, il suffit à mon avis de constater qu’ils invitent la Cour à assumer le rôle de juge de quatrième instance, ce qui ne relève pas de sa compétence (voir, parmi beaucoup d’autres, Zubac c. Croatie [GC], no 40160/12, § 79, 5 avril 2018). Ces griefs devraient d’après moi être déclarés irrecevables comme étant manifestement mal fondés.

Quant au grief fondé sur l’article 1 du Protocole no 1, la majorité elle‑même constate qu’il y a eu en l’espèce une ingérence (dans le droit de propriété des requérants) et que cette ingérence est « justifiée (...) pour les mêmes motifs que ceux menant à la non-violation de l’article 11 » (paragraphe 76 de l’arrêt). Je ne comprends pas pourquoi elle ne tire pas la conclusion logique de ce constat, à savoir que ce grief (comme celui tiré de l’article 11 de la Convention) est recevable mais non fondé.

* * *

[1]. Said Nursi, surnommé Bediüzzaman (« le prodige du temps »), est né en 1876 à Bitlis et est décédé en 1960 à Urfa. Mécontent du système d’éducation existant, il voulait réunir l’enseignement des sciences religieuses traditionnelles et celui des sciences modernes (fen). Pour cela, il souhaitait la création d’une université de l’islam, Medresetü-z Zehra, dans les provinces orientales de l’Empire ottoman.


Synthèse
Formation : Cour (deuxiÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-184491
Date de la décision : 10/07/2018
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Non-violation de l'article 11 - Liberté de réunion et d'association (Article 11-1 - Liberté d'association)

Parties
Demandeurs : FONDATION ZEHRA ET AUTRES
Défendeurs : TURQUIE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : CENGIZ O.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

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