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10/10/2013 | CEDH | N°001-126641

CEDH | CEDH, AFFAIRE K.K. c. FRANCE, 2013, 001-126641


CINQUIEME SECTION

AFFAIRE K.K. c. FRANCE

(Requête no 18913/11)

ARRÊT

STRASBOURG

10 octobre 2013

DÉFINITIF

10/01/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire K.K. c. France,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :

Mark Villiger, président,
Ann Power-Forde,
Ganna Yudkivska,
André Potocki,
Paul Lemmens,
Helena Jäderbl

om,
Aleš Pejchal, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 septembre 2013,

Rend l’ar...

CINQUIEME SECTION

AFFAIRE K.K. c. FRANCE

(Requête no 18913/11)

ARRÊT

STRASBOURG

10 octobre 2013

DÉFINITIF

10/01/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire K.K. c. France,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une chambre composée de :

Mark Villiger, président,
Ann Power-Forde,
Ganna Yudkivska,
André Potocki,
Paul Lemmens,
Helena Jäderblom,
Aleš Pejchal, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 septembre 2013,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 18913/11) dirigée contre la République française et dont un ressortissant iranien, M. K.K. (« le requérant »), a saisi la Cour le 24 mars 2011 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »). Le président de la section a accédé à la demande de non-divulgation de son identité formulée par le requérant (article 47 § 3 du règlement).

2. Le requérant, qui a été admis au bénéfice de l’assistance judiciaire, a été représenté par Me C. Roussel, avocat à Colmar. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, Mme E. Belliard, directrice des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères.

3. Le requérant allègue que la mise à exécution de la décision des autorités françaises de l’éloigner vers l’Iran l’exposerait au risque d’être soumis à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention. Invoquant les articles 13 et 3 combinés, il se plaint du caractère non suspensif du recours devant la CNDA du fait de l’examen de sa demande d’asile en procédure prioritaire.

4. Le 29 août 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Le requérant est né en 1964 et réside à Didenheim.

A. Sur les faits qui se sont déroulés en Iran

6. Issu d’une famille très religieuse, le requérant se dit particulièrement attaché aux valeurs musulmanes et très fier de son pays. En 1978, quand la révolution islamique éclata, il se montra très actif dans différentes associations islamiques au sein de son lycée et, lors de la guerre Iran-Irak, il s’engagea volontairement sur le front à l’âge de quinze ans. Il explique que c’est dans ce cadre qu’il entra dans les services de renseignements iraniens et qu’il commença à collecter des informations pour eux, tout en poursuivant, en parallèle, des études d’électricien.

7. À la fin de la guerre, en 1988, le requérant se réinséra dans la vie civile et créa sa propre société d’électricien dans la ville d’Ouroumieh. Il garda néanmoins des contacts réguliers avec « les Gardiens de la Révolution », une organisation paramilitaire iranienne.

8. En 1990, il reçut, par l’intermédiaire de son beau-frère, une proposition de reprendre ses activités au sein des services de renseignements, ceux-ci ayant besoin de ses compétences et notamment de ses connaissances géographiques des régions iraniennes d’Azerbaïdjan et du Kurdistan. À côté de son activité d’électricien, il commença donc à travailler à mi-temps auprès du service des renseignements des Bassidjis (une des branches des Gardiens de la Révolution). Sa mission pour cette organisation consistait à recueillir des informations au sujet d’une liste de personnes de confession Baha’ie considérées comme les « ennemis de l’Islam » et à les transmettre à ses supérieurs hiérarchiques. Le requérant participait également, une fois par mois, à des réunions dont le but était, selon lui, principalement de rassurer les agents bassidjis et de les convaincre qu’ils agissaient pour le « bien » de leur pays.

9. Le requérant explique avoir progressivement compris qu’il subissait une forme d’endoctrinement et de pression psychologique visant à diaboliser la foi Baha’ie et à justifier les arrestations de plusieurs membres de cette communauté. Les Baha’is lui apparurent pourtant rapidement comme « des gens respectables et inoffensifs qui ne troublaient pas l’ordre public », qui pratiquaient leur religion discrètement et non comme les activistes politiques qu’on lui avait décrits.

10. Dans l’un des rapports qu’il transmit à son autorité hiérarchique, le requérant fit état de ses impressions et indiqua que, selon lui, les Baha’is ne constituaient un danger ni pour la Révolution ni pour la nation iranienne. Malgré cela, les arrestations de membres de la communauté Baha’ie continuèrent, ce qui incita le requérant, en 2005, à critiquer ouvertement le système en dénonçant le traitement infligé injustement aux Baha’is.

11. En janvier 2006, il décida d’arrêter ses activités au sein des services de renseignements. Il reçut alors plusieurs avertissements de ses supérieurs hiérarchiques qui, dans un premier temps, l’exhortèrent à continuer à travailler pour eux puis le menacèrent de représailles s’il ne revenait pas. Selon le requérant, les services secrets ne pouvaient accepter qu’un ancien membre puisse circuler librement et critiquer le régime ; ils ne voulaient pas non plus prendre le risque que leur modus operandi et leurs identités soient rendus publics.

12. Au mois de mai 2006, le requérant fut kidnappé par un ancien « collègue » qui l’emmena dans une petite maison en dehors de la ville d’Ouroumieh où il fut séquestré. Il fut pendu au plafond par les pieds et frappé avec une ceinture par trois personnes. Au cours des tortures, ses agresseurs le sommèrent de reprendre ses activités d’espionnage. Les circonstances de sa libération ne sont pas connues.

13. À la suite de cet épisode, le requérant décida de quitter le pays, sur les conseils de son oncle, magistrat et membre du Sepah-Pasdaran.

14. Après son départ, il fit l’objet de deux convocations à se présenter devant le tribunal révolutionnaire de la République islamique d’Ouroumieh (section no 3) les 26 août 2006 et 27 septembre 2007. La première fut adressée à sa femme, la deuxième à sa mère. Les convocations sont ainsi libellées :

« Monsieur, vous êtes accusé de faire des activités contre le gouvernement islamique et contre la sécurité publique et l’ordre national. La conséquence de votre absence à la date indiquée sera votre arrestation. »

B. Sur les faits tels qu’ils se sont déroulés suite au départ du requérant d’Iran

15. Après avoir quitté l’Iran, le requérant se rendit en Turquie puis en Grèce où il demeura pendant un an sous couvert d’un faux passeport roumain. En août 2007, il se rendit en Angleterre en passant par l’Italie et la France et y déposa une demande d’asile qui fut rejetée le 21 décembre suivant. De retour en France, il fut interpellé à Chamonix par la Police de l’air et des frontières le 22 janvier 2008. Il fit, le même jour, l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière mais ne déféra pas à cette mesure et quitta la France pour se rendre en Italie puis en Grèce où il déposa une demande d’asile pour laquelle il n’obtint jamais de réponse des autorités grecques. Il quitta ensuite la Grèce pour la Belgique avec l’intention de se rendre en Angleterre mais fut interpellé à Calais et maintenu dans un centre de rétention, avant d’être renvoyé en Belgique. En septembre 2008, il se rendit en Suisse et fut placé au centre de rétention de Kreuzlingen pendant cinquante jours. Le 28 octobre 2008, il fut remis aux autorités françaises et placé en rétention administrative. Les circonstances de sa remise en liberté ne sont pas connues.

16. Le 13 novembre 2008, le requérant demanda à être admis au séjour au titre de l’asile. Dans un courrier du 3 avril 2009, la préfecture du Haut‑Rhin enregistra sa demande en procédure prioritaire après avoir constaté qu’il avait omis de signaler qu’il avait déjà demandé l’asile au Royaume-Uni et en Grèce.

17. Le 3 juin 2009, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (ci-après « OFPRA ») rejeta la demande au motif suivant :

« A supposer établies ses activités de Bassidji en Iran, les déclarations écrites et orales de l’intéressé n’ont pas permis d’établir la réalité de son parcours professionnel et les persécutions dont il aurait été victime en 2006 du fait de sa volonté de quitter le groupe. »

18. Le requérant interjeta appel de cette décision devant la Cour nationale du droit d’asile (ci-après « CNDA »). Il produisit, à cette occasion, deux certificats médicaux destinés à corroborer les allégations de mauvais traitements subis par le passé : le premier, en date du 10 juillet 2009, établi par un médecin du centre hospitalier de Mulhouse indique que « la cicatrice inter-fessière pourrait être mise en rapport avec les coups que K. aurait reçus sur le sacrum » ; le second, rédigé le 20 janvier 2010 par le docteur V., est ainsi libellé :

« Ce suivi s’inscrit dans une poursuite d’un suivi psychiatrique. (...) Il nous dit avoir décidé de partir d’Iran en raison de ses idées et choix politiques. Il ne regrette ni sa décision ni ses choix mais vit très douloureusement la situation précaire dans laquelle il se trouve. Il présente une souffrance psychique importante (...). Il présente des troubles anxio-dépressifs et post-traumatiques avec, malgré le traitement, persistance d’insomnie avec cauchemars. Sur un fond d’anxiété chronique il présente des crises d’angoisse avec palpitations, nausées et vertiges. (...) Son état justifie d’une prise en charge psychothérapique et d’un traitement (...) »

19. Interpellé à nouveau le 14 mars 2011, le requérant fit l’objet d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière et fut placé en rétention. Aucun arrêté fixant le pays de destination n’ayant été pris, le requérant ne contesta que l’arrêté de reconduite à la frontière devant le tribunal administratif de Strasbourg. Il invoqua, à l’appui de son recours, les mauvais traitements qu’il subirait en Grèce en tant que demandeur d’asile et en Iran du fait de son profil. Par un jugement du 17 mars 2011, le tribunal administratif rejeta son recours après avoir constaté que l’arrêté ne fixait pas de pays de destination.

20. Entre-temps, par une décision du 16 mars 2011, confirmée en appel le 18 mars suivant, le juge des libertés et de la détention ordonna la prolongation du maintien en rétention du requérant pour une durée de quinze jours.

21. Le 23 mars 2011, le requérant fut présenté aux autorités consulaires iraniennes lesquelles lui délivrèrent un laissez-passer. Le 24 mars 2011, le requérant saisit la Cour d’une demande de mesure provisoire en vue de faire suspendre son expulsion. Le même jour, la Cour décida d’indiquer au gouvernement français, en application de l’article 39 de son règlement, qu’il était souhaitable de ne pas renvoyer le requérant vers l’Iran pour la durée de la procédure devant la Cour.

22. Le 31 mai 2011, la CNDA rejeta son recours aux motifs suivants :

« Considérant (...) que si le requérant invoque avoir appartenu à la milice des Bassidjis dès le début de la révolution islamique et d’avoir combattu lors de la guerre de son pays contre l’Irak, les déclarations trop peu circonstanciées faites à huis clos par l’intéressé, n’ont pas emporté la conviction de la Cour quant à sa qualité d’informateur des Bassidjis, aux critiques qu’il aurait exprimées à l’égard de cette milice à partir de 2005 et à la réalité des persécutions invoquées de ce fait ; que par ailleurs, les documents présentés comme deux convocations établies par le tribunal révolutionnaire de la République islamique à Ouroumieh, qui ne présentent pas de garanties suffisantes d’authenticité, ainsi que les témoignages produits, relatifs à la situation du requérant en France, ne sont pas de nature à corroborer ses allégations sur les persécutions ; que les certificats médicaux produits ne peuvent être regardés comme établissant un lien entre les constatations relevées lors de l’examen du requérant et les sévices dont celui-ci déclare avoir été victime ; que dès lors, ni les pièces du dossier, ni les déclarations faites en séance devant la Cour ne permettent de tenir pour établis les faits allégués et pour fondées les craintes énoncées ni au regard des stipulations de l’article 1 A 2o de la Convention de Genève ni au regard des dispositions de l’article L. 712-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers (...) »

II. LE DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL PERTINENT

A. Le droit français

23. Les principes généraux régissant la procédure d’asile dite prioritaire appliquée aux demandeurs en rétention et le recours devant le tribunal administratif contre un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière sont résumés dans l’arrêt I.M. c. France (no 9152/09, §§ 49-63 et §§ 64-74, 2 février 2012).

24. L’article L. 513-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) dispose :

« Le recours contentieux contre la décision fixant le pays de renvoi n’est suspensif d’exécution, dans les conditions prévues au second alinéa de l’article L. 512-3, que s’il est présenté en même temps que le recours contre l’obligation de quitter le territoire français ou l’arrêté de reconduite à la frontière qu’elle vise à exécuter. »

B. Texte de l’Union Européenne

25. La directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres prévoit en son article 23 :

Article 23
Procédure d’examen

« 1. Les États membres traitent les demandes d’asile dans le cadre d’une procédure d’examen conformément aux principes de base et aux garanties fondamentales visés au chapitre II.

(...)

3. Les États membres peuvent donner la priorité à une demande ou en accélérer l’examen dans le respect des principes de base et des garanties fondamentales visés au chapitre II, y compris lorsque la demande est susceptible d’être fondée ou dans les cas où le demandeur a des besoins particuliers.

4. Les États membres peuvent également décider, dans le respect des principes de base et des garanties fondamentales visés au chapitre II, qu’une procédure d’examen est prioritaire ou est accélérée lorsque :

a) le demandeur n’a soulevé, en déposant sa demande et en exposant les faits, que des questions sans pertinence ou d’une pertinence insignifiante au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour obtenir le statut de réfugié en vertu de la directive 2004/83/CE; ou

b) le demandeur qui manifestement ne peut être considéré comme un réfugié ou ne remplit pas les conditions requises pour obtenir le statut de réfugié dans un État membre en vertu de la directive 2004/83/CE; ou

c) la demande d’asile est considérée comme infondée

i) parce que le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens des articles 29, 30 et 31, ou

ii) parce que le pays qui n’est pas un État membre est considéré comme un pays tiers sûr pour le demandeur sans préjudice de l’article 28, paragraphe 1, ou

d) le demandeur a induit les autorités en erreur en ce qui concerne son identité et/ou sa nationalité et/ou l’authenticité de ses documents, en présentant de fausses indications ou de faux documents ou en dissimulant des informations ou des documents pertinents qui auraient pu influencer la décision dans un sens défavorable, ou

e) le demandeur a introduit une autre demande d’asile mentionnant d’autres données personnelles, ou

f) le demandeur n’a produit aucune information permettant d’établir, avec une certitude suffisante, son identité ou sa nationalité, ou s’il est probable que, de mauvaise foi, il a procédé à la destruction ou s’est défait de pièces d’identité ou de titres de voyage qui auraient aidé à établir son identité ou sa nationalité, ou

g) la demande formulée par le demandeur est manifestement peu convaincante en raison des déclarations incohérentes, contradictoires, peu plausibles ou insuffisantes qu’il a faites sur les persécutions dont il prétend avoir fait l’objet, visées dans la directive 2004/83/CE, ou

h) le demandeur a introduit une demande ultérieure dans laquelle il n’invoque aucun élément nouveau pertinent par rapport à sa situation personnelle ou à la situation dans son pays d’origine, ou

i) le demandeur n’a pas introduit plus tôt sa demande, sans motif valable, alors qu’il avait la possibilité de le faire, ou

j) le demandeur ne dépose une demande qu’afin de retarder ou d’empêcher l’exécution d’une décision antérieure ou imminente qui entraînerait son expulsion, ou

k) sans motif valable, le demandeur n’a pas rempli les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/83/CE, ou de l’article 11, paragraphe 2, points a) et b), et de l’article 20, paragraphe 1, de la présente directive, ou

l) le demandeur est entré ou a prolongé son séjour illégalement sur le territoire de l’État membre et, sans motif valable, ne s’est pas présenté aux autorités et/ou n’a pas introduit sa demande d’asile dans les délais les plus brefs compte tenu des circonstances de son entrée sur le territoire, ou

m) le demandeur représente un danger pour la sécurité nationale ou l’ordre public de l’État membre; ou le demandeur a fait l’objet d’une décision d’éloignement forcé pour des motifs graves de sécurité nationale ou d’ordre public au regard du droit national, ou

n) le demandeur refuse de se conformer à l’obligation de donner ses empreintes digitales conformément à la législation communautaire et/ou nationale pertinente, ou

o) la demande a été introduite par un mineur non marié auquel l’article 6, paragraphe 4, point c), s’applique après que la demande déposée par le ou les parents responsables du mineur a été rejetée et aucun élément nouveau pertinent n’a été apporté en ce qui concerne la situation personnelle du demandeur ou la situation dans son pays d’origine. »

III. TEXTES ET DOCUMENTS INTERNATIONAUX

A. Sur la situation générale dans le pays, notamment au regard de la minorité Baha’ie

26. Dans ses rapports sur la situation des droits de l’Homme en Iran (USSD Human Rights report) en date des 8 avril 2011 et 24 mai 2012, le Département d’État américain indique que les libertés furent largement réduites en représailles aux manifestations ayant eu lieu à la suite de la réélection de Mahmoud Ahmadinejad à la tête de l’État, en juin 2009. A cette occasion, le gouvernement engagea une campagne de violence et d’intimidation, des exécutions extrajudiciaires d’individus ou de groupes furent rapportées ainsi que des condamnations à mort à l’issue de procès non équitables. Les forces de sécurité sous le contrôle de l’État se rendirent coupables de répressions et de violences politiquement motivées, de tortures et de viols. Les milices Bassidjis furent notoirement impliquées dans la commission d’actes de violence. Les autorités détinrent des prisonniers politiques, souvent incommunicado, et continuèrent la répression ciblant les défenseurs des droits des femmes et des minorités, les étudiants militants et les membres de minorités religieuses.

27. Les rapports précités pointent, d’une part, l’absence d’indépendance de la justice, de publicité des procès et d’impartialité, d’autre part l’impunité qui règne quant aux crimes commis par les forces de police, militaires et paramilitaires et l’absence de mécanismes d’enquête concernant ces crimes. Les rapports citent plusieurs cas de condamnations à mort d’opposants politiques pour des motifs fallacieux comme le trafic de drogue. Le problème de la corruption à tous les niveaux de l’État est par ailleurs signalé. Les rapports observent enfin les restrictions sévères apportées au droit à la vie privée et aux libertés individuelles, notamment les libertés d’expression, de réunion, de mouvement et de religion.

28. Dans son Operational Guidance Note sur l’Iran d’octobre 2012, le Home Office britannique recommande notamment d’accorder l’asile aux personnes pouvant être soupçonnées de critiquer le régime et aux membres de la communauté Baha’ie.

29. Dans une résolution du 17 février 2012, l’Assemblée Générale de l’ONU (A/RES/66/175) prit acte des rapports, respectivement, du Secrétaire Général de l’Organisation (A/66/361) et du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’Homme dans la République islamique d’Iran (A/66/374), desquels il ressort que la situation des droits de l’Homme dans ce pays continue de se dégrader. L’Assemblée constata les violations graves et répétées des droits de l’homme dans ce pays, notamment le recours à la torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que le nombre croissant d’exécutions et les méthodes employées (lapidation, pendaison). Elle mit aussi en lumière la recrudescence des persécutions et des violations des droits fondamentaux des personnes appartenant à la foi Baha’ie qui demeure une minorité religieuse non reconnue en Iran, la multiplication des attaques contre les adeptes de cette religion et leurs défenseurs (arrestations, détentions arbitraires, poursuites judiciaires et condamnations pénales). Plus généralement, l’Assemblée nota les graves limitations et restrictions imposées au droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction. Concernant les conditions de détention dans les prisons, l’Assemblée observa la violation persistante des droits des détenus, notamment la détention sans inculpation ou avec mise au secret, le recours systématique et arbitraire à l’isolement cellulaire de longue durée, les mauvaises conditions de détention (surpopulation carcérale, manque d’hygiène), la torture et les techniques brutales d’interrogatoire.

30. Dans son rapport mondial publié le 22 janvier 2012, Human Rights Watch constata l’obstruction continue du gouvernement iranien qui refuse, depuis 2005, de laisser le Rapporteur spécial des Nations Unies accéder à son territoire. Le rapport fait aussi état de l’augmentation du recours à la peine de mort en Iran et des sanctions internationales prises contre des officiels iraniens (membres du corps judiciaire, des milices Bassidjies ou des Gardes de la Révolution) ayant commis des violations des droits de l’Homme.

B. Sur la milice Bassidjie en particulier

31. Concernant la milice Bassidjie à laquelle le requérant prétend appartenir, dans son rapport sur la situation en Iran (Country of Origin Information report) du 16 janvier 2013, le Home Office du Royaume-Uni met en lumière les risques de persécutions en cas de retour que courent les anciens membres des services de sécurité de l’Etat (Gardes de la Révolution ou Bassidjis) qui auraient publiquement pris position contre les abus commis par ces organisations. Le rapport apporte quelques précisions sur les Bassidjis, milice paramilitaire composée de volontaires et qui fonctionne sous la tutelle des Gardes de la Révolution. Qualifiés d’« yeux et oreilles du régime », les Bassidjis sont considérés comme un corps très loyal (paragraphe 9.19). Des branches de cette organisation se trouvent sur l’ensemble du territoire et dans chaque ville en Iran. Les Bassidjis tiennent un rôle très actif au sein des affaires de sécurité intérieure en Iran et sont présents dans les universités, les écoles, les ministères, les associations commerciales, les usines et les hôpitaux.

32. Créée en 1979, après le siège de l’ambassade des États-Unis à Téhéran, la milice Bassidjie défend la République islamiste contre les « ennemis de l’intérieur » et les interventions étrangères (paragraphe 9.23). Le rapport énumère aussi les différents niveaux de participation dans la milice : les membres réguliers volontaires, les membres actifs rémunérés qui présentent un grand endoctrinement idéologique et politique, les membres spéciaux qui sont aussi des Gardes de la Révolution.

C. Sur les risques d’interpellation à l’aéroport

33. Concernant ce point, la Cour renvoie aux paragraphes 35 et 36 de l’arrêt R.C. c. Suède (no 41827/07, 9 mars 2010).

34. Le dernier rapport du Service de l’immigration danois, publié le 26 février 2013, intitulé « Iran, On conversion to christianity, issues concerning Kurds and post-2009 election protestors as well as legal issues and exit procedures », témoigne de la persistance des risques d’interpellation à l’aéroport pour les personnes ayant quitté illégalement le territoire et voyageant avec un laissez-passer.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

35. Le requérant allègue qu’un renvoi vers l’Iran l’exposerait à être soumis à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

A. Sur la recevabilité

36. Le Gouvernement excipe de l’irrecevabilité de la requête pour défaut de qualité de victime du requérant, faute pour l’arrêté de reconduite à la frontière de mentionner l’Iran comme pays de destination. Le Gouvernement rappelle, en effet, qu’une mesure d’éloignement implique, pour être exécutée, que soit fixé le pays vers lequel l’étranger doit être renvoyé. Or, en l’espèce, comme l’a relevé le tribunal administratif de Strasbourg, l’arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ne fixait pas le pays de destination de la reconduite. Il en résulte que le requérant, qui ne pouvait faire l’objet d’un renvoi à la date de sa demande de mesure provisoire, n’a pas la qualité de victime.

37. Le Gouvernement ajoute que la requête est au surplus irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes puisque le requérant, s’il avait fait l’objet d’un arrêté fixant l’Iran comme pays de destination, aurait pu le contester devant le juge administratif.

38. Le requérant conteste ces exceptions d’irrecevabilité.

39. La Cour est d’avis que l’argument tiré de l’absence de qualité de victime du requérant est inopérant puisque, s’il est exact qu’aucun arrêté préfectoral fixant l’Iran comme pays de destination n’a été pris, il ressort des éléments au dossier que le requérant a été présenté aux autorités consulaires iraniennes et qu’un laissez-passer à destination de ce pays a été délivré. Ainsi, il ne fait guère de doute que les autorités françaises avaient l’intention d’expulser vers son pays d’origine le requérant alors placé en rétention à cet effet et que seule l’application de l’article 39 du règlement de la Cour a empêché qu’un arrêté fixant l’Iran comme pays de destination soit pris mais également, compte tenu de l’absence de caractère suspensif du recours contre un tel arrêté (CESEDA, art. L. 513-3), que le requérant soit renvoyé. De plus, force est de constater que le requérant a contesté devant le tribunal administratif le seul arrêté qui lui avait été notifié, à savoir l’arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, et que, dans ce cadre, il a fait valoir les risques de mauvais traitements encourus en cas de renvoi aussi bien vers l’Iran que vers la Grèce. La Cour estime en conséquence que l’on ne saurait reprocher au requérant de ne pas avoir la qualité de victime et de ne pas avoir épuisé les voies de recours internes.

40. La Cour constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

41. Le requérant prétend qu’il sera interpellé dès son arrivée à l’aéroport de Téhéran et immédiatement détenu du fait de son refus de collaborer avec le régime.

42. Il souligne qu’en Iran, toute opposition au régime est réprimée dans le sang et la violence et donne, à ce titre, l’exemple des tortures et emprisonnements subis par les manifestants de la « Révolte verte » de 2009. Le requérant cite l’arrêt R.C. c. Suède (précité, § 33) dans lequel il a été estimé qu’un renvoi en Iran, étant donné la situation des droits humains et les risques que courent les iraniens ne pouvant pas produire de preuve de leur départ légal du pays, était contraire à l’article 3 de la Convention.

43. Selon le requérant qui s’appuie sur un rapport du Danish Immigration Service datant de 2008, la police de l’immigration, responsable des contrôles à l’aéroport, scanne les passeports et compare les informations avec une base de données qui permet de savoir si une personne est sortie légalement du territoire ou si une procédure judiciaire est en cours contre elle. Il ajoute qu’en tout état de cause, une personne se présentant à la frontière munie d’un laissez-passer délivré par les autorités consulaires iraniennes sera automatiquement interpellée et détenue pour être interrogée afin que soient déterminées les circonstances de son départ.

44. Le Gouvernement insiste sur le fait que ni l’OFPRA ni la CNDA n’ont considéré réels les risques allégués par le requérant. Il signale à ce titre que, sur deux cent soixante-trois requêtes présentées en 2010 par des ressortissants iraniens, l’OFPRA a octroyé la protection à cent quatre-vingt-neuf demandes, portant ainsi le taux d’admission au statut de réfugié des iraniens à 74 %. La CNDA a, quant à elle, annulé vingt-quatre décisions de rejet de l’OFPRA, soit un taux d’admission au statut de réfugié devant cette instance à 72 %. Le Gouvernement en déduit que ni l’OFPRA, ni la CNDA ne sous-estiment les risques encourus en Iran et que la présente requête ne permet pas d’établir un risque réel et individuel du fait de son caractère insuffisamment circonstancié.

45. Concernant les convocations judiciaires produites par le requérant, le Gouvernement reconnaît ne pouvoir réfuter de façon catégorique leur authenticité. Il rappelle que l’authentification des documents produits par les demandeurs d’asile se heurte à la nécessité de ne pas porter atteinte au principe de confidentialité qui s’attache aux demandes de protection internationale. Le Gouvernement ajoute qu’en tout état de cause, la preuve documentaire n’a qu’un statut subsidiaire et qu’une valeur confirmative. C’est, selon lui, à la crédibilité générale des déclarations du demandeur d’asile qu’il convient d’accorder une importance capitale. Or, en l’espèce, la CNDA a relevé que le récit du requérant était trop peu circonstancié pour emporter la conviction de la juridiction et a en conséquence considéré que les deux convocations établies par le tribunal révolutionnaire d’Ouroumieh ne permettaient pas de pallier les carences et contradictions affectant ses déclarations.

2. Appréciation de la Cour

a) Principes généraux

46. La Cour rappelle que, selon les principes applicables à l’espèce, les États contractants ont, en vertu d’un principe de droit international bien établi et sans préjudice des engagements découlant pour eux des traités internationaux, y compris la Convention, le droit de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des non-nationaux. Cependant, l’expulsion d’un étranger par un État contractant peut soulever un problème au regard de l’article 3, et donc engager la responsabilité de l’État en cause au titre de la Convention, lorsqu’il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l’intéressé, si on l’expulse vers le pays de destination, y courra un risque réel d’être soumis à un traitement contraire à l’article 3. En pareil cas, cette disposition implique l’obligation de ne pas expulser la personne en question vers ce pays (Hirsi Jamaa et autres c. Italie [GC], no 27765/09, § 114, 23 février 2012).

47. L’existence d’un risque de mauvais traitements doit être examinée à la lumière de la situation générale dans le pays de renvoi et des circonstances propres au cas de l’intéressé (Saadi c. Italie [GC], no 37201/06, § 130, CEDH 2008).

48. La Cour considère qu’il appartient en principe au requérant de produire des éléments susceptibles de démontrer qu’il serait exposé, en cas de mise à exécution de la mesure incriminée, à un risque de traitements contraires à l’article 3, à charge ensuite pour le Gouvernement de dissiper les doutes éventuels au sujet de ces éléments (Saadi, précité, § 129 ; NA. c. Royaume-Uni, no 25904/07, § 111, 17 juillet 2008). Elle rappelle également qu’il ne lui appartient pas normalement de substituer sa propre appréciation des faits à celle des juridictions internes, mieux placées pour évaluer les preuves produites devant elles (voir, entre autres, Klaas c. Allemagne, 22 septembre 1993, § 29, série A no 269, à propos de l’article 3). Elle reconnaît que, eu égard à la situation particulière dans laquelle se trouvent souvent les demandeurs d’asile, il convient dans de nombreux cas de leur accorder le bénéfice du doute lorsque l’on apprécie la crédibilité de leurs déclarations et des documents soumis à l’appui de celles‑ci. Toutefois, lorsque des informations sont soumises qui donnent de bonnes raisons de douter de la véracité des déclarations du demandeur d’asile, celui-ci est tenu de fournir une explication satisfaisante pour les incohérences de son récit (voir, notamment, N. c. Suède, no 23505/09, § 53, 20 juillet 2010, et Collins et Akaziebie c. Suède (déc.), no 23944/05, 8 mars 2007). De la même manière, il incombe au requérant de fournir une explication suffisante pour écarter d’éventuelles objections pertinentes quant à l’authenticité des documents par lui produits (Mo.P. c. France (déc.), no 55787/09, § 53, 30 avril 2013).

49. Enfin, s’il convient de se référer en priorité aux circonstances dont l’État en cause avait connaissance au moment de l’expulsion, la date à prendre en compte pour l’examen du risque encouru est celle de la date de l’examen de l’affaire par la Cour (Chahal c. Royaume-Uni, § 86, 15 novembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996‑V).

b) Application de ces principes au cas d’espèce

50. Concernant la situation générale en Iran, la Cour a déjà estimé que, bien que soient rapportées de graves violations des droits de l’homme en Iran, la situation dans ce pays n’était pas telle que tout renvoi constituerait une violation de la Convention (R.C. c. Suède, précité, § 49, et S.F. et autres c. Suède, no 52077/10, § 64, 15 mai 2012). Au vu des rapports internationaux consultés, la Cour ne voit pas de raison de se départir d’une telle conclusion. Ainsi, elle doit déterminer si le renvoi du requérant vers l’Iran entraînerait, dans le cas particulier de l’espèce, un risque réel de mauvais traitements au sens de l’article 3 de la Convention.

51. Le requérant allègue avoir fui en raison des mauvais traitements subis du fait de ses prises de position contre les abus commis par les Bassidjis, il invoque principalement le risque qu’il court d’être interpellé dès son arrivée à l’aéroport de Téhéran. Selon lui, il serait immédiatement identifié par les autorités iraniennes d’une part, parce qu’il ne serait pas en mesure de prouver qu’il est légalement sorti du territoire, d’autre part, parce qu’il fait l’objet de poursuites du fait de sa démission des services de renseignements.

52. La Cour constate, tout d’abord, que le requérant présente un récit assez circonstancié et étayé par plusieurs pièces documentaires, dont deux convocations du tribunal révolutionnaire. Elle relève que les documents produits tendent à corroborer les faits exposés. Elle note toutefois les réserves émises par le Gouvernement, au regard des décisions de l’OFPRA et de la CNDA, quant à la crédibilité du récit du requérant et quant à l’authenticité des documents produits, ainsi que l’argument selon lequel l’anonymat imposé dans cette affaire l’aurait empêché d’engager plus d’investigations. La Cour écarte d’emblée la justification fondée sur l’anonymat puisque, si l’identité du requérant est dissimulée dans les documents publics de l’affaire, cela n’empêche pas le Gouvernement, qui a accès à cette information confidentielle, d’effectuer toute enquête nécessaire (voir, en ce sens, P.I. c. France (déc.), no 37180/10, § 49, 12 juin 2012). La Cour relève, par ailleurs, qu’en l’espèce, les éléments apportés par le requérant – tant son récit que les preuves documentaires – furent écartés par les autorités au moyen de motivations succinctes. L’OFPRA, en premier lieu, rejeta la demande du requérant par la seule affirmation que ses déclarations écrites et orales n’auraient pas permis d’établir la réalité de son parcours professionnel et les persécutions dont il aurait été victime en 2006. En second lieu, la CNDA, statuant en appel, s’est limitée à juger trop peu circonstanciées les déclarations du requérant et en a conclu qu’elle n’était convaincue ni de sa qualité d’informateur des Bassidjis, ni des critiques qu’il aurait exprimées à l’égard de cette milice à partir de 2005, ni de la réalité des persécutions invoquées de ce fait. S’agissant plus spécifiquement des convocations du tribunal révolutionnaire d’Ouroumieh communiquées par le requérant au soutien de son récit, la CNDA les déclara dénuées de garanties suffisantes d’authenticité, sans indiquer les motifs fondant ses suspicions. Il en résulte que la Cour ne trouve pas d’éléments suffisamment explicites dans ces motivations des instances nationales pour écarter le récit du requérant et rejeter sa demande. La Cour observe, par ailleurs, qu’aucun élément mettant manifestement en doute l’authenticité des documents produits ne lui a été soumis. Le Gouvernement reconnaît par ailleurs ne pas disposer d’éléments lui permettant de réfuter de façon catégorique cette authenticité. Eu égard à ce qui précède, la Cour estime que le Gouvernement n’a pas apporté d’informations pertinentes donnant des raisons suffisantes de douter de la véracité des déclarations du requérant et, partant, qu’il n’existe aucune raison de douter de la crédibilité de ce dernier. Dès lors, il ne saurait être attendu du requérant qu’il prouve plus avant ses dires et l’authenticité des éléments de preuve par lui fournis.

53. La Cour estime, enfin, important de prendre en compte les risques spécifiques encourus par les Iraniens qui retournent dans leur pays sans pouvoir prouver qu’ils ont quitté légalement le territoire. Il ressort des rapports internationaux consultés (voir paragraphes 33 et 34) que ces personnes sont fréquemment interpellées et interrogées quant aux conditions de leur départ du pays. En l’espèce, il n’est pas contesté que le requérant a quitté illégalement l’Iran et qu’il est détenteur d’un laissez-passer délivré par les autorités consulaires iraniennes en France et non d’un passeport. Par conséquent, il est probable que celui-ci, à son arrivée à l’aéroport de Téhéran, attire l’attention des autorités et que son passé de Bassidji et ses anciennes prises de position contre les abus commis par les membres de cette milice soient révélés. L’effet cumulé de ces différents facteurs constitue un risque supplémentaire pour le requérant (voir, mutatis mutandis, R.C. c. Suède, précité, § 56, et NA. c. Royaume-Uni, précité, §§ 134-136).

54. En conséquence, la Cour considère que, faute pour le Gouvernement de parvenir à mettre sérieusement en doute la réalité des craintes du requérant, elle ne peut qu’admettre que le renvoi du requérant vers l’Iran l’exposerait, au vu des circonstances de l’espèce, à un risque de mauvais traitements au regard de l’article 3 de la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 13 DE LA CONVENTION COMBINÉ AVEC L’ARTICLE 3

55. Le requérant estime n’avoir pas eu droit à un recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention pour faire valoir son grief sous l’article 3 en raison du placement de sa demande d’asile en procédure prioritaire. Les dispositions pertinentes de l’article 13 se lisent comme suit :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

A. Sur la recevabilité

56. La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

57. Le requérant estime que l’examen de sa demande d’asile selon la procédure prioritaire l’a privé de son droit à un recours effectif. Il soutient, par ailleurs, que le bref délai de recours de quarante-huit heures devant les juridictions administratives ne lui a nullement permis de faire valoir, de façon complète et circonstanciée, son grief sous l’article 3.

58. Le Gouvernement assure que la procédure prioritaire devant l’OFPRA assure les garanties de protection de la procédure de droit commun (audition confidentielle du requérant avec le concours d’un interprète). Il ajoute qu’en tout état de cause, le requérant a eu la possibilité de faire valoir son grief devant le tribunal administratif. S’appuyant sur l’arrêt H.R. c. France (no 64780/09, §§ 76 à 79, 22 septembre 2011), il affirme que l’absence d’effet suspensif en appel et en cassation est sans incidence sur l’effectivité du recours.

59. Le Gouvernement souhaite distinguer la présente affaire de celle ayant donné lieu à l’arrêt I.M. c. France précité, dans laquelle le classement en procédure prioritaire ne se justifiait pas, le requérant n’ayant eu à aucun moment la possibilité de déposer une demande d’asile avant son placement en rétention. En l’espèce, la demande d’asile a été considérée comme abusive sur le fondement de l’article L. 741-4-4o du CESEDA en raison des déclarations fallacieuses du requérant sur son formulaire de demande d’asile. L’exposé des faits présenté par le requérant devant la Cour démontre, selon le Gouvernement, que celui-ci est entré sur le territoire français, non pour demander l’asile, mais pour gagner le Royaume-Uni. Ce n’est que deux ans après sa première venue en France et plus de dix mois après avoir fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière qu’il a demandé l’asile, ce qui jette des doutes sur la réalité des craintes invoquées en cas de retour en Iran.

60. Le Gouvernement souligne que les circonstances dans lesquelles le requérant a déposé l’asile sont très différentes de celles de l’affaire I.M. c. France. En effet, le requérant, remis par les autorités helvétiques à la France le 28 octobre 2008, a été libéré le même jour, il a donc pu préparer sa demande d’asile hors du centre de rétention et la déposer le 13 novembre 2008.

61. Le Gouvernement précise enfin que l’absence d’effet suspensif du recours devant la CNDA ne saurait, à lui seul, dénier à ce recours tout caractère effectif.

2. Appréciation de la Cour

a) Principes généraux

62. Les principes généraux relatifs à l’effectivité des recours et des garanties fournies par les États contractants en cas d’expulsion d’un demandeur d’asile en vertu des articles 13 et 3 combinés de la Convention sont résumés dans l’arrêt M.S.S. c. Belgique et Grèce [GC], no 30696/09, §§ 286-293, CEDH 2011. Dans cet arrêt, la Cour a d’abord rappelé le caractère subsidiaire que revêt, par rapport aux systèmes nationaux, le mécanisme de plainte devant elle, puisqu’elle se garde d’examiner elle-même les demandes d’asile ou de contrôler la manière dont les États remplissent leurs obligations découlant de la Convention de Genève. Sa préoccupation essentielle est de savoir s’il existe des garanties effectives qui protègent le requérant contre un refoulement arbitraire vers le pays qu’il a fui (§§ 286 et 287).

63. Ensuite, la Cour a réitéré les principes inhérents à l’article 13 de la Convention, qui « garantit l’existence en droit interne d’un recours permettant de se prévaloir des droits et libertés de la Convention tels qu’ils y sont consacrés. Cette disposition a donc pour conséquence d’exiger un recours interne habilitant à examiner le contenu d’un « grief défendable » fondé sur la Convention et à offrir le redressement approprié. La portée de l’obligation que l’article 13 fait peser sur les États contractants varie en fonction de la nature du grief du requérant. Toutefois, le recours exigé par l’article 13 doit être « effectif » en pratique comme en droit » (Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 157, CEDH 2000‑XI, et M.S.S. c. Belgique et Grèce, précité, § 288).

64. La Cour reconnaît une marge d’appréciation aux États contractants puisque « l’effectivité d’un recours au sens de l’article 13 ne dépend pas de la certitude d’une issue favorable pour le requérant. De même, l’« instance » dont parle cette disposition n’a pas besoin d’être une institution judiciaire, mais alors ses pouvoirs et les garanties qu’elle présente entrent en ligne de compte pour apprécier l’effectivité du recours s’exerçant devant elle. En outre, l’ensemble des recours offerts par le droit interne peut remplir les exigences de l’article 13, même si aucun d’eux n’y répond en entier à lui seul » (Gebremedhin [Gaberamadhien] c. France, no 25389/05, § 53, CEDH 2007‑II, et M.S.S. c. Belgique et Grèce, précité, § 289).

65. L’effectivité d’un recours au sens de l’article 13 demande impérativement un contrôle attentif par une autorité nationale (Chamaïev et autres c. Géorgie et Russie, no 36378/02, § 448, CEDH 2005‑III), un examen indépendant et rigoureux de tout grief aux termes duquel il existe des motifs de croire à un risque de traitement contraire à l’article 3 (Jabari c. Turquie, no 40035/98, § 50, CEDH 2000‑VIII) ainsi qu’une célérité particulière (Batı et autres c. Turquie, nos 33097/96 et 57834/00, § 136, CEDH 2004‑IV (extraits)). Lorsqu’il s’agit d’un grief selon lequel l’expulsion de l’intéressé l’exposera à un risque réel de subir un traitement contraire à l’article 3 de la Convention, compte tenu de l’importance que la Cour attache à cette disposition et de la nature irréversible du dommage susceptible d’être causé en cas de réalisation du risque de torture ou de mauvais traitements, l’effectivité d’un recours au sens de l’article 13 requiert également que les intéressés disposent d’un recours de plein droit suspensif (Čonka c. Belgique, no 51564/99, §§ 81-83, CEDH 2002‑I ; Gebremedhin, précité, § 66, et M.S.S. c. Belgique et Grèce, précité, §§ 290-293).

b) Application de ces principes au cas d’espèce

66. Le requérant se plaint de ne pas avoir bénéficié en droit français d’un recours effectif pour faire valoir son grief sous l’article 3, au mépris de l’article 13 de la Convention, en raison du traitement de sa demande d’asile selon la procédure prioritaire

67. La Cour est consciente de la nécessité pour les États confrontés à un grand nombre de demandeurs d’asile de disposer des moyens nécessaires pour faire face à un tel contentieux. Elle ne remet pas en cause l’intérêt et la légitimité de l’existence d’une procédure prioritaire, en plus de la procédure normale de traitement des demandes d’asile, pour les demandes dont tout porte à croire qu’elles sont infondées ou abusives. Elle note d’ailleurs que la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres donne aux Etats membres de l’Union européenne la possibilité d’appliquer une procédure accélérée notamment lorsque des éléments clairs et évidents permettent aux autorités de considérer que le demandeur ne pourra pas bénéficier d’une protection internationale, lorsque la demande paraît frauduleuse ou lorsque, sans motif valable, elle n’a pas été présentée dans les délais les plus brefs suivant la date d’entrée sur le territoire.

68. La Cour rappelle qu’elle a déjà examiné la compatibilité de la procédure d’asile dite prioritaire appliquée aux demandeurs en rétention et le recours devant le tribunal administratif contre un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. Dans l’arrêt I.M. c. France (précité, §§ 49-63 et §§ 64-74), la Cour a jugé, quant à l’effectivité du système de droit interne pris dans son ensemble, que si les recours exercés par le requérant étaient théoriquement disponibles, leur accessibilité en pratique avait été limitée par plusieurs facteurs, liés pour l’essentiel au classement automatique de sa demande en procédure prioritaire, à la brièveté des délais de recours à sa disposition et aux difficultés matérielles et procédurales d’apporter des preuves alors que le requérant se trouvait en détention ou en rétention (ibid., § 154). La Cour a conclu à la violation de l’article 13 combiné avec l’article 3 après avoir constaté qu’il s’agissait d’une première demande d’asile et que le requérant, gardé à vue puis détenu, n’avait pas eu la possibilité de se rendre en personne à la préfecture pour introduire une demande d’asile comme l’exige le droit français (ibid., §§ 141 et 143). Dans l’arrêt Sultani c. France (no 45223/05, §§ 64-65, CEDH 2007‑IV (extraits)), la Cour a, au contraire, estimé que le réexamen d’une demande d’asile selon le mode prioritaire ne privait pas l’étranger en rétention d’un examen circonstancié dès lors qu’une première demande avait fait l’objet d’un examen complet dans le cadre d’une procédure d’asile normale. Le simple fait qu’une demande d’asile soit traitée en procédure prioritaire et donc dans un délai restreint ne saurait en conséquence, à lui seul, permettre à la Cour de conclure à l’ineffectivité de l’examen mené.

69. En l’espèce, la Cour observe que, comme dans l’arrêt I.M. précité, le requérant est un primo-demandeur d’asile en France et que, du fait du classement en procédure prioritaire, il a bénéficié de délais de recours réduits pour préparer une demande d’asile complète et documentée en langue française, soumise à des exigences identiques à celles prévues pour les demandes déposées selon la procédure normale. La Cour relève cependant qu’à la différence de l’arrêt I.M., le requérant a particulièrement tardé à former une demande d’asile en France. En effet, il n’a demandé l’asile que deux ans après sa première venue en France et plus de dix mois après avoir fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière. La Cour en déduit que le requérant a donc disposé de deux années pour présenter une demande d’asile, laquelle aurait bénéficié d’un examen complet dans le cadre de la procédure normale, ou, à tout le moins, pour se procurer les documents de nature à étayer une telle demande d’asile. La Cour note que le requérant a volontairement omis de préciser aux autorités françaises qu’il avait auparavant vainement sollicité l’asile auprès des autorités britanniques et grecques, ce qui a justifié le traitement de sa demande selon la procédure prioritaire. Ces précédentes demandes d’asile montrent que le requérant savait comment formuler une demande d’asile et avait conscience de la nécessité de documenter celle-ci.

70. La Cour souligne que le requérant, alors qu’il était libre et non en rétention, a pu former une demande d’asile devant l’OFPRA et un recours suspensif devant le tribunal administratif contre le second arrêté de reconduite à la frontière, bien que ces recours soient enfermés dans des délais brefs de, respectivement, cinq jours et quarante-huit heures. Eu égard aux précédentes demandes d’asile, au caractère particulièrement tardif de la demande d’asile présentée en France et, partant, à la possibilité qu’il avait de rassembler, au préalable, toute pièce utile pour documenter une telle demande, le requérant ne peut valablement soutenir que l’accessibilité des recours disponibles a été affectée par la brièveté des délais dans lesquels ils devaient être exercés et par les difficultés matérielles rencontrées pour obtenir les preuves nécessaires (voir, mutatis mutandis, M.E. c. France, no 50094/10, §§ 65-70, 6 juin 2013).

71. Ces considérations amènent la Cour à conclure à l’absence de violation de l’article 13 combiné avec l’article 3.

III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

72. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

73. Le requérant s’en remet à la sagesse de la Cour quant à l’appréciation du montant approprié pour réparer son préjudice moral. Il ne formule en revanche aucune demande au titre des frais et dépens.

74. Le Gouvernement estime que la constatation éventuelle par la Cour d’une violation suffirait à assurer la réparation du préjudice moral allégué.

75. La Cour considère qu’eu égard aux circonstances de l’espèce, le constat d’une violation potentielle de l’article 3 de la Convention constitue en lui-même une satisfaction équitable suffisante pour tout dommage moral pouvant avoir été subi par le requérant.

IV. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 39 DU RÈGLEMENT DE LA COUR

76. La Cour rappelle que, conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, le présent arrêt deviendra définitif : a) lorsque les parties déclareront qu’elles ne demanderont pas le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre ; ou b) trois mois après la date de l’arrêt, si le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre n’a pas été demandé ; ou c) lorsque le collège de la Grande Chambre rejettera la demande de renvoi formulée en application de l’article 43.

77. Elle considère que les mesures qu’elle a indiquées au Gouvernement en application de l’article 39 de son règlement (paragraphes 3-4 ci-dessus) doivent demeurer en vigueur jusqu’à ce que le présent arrêt devienne définitif ou que la Cour rende une autre décision à cet égard.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit que, dans l’éventualité de la mise à exécution de la décision de renvoyer le requérant vers l’Iran, il y aurait violation de l’article 3 de la Convention ;

3. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 13 de la Convention combiné avec l’article 3 ;

4. Dit que le constat de violation de l’article 3 en cas de renvoi en Iran constitue en lui-même une satisfaction équitable suffisante pour dommage moral ;

5. Décide de continuer à indiquer au Gouvernement, en application de l’article 39 de son règlement, qu’il est souhaitable, dans l’intérêt du bon déroulement de la procédure, de ne pas expulser le requérant jusqu’à ce que le présent arrêt devienne définitif ou que la Cour rende une autre décision à cet égard.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 10 octobre 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Claudia WesterdiekMark Villiger
GreffièrePrésident

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l’exposé de l’opinion séparée du Juge P. Lemmens.

M.V.

C.W.

OPINION CONCORDANTE DU JUGE LEMMENS

J’ai voté avec mes collègues pour le constat d’une violation potentielle de l’article 3 de la Convention. Je souscris par ailleurs entièrement aux motifs conduisant à cette conclusion.

Il me semble toutefois utile de souligner que le constat de violation repose notamment sur le fait que les autorités nationales n’ont pas motivé de manière suffisamment explicite, donc concrète, leur conclusion selon laquelle le récit du requérant n’était pas crédible (voir en particulier le paragraphe 52 de l’arrêt).

L’arrêt de la Cour doit être exécuté. Cela veut dire, notamment, que l’autorité nationale compétente devra soigneusement réexaminer la situation du requérant et motiver sa décision d’une manière qui réponde aux critiques émises par la Cour. Mais cela n’exclut pas que, sur la base d’un nouvel examen des éléments du dossier, cette autorité parvienne à la même conclusion que celle qui fait l’objet du présent arrêt de la Cour. On ne saurait par ailleurs exclure qu’au moment où l’autorité nationale prendra sa décision, les autorités iraniennes auront favorablement changé d’attitude à l’égard d’Iraniens retournant dans leur pays après l’avoir quitté illégalement (voir paragraphe 53). Bien sûr, si le requérant estime que la nouvelle décision viole ses droits fondamentaux, il pourra introduire un recours devant les instances nationales compétentes, puis le cas échéant une nouvelle requête devant la Cour (pour un exemple, voir Liou c. Russie (no 2), no 29157/09, 26 juillet 2011).

Au vu de ce qui précède, je me demande si la Cour ne devrait pas formuler sa conclusion de manière plus précise. Il est dit au paragraphe 54 que la Cour « ne peut qu’admettre que le renvoi du requérant vers l’Iran l’exposerait, au vu des circonstances de l’espèce, à un risque de mauvais traitements au regard de l’article 3 de la Convention ». Au point 2 du dispositif, il est dit, selon la formule généralement consacrée « que, dans l’éventualité de la mise à exécution de la décision de renvoyer le requérant vers l’Iran, il y aurait violation de l’article 3 de la Convention ». De telles formulations pourraient donner l’impression – erronée ‑ que le requérant ne saurait en aucun cas être renvoyé vers l’Iran, même après un réexamen de son dossier qui, par hypothèse, serait impeccable du point de vue des exigences de la Convention.

J’aurais préféré que la Cour dise au paragraphe 54 qu’« il y a lieu d’admettre que le renvoi du requérant vers l’Iran, sur base de la décision faisant l’objet du présent arrêt, l’exposerait, au vu des circonstances de l’espèce, à un risque de mauvais traitements au regard de l’article 3 de la Convention ». Il serait alors clair que le point 2 du dispositif se réfère à la seule décision examinée de renvoyer le requérant vers l’Iran.


Synthèse
Formation : Cour (cinquieme section)
Numéro d'arrêt : 001-126641
Date de la décision : 10/10/2013
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 3 - Interdiction de la torture (Article 3 - Expulsion) (Conditionnel) (Iran);Non-violation de l'article 13+3 - Droit à un recours effectif (Article 13 - Recours effectif) (Article 3 - Interdiction de la torture;Expulsion)

Parties
Demandeurs : K.K.
Défendeurs : FRANCE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : ROUSSEL C.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

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