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16/06/2015 | CEDH | N°001-155212

CEDH | CEDH, AFFAIRE CONSTANTIN NISTOR c. ROUMANIE, 2015, 001-155212


TROISIÈME SECTION

AFFAIRE CONSTANTIN NISTOR c. ROUMANIE

(Requête no 35091/12)

ARRÊT

STRASBOURG

16 juin 2015

DÉFINITIF

16/09/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Constantin Nistor c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, président,
Luis López Guerra,
Ján Šikuta,
Kristina Pardalos,

Johannes Silvis,
Valeriu Griţco,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du c...

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE CONSTANTIN NISTOR c. ROUMANIE

(Requête no 35091/12)

ARRÊT

STRASBOURG

16 juin 2015

DÉFINITIF

16/09/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Constantin Nistor c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, président,
Luis López Guerra,
Ján Šikuta,
Kristina Pardalos,
Johannes Silvis,
Valeriu Griţco,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 26 mai 2015,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 35091/12) dirigée contre la Roumanie et dont un ressortissant de cet État, M. Constantin Nistor (« le requérant »), a saisi la Cour le 8 mai 2012 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») a été représenté par son agente, Mme C. Brumar, du ministère des Affaires étrangères.

3. Le requérant se plaint en particulier des conditions de sa détention dans les locaux de détention de la police à Bacău ainsi que de la surveillance vidéo dont il aurait fait l’objet dans sa cellule et au parloir.

4. Le 23 octobre 2013, les griefs tirés des articles 3 et 8 de la Convention ont été communiqués au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Le requérant est né en 1960 et réside à Piatra Neamţ.

6. Par une ordonnance du 29 septembre 2011, le parquet plaça le requérant, soupçonné de corruption, en garde à vue. L’intéressé fut incarcéré le même jour dans les locaux de détention de la police départementale de Bacău.

7. Le requérant fut ensuite placé en détention provisoire pour une durée de vingt-neuf jours par un jugement avant dire droit du 30 septembre 2011 du tribunal départemental de Bacău. Sa détention provisoire fut ensuite prolongée à deux reprises, le 25 octobre puis le 25 novembre 2011.

8. Le 29 novembre 2011, le requérant fut transféré à la prison de Bacău.

A. Les conditions de détention dans les locaux de détention de la police départementale de Bacău

9. Le requérant décrit ses conditions de détention dans les locaux de détention de la police départementale à Bacău comme suit. Il indique que sa cellule mesurait 15 m2, qu’elle contenait six lits pour dix détenus et qu’elle était occupée par des détenus fumeurs alors que lui-même ne l’aurait pas été. Il ajoute qu’elle était insalubre, qu’elle n’était pas chauffée malgré l’arrivée du froid et qu’elle était infestée de moustiques et de parasites (puces, poux, punaises de lit). Il se plaint également d’une absence de linge de lit propre, et d’un manque de produits d’hygiène et de nettoyage. Il affirme en outre que l’eau chaude n’était disponible que deux fois par semaine, les lundis et les jeudis, de 16 heures à 18 heures. Il allègue par ailleurs que la nourriture était de mauvaise qualité et que le personnel qui la distribuait ne respectait pas les normes minimales d’hygiène. Il soutient enfin qu’il ne pouvait sortir de sa cellule que deux fois par semaine pour se rendre dans une « cage » qui aurait mesuré tout au plus 25 m2.

10. Le Gouvernement indique que le requérant a été placé dans la cellule no 5 au premier étage, que celle-ci mesurait 12,87 m2 et qu’elle a accueilli à ce moment-là entre trois et six détenus. Il soutient que le requérant n’a pas demandé à être placé dans une cellule pour non-fumeurs. Il indique également que les cellules des locaux de détention de la police étaient, en règle générale, équipées de quatre lits, mais que le nombre de lits pouvait être augmenté en fonction du nombre de détenus. Il ajoute que les cellules n’étaient pas meublées, qu’elles bénéficiaient d’un système de chauffage ainsi que de la lumière et de la ventilation naturelles et que les détenus étaient pourvus en linge de lit en bon état. Enfin, selon le Gouvernement, une action de dératisation était menée chaque année, l’eau chaude était fournie deux fois par semaine, la nourriture était conforme à la réglementation du ministère de la Justice, les locaux de détention de la police disposaient d’une cour de promenade à laquelle les détenus auraient eu accès quotidiennement, à l’exception des jours où le personnel n’était pas disponible en raison des obligations de surveillance à l’extérieur (transfert des détenus vers les tribunaux, le parquet ou les hôpitaux).

B. La surveillance dans la cellule des locaux de détention de la police départementale de Bacău

11. La cellule du requérant était équipée d’une caméra de surveillance qui fonctionnait vingt-quatre heures sur vingt-quatre et était reliée au bureau de l’inspecteur en chef des locaux de détention. Il verse au dossier un croquis de la cellule dont il ressort que la caméra est située en haut et à droite de l’entrée. Un dispositif similaire était présent au parloir.

12. Selon les informations fournies par le Gouvernement, les enregistrements étaient conservés pendant dix jours et avaient pour but d’assurer la sécurité des lieux et des personnes présentes. Les toilettes n’étaient pas équipées de caméra de surveillance.

13. À une date non précisée, le requérant saisit le tribunal de première instance de Bacău (« le tribunal de première instance ») d’une action civile en responsabilité délictuelle contre le ministère de l’Administration et de l’Intérieur. Il réclamait des dommages et intérêts pour ce qu’il estimait être une violation, pendant son incarcération dans les locaux de détention de la police à Bacău, de ses droits garantis par les articles 2, 3, 5 et 8 de la Convention.

14. Par un jugement du 9 avril 2013, le tribunal de première instance rejeta son action pour défaut de paiement des taxes judiciaires.

15. Le requérant interjeta appel et demanda à être exempté du paiement de ces taxes au motif qu’il s’agissait d’une violation de ses droits garantis par la Convention.

16. Par un arrêt du 9 septembre 2013, le tribunal départemental de Bacău (« le tribunal départemental ») rejeta son appel, jugeant que, en application de la législation sur les taxes judiciaires, seules les actions dénonçant une violation des articles 2 et 3 de la Convention étaient exonérées du paiement de ces taxes.

17. Le requérant forma un pourvoi en recours. À ses dires, la cour d’appel de Bacău a fait droit à son pourvoi par un arrêt du 19 mai 2014 et a renvoyé l’affaire au tribunal départemental pour un nouveau jugement sur le fond.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES ET INTERNATIONAUX PERTINENTS

18. Les dispositions pertinentes en l’espèce de la loi no 275/2006 sur l’exécution des peines sont ainsi libellées :

Article 82 – L’exécution de la garde à vue et de la détention provisoire

« Les dispositions du titre IV, chapitres III-VII, relatives aux conditions de détention, aux droits et obligations des personnes condamnées, au travail, aux activités éducatives et culturelles, de conseil psychologique et d’assistance sociale, aux récompenses – à l’exception de la permission de sortir de l’établissement pénitentiaire – et aux sanctions s’appliquent de la même manière [aux personnes placées en détention provisoire] pour autant qu’elles ne contreviennent pas aux dispositions du présent titre. »

19. Les dispositions pertinentes en l’espèce du règlement d’application de la loi no 275/2006 sur l’exécution des peines sont ainsi libellées :

Article 195

« 1. La sécurité dans le lieu de détention ainsi que la protection, la surveillance et l’escorte des personnes privées de liberté représentent un ensemble d’actions et de mesures prises par l’administration du lieu de détention, qui ont comme but :

a) d’empêcher les personnes privées de liberté de se soustraire à l’exécution de la peine et des mesures préventives (...)

e) de prévenir les situations de risque pour l’ordre public (...)

11. Pour atteindre les buts prévus au paragraphe 1 a) et e), des systèmes électroniques de surveillance à distance peuvent être utilisés. Les critères et la procédure d’application sont approuvés par ordre du ministre de la Justice. »

20. Les dispositions pertinentes en l’espèce de l’ordre du ministre de la Justice portant approbation du règlement sur la sécurité des établissements subordonnés à l’Administration nationale des établissements pénitentiaires sont ainsi libellées :

Article 97

« 6. La surveillance des halls, des sections de détention, des salles d’attente, des cours de promenade, des allées pour les piétons, des salles d’activités sportives, des salles à manger, des clubs, des ateliers, des salles [où les détenus peuvent recevoir] des colis ou des visites, des espaces extérieurs des pavillons de détention peut se faire par le biais de systèmes électroniques de surveillance vidéo. Les images sont visionnées et sauvegardées au centre de surveillance électronique. »

Article 98

« 2. Dans les salles à l’usage du juge délégué [à l’exécution des peines], dans les salles [où les détenus se voient octroyer le droit] de téléphoner ou dans celles où ont lieu des activités morales ou religieuses, la surveillance peut se faire visuellement ou par des systèmes électroniques de surveillance vidéo, dans des conditions respectant la confidentialité (...) »

21. Les conclusions du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) rendues à la suite des visites effectuées en 2010 dans plusieurs locaux de détention de la police roumaine sont résumées dans l’affaire Căşuneanu c. Roumanie (no 22018/10, § 43, 16 avril 2013).

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

22. Le requérant dénonce les conditions de sa détention, qu’il qualifie de traitements contraires à l’article 3 de la Convention. Cette disposition est ainsi libellée :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

A. Sur la recevabilité

23. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes. Il reconnaît qu’il n’existe pas de recours effectif en ce qui concerne le surpeuplement carcéral, mais indique que le requérant aurait dû saisir le juge délégué à l’exécution des peines au sujet des aspects de la vie en prison relatifs à sa situation personnelle, tels que la présence de parasites ou l’absence de linge de lit propre.

24. Le requérant estime qu’il a présenté son grief en conformité avec les exigences de l’article 35 de la Convention.

25. La Cour observe que, s’agissant des conditions matérielles de détention, le grief du requérant porte en particulier sur une surpopulation carcérale et sur de mauvaises conditions d’hygiène. Elle rappelle à ce propos avoir déjà jugé, dans des affaires récentes relatives à un grief similaire et dirigées contre la Roumanie, qu’au vu de la particularité de ce grief le Gouvernement n’a pas indiqué comment une action devant le juge délégué à l’exécution des peines aurait pu apporter au requérant une réparation immédiate et effective pour son grief (Marin Vasilescu c. Roumanie, no 62353/09, § 27, 11 juin 2013, Bulea c. Roumanie, no 27804/10, § 42, 3 décembre 2013, et Bujorean c. Roumanie, no 13054/12, § 21, 10 juin 2014). Les arguments du Gouvernement ne sauraient conduire la Cour à une conclusion différente en l’espèce. Dès lors, il convient de rejeter cette exception.

26. Constatant par ailleurs que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

27. Le requérant allègue que la cellule qu’il a occupée dans les locaux de détention de la police à Bacău était surpeuplée et que les conditions de sa détention en général n’étaient pas conformes aux standards de la Cour et du CPT en la matière.

28. Le Gouvernement indique que le requérant a bénéficié d’un espace de vie pouvant aller jusqu’à 4,27 m2 et que les autorités roumaines continuent à déployer des efforts pour améliorer les conditions de détention.

29. La Cour rappelle que l’article 3 de la Convention impose à l’État de s’assurer que toute personne détenue le soit dans des conditions qui sont compatibles avec le respect de la dignité humaine, qui ne soumettent pas l’intéressé à une détresse ou à une épreuve d’une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention et que, eu égard aux exigences pratiques de l’emprisonnement, la santé et le bien-être de la personne détenue sont assurés de manière adéquate (Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, §§ 92-94, CEDH 2000-XI). Lorsqu’on évalue les conditions de détention, il y a lieu de prendre en compte les effets cumulatifs de celles‑ci (Dougoz c. Grèce, no 40907/98, § 46, CEDH 2001-II).

30. L’État est donc tenu, nonobstant les problèmes logistiques et financiers, d’organiser son système pénitentiaire de façon à assurer aux détenus le respect de leur dignité humaine (Benediktov c. Russie, no 106/02, § 37, 10 mai 2007, et Soukhovoï c. Russie, no 63955/00, § 31, 27 mars 2008).

31. En l’espèce, la Cour note que le requérant se borne à se plaindre de ses conditions de détention dans les locaux de la police à Bacău du 29 septembre au 29 novembre 2011.

32. S’agissant de la question du surpeuplement carcéral, la Cour note qu’elle a récemment examiné les conditions régnant dans les locaux de détention de la police à Bacău dans l’affaire d’un requérant qui y a été détenu quelques mois après le requérant en l’espèce (Mihăilescu c. Roumanie, no 46546/12, §§ 56-61, 1er juillet 2014). Dans cette affaire, la Cour a constaté que l’espace de vie dont l’intéressé avait bénéficié avait varié entre 1 m2 et 4 m2 et que, même si à certains moments cet espace avait été supérieur à 4 m2, les cellules n’étaient pas meublées de façon adéquate, qu’elles étaient humides ou inondées et que le requérant n’avait pas pu se nourrir de façon correcte (idem, § 57). Elle a donc conclu à la violation de l’article 3 de la Convention (idem, § 61).

33. La Cour estime que les mêmes conclusions doivent s’appliquer en l’espèce, d’autant que les allégations du requérant relatives au surpeuplement carcéral et à la précarité des conditions d’hygiène correspondent aux constats du CPT après sa visite dans plusieurs locaux de détention de la police roumaine (paragraphe 21 ci-dessus).

34. Au vu de ce qui précède, la Cour conclut qu’il y a eu, en l’espèce, violation de l’article 3 de la Convention.

35. Compte tenu de ce constat, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner plus avant les allégations du requérant relatives à la présence de détenus fumeurs dans sa cellule (Cucolaş c. Roumanie, no 17044/03, § 99, 26 octobre 2010, et Florin Andrei c. Roumanie, no 33228/05, § 49, 15 avril 2014).

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 8 DE LA CONVENTION

36. Le requérant dénonce une violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale en raison de la présence de caméras de surveillance dans sa cellule et dans le parloir des locaux de détention de la police à Bacău. Il invoque à cet égard l’article 8 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien‑être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

37. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes. Il est d’avis que le requérant aurait dû saisir les tribunaux d’une action civile en responsabilité délictuelle afin de demander le constat de la violation alléguée de ses droits garantis par l’article 8 de la Convention ainsi que la réparation de tout préjudice éventuellement subi.

38. Le requérant soutient qu’il a épuisé les voies de recours internes. Il précise à cet égard qu’il a formé une action en responsabilité civile qui est pendante devant le tribunal départemental de Bacău.

39. La Cour note que le requérant a bien formé une action civile en responsabilité délictuelle qui porte, entre autres, sur la violation de ses droits garantis par l’article 8 de la Convention (paragraphe 17 ci-dessus) et que cette action est toujours pendante devant les juridictions nationales.

40. Il s’ensuit que ce grief est prématuré et qu’il doit être rejeté pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

41. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

42. Le requérant réclame 30 000 euros (EUR) pour préjudices matériel et moral.

43. Le Gouvernement estime que l’octroi d’un montant pour préjudice matériel ne se justifie pas en l’espèce. Quant au préjudice moral, il estime que le constat d’une violation constituerait en soi une réparation satisfaisante et que, en tout état de cause, la somme réclamée par le requérant est excessive.

44. La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et elle rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 3 000 EUR pour préjudice moral.

B. Frais et dépens

45. Le requérant demande également 72 800 lei roumains (RON) (soit environ 16 545 EUR) correspondant aux honoraires des deux avocats qui l’ont représenté devant les tribunaux internes lors de la procédure pénale menée à son encontre, 250 RON (soit environ 56 EUR) représentant des frais judiciaires engagés lors de cette dernière procédure, ainsi que 85,95 RON (soit environ 20 EUR) représentant divers frais postaux. Il accompagne ses demandes de certains justificatifs.

46. Le Gouvernement estime que les sommes sollicitées n’ont pas de rapport avec la procédure devant la Cour, à l’exception d’une partie des frais de poste.

47. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, compte tenu du fait que le requérant a présenté lui-même sa réponse aux observations du Gouvernement, la Cour estime que les sommes réclamées au titre des honoraires d’avocat et des frais judiciaires ne sont pas liées à la procédure devant elle (Dulbastru c. Roumanie, no 47040/11, §§ 41-43, 8 juillet 2014). En revanche, elle note que le requérant a produit des justificatifs – pour un montant de 20 EUR – relatifs aux frais postaux qu’il a engagés pour la présente procédure. Dès lors, elle accorde cette somme au requérant.

C. Intérêts moratoires

48. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable quant au grief tiré de l’article 3 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention ;

3. Dit

a) que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur, au taux applicable à la date du règlement :

i. 3 000 EUR (trois mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour préjudice moral,

ii. 20 EUR (vingt euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par le requérant, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 16 juin 2015, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Stephen PhillipsJosep Casadevall
GreffierPrésident


Synthèse
Formation : Cour (troisiÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-155212
Date de la décision : 16/06/2015
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 3 - Interdiction de la torture (Article 3 - Traitement dégradant;Traitement inhumain) (Volet matériel)

Parties
Demandeurs : CONSTANTIN NISTOR
Défendeurs : ROUMANIE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

Source

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