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01/10/2013 | CEDH | N°001-126560

CEDH | CEDH, AFFAIRE HÜSEYİN KAPLAN c. TURQUIE, 2013, 001-126560


DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE HÜSEYİN KAPLAN c. TURQUIE

(Requête no 24508/09)

ARRÊT

(Fond)

STRASBOURG

1er octobre 2013

DÉFINITIF

01/01/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Hüseyin Kaplan c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Danutė Jočienė,
Dragoljub Popović,
András Sa

jó,
Işıl Karakaş,
Paulo Pinto de Albuquerque,
Helen Keller, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du cons...

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE HÜSEYİN KAPLAN c. TURQUIE

(Requête no 24508/09)

ARRÊT

(Fond)

STRASBOURG

1er octobre 2013

DÉFINITIF

01/01/2014

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Hüseyin Kaplan c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Danutė Jočienė,
Dragoljub Popović,
András Sajó,
Işıl Karakaş,
Paulo Pinto de Albuquerque,
Helen Keller, juges,
et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 septembre 2013,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 24508/09) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet Etat, M. Hüseyin Kaplan (« le requérant »), a saisi la Cour le 29 avril 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par Me L. Ercan, avocat à Ankara. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.

3. Le 31 août 2012, la requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et sur le fond de l’affaire.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

4. Le requérant est né en 1949 et réside à Kırıkkale.

5. Le 26 mai 1981, il acheta une prairie d’une superficie de 2 990 m2.

6. Le 5 mars 1982, la commune de Kırıkkale décida d’affecter le terrain de l’intéressé à un service public et annota le registre foncier en conséquence.

7. Le 1er décembre 1986, la commune, sans exproprier M. Kaplan de son terrain, adopta un nouveau plan d’urbanisme.

8. Le 2 janvier 1991, elle adopta à nouveau un plan d’urbanisme.

9. Le terrain du requérant acquit le statut de terrain constructible sur une superficie de 2 243 m2.

10. La commune décida d’affecter le terrain du requérant à l’édification d’un établissement d’enseignement technique et professionnel.

11. Elle n’expropria pas le requérant de son bien et ne construisit pas l’école prévue.

12. Les 26 février et 8 octobre 2007, le requérant demanda à la municipalité quel était le statut de son terrain dans le plan d’urbanisme en vigueur.

13. L’administration fit savoir au requérant qu’il y avait une restriction d’usage pour le terrain en question et que celui-ci avait été affecté dans le plan d’urbanisme à l’édification d’un établissement d’enseignement technique et professionnel. Elle l’informa qu’il ne lui était dès lors pas possible d’obtenir un permis de construire ni de procéder à la plantation d’arbres sur son terrain.

14. Le 15 janvier 2007, le requérant intenta, par l’intermédiaire de son avocat, une action en dommages et intérêts contre l’administration devant le tribunal de grande instance de Kırıkkale (« le tribunal »).

15. Alléguant que le terrain en question avait été affecté dans le plan d’urbanisme à l’édification d’une école, et ce en l’absence d’expropriation par l’administration, il se plaignait d’avoir perdu l’usage de son bien et soutenait que son droit de propriété se trouvait vidé de sa substance depuis vingt-sept ans.

16. Il ajoutait qu’il ne pouvait utiliser le terrain pour y planter des arbres ou y construire un immeuble.

17. Selon lui, cette situation entravait la pleine jouissance de son droit de propriété et avait des répercussions dommageables, notamment en ce qu’elle amoindrissait considérablement selon lui ses chances de vendre son terrain.

18. Le tribunal ordonna une expertise.

19. Le 5 juillet 2007, après avoir effectué une visite des lieux, l’expert rendit son rapport. Il y constatait qu’il n’y avait pas eu d’emprise sur le terrain par la municipalité.

20. Par un jugement du 27 septembre 2007, le tribunal débouta le requérant de sa demande au motif que la municipalité n’avait pas procédé à une emprise sur le terrain litigieux et que l’intéressé n’avait pas démontré le préjudice matériel allégué.

21. Le requérant forma un pourvoi en cassation contre le jugement de première instance. Il déplorait l’incertitude dont il se disait victime depuis 1982 quant au sort de son terrain.

22. Par un arrêt du 17 mars 2008, la Cour de cassation confirma le jugement attaqué en toutes ses dispositions.

Cette décision se lit comme suit en ses parties pertinentes en l’espèce :

« (...) L’objet de la requête est une demande de dommages et intérêts pour expropriation de facto.

Au regard des documents et preuves contenus dans le dossier, de la motivation du jugement attaqué et du fait, notamment, que l’administration n’a pas occupé le terrain en question par une emprise, le jugement rendu par la juridiction de première instance est conforme aux règles procédurales et aux dispositions légales (...) »

23. Le 19 mars 2013, le requérant s’adressa à la commune de Kırıkkale pour demander quel était le statut de son terrain dans le dernier plan d’urbanisme.

24. Le 20 mars 2013, la municipalité fit savoir à l’intéressé que le terrain litigieux était toujours affecté à l’édification d’un établissement d’enseignement technique et professionnel.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

25. Aux termes de l’article 10 de la loi no 3184, les plans d’urbanisme sont adoptés pour cinq ans.

26. Selon l’article 6 de la loi du 11 juin 2013, les propriétaires de terrains frappés d’une restriction légale en raison de l’affectation, dans le plan d’urbanisme, de leurs biens à un service public peuvent intenter une action en justice devant la juridiction administrative, après avoir préalablement saisi l’administration concernée. Les dispositions de cet article s’appliquent également aux litiges en cours d’instance devant les tribunaux et aux décisions de justice qui ne sont pas encore devenues définitives.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1 À LA CONVENTION

27. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, le requérant allègue que l’affectation de son terrain depuis 1982, sans contrepartie, à un usage public a restreint considérablement l’usage potentiel de ce terrain et qu’elle a porté atteinte à son droit au respect de ses biens. Cette disposition est libellée comme suit dans ses parties pertinentes en l’espèce :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

(...) »

28. Le Gouvernement combat cette thèse.

A. Sur la recevabilité

29. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes, reprochant au requérant de ne pas avoir saisi les tribunaux administratifs d’un recours de plein contentieux. A cet égard, il fait référence à une décision du tribunal des conflits du 2 juillet 2012 donnant compétence en la matière à la juridiction administrative. Par ailleurs, indiquant que la date de la notification de la décision interne définitive est le 1er avril 2008, il reproche au requérant de n’avoir pas introduit sa requête dans un délai de six mois à compter de cette date.

30. S’agissant du recours de plein contentieux devant les tribunaux administratifs, la Cour considère que le requérant peut passer pour avoir épuisé les voies de recours internes dans la mesure où il a saisi les juridictions judiciaires d’une demande en dommages et intérêts pour le préjudice qu’il estimait avoir subi du fait de l’affectation de son terrain à l’édification d’une école. A cet égard, la Cour rappelle qu’elle applique la règle de l’épuisement des voies de recours internes en tenant dûment compte du contexte et avec une certaine souplesse, sans formalisme excessif. Elle réaffirme que, lorsqu’une voie de recours a été utilisée, l’usage d’une autre voie dont le but est pratiquement le même n’est pas exigé (Kozacıoğlu c. Turquie [GC], no 2334/03, §§ 39-43, CEDH 2009, et Riad et Idiab c. Belgique, nos 29787/03 et 29810/03, § 84, CEDH 2008). En outre, elle observe que les dispositions de l’article 6 de la loi du 11 juin 2013 (paragraphe 26 ci-dessus) ne s’appliquent pas aux circonstances de la cause, l’arrêt de la Cour de cassation du 17 mars 2008 (paragraphe 22 ci‑dessus) étant définitif.

31. S’agissant de l’exception de tardiveté, la Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes et dans un délai de six mois à compter de la date de la décision interne définitive. Elle rappelle également que, lorsque la violation alléguée consiste en une situation continue, le délai de six mois ne commence à courir qu’à la date à laquelle cette situation continue a pris fin (Marinakos c. Grèce (déc.), no 49282/99, 29 mars 2000 ; Malama c. Grèce, no 43622/98, 1er mars 2001 ; Paar c. Hongrie (déc.), no 40867/98, 20 septembre 2001 ; Skowronski c. Pologne (déc.), no 37609/97, 19 mars 2002, et Ülke c. Turquie (déc.), no 39437/98, 1er juin 2004). La notion de « situation continue » désigne un état de choses résultant d’actions continues accomplies par l’Etat ou en son nom, dont un requérant est victime. Tant qu’une telle situation perdure, la règle des six mois ne trouve pas à s’appliquer (Iordache c. Roumanie, no 6817/02, §§ 49 et 50, 14 octobre 2008).

En l’espèce, la Cour note que le terrain du requérant est resté affecté de manière continue à l’édification d’une école dans différents plans d’urbanisme adoptés tous les cinq ans par l’administration, et ce sans que le requérant ait à aucun moment été exproprié de son bien. En outre, le droit interne n’a pas été en mesure de remédier à l’incertitude attachée au sort du terrain de l’intéressé. Ainsi, les circonstances incriminées par celui-ci trouvant encore à s’appliquer au moment de l’introduction de sa requête, l’exception de tardiveté soulevée par le Gouvernement au titre de l’article 35 § 1 de la Convention ne saurait être retenue.

32. Compte tenu de ce qui précède, la Cour rejette les exceptions préliminaires du Gouvernement.

33. Constatant par ailleurs que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 de la Convention et qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, elle la déclare recevable.

B. Sur le fond

34. Le requérant soutient que la situation dénoncée a emporté violation de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention. Il allègue subir une ingérence dans l’exercice de son droit au respect de ses biens depuis 1982, date à laquelle l’administration aurait décidé d’affecter son terrain à un service public. Pendant toute cette période, son terrain – doté du statut de terrain constructible en 1991 – aurait été frappé d’une restriction d’usage consistant en une interdiction de construire ou de planter des arbres, jusqu’à ce que l’administration procédât, à une date indéterminée, à son expropriation. Le requérant se plaint de cette situation d’incertitude. Il reproche aux autorités leur inertie et déplore l’absence d’indemnisation pour le sacrifice qui lui serait imposé. Il soutient qu’il a perdu de la sorte la pleine jouissance du terrain et que la situation litigieuse a en outre éliminé toute possibilité concrète de trouver un acheteur et donc de vendre le terrain. Compte tenu de la situation dénoncée, il estime qu’il y a eu une atteinte disproportionnée à son droit au respect de ses biens.

35. Le Gouvernement se borne à réitérer ses exceptions préliminaires et ne se prononce pas sur le fond de l’affaire.

36. Aux yeux de la Cour, il y a eu ingérence dans l’exercice par le requérant de son droit au respect de ses biens. La Cour note en effet que, depuis 1982, le terrain du requérant a été affecté à un service public et que le registre foncier a été annoté en conséquence. Elle relève qu’il ressort des éléments du dossier que ledit terrain, qui avait initialement le statut de prairie, a acquis le statut de terrain constructible en 1991 (paragraphes 8 et 9 ci-dessus) et qu’il a été affecté dans le plan d’urbanisme à l’édification d’un établissement d’enseignement technique et professionnel. Or plus de vingt ans se sont écoulés et l’administration n’a pas même démarré la construction de l’école ni exproprié le requérant de son terrain. La Cour estime que la situation décrite a eu incontestablement pour effet de créer une restriction de la disponibilité du bien en cause. Reste à savoir si cette ingérence a enfreint ou non les dispositions de l’article 1 du Protocole no 1.

37. La Cour observe qu’il n’y a pas eu de privation formelle de propriété puisque le droit de propriété du requérant est resté juridiquement intact. Cependant, elle rappelle que, en l’absence d’un transfert de propriété, elle doit aussi regarder au-delà des apparences et analyser la réalité de la situation litigieuse (Sporrong et Lönnroth c. Suède, 23 septembre 1982, § 63, série A no 52, et Van Droogenbroeck c. Belgique, 24 juin 1982, § 38, série A no 50 ; voir également, mutatis mutandis, Airey c. Irlande, 9 octobre 1979, § 25, série A no 32).

38. A cet égard, elle relève que les effets de la situation litigieuse dénoncés par le requérant découlent tous des limitations apportées au droit de propriété et des conséquences de celles-ci sur la valeur de l’immeuble ; ils résultent donc tous de la restriction exercée sur la faculté de l’intéressé de disposer de son bien. Cela étant, la Cour note que, bien qu’il ait perdu de sa substance, le droit en cause n’a pas disparu. Les effets des mesures en question ne sont pas tels qu’on puisse les assimiler à une privation de propriété. Le requérant n’a perdu ni l’accès à son terrain ni la maîtrise de celui-ci et, en principe, la possibilité de vendre son bien, bien que rendue plus malaisée, a subsisté. Dans ces conditions, la Cour estime que la seconde phrase du premier alinéa de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce (Scordino c. Italie (no 2), no 36815/97, § 71, 15 juillet 2004, et Matos e Silva, Lda., et autres c. Portugal, 16 septembre 1996, § 85, Recueil des arrêts et décisions 1996‑IV).

39. En revanche, elle considère que la situation dénoncée par le requérant relève de la première phrase de l’article 1 du Protocole no 1 (Sporrong et Lönnroth, précité, § 65 ; Erkner et Hofauer c. Autriche, 23 avril 1987, § 74, série A no 117 ; Poiss c. Autriche, 23 avril 1987, § 64, série A no 117 ; Elia S.r.l. c. Italie, no 37710/97, § 57, CEDH 2001-IX ; Scordino (no 2), précité, § 73 ; Köktepe c. Turquie, no 35785/03, § 85, 22 juillet 2008 ; Hakan Arı c. Turquie, no 13331/07, § 37, 11 janvier 2011, et Ziya Çevik c. Turquie, no 19145/08, § 36, 21 juin 2011).

40. La Cour doit donc rechercher si un juste équilibre a été maintenu entre les exigences de l’intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux du requérant (Sporrong et Lönnroth, précité, § 69, et Phocas c. France, 23 avril 1996, § 53, Recueil 1996‑II).

41. Elle constate que le terrain n’était plus libre de toute contrainte depuis son affectation, en 1982, à un service public. Elle note également qu’avec le développement urbain il a perdu son caractère initial de prairie et qu’il a acquis la qualité de terrain constructible en 1991 (paragraphes 8 et 9 ci-dessus).

42. Or ce terrain, destiné à être exproprié, a été soumis à une interdiction de construire en vertu d’un plan d’urbanisme l’ayant affecté à l’édification d’une école. Cette interdiction a été maintenue de manière continue (paragraphe 24 ci-dessus).

43. La Cour rappelle avoir jugé que, dans un domaine aussi complexe et difficile que l’aménagement du territoire, les Etats contractants jouissaient d’une large marge d’appréciation pour mener leur politique urbanistique (Sporrong et Lönnroth, précité, § 69). Dans les circonstances de la cause, elle tient pour établi que l’ingérence dans l’exercice par le requérant de son droit au respect de ses biens répondait aux exigences de l’intérêt général. Néanmoins, elle ne saurait renoncer pour autant à exercer son pouvoir de contrôle.

44. Elle observe que, durant toute la période concernée, le requérant est resté dans une incertitude complète quant au sort de sa propriété. A la date du 20 mars 2013, l’intéressé n’était toujours pas exproprié de son bien.

45. La Cour estime que cet état des choses a entravé la pleine jouissance du droit de propriété du requérant, lequel ne peut ni construire sur un terrain doté du statut de terrain constructible ni même y planter des arbres. Cette situation a, de plus, eu des répercussions dommageables en ce qu’elle a, entre autres, considérablement affaibli les chances de l’intéressé de vendre son terrain.

46. Enfin, la Cour constate que le requérant n’a vu sa perte compensée par aucune indemnisation.

47. A la lumière de ces considérations, elle estime que le requérant a eu à supporter une charge spéciale et exorbitante qui a rompu le juste équilibre devant régner entre, d’une part, les exigences de l’intérêt général et, d’autre part, la sauvegarde du droit au respect de ses biens (Hakan Arı, précité, § 47 ; Ziya Çevik, précité, § 47 ; Sporrong et Lönnroth, précité, §§ 73 et 74 ; Erkner et Hofauer, précité, §§ 78 et 79 ; Elia, précité, § 83 ; Rossitto c. Italie, no 7977/03, § 45, 26 mai 2009 ; Skibińscy c. Pologne, no 52589/99, § 98, 14 novembre 2006 ; Skrzyński c. Pologne, no 38672/02, § 92, 6 septembre 2007 ; Rosiński c. Pologne, no 17373/02, § 89, 17 juillet 2007 ; Buczkiewicz c. Pologne, no 10446/03, § 77, 26 février 2008, et Pietrzak c. Pologne, no 38185/02, § 115, 8 janvier 2008).

48. Dès lors, la Cour conclut qu’il y a eu violation de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

49. Le requérant réclame 120 000 euros (EUR) pour dommage matériel. Il demande également que ce montant soit assorti d’intérêts moratoires. Il présente sa déclaration d’impôt foncier de 2013, dans laquelle il a indiqué comme valeur actuelle de son terrain 193 807,50 livres turques (soit environ 77 435 EUR). Au titre du dommage moral, il réclame 20 000 EUR. Le requérant demande également 5 000 EUR pour les honoraires de son représentant et 2 000 EUR pour les frais et dépens.

50. Le Gouvernement invite la Cour à rejeter les prétentions du requérant, qu’il juge excessives et dépourvues de fondement.

51. Dans les circonstances de l’espèce, la Cour estime que la question de l’application de l’article 41 ne se trouve pas en état, de sorte qu’il convient de la réserver en tenant compte de l’éventualité d’un accord entre l’Etat défendeur et le requérant.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention ;

3. Dit que la question de l’application de l’article 41 de la Convention ne se trouve pas en état ; en conséquence,

a) la réserve ;

b) invite le Gouvernement et le requérant à lui adresser par écrit, dans un délai de six mois à compter de la date de la notification du présent arrêt, leurs observations sur cette question et, notamment, à lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir ;

c) réserve la procédure ultérieure et délègue au président de la chambre le soin de la fixer au besoin.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 1er octobre 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Stanley NaismithGuido Raimondi
GreffierPrésident


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