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14/01/2014 | CEDH | N°001-139990

CEDH | CEDH, AFFAIRE SÂNCRĂIAN c. ROUMANIE, 2014, 001-139990


TROISIÈME SECTION

AFFAIRE SÂNCRĂIAN c. ROUMANIE

(Requête no 71723/10)

ARRÊT

STRASBOURG

14 janvier 2014

DÉFINITIF

14/04/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Sâncrăian c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, président,
Alvina Gyulumyan,
Corneliu Bîrsan,
Luis López Guerra,
Nona T

sotsoria,
Kristina Pardalos,
Valeriu Griţco, juges,
et de Santiago Quesada, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 dé...

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE SÂNCRĂIAN c. ROUMANIE

(Requête no 71723/10)

ARRÊT

STRASBOURG

14 janvier 2014

DÉFINITIF

14/04/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Sâncrăian c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, président,
Alvina Gyulumyan,
Corneliu Bîrsan,
Luis López Guerra,
Nona Tsotsoria,
Kristina Pardalos,
Valeriu Griţco, juges,
et de Santiago Quesada, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 décembre 2013,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 71723/10) dirigée contre la Roumanie et dont une ressortissante de cet État, Mme Maria Sâncrăian (« la requérante »), a saisi la Cour le 24 septembre 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. La requérante a été représentée par Me T. Godîncă-Herlea, avocate à Cluj-Napoca. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») a été représenté par son agente, Mme I. Cambrea, du ministère des Affaires étrangères.

3. La requérante dénonce en particulier l’illégalité de sa détention après la réouverture de la procédure à l’issue de laquelle elle avait été condamnée pour escroquerie, la méconnaissance de son droit d’obtenir à bref délai une décision judiciaire concernant la légalité de sa détention, ainsi que l’impossibilité d’obtenir une réparation pour sa détention prétendument illégale. Elle se plaint également des conditions de détention subies et de l’absence d’assistance médicale dans plusieurs centres de détention. Elle invoque les articles 3 et 5 §§ 1, 4 et 5 de la Convention.

4. Le 15 septembre 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. La requérante est née en 1956 et réside à Cluj-Napoca.

A. La procédure pénale engagée contre la requérante et sa détention

6. Par un jugement définitif du 14 novembre 2006, le tribunal de première instance de Cluj-Napoca condamna par contumace la requérante à trois ans et demi de prison ferme pour escroquerie.

7. Le 9 juillet 2008, la requérante fut arrêtée en Italie et, le 1er septembre 2008, elle fut extradée vers la Roumanie où elle fut placée en détention en vertu du jugement définitif du 14 novembre 2006.

8. Le 25 septembre 2008, la requérante demanda au tribunal, en vertu de l’article 5221 du code de procédure pénale, la réouverture de la procédure qui s’était achevée avec sa condamnation. Elle versa au dossier plusieurs décisions des tribunaux internes ayant accueilli de telles demandes et ordonnant la remise en liberté des intéressés. Elle se référa également aux conclusions de la Cour dans les arrêts Sejdovic c. Italie ([GC], no 56581/00, CEDH 2006‑II) et Stoichkov c. Bulgarie (no 9808/02, arrêt du 24 mars 2005).

9. Par une décision du 13 novembre 2008, le tribunal de première instance de Cluj-Napoca rejeta la demande de la requérante.

10. La requérante interjeta appel de cette décision. Au cours des différentes audiences, elle demanda que l’affaire soit examinée avec célérité étant donné qu’elle concernait la liberté d’une personne.

11. Par un arrêt du 23 novembre 2009, le tribunal départemental de Cluj annula la décision du tribunal de première instance du 13 novembre 2008. Notant que les droits de la défense de la requérante avaient été méconnus au cours de la procédure par contumace, il ordonna la réouverture de cette procédure et une nouvelle administration des preuves.

12. L’affaire fut alors réinscrite au rôle du tribunal de première instance de Cluj-Napoca.

13. Lors de l’audience du 4 février 2010, devant le tribunal de première instance, l’avocat de la requérante s’opposa à l’ajournement de l’affaire pour cause de citation irrégulière d’une des parties lésées. Il fit valoir également que, en vertu du principe de la présomption d’innocence, la requérante devait être jugée libre. Le parquet s’opposa à la demande de l’avocat, répliquant qu’il n’y avait aucune disposition légale qui fonde cette demande. Le tribunal ajourna l’affaire au 25 mars 2010 et précisa qu’aucune mesure ne pouvait être prise avant la citation régulière de toutes les parties.

14. Le même jour, la requérante déposa une demande tendant à l’avancement de la date de la prochaine audience. Elle souligna que la demande de réouverture de la procédure avait été accueillie et que, dès lors, la procédure devait suivre les règles du jugement en première instance. Or, de ce fait, en vertu du principe de la présomption d’innocence, la légalité de la décision initiale de condamnation et celle du mandat d’arrêt émis sur sa base étaient mises en doute. Par une décision du 8 février 2010, la demande fut rejetée, étant donné l’objet du dossier et l’encombrement du rôle du tribunal.

15. Par une décision du 25 mars 2010, le tribunal constata que le parquet n’avait à aucun moment informé la requérante de l’accusation portée contre elle et que les pièces recueillies au cours de l’instruction pénale ne lui avaient pas été présentées. En conséquence, il décida le renvoi de l’affaire devant le parquet pour un complément d’enquête. Dans le dispositif de la même décision, le tribunal annula le mandat d’arrêt établi au nom de la requérante en vue de la mise à exécution du jugement du 14 novembre 2006 et ordonna sa remise en liberté.

16. La requérante fut remise en liberté le même jour.

17. La procédure pénale engagée contre la requérante est actuellement pendante en première instance.

B. Les conditions de détention et de transfert et l’assistance médicale

1. La version de la requérante

a) Le formulaire de requête

18. Le 1er septembre 2008, la requérante fut incarcérée dans les locaux de la direction générale de la police de Bucarest dans les cellules nos 1 et 5 avec trois autres personnes. Les cellules mesuraient 9 m², étaient dotées de quatre lits superposés sans draps, couverture ou oreiller et de toilettes sans cloison. La douche était installée au-dessus des toilettes. La fenêtre mesurait 1 m sur 0, 5 m. Le ménage de la cellule était assuré par la requérante qui s’était procuré les produits d’entretien à ses frais. Elle bénéficiait d’une sortie en promenade d’une heure par jour.

19. Le 12 septembre 2008, la requérante fut transférée dans les locaux de la direction générale de la police de Cluj dans un fourgon fermé, sans aération, avec un autre détenu. À l’arrivée, la requérante fut placée seule dans une cellule de 6 à 7 m², qui était située au sous-sol, sans aération et sans lumière naturelle. La cellule n’était pas dotée de groupe sanitaire et il fallait demander à chaque fois au gardien à être amenée aux toilettes à l’extérieur de la cellule. La requérante pouvait prendre une douche par semaine. La requérante a dû également se procurer à ses frais les produits d’entretien.

20. Le 19 septembre 2008, la requérante fut transférée dans la prison de Gherla. Elle fut placée seule dans une cellule de 12 à 13 m², dotée de quatre lits superposés. Les matelas étaient très sales et sentaient très mauvais.

21. La requérante fut transportée à l’hôpital pénitentiaire de Jilava avec une autre personne dans le compartiment individuel du fourgon pénitentiaire de 1 m². Le transport commença à 16 h 30 et prit fin le lendemain à 23 h, après plusieurs arrêts en cours de route dans d’autres centres pénitentiaires.

22. Dans l’hôpital pénitentiaire de Jilava, la requérante fut placée pendant sept jours dans la cellule no 37 qui mesurait entre 20 et 25 m² et était dotée de cinq lits. Plusieurs lits non utilisables étaient rangés contre un mur. Les toilettes avaient une superficie de 1 m² et l’eau s’écoulait dans la cellule. La cellule était infestée de rats.

23. La requérante fut ensuite incarcérée dans les locaux extérieurs de la prison de Gherla sis à Cluj-Napoca dans des cellules dotées, soit de quatre lits, soit de quinze à vingt-et-un lits superposés. Les toilettes avaient une superficie de 1 m².

24. Le 5 décembre 2008, la requérante fut transférée à nouveau dans les locaux de la direction générale de la police de Bucarest où elle fut placée successivement dans plusieurs cellules dans des conditions précaires. Pendant le premier mois passé dans ces locaux, les gardiens refusèrent de lui donner ses soutien-gorge que le médecin l’avait autorisée à porter.

25. Le 14 janvier 2009, la requérante a informé le personnel du centre de détention qu’elle ressentait une douleur à l’œil gauche. Après un premier refus, elle fut amenée à l’infirmerie le lendemain. On diagnostiqua chez elle une infection de l’œil et on lui prescrivit un traitement à base de crème.

26. Le 13 janvier 2009, la requérante déclara au personnel du centre de détention que sa codétenue était infestée de poux. Bien que la requérante administrât à sa collègue un médicament qu’elle s’était procuré à ses frais, elle fut à son tour infestée. La requérante ne fut traitée et la cellule ne fut désinfectée que le 22 janvier 2009.

b) Les renseignements ultérieurs

27. Par une lettre du 28 juin 2011, la requérante répondit à une lettre du Greffe par laquelle elle était invitée, entre-autres, à préciser chaque centre de détention dans lequel elle avait été incarcérée et les conditions de détention subis dans les centres dont elle entendait se plaindre. Dans cette lettre elle compléta la description des conditions de détention subies au cours de son incarcération de 21 jours dans la prison de Gherla pendant la période de septembre à octobre 2008, ainsi que les conditions de surpopulation carcérale subies dans la prison de Târgşor du 13 février au 5 mars 2009. À cette dernière date, elle fut transférée dans les locaux extérieurs de la prison de Gherla sis à Cluj-Napoca.

2. La version du Gouvernement

28. Le Gouvernement énumère les centres pénitentiaires dans lesquels la requérante a été incarcérée et se réfère aux conditions matérielles de sa détention dans ces centres et celles concernant ses transferts, ainsi qu’à l’assistance médicale accordée. Il souligne que ces conditions étaient conformes à la réglementation nationale en la matière et que la requérante a bénéficié de l’assistance médicale en prison lorsqu’elle l’a réclamée. Il mentionne enfin, documents à l’appui, que la requérante a été hospitalisée dans l’hôpital pénitentiaire de Jilava où on a diagnostiqué chez elle une polyarthrose vertébrale, mais qu’elle a refusé le traitement et les examens médicaux supplémentaires conseillés.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

29. Les dispositions de l’article 5221 du code de procédure pénale (CPP) sont ainsi libellées :

Article 5221

Le réexamen après extradition de la procédure conclue par

la condamnation in absentia

« 1. En cas d’extradition d’une personne jugée et condamnée in absentia, l’affaire pourra être réexaminée par le tribunal de première instance, à la demande de la personne condamnée.

2. Les dispositions des articles 405 à 408 sont applicables. »

30. Les dispositions des articles 405 à 408 du CPP concernent la procédure d’examen d’une affaire après la recevabilité d’une demande de révision. Ces dispositions renvoient à leur tour aux règles régissant le jugement en première instance. En vertu de ces dernières règles générales, le tribunal qui examine le fond de l’accusation doit se prononcer également sur la détention de l’intéressé (article 350 du CPP). Selon l’article 406 du CPP, après la recevabilité, le tribunal peut accueillir la demande de révision, si elle s’avère bien fondée, auquel cas, il annule la décision initiale, ou il peut la rejeter. L’article 404 du CPP, qui offre aux tribunaux la possibilité d’ordonner le sursis à l’exécution de la peine ou de prendre de mesures provisoires, n’était pas applicable, à l’époque des faits, à la procédure de réexamen après extradition prévue par l’article 5221. Suite à l’entrée en vigueur, le 25 novembre 2010, de la loi no 202/2010, cet article est également applicable à la procédure de réexamen après extradition. Les dispositions pertinentes de l’article 404 du CPP sont ainsi libellées :

« 1. Après la recevabilité, le tribunal peut suspendre de manière motivée, en tout ou en partie, l’exécution de la décision qui fait l’objet de la révision.

2. Le tribunal peut également prendre une des mesures provisoires, si les conditions légales sont réunies. »

31. En l’absence d’une disposition légale expresse, certains tribunaux ont ordonné la remise en liberté des personnes condamnées dès la réouverture de la procédure pénale, estimant que la décision portant réouverture efface la procédure antérieure et que, dès lors, les intéressés devaient bénéficier de la présomption d’innocence, et retrouver la liberté (voir la décision du tribunal départemental de Bacău du 23 février 2005 et celle du même tribunal no 177/R/2009 du 4 mars 2009, la décision définitive no 109 du 25 janvier 2008 de la cour d’appel de Ploieşti, la décision définitive du tribunal départemental de Prahova no 54 du 27 février 2008 et la décision définitive no 591 du 9 octobre 2008 de la cour d’appel de Bacău).

32. D’autres tribunaux ont fait l’application de l’article 404 du CPP, même avant l’entrée en vigueur des modifications rendant cet article applicable à la procédure de réexamen d’une affaire après extradition (voir la décision avant dire droit du 24 avril 2008 du tribunal de première instance d’Oradea et la décision avant dire droit du 22 octobre 2009 du tribunal départemental de Bihor, rendues en formations de juge unique constituées du même juge, ainsi que la décision avant dire droit du 15 septembre 2010 du tribunal départemental de Braşov).

33. D’autres tribunaux ont refusé d’ordonner la remise en liberté dans des cas similaires, estimant que l’intéressé gardait la qualité de condamné jusqu’à la fin de la procédure de réexamen (voir la décision définitive de la cour d’appel d’Oradea du 27 mars 2009, la décision no 459 du 1er septembre 2009 de la cour d’appel de Constanţa, la décision définitive de la cour d’appel de Piteşti no 41A du 13 avril 2010, la décision définitive no 244R du 27 avril 2010 de la cour d’appel d’Oradea, et la décision définitive du tribunal départemental de Brăila no 103 du 11 juin 2010). Dans sa décision définitive no 5173 du 1er novembre 2007, la Haute Cour de cassation et de justice a jugé que la décision de réouverture de la procédure n’influe aucunement sur la décision de condamnation.

34. Dans le cadre du réexamen après extradition, par une décision définitive no 384 du 10 avril 2008, le tribunal départemental de Prahova a accueilli une contestation concernant l’exécution d’une peine de prison, sur la base de l’article 461 § 1 d) du CPP, et a annulé un mandat d’arrêt délivré en vue de l’exécution d’une peine de prison. À cet effet, il constata que, par une décision antérieure, la décision de condamnation d’un intéressé avait été annulée suite à la réouverture de la procédure après l’extradition de celui-ci. Toutefois, dans cette décision, le tribunal avait omis de se prononcer sur le sort du mandat d’arrêt délivré en vertu de la décision de condamnation. En revanche, dans sa décision no 459 du 1er septembre 2009 (voir également le paragraphe antérieur), la cour d’appel de Constanţa a jugé que la décision de réouverture d’une procédure par contumace ne saurait être considérée comme un « incident dans l’exécution » aussi longtemps que la décision de condamnation n’a pas été annulée.

35. Dans le compte-rendu de sa réunion du 4 juin 2008 avec les dirigeants des plus hautes autorités judiciaires pénales, la Commission de l’unification de la jurisprudence nommée dans le cadre du Conseil supérieur de la magistrature, notait qu’il y avait des opinions divergentes quant à la possibilité de libérer une personne après la réouverture de la procédure à l’issue de laquelle elle avait été condamnée à un peine de prison, réouverture basée sur l’article 5221 du CPP. Selon une première opinion, la remise en liberté était possible à l’occasion de la réouverture de la procédure, alors que selon la deuxième opinion, majoritaire, cela n’était possible qu’une fois le fond de l’affaire réexaminé.

36. Les dispositions de l’article 504 du CPP sont ainsi libellées :

Article 504

« 1. Toute personne condamnée par une décision définitive a droit à se voir octroyer par l’État une réparation pour le dommage subi si, à la suite d’un nouveau jugement de la cause, le tribunal décide par un jugement définitif l’acquittement de cette personne.

2. Bénéficie également du droit à la réparation du dommage subi toute personne qui, au cours du procès pénal, a subi une privation ou une restriction illégale de sa liberté.

3. La privation ou la restriction illégales de liberté doivent avoir été constatées, selon le cas, par une ordonnance du procureur portant révocation de la mesure privative ou restrictive de liberté, par un non-lieu fondé sur le motif prévu à l’article 10, alinéa premier, lettre j), par une décision du tribunal portant révocation de la mesure privative ou restrictive de liberté, par une décision définitive d’acquittement ou par une décision définitive ordonnant la clôture de la procédure pénale pour le motif prévu à l’article 10, alinéa premier, lettre j).

4. Bénéficie également du droit à la réparation du dommage subi toute personne qui a été privée de liberté, même après l’intervention de la prescription ou de l’amnistie, ou si les faits imputés ne constituaient plus une infraction selon la loi pénale. »

37. La Constitution révisée le 31 octobre 2003 est ainsi rédigée dans ses parties pertinentes en l’espèce :

Article 20 § 2

« (2) En cas de contradiction entre les pactes et traités concernant les droits fondamentaux de l’homme auxquels la Roumanie est partie et les lois internes, les dispositions internationales prévalent, sauf si la Constitution ou les lois internes contiennent des dispositions plus favorables. »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

38. La requérante dénonce les conditions de détention subies dans les centres de détention roumains dans lesquels elle a été incarcérée et l’absence d’assistance médicale qu’elle qualifie de traitement inhumain et dégradant. Elle invoque l’article 3 de la Convention, ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

Sur la recevabilité

39. Dans la mesure où le grief de la requérante se rapporte à l’insuffisance alléguée de traitement médical, la Cour constate, comme elle l’a fait dans les affaires Petrea c. Roumanie (no 4792/03, § 35, 29 avril 2008) et Coman c. Roumanie (no 34619/04, § 45, 26 octobre 2010), que la requérante a omis d’introduire un recours fondé sur les dispositions de la loi no 275/2006 sur l’exécution des peines et des mesures adoptées au cours du procès pénal (« la loi no 275/2006 »). Dès lors, il convient de rejeter cette branche du grief pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

40. S’agissant des conditions matérielles de détention, la Cour rappelle avoir déjà jugé qu’au vu de la particularité d’un tel grief, il n’y avait pas de recours effectif à la disposition du requérant (Petrea, précité, § 37, et Brânduşe c. Roumanie, no 6586/03, §§ 37 et 40, 7 avril 2009). En effet, le droit roumain en la matière ne permet pas, au moins pour l’instant, de mettre un terme à des conditions matérielles de détention contraires à l’article 3 de la Convention et d’obtenir une réparation suffisante pour le préjudice subi (Iacov Stanciu c. Roumanie, no 35972/05, §§ 197-199, 24 juillet 2012).

41. En revanche, à cet égard, le Gouvernement excipe du non-respect par la requérante du délai de six mois, prévu par l’article 35 de la Convention pour autant que le grief concerne les conditions de détention dans les centres pénitentiaires dans lesquels elle a été incarcérée avant d’être transféré à la prison de Târgşor. Il soutient qu’en raison des conditions de détention dans cette prison, dont la requérante ne se plaint d’ailleurs pas, on ne saurait considérer que la détention de la requérante s’analyse en une situation continue.

42. La requérante conteste cette thèse et renvoie à cet effet à sa lettre du 28 juin 2011 par laquelle elle compléta la description des conditions de détention subies au cours son incarcération avec la période passée à la prison de Târgşor du 13 février au 5 mars 2009. Elle souligne également que, dans le formulaire de requête, à la fin de son grief tiré de l’article 3 de la Convention, elle avait indiqué de manière générale que les conditions de détention avaient été plus qu’insalubres, qu’elle n’avait pas bénéficié en temps utile de l’assistance médicale et que le comportement du personnel pénitentiaire n’avait pas été adéquat. Invoquant l’affaire Seleznev c. Russie (no 15591/03, § 36, 26 juin 2008), elle estime que sa détention s’analyse en une situation continue.

43. La Cour rappelle également qu’elle se doit d’examiner proprio motu la question du respect du délai de six mois (Palić c. Bosnie-Herzégovine, no 4704/04, § 48, 15 février 2011, et Gadi c. France (déc.), no 45533/05, 13 janvier 2009). Dans le cas présent, en dépit de ses explications ultérieures formulées après la communication de la requête au Gouvernement (paragraphe 42 ci-dessus), la Cour considère que le grief initial de la requérante soulevé dans son formulaire de requête et complété dans la lettre du 28 juin 2011 porte sur les conditions de détention subies jusqu’au mois de mars 2009, date à laquelle elle a quitté la prison de Târgşor. En effet, il ressort du dossier que le requérante a décrit de manière très détaillée les conditions de détention dans les différents centres pénitentiaires jusqu’à cette date, mais n’a donné aucun renseignement sur les conditions de détention après cette date et jusqu’à sa remise en liberté, intervalle pendant lequel elle a été incarcérée dans les locaux extérieurs de la prison de Gherla sis à Cluj-Napoca. Certes, il est vrai que la requérante a décrit les conditions de détention subies dans cette prison à l’occasion de sa première incarcération (paragraphe 23 ci-dessus). Toujours est-il que, lorsque la requérante a entendu se plaindre des conditions de détention subies dans un centre pénitentiaire à différents moments de son incarcération, elle l’a fait de manière expresse (voir, par exemple, le cas des locaux de la direction générale de la police de Bucarest où elle a été incarcérée du 1er au 12 septembre 2008 et du 5 décembre 2008 au 13 février 2009, paragraphes 18 et 24-26 ci-dessus).

44. Or, la Cour constate que la présente requête a été introduite le 24 septembre 2010, soit plus de six mois après l’incarcération de la requérante dans la prison de Târgşor.

45. Compte tenu de ce qui précède il s’ensuit que cette partie du grief est tardive et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 1 DE LA CONVENTION

46. La requérante dénonce le caractère illégal de sa détention après le jugement du 23 novembre 2009, par lequel le tribunal départemental de Cluj avait décidé la réouverture de la procédure pénale engagée à son encontre, et jusqu’au 25 mars 2010, date de sa remise en liberté. Elle invoque l’article 5 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

a) s’il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent ; »

A. Sur la recevabilité

47. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes par la requérante. Il souligne en premier lieu que la requérante aurait pu demander sa remise en liberté dans le cadre de l’appel interjeté contre le jugement du 13 novembre 2008 du tribunal de première instance de Cluj-Napoca ou dans un éventuel recours formé contre l’arrêt adopté par le tribunal départemental de Cluj le 23 novembre 2009 (paragraphes 10-11 ci-dessus).

48. En deuxième lieu, le Gouvernement souligne que, après la réouverture de la procédure, la requérante n’a pas demandé de manière formelle son élargissement. Elle ne l’aurait fait que lors de l’audience du 25 mars 2010, quand sa demande a d’ailleurs été accueillie. La Gouvernement fait savoir qu’une telle demande, à défaut de l’application de l’article 404 du CPP à l’époque, aurait pu être basée directement sur l’article 5 de la Convention.

49. En troisième lieu, le Gouvernement argue qu’il aurait été loisible à la requérante de s’opposer à l’exécution de la peine en vertu de l’article 461 § 1 d) du CPP, selon lequel une objection peut être formée contre l’exécution d’une décision du fait de tout incident intervenu pendant cette exécution. Il estime que la décision de la réouverture de la procédure pouvait constituer un tel « incident ». À cet effet, il fournit une décision interne, datant de 2008 (paragraphe 34 ci-dessus), dans laquelle le tribunal a ordonné, sur la base de l’article susmentionné, l’élargissement d’une personne qui a vu sa décision de condamnation annulée à l’occasion de la réouverture de la procédure.

50. La requérante rétorque qu’elle a demandé oralement, à plusieurs reprises, sa remise en liberté dans le cadre de la procédure engagée. À cet effet, elle a souligné à plusieurs reprises le caractère urgent de l’affaire qui portait entre-autres sur la liberté d’une personne (paragraphe 10 ci-dessus) et a produit au dossier plusieurs exemples de décisions des tribunaux internes ordonnant la remise en liberté des intéressés après la réouverture de la procédure (paragraphe 8 ci-dessus).

51. La requérante souligne en outre qu’à l’époque des faits, avant la modification apportée par la loi no 202/2010, aucune disposition nationale ne régissait la question de l’élargissement d’une personne après la réouverture après extradition d’une procédure pénale. Par ailleurs, la jurisprudence développée par les tribunaux n’a pas apporté de réponse claire et constante à cette question. Au contraire, une jurisprudence divergente a vu le jour, certains tribunaux refusant de remettre en liberté les intéressés, alors que d’autres ont fait droit à de telles demandes de libération. L’existence d’une divergence de jurisprudence a d’ailleurs été reconnue par la commission de l’unification de la jurisprudence créée dans le cadre du Conseil supérieur de la magistrature (paragraphe 35 ci-dessus).

52. Dans ces conditions et renvoyant aux conclusions de la Cour dans l’affaire Svipsta c. Lettonie (no 66820/01, § 142, CEDH 2006‑III (extraits), la requérante argue qu’une demande de libération formée sur le terrain de l’article 5 de la Convention, le cas échéant combiné avec l’article 404 du CPP, qui n’était pas applicable à l’époque des faits, n’aurait pas été considérée comme un recours efficace.

53. S’agissant de l’argument du Gouvernement tiré de l’efficacité de la contestation à l’exécution basée sur l’article 461 § 1 d) du CPP, la requérante souligne qu’une telle voie de recours serait dépourvue d’effet dans sa situation étant donné que la décision de condamnation n’avait pas été annulée lors de la réouverture de la procédure. Dans ces conditions, la simple réouverture de la procédure ne peut être valablement considérée comme un « incident dans l’exécution » et en conséquence, par le biais de cette voie on ne saurait remettre en cause le bien-fondé d’une décision de condamnation encore valide (voir aussi les conclusions dans ce sens d’une juridiction interne, paragraphe 34 in fine ci-dessus).

54. La Cour relève que les arguments avancés par le Gouvernement à l’appui de l’exception préliminaire formulée par lui sont étroitement liés à la substance du grief tiré de l’article 5 de la Convention. Dès lors, il y a lieu de joindre l’exception au fond (voir, mutatis mutandis, Csiki c. Roumanie, no 11273/05, § 65, 5 juillet 2011).

55. La Cour constate que le grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention. La Cour relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

56. La requérante, renvoyant aux aspects développés sur le terrain de la recevabilité de l’affaire (paragraphe 50 ci-dessus), allègue qu’elle avait dénoncé sa détention après la réouverture de la procédure et cela même en l’absence d’une base légale. Elle souligne qu’en l’absence de cette base légale, les tribunaux ont développé une jurisprudence divergente (paragraphe 51 ci-dessus).

57. Par ailleurs, elle soutient que le maintien de la décision de condamnation après la réouverture de la procédure est formel car les tribunaux, dans leur examen du fond de l’affaire, doivent entendre le condamné par contumace et instruire d’autres moyens de preuve, comme par exemple des témoignages. Dans ces conditions, selon elle, la décision initiale de condamnation et le mandat d’arrêt émis aux fins de son exécution devraient dans tous les cas être annulés.

58. La requérante allègue également que l’impossibilité pour le tribunal d’examiner la question de sa détention a créé une présomption de culpabilité à son encontre et a vidé de son sens un des buts de la procédure de réexamen, à savoir son élargissement au cours du nouvel examen.

59. La requérante affirme enfin que sa situation n’est pas similaire à celle dans l’affaire Gheorghe Gaga c. Roumanie (no 1562/02, § 62, 25 mars 2008) invoquée par le Gouvernement, étant donné que, dans cette dernière affaire, le requérant était détenu sur la base d’une décision définitive de condamnation qui n’avait pas été remise en cause par une réouverture de la procédure. Elle considère que son maintien en détention équivaut à une exécution anticipée de sa peine, contraire à la jurisprudence de la Cour.

60. Le Gouvernement allègue que la requérante a été détenue pendant la période litigieuse conformément à l’article 5 § 1 a) de la Convention, en vertu du jugement définitif du 14 novembre 2006, par lequel le tribunal de première instance de Cluj-Napoca l’a condamnée à trois ans et demi de prison ferme. Il souligne que la recevabilité de la demande de réouverture de la procédure constatée par le tribunal départemental de Cluj le 23 novembre 2009 n’a influé aucunement sur la validité du jugement de condamnation. Celui-ci n’a été annulé que le 25 mars 2010, et la requérante a d’ailleurs été remise en liberté.

61. En outre, le Gouvernement estime que les tribunaux n’étaient pas tenus de statuer d’office sur la légalité de la détention d’un intéressé à l’époque des faits. Ils auraient pu le faire uniquement sur une demande de celui-ci fondée sur l’article 5 § 1 a) de la Convention. Or, la requérante n’a demandé formellement le sursis à l’exécution de la peine que lors de l’audience du 4 février 2010 et sa demande a été accueillie à l’audience suivante du 25 mars 2010. Le Gouvernement souligne également que, même après la modification du CPP en novembre 2010, alors qu’il était loisible aux tribunaux, en vertu de l’article 404 du CPP, de prononcer le sursis à l’exécution de la peine après la décision de la réouverture de la procédure, cela ne concernait qu’un sursis fondé sur la situation personnelle du condamné et ne visait nullement des aspects liés à la légalité ou au
bien-fondé de la condamnation initiale.

62. Le Gouvernement soutient encore que les conclusions de la Cour dans l’arrêt Gheorghe Gaga c. Roumanie (no 1562/02, § 62, 25 mars 2008) sont également applicables dans la présente affaire en ce que, tant le requérant dans l’affaire précitée, que la requérante dans la présente affaire ont été détenus après condamnation définitive par un tribunal compétent. Il argue enfin de ce que la situation dans la présente affaire diffère de celle de l’affaire Stoichkov c. Bulgarie (no 9808/02, 24 mars 2005), dans laquelle la demande de réouverture de la procédure de condamnation par contumace avait été refusée.

2. Appréciation de la Cour

63. La Cour rappelle que l’exigence de régularité posée par l’article 5 § 1 a) (« détention régulière » ordonnée « selon les voies légales ») n’est pas satisfaite par un simple respect du droit interne pertinent ; il faut que le droit interne se conforme lui-même à la Convention, y compris aux principes généraux énoncés ou impliqués par elle, notamment celui de la prééminence du droit expressément mentionné dans le préambule de la Convention. Par ailleurs, il incombe au premier chef aux autorités nationales, et notamment aux tribunaux, d’interpréter et d’appliquer le droit interne. Toutefois, dès lors qu’au regard de l’article 5 § 1 l’inobservation du droit interne emporte violation de la Convention, la Cour peut et doit exercer un certain contrôle pour rechercher si le droit interne a bien été respecté. Une période de détention est en principe régulière si elle a lieu en exécution d’une décision de justice (Douiyeb c. Pays-Bas [GC], no 31464/96, §§ 44-45, 4 août 1999).

64. À cet égard, la Cour tient à souligner que, vu l’importance de la liberté de la personne, il est essentiel que le droit national applicable remplisse le critère de « légalité » fixé par la Convention, qui exige que le droit, écrit comme non écrit, soit assez précis pour permettre au citoyen, en s’entourant au besoin de conseils éclairés, de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à dériver d’un acte déterminé (Baranowski c. Pologne, no 28358/95, § 52, CEDH 2000‑III, et Laumont c. France, no 43626/98, § 45, CEDH 2001‑XI).

65. Par ailleurs, à l’origine de l’expression « selon les voies légales » se trouve la notion de procédure équitable et adéquate, l’idée que toute mesure privative de liberté doit émaner d’une autorité qualifiée, être exécutée par une telle autorité et ne pas revêtir un caractère arbitraire (voir notamment l’arrêt Winterwerp c. Pays-Bas, 24 octobre 1979, § 45, série A no 33).

66. De plus, la Cour a estimé que l’obligation de garantir à l’accusé le droit d’être présent dans la salle d’audience – soit pendant la première procédure à son encontre, soit au cours d’un nouveau procès – est l’un des éléments essentiels de l’article 6 (Stoichkov c. Bulgarie, no 9808/02, § 56, 24 mars 2005). Dès lors, le refus de rouvrir une procédure qui s’est déroulée par contumace en l’absence de toute indication que l’accusé avait renoncé à son droit de comparaître a été considéré comme un « flagrant déni de justice », ce qui correspond à la notion de procédure « manifestement contraire aux dispositions de l’article 6 ou aux principes qui y sont consacrés » (Stoichkov, précité, §§ 54-58, et Sejdovic c. Italie [GC], no 56581/00, § 84, CEDH 2006‑II).

67. En l’espèce, la Cour note que la requérante a été arrêtée le 9 juillet 2008 en Italie. Le 1er septembre 2008, elle a été extradée vers la Roumanie en vue de l’exécution d’une peine infligée dans ce pays, où elle a été placée en détention jusqu’au 25 mars 2010.

68. La Cour estime que la détention de la requérante comporte deux périodes qu’il convient d’examiner séparément. Pendant la première période, qui s’étend jusqu’à la date de la réouverture de la procédure, à savoir le 23 novembre 2009, la requérante a été détenue en exécution d’une décision de justice ; sa détention relève donc de l’article 5 § 1 a) de la Convention. Il n’apparaît pas que la décision de condamnation était illégale, dépourvue de base légale ou arbitraire ou que la détention ne poursuivait pas un des buts de la privation de liberté permis par l’article 5 § 1 a) avant cette date (mutatis mutandis, Stoichkov, précité, §§ 52 et 58). D’ailleurs, la requérante ne semble pas contester la régularité de cette période de détention.

69. Les parties s’opposent en revanche quant à l’existence d’un titre de détention valable justifiant le maintien en détention de la requérante après la réouverture de la procédure pénale, à savoir le 23 novembre 2009.

70. La Cour constate d’emblée qu’à l’époque des faits, les dispositions légales régissant le réexamen d’une affaire après extradition n’indiquaient pas si – et, dans l’affirmative, à quelles conditions – la détention basée sur une condamnation par contumace pouvait être prolongée en cas de réouverture du procès.

71. Cette omission législative n’a pas été palliée par une jurisprudence constante des tribunaux roumains, certains tribunaux refusant de remettre en liberté les intéressés, alors que d’autres ont fait droit à de telles demandes de libération (paragraphes 31-33 et 35 ci-dessus). Ce n’est que par le biais d’une modification du code de procédure pénale entrée en vigueur en novembre 2010, soit après la remise en liberté de la requérante, qu’il a été mis fin à cette omission et que l’on a mis les bases pour la fin de la jurisprudence divergente des tribunaux roumains quant à la privation de liberté d’une personne après la réouverture de la procédure (paragraphe 30 ci-dessus).

72. À l’évidence, une telle divergence de jurisprudence n’était pas de nature à permettre à quelqu’un de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à découler d’un acte déterminé. Dans ces conditions, la Cour conclut que la législation roumaine pertinente ne satisfaisait pas au critère de « prévisibilité » d’une « loi » aux fins de l’article 5 § 1 de la Convention (mutatis mutandis, Baranowski précité, § 55, et Toniolo c. Saint-Marin et Italie, no 44853/10, §§ 48-51, 26 juin 2012).

73. En effet, malgré la mise en cause de la condamnation de la requérante « manifestement contraire aux dispositions de l’article 6 de la Convention » (paragraphe 66 ci-dessus), la requérante est restée en détention après la réouverture de la procédure. Cette situation aurait pu se prolonger en l’absence d’une base légale autorisant les tribunaux à se prononcer quant au maintien ou à la suspension de la détention en fonction des circonstances de l’espèce. Par ailleurs, dans la présente affaire, la Cour constate que la remise en liberté de la requérante n’a été aucunement motivée par le tribunal.

74. À la lumière de ces éléments, la Cour estime également qu’aucune voie de recours efficace n’était disponible à la requérante pour dénoncer sa détention et amener le tribunal à se prononcer à cet égard. En l’absence d’une base légale et d’une jurisprudence constante des tribunaux, il ne saurait être reproché à la requérante de ne pas avoir fait usage des voies de recours ordinaires indiquées par le Gouvernement (paragraphe 47
ci-dessus).

75. Pareille conclusion s’impose en ce qui concerne la possibilité pour la requérante de se fonder directement sur l’article 5 § 1 de la Convention (paragraphe 48 ci-dessus). À cet égard, la Cour relève qu’en effet la Convention est directement applicable en Roumanie et qu’elle l’emporte sur les dispositions du droit national qui seraient en contradiction avec elle (Paroisse gréco-catholique Sfântul Vasile Polonă c. Roumanie, no 65965/01, § 103, 7 avril 2009). Elle a déjà retenu par ailleurs qu’un système basé sur la primauté de la Convention et de la jurisprudence y relative sur les droits nationaux est à même d’assurer au mieux le bon fonctionnement du mécanisme de sauvegarde mis en place par la Convention et ses protocoles additionnels (Dumitru Popescu c. Roumanie (no 2), no 71525/01, § 103, 26 avril 2007). Toutefois, la Cour observe que, dans la présente affaire, le Gouvernement n’a fourni aucun exemple de cas dans lequel une personne se serait appuyée avec succès sur les dispositions de l’article 5 § 1 de la Convention devant une autorité nationale afin d’obtenir sa remise en liberté. Cette absence de jurisprudence indique le manque de certitude, dans la pratique, de ce recours théorique (voir, dans le même sens, Paroisse gréco-catholique Sfântul Vasile Polonă précité, § 104). La Cour estime dès lors qu’une demande fondée sur l’applicabilité directe de la Convention dans le droit roumain n’aurait pas eu le degré de certitude juridique requis pour pouvoir constituer un recours effectif à épuiser par la requérante.

76. S’agissant enfin de la contestation à l’exécution fondée sur l’article 461 du CPP (paragraphe 49 ci-dessus), la Cour note que le Gouvernement envoie une seule décision interne fondée sur cet article. Il convient toutefois de constater que cette décision vise une situation exceptionnelle, étant donné que la décision initiale de condamnation avait été annulée lors de la réouverture de la procédure (paragraphe 34 ci-dessus). La contestation visait en conséquence une question de pure exécution d’une peine annulée. Or, dans la présente affaire, le tribunal ne s’est pas prononcé sur la validité de la décision de condamnation lors de la réouverture de la procédure. Dans ces conditions, il est peu crédible que la simple réouverture de la procédure suffisait pour être considérée comme étant « un incident dans l’exécution » d’une décision de condamnation. Dès lors, la contestation de l’exécution n’aurait pas pu non plus être un recours efficace à épuiser par la requérante.

77. Enfin, la Cour observe que la requérante a dénoncé, à plusieurs reprises et en vain, sa détention devant les tribunaux internes (paragraphes 8, 10, 13 et 14 ci-dessus). Toutefois, ce n’est que lorsque le tribunal a décidé de renvoyer le dossier au parquet en vue d’un complément d’enquête qu’il a décidé la remise en liberté de la requérante. La Cour remarque d’ailleurs l’absence totale de motivation quant à cet aspect (paragraphe 15 in fine ci-dessus).

78. Compte tenu de ce qui précède et de ce que seule une interprétation étroite cadre avec le but et l’objet de l’article 5 § 1 de la Convention (Medvedyev et autres c. France [GC], no 3394/03, § 78, CEDH 2010), la Cour estime qu’il convient de rejeter l’exception de non-épuisement soulevée par le Gouvernement et de conclure que la détention de la requérante du 23 novembre 2009 au 25 mars 2010 ne saurait s’analyser en une détention régulière au sens de l’article 5 § 1 a) de la Convention, faute de base légale ayant les qualités requises pour satisfaire au principe général de sécurité juridique.

79. Partant, il y a eu violation de l’article 5 § 1 a) de la Convention.

III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 4 DE LA CONVENTION

80. La requérante se plaint également de la durée excessive de la procédure tendant à la réouverture du procès pénal la concernant et à sa remise en liberté. Elle invoque l’article 5 § 4 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. »

A. Sur la recevabilité

81. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

82. La requérante, dans son formulaire de requête soutient que sa demande de réouverture formée en septembre 2008 constituait en elle-même une contestation de sa détention. Elle estime en conséquence que celle-ci n’a pas été examinée avec la célérité requise par l’article 5 § 4 de la Convention, compte tenu de ce qu’elle n’a été remise en liberté qu’un an et demi plus tard, le 25 mars 2010. Elle souligne enfin, que même après la décision de la réouverture de la procédure, l’audience a été ajournée à plusieurs reprises pour des faits qui ne lui étaient pas imputables. S’agissant plus particulièrement de l’audience du 4 février 2010, la requérante mentionne que la formation de jugement avait été changée pour des raisons liées aux congés du juge titulaire et que le remplaçant n’a pas entendu se prononcer sur sa demande de libération, car, selon la requérante, la coutume veut qu’un juge remplaçant ne tranche pas les questions importantes de l’affaire en l’absence du juge titulaire.

83. Le Gouvernement considère que l’article 5 § 4 de la Convention n’est pas applicable à la procédure en réexamen engagée par la requérante en 2008 en vertu de l’article 5221 du CPP aussi longtemps que la réouverture n’ait pas été décidée. Renvoyant aux arguments développés sur le terrain de l’exception de non-épuisement soulevée dans le cadre du grief tiré de l’article 5 § 1 (paragraphes 47-49 ci-dessus), il fait valoir en outre qu’après la réouverture, la requérante avait à sa disposition plusieurs voies de recours par lesquelles elle pouvait contester sa détention, voies qu’elle a omis d’utiliser. En ce qui concerne la durée de la procédure par laquelle la requérante a contesté sa décision, le Gouvernement argue que celle-ci n’a formulé une demande de sursis à l’exécution de la peine que lors de l’audience du 25 mars 2010, date à laquelle elle a d’ailleurs été remise en liberté.

84. La Cour rappelle que le contrôle voulu par l’article 5 § 4 se trouve incorporé au jugement dans l’hypothèse d’une peine d’emprisonnement de durée déterminée prononcée par une juridiction nationale, après condamnation, pour sanctionner une infraction (arrêts De Wilde, Ooms et Versyp c. Belgique, 18 juin 1971, § 76, série A no 12). Tel n’est toutefois pas le cas pour la détention ultérieure dans la mesure où des questions nouvelles de légalité la concernant surgiraient après coup (arrêts Weeks c. Royaume-Uni, 2 mars 1987, § 56, série A no 114 et Thynne, Wilson et Gunnell c. Royaume-Uni, 25 octobre 1990, § 68, série A no 190‑A, et Hussain c. Royaume-Uni, 21 février 1996, § 54, Recueil des arrêts et décisions 1996‑I).

85. La Cour rappelle que, sur le terrain de l’article 5 § 1 de la Convention, elle a déjà conclu qu’à l’époque des faits aucune voie de recours efficace n’était accessible à la requérante pour dénoncer sa détention et amener le tribunal à se prononcer à cet égard. En l’espèce, la Cour considère que, faute d’une motivation adéquate de la part du tribunal, sa décision de remise en liberté apparaît plutôt comme une conséquence de la mesure procédurale de renvoi de l’affaire au parquet qu’une réponse à la demande de libération de la requérante (voir, a contrario, Baranowski précité, § 75).

86. Par conséquent, la Cour considère que les insuffisances du droit interne quant à l’efficacité du contrôle juridictionnel de la détention d’une personne après la réouverture en vertu de l’article 5221 du CPP, à l’époque des faits, ne peuvent pas se concilier avec les exigences de l’article 5 § 4 de la Convention. Au vu de ce qui précède, la Cour conclut qu’il y a également eu violation de cette disposition en l’espèce.

Cette conclusion dispense la Cour d’examiner l’argument de la requérante selon laquelle les tribunaux roumains n’ont pas examiné à bref délai la régularité de sa détention.

IV. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 5 § 5 DE LA CONVENTION

87. La requérante considère qu’elle n’a pas eu droit à réparation pour les violations alléguées de ses droits garantis par l’article 5 §§ 1 et 4 de la Convention. Elle invoque à cet égard l’article 5 § 5, ainsi libellé :

« Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation. »

A. Sur la recevabilité

88. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

89. La requérante estime que les cas dans lesquels une détention irrégulière peut donner lieu à indemnisation sont énumérés de manière restrictive par l’article 504 du CPP (paragraphe 36 ci-dessus) et que sa situation ne relève d’aucun d’entre eux. Elle dénonce par ailleurs l’absence de voie de droit pour demander réparation pour la violation de l’article 5 §§ 1 et 4.

90. Le Gouvernement considère que la requérante n’est pas en droit à réclamer une indemnisation aussi longtemps que la procédure pénale engagée contre elle est pendante. Une fois la procédure terminée, il serait loisible à la requérante de demander une réparation en cas d’acquittement en vertu de l’article 504 du CPP.

91. La Cour rappelle que l’article 5 § 5 se trouve respecté dès lors que l’on peut demander réparation du chef d’une privation de liberté opérée dans des conditions contraires aux paragraphes 1, 2, 3 ou 4 (Wassink c. Pays-Bas, 27 septembre 1990, § 38, série A no 185-A, et Houtman et Meeus c. Belgique, no 22945/07, § 43, 17 mars 2009). Le droit à réparation énoncé au paragraphe 5 suppose donc qu’une violation de l’un de ces autres paragraphes ait été établie par une autorité nationale ou par les institutions de la Convention. À cet égard, la jouissance effective du droit à réparation garanti par cette dernière disposition doit se trouver assurée à un degré suffisant de certitude (Ciulla c. Italie, 22 février 1989, § 44, série A no 148, Sakık et autres c. Turquie, 26 novembre 1997, § 60, Recueil 1997‑VII, et N.C. c. Italie [GC], no 24952/94, § 49, CEDH 2002‑X).

92. Se tournant vers la présente espèce, la Cour relève que, eu égard à son constat de violation des paragraphes 1 et 4 de l’article 5, le paragraphe 5 de cette disposition trouve à s’appliquer. Elle doit donc rechercher si l’intéressée a disposé au niveau interne d’un droit exécutoire à réparation de son préjudice avant le présent arrêt, ou si elle disposera d’un tel droit après l’adoption de l’arrêt.

93. Elle rappelle à cet égard que, pour qu’elle conclue à la violation de l’article 5 § 5, il doit être établi que le constat de violation d’un des autres paragraphes de l’article 5 ne pouvait, avant l’arrêt concerné de la Cour, ni ne peut, après cet arrêt, donner lieu à une demande d’indemnité devant les juridictions nationales (Brogan et autres c. Royaume-Uni, 29 novembre 1988, §§ 66-67, série A no 145‑B, et Stanev c. Bulgarie [GC], no 36760/06, § 184, CEDH 2012).

94. À la lumière de cette jurisprudence, la Cour estime qu’il faut d’abord vérifier si la violation de l’article 5 §§ 1 et 4 constatée en l’espèce aurait pu donner lieu, avant le prononcé du présent arrêt, à un droit à réparation devant les tribunaux internes.

95. À cet égard, la Cour note que selon l’article 504 du CPP, toute réparation est conditionnée à la constatation de l’illégalité de la détention par ordonnance du parquet ou par décision d’un tribunal (paragraphe 36
ci-dessus). Or, il ressort du dossier que les autorités judiciaires roumaines n’ont à aucun moment considéré cette mesure comme illégale ou autrement contraire à l’article 5 de la Convention. La thèse du Gouvernement consiste d’ailleurs à dire que la détention de la requérante était conforme au droit interne. Dès lors, la Cour conclut qu’aucune compensation ne pouvait être réclamée par la requérante en vertu de la disposition susmentionnée pour la violation de l’article 5 § 1, faute de reconnaissance de l’irrégularité de la détention par les autorités nationales (Degeratu c. Roumanie, no 35104/02, § 59, 6 juillet 2010).

96. En outre, aucun recours judiciaire permettant de faire contrôler la légalité de la détention n’étant disponible en droit roumain, la requérante ne pouvait invoquer la responsabilité de l’État pour obtenir une réparation pour la violation de l’article 5 § 4.

97. Se pose ensuite la question de savoir si le prononcé du présent arrêt concluant à la violation des paragraphes 1 et 4 de l’article 5 permettra à la requérante de demander réparation en droit roumain. La Cour observe qu’il ne ressort pas de la législation pertinente qu’un tel recours existe ; le Gouvernement n’a d’ailleurs pas présenté d’arguments prouvant le contraire.

98. Il n’a donc pas été démontré que la requérante pouvait se prévaloir, avant l’arrêt de la Cour, d’un droit à réparation, ou qu’elle pourra se prévaloir d’un tel droit après le prononcé de l’arrêt, pour la violation de l’article 5 §§ 1 et 4.

99. Par conséquent, il y a eu violation de l’article 5 § 5 de la Convention.

V. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

100. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

101. La requérante réclame en premier lieu 9 548 lei roumains (RON), soit environ 2 200 euros (EUR) au titre du préjudice matériel qu’elle aurait subi, représentant des prêts de la part de sa famille couvrant le coût des biens achetés pendant sa détention, à savoir de la nourriture, des produits d’entretien et de nettoyage ainsi que de la lingerie. À cette somme s’ajoute la valeur des dix-huit paquets reçus de la part de sa famille qu’elle évalue à 7 480 RON, soit environ 1 700 EUR, ainsi que la somme de 400 EUR qu’elle avait sur elle lors de l’extradition et qu’elle a dépensée pendant sa détention pour l’achat de la nourriture en particulier. La requérante réclame en outre 20 400 EUR au titre du préjudice moral qu’elle aurait subi, somme qu’elle ventile ainsi : 15 400 EUR pour la violation de l’article 5 §§ 1, 4 et 5 de la Convention et 5 000 EUR pour la violation de l’article 3 de la Convention.

102. Pour le Gouvernement, aucune somme ne doit être accordée au titre du préjudice matériel, la requérante n’ayant pas prouvé le lien de causalité avec le constat de violations et n’ayant pas produit de justificatifs pour les prêts prétendument octroyés par sa famille. En outre, il estime que la requérante ne saurait invoquer contre l’État un droit qu’elle a exercé en prison, à savoir celui de recevoir des colis. Quant au préjudice moral, le Gouvernement considère que le constat de violation constituerait une réparation suffisante et qu’en tout état de cause, la somme réclamée est excessive.

103. La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre les violations constatées et le dommage matériel allégué. Par contre, elle juge que la requérante a subi un tort moral certain et considère qu’il y a lieu de lui octroyer 8 000 EUR au titre du préjudice moral.

B. Frais et dépens

104. La requérante demande également 18 700 RON, soit 4 633 EUR pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes et 1 860 EUR pour frais d’honoraires d’avocat engagés devant la Cour. À cette dernière somme s’ajoute celle de 106,7 RON représentant le coût des photocopies des pièces du dossier interne. Elle dépose des reçus pour les honoraires d’avocat engagés.

105. Le Gouvernement souligne que la requérante n’a pas envoyé de contrats d’assistance judiciaire, établissant les honoraires des avocats ainsi qu’un récapitulatif des heures effectivement travaillées par ceux-ci. Dans ces conditions, il est impossible d’établir un lien de causalité entre ces dépens et les prétendues violations de la Convention. Selon lui, la même conclusion est valable pour les frais des photocopies.

106. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable d’accorder à la requérante la somme de 4 000 EUR au titre des frais et dépens.

C. Intérêts moratoires

107. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 5 §§ 1, 4 et 5, et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 1 de la Convention ;

3. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention ;

4. Dit qu’il y a eu violation de l’article 5 § 5 de la Convention ;

5. Dit

a) que l’État défendeur doit verser à la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur, au taux applicable à la date du règlement :

i) 8 000 EUR (huit mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii) 4 000 EUR (quatre mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par la requérante, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

6. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 14 janvier 2014, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Santiago QuesadaJosep Casadevall
GreffierPrésident


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