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11/12/2012 | CEDH | N°001-115169

CEDH | CEDH, AFFAIRE SAMPANI ET AUTRES c. GRÈCE, 2012, 001-115169


PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE SAMPANI ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 59608/09)

ARRÊT

STRASBOURG

11 décembre 2012

DÉFINITIF

29/04/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Sampani et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Isabelle Berro-Lefèvre, présidente,
Anatoly Kovler,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova T

rajkovska,
Julia Laffranque,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Erik Møse, juges,
et de André Wampach, greffier adjoint de section,

Après en avoir déli...

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE SAMPANI ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 59608/09)

ARRÊT

STRASBOURG

11 décembre 2012

DÉFINITIF

29/04/2013

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Sampani et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Isabelle Berro-Lefèvre, présidente,
Anatoly Kovler,
Khanlar Hajiyev,
Mirjana Lazarova Trajkovska,
Julia Laffranque,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Erik Møse, juges,
et de André Wampach, greffier adjoint de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 20 novembre 2012,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 59608/09) dirigée contre la République hellénique et dont cent quarante ressortissants de cet Etat, dont les noms figurent en annexe (« les requérants »), ont saisi la Cour le 7 octobre 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants ont été représentés par le Greek Helsinki Monitor, une organisation non gouvernementale ayant son siège à Glyka Nera. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, Mme V. Pelekou, assesseure auprès du Conseil juridique de l’Etat, et M. I. Bakopoulos, auditeur auprès du Conseil juridique de l’Etat.

3. Devant la Cour, les requérants alléguaient en particulier une violation de l’article 14 de la Convention, combiné avec l’article 2 du Protocole no 1, et de l’article 13 de la Convention.

4. Le 25 mars 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond de l’affaire.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

A. L’évolution de la situation de l’école primaire d’Aspropyrgos depuis les faits de l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce du 5 juin 2008

5. Les requérants, tous d’origine rom, résidaient, à l’époque des faits, sur l’aire de Psari, près d’Aspropyrgos. Quatre-vingt-dix-huit requérants étaient des enfants âgés de cinq ans et demi à quinze ans scolarisables en 2008‑2009 et 2009-2010. Quarante-deux requérants sont des adultes, parents ou tuteurs des autres requérants. Les requérants appartiennent à trente-huit familles. Certains d’entre eux étaient requérants dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (no 32526/05, 5 juin 2008).

6. Les requérants se réfèrent aux circonstances de fait de cet arrêt pour la période allant jusqu’à octobre 2007 et notamment à ce qui suit :

« 29. Le 20 juin 2006, la 3e circonscription du Conseil éducatif de l’éducation primaire de l’Attique de l’Ouest adressa une lettre au directeur de la périphérie de l’Attique. Elle l’y informait que, pour l’année scolaire 2005-2006, cinquante-quatre élèves d’origine rom avaient été inscrits à la 10e école primaire d’Aspropyrgos. Elle précisait que « des classes préparatoires [avaient] été prévues pour les élèves d’origine rom, en vue d’assurer leur adaptation à l’environnement scolaire, compte tenu des déficiences dont ils souffr[aient] et de diverses autres raisons rendant impossible leur intégration dans les classes ordinaires ». Elle ajoutait que « malgré les progrès effectués par les élèves roms dans les classes préparatoires, l’ensemble des ces élèves n’[étaient] pas encore aptes à intégrer les classes ordinaires.

30. Le 5 avril 2007, les salles préfabriquées de la 10e école primaire furent incendiées par des inconnus. Il ressort du dossier qu’en septembre 2007 les deux salles ont été remplacées mais qu’en raison de problèmes d’infrastructure elles n’étaient pas opérationnelles. En septembre 2007 fut créée à Aspropyrgos une 12e école primaire, vers laquelle les enfants roms furent transférés. Il ressort du dossier qu’en octobre 2007 cette école n’était pas encore opérationnelle, en raison de problèmes d’infrastructure. Le Gouvernement allègue que la création de la 12e école primaire d’Aspropyrgos ne visait qu’à décongestionner la 10e école primaire. »

7. Par une décision no 10781/D4/2008 du 25 janvier 2008, publiée au Journal officiel du 30 janvier 2008, les ministres de l’Education et des Finances créèrent la 12e école primaire d’Aspropyrgos, qui était censée accueillir indistinctement des élèves roms et non roms.

8. Durant l’année scolaire 2007-2008, les enfants roms étaient encore scolarisés dans un bâtiment annexe au bâtiment principal de la 10e école. Pendant les vacances de Noël, les salles du bâtiment annexe furent endommagées. Le 8 janvier 2008, à la suite d’une plainte déposée par le directeur de l’école, la police assura qu’elle allait saisir le procureur.

9. Selon les informations fournies par la 12e école primaire, à la fin de l’année scolaire 2008, soixante élèves y étaient inscrits en début d’année, dix-huit avaient suivi les cours occasionnellement, neuf avaient fini l’année avec beaucoup d’absences et, à l’issue d’un test, trois d’entre eux avaient été considérés comme ayant l’âge et le niveau requis pour être intégrés dans des classes ordinaires.

10. Le 3 mars 2008, la mairie d’Aspropyrgos convoqua les directeurs des écoles primaires et les invita à redéfinir la carte scolaire et les zones de recrutement des écoles. Ceux-ci attribuèrent la même zone de recrutement aux 9e, 10e et 12e écoles.

11. Le 11 mars 2008, une réunion eut lieu à la 10e école, organisée par le médiateur, entre la direction de cette école, la préfecture, l’association des parents d’élèves (non roms) et le médiateur. Le but était de convaincre les parents d’élèves de renoncer à leur opposition à l’intégration des élèves roms dans des classes ordinaires. Toutefois, une intervention du maire d’Aspropyrgos ne permit pas à cette réunion d’aboutir et il ne fut pas possible non plus d’inscrire dans les classes ordinaires trois élèves roms qui avaient un niveau scolaire suffisant.

12. Le 8 avril 2008, la direction de l’éducation primaire de l’Attique de l’Ouest définit la zone de recrutement de chacune des douze écoles de la région. L’aire de Psari, où les requérants résidaient, fut rattachée à la 12e école.

13. Le 24 juin 2008, à la suite d’un rapport du comité chargé du contrôle de la conformité des bâtiments scolaires aux dispositions en vigueur, le préfet de l’Attique de l’Ouest décida d’utiliser provisoirement, pour les locaux de la 12e école, le bâtiment préfabriqué qui jouxtait la 10e école et qui avait servi, en 2005, à accueillir des classes de soutien.

14. Ces locaux de la 12e école subirent à nouveau des dégradations pendant les vacances d’été 2008 et tout le matériel fut dérobé.

15. Le 8 septembre 2008, le directeur de la 12e école rapporta en détail aux autorités régionales du ministère de l’Education les dommages causés au bâtiment et conclut que celui-ci n’était pas en état d’accueillir des élèves. Il affirma que l’état des installations ne permettait pas de couvrir les besoins élémentaires de l’école et mettrait en péril la sécurité des élèves et du personnel enseignant.

16. Toutefois, le 10 septembre 2008, à la veille de la rentrée scolaire, les familles roms furent informées que la 12e école ouvrirait ses portes, dans les locaux jouxtant la 10e.

17. Le 22 septembre 2008, une délégation de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) du Conseil de l’Europe se rendit en visite, entre autres, auprès de la communauté rom de Psari et à la 12e école.

18. Le 24 septembre et le 8 octobre 2008, les services du ministère de l’Education invitèrent le maire d’Aspropyrgos et le préfet de l’Attique de l’Ouest à autoriser la fusion de la 12e et de la 11e école, en attirant l’attention sur le fait que cette affaire était suivie par les institutions européennes à la suite de plaintes portées contre la Grèce.

19. Une lettre envoyée le 26 septembre 2008 au ministre de l’Education par le maire d’Aspropyrgos et les parents d’élèves non roms se lisait ainsi :

« La création de la 12e école primaire ne visait pas (...) à exercer une ségrégation entre les enfants roms et les autres élèves des écoles du district. Elle est cependant devenue une nécessité inévitable parce que des Tsiganes vivant dans des tentes ont choisi de vivre une vie nomade, dans des décharges qu’ils ont eux-mêmes créées, sans se soucier des standards élémentaires d’hygiène, et en s’adonnant à des activités illégales qui ont un impact négatif sur des groupes sociaux vulnérables ainsi que, de manière plus générale, sur les habitants d’Aspropyrgos. (...) En dépit de tout cela, [les enfants roms] osent exiger de partager les mêmes salles de classe que les autres élèves d’Aspropyrgos, dont un pourcentage considérable fait partie des groupes sociaux sensibles ou sont des enfants d’immigrés économiques (...) »

20. Le 17 octobre 2008, le préfet de l’Attique de l’Ouest refusa l’autorisation demandée (paragraphe 18 ci-dessus) au motif qu’il souhaitait éviter de créer des problèmes d’ordre social, culturel et éducatif. Il releva en outre que la 12e école était plus proche du lieu d’habitation des élèves roms que la 11e.

21. Le 8 décembre 2008, le médiateur de la République adressa au préfet de l’Attique de l’Ouest une lettre l’incitant à revenir sur sa décision du 17 octobre 2008. Il précisait entre autres ce qui suit :

« La 12e école d’Aspropyrgos a une histoire d’incendies volontaires et de vandalismes qu’il est inutile de vous rappeler. On souhaiterait cependant attirer votre attention sur l’état de cette école tel qu’il a été décrit dans la lettre du 8 septembre 2008 envoyée par le directeur de cette école au chef du 1er bureau de l’éducation régionale de l’Attique de l’Ouest, car ce document ne vous a pas été soumis avant que vous preniez votre décision.

L’aspect sombre des installations comprend entre autres : s’agissant de la cour de l’école : la clôture à certains endroits peut être dangereuse pour les enfants. De plus, les balançoires et les paniers de basket sont détruits. S’agissant des toilettes : il n’existe pas actuellement de toilettes en état de fonctionnement dans l’école. Elles ont été toutes pillées : les robinets, les luminaires, les câbles, les poignées de porte et une partie de porte ont été volés. S’agissant des salles de cours : les portes, les fenêtres, les câbles, le tableau électrique, les luminaires, les bancs et les chaises ont été volés. Il n’y a plus aucun appareil de refroidissement de l’air ou de chauffage. S’agissant de la salle des professeurs : tout ce qui existait dans cette salle a été dérobé.

A la lumière de ce qui précède, je considère que les installations de la 12e école primaire d’Aspropyrgos, telles qu’elles se présentent aujourd’hui, ne sont pas en mesure de couvrir même de manière élémentaire les besoins d’une unité scolaire et qu’elles mettent en danger la sécurité des élèves et du personnel enseignant. »

22. Le médiateur souligna que, en dépit du fait que la zone de recrutement de la 12e école englobait une population scolaire importante, tous les élèves inscrits pour l’année 2008-2009 appartenaient à la communauté rom, alors que le décret présidentiel no 201/1998 disposait qu’il était obligatoire de transférer tous les élèves résidant dans la zone de recrutement d’une école à l’école en cause et que le transfert devait s’effectuer même en l’absence de demande des parents. Le médiateur reconnaissait que la préfecture n’était pas responsable de la non-application du décret mais il incitait celle-ci à prendre en considération, dans l’exercice de ses fonctions, le fait que la non-application du décret avait eu pour effet de transformer la 12e école en une « école ghetto », compte tenu du fait qu’aucun élève non rom de la région n’y était inscrit.

23. Le médiateur rappela également que le ministère de l’Education était favorable à l’intégration des élèves roms dans le système éducatif ordinaire et qu’une circulaire du 10 septembre 2008, intitulée « Inscription et scolarité des Roms » recommandait que, dans chaque classe, le pourcentage d’élèves d’une autre culture ne dépassât pas 50 %.

24. Le médiateur affirma qu’il existait des problèmes d’intolérance de la part de la population non rom et que l’association des parents d’élèves avait créé des problèmes en 2005. Il reconnut que l’annexe de la 10e école, rebaptisée 12e école, avait été créée sous la pression des incidents qui avaient été provoqués par les parents d’élèves non roms et qui avaient conduit à la condamnation de la Grèce dans l’arrêt de la Cour Sampanis et autres (précité). Il souligna que le maintien de la décision refusant d’autoriser la fusion de la 12e et de la 11e école constituait une discrimination injustifiée à l’égard des élèves roms, car il les empêchait de se fondre dans l’environnement culturel de la région et était motivé uniquement par le souci du préfet d’éviter de nouveaux incidents, cette fois de la part des parents d’élèves de la 11e école.

25. Le 17 mars 2009, le directeur de la 12e école écrivit au maire d’Aspropyrgos, l’invitant à équiper d’eau courante le camp de Roms, car, selon lui, l’absence d’installations influait négativement sur la santé et la propreté des élèves, et par conséquent sur leur capacité à poursuivre leur scolarité. Par une réponse du 31 mars 2009, le maire rejeta la demande au motif que les propriétaires du terrain sur lequel les Roms étaient installés essayaient d’obtenir l’expulsion de ceux-ci et l’avaient menacé de poursuites s’il accueillait la demande en question.

26. Le 30 mai et le 20 juillet 2009, les requérants adressèrent deux lettres aux services compétents du ministère de l’Education et au ministre lui-même, les invitant à autoriser les enfants roms à fréquenter la 10e école et à établir pour eux un programme d’études qui aurait été conçu pour les Roms musulmans de Thrace et qui se serait révélé efficace. Ils ne reçurent aucune réponse.

27. Le 11 juin 2009, le directeur de la 12e école informa les services du ministère de l’Education que les livres scolaires étaient inappropriés pour les Roms dont la langue maternelle n’était pas le grec.

28. Le 23 juillet 2009, le médiateur écrivit à nouveau au ministère de l’Education. Il informait celui-ci que le préfet, qui avait, le 17 octobre 2008, refusé d’autoriser la fusion des 12e et 11e écoles, ne souhaitait pas revenir sur cette décision. Il soulignait que le fonctionnement de cette école ghetto réservée aux élèves roms était contraire à la position du ministère, défavorable aux écoles « exclusivement réservées aux élèves tsiganes ». Il se prévalait de la lettre du 8 septembre 2008 du directeur de la 12e école, selon laquelle l’état des installations n’aurait pas permis de couvrir les besoins élémentaires d’une école et aurait mis en péril la sécurité des élèves et du personnel enseignant. Il ajoutait que les besoins ne pouvaient pas être satisfaits par la mairie d’Aspropyrgos qui aurait ouvertement déclaré, le 26 septembre 2008, que les enfants roms « os[aient] exiger de partager les mêmes salles de classe que les autres élèves d’Aspropyrgos ». Il soulignait que le maire avait ignoré une invitation des autorités régionales du ministère à « faire le nécessaire pour la remise en état immédiate » de la 12e école. Il attirait l’attention sur le fait que la Grèce était « sous contrôle » dans le cadre de l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres et qu’elle n’avait pas fait jusqu’alors preuve de progrès à ce sujet.

29. Le 1er août 2009, les requérants portèrent plainte avec constitution de partie civile contre les directions de la 10e et de la 12e école pour manquement aux devoirs de la fonction. L’examen de la plainte était encore pendant à la date du dépôt à la Cour, le 10 octobre 2011, de leurs observations en réponse à celles du Gouvernement.

30. Il ressort des pièces du dossier que, entre octobre 2008 et juin 2009, le directeur de la 12e école a envoyé plusieurs lettres aux autorités régionales de l’éducation, au préfet et au maire d’Aspropyrgos pour les alerter sur les carences auxquelles l’école aurait fait face, notamment en ce qui concernait l’itinéraire du bus scolaire affecté à l’école, la construction d’un préau, l’installation du chauffage et de toilettes supplémentaires, la construction de deux salles de classe supplémentaires, la création d’un jardin d’enfants et l’abandon des cours par certains élèves à partir d’avril 2009.

B. Situation générale de la 12e école d’Aspropyrgos

1. Thèse du Gouvernement

31. Selon le Gouvernement, le bâtiment préfabriqué dans lequel la 12e école avait été installée disposait de quatre salles de cours, d’un bureau des enseignants, de quatre toilettes, de deux salles de douches, d’une cantine et d’une cour aménagée. Trois classes auraient été créées alors que la capacité officielle de l’école aurait été de six classes. Il ressortirait d’un document établi par le ministère de l’Education le 12 juillet 2011 et versé au dossier par le Gouvernement que, pendant la période de fonctionnement de la 12e école (2008-2011), deux élèves avaient obtenu leur diplôme de fin d’études primaires.

32. A partir de 2009, l’école aurait disposé d’un fax, d’un photocopieur, d’un ordinateur et d’une bibliothèque. Il y aurait eu cinq enseignants : quatre instituteurs et un professeur de gymnastique. Le nombre d’élèves inscrits à l’époque des faits (2008-2009) aurait été de 226. La scolarité des élèves aurait été irrégulière, le nombre de présents variant de trente à soixante par jour en raison du mode de vie des familles de ces élèves, fréquemment en déplacement pour des travaux saisonniers.

33. Le fait que l’ensemble des élèves de la 12e école était d’origine rom aurait été dû à l’attitude de la société locale et non pas à l’Etat grec. Le ministère de l’Education aurait demandé à la direction de l’école de procéder à l’inscription immédiate des enfants non roms dont le domicile se situait dans la zone de recrutement de cette école, et ce même en l’absence de demande de la part des parents concernés, mais l’on aurait constaté que ces enfants étaient déjà inscrits dans d’autres écoles, publiques ou privées.

2. Thèse des requérants

34. Se fondant sur des documents officiels versés au dossier, les requérants contestent plusieurs des affirmations du Gouvernement, notamment celles relatives à la configuration et à la superficie de l’école ainsi qu’au nombre de classes en service. Selon leur version, l’extension de l’école à sa taille actuelle avait eu lieu en décembre 2009, mais sa capacité était encore insuffisante pour les 200 élèves environ qui y auraient été inscrits. Par une lettre du 29 septembre 2009, le directeur de la 12e école aurait informé les autorités compétentes du ministère de l’Education que seulement deux enseignants débutants, sans aucune expérience, étaient affectés à l’école. Or, selon les requérants qui se réfèrent à une décision ministérielle du 25 septembre 2006, l’école aurait dû être pourvue, en plus du directeur, d’au moins quatre enseignants pour l’année scolaire 2008-2009 pour le nombre de 226 élèves qu’aurait fourni le Gouvernement et qui serait inexact.

35. L’absentéisme scolaire des élèves roms aurait été dû à l’emplacement de l’arrêt de bus, situé loin de l’école, et à l’impossibilité pour les enfants roms de marcher dans le froid et sous la pluie sans vêtements adaptés. Ceux-ci auraient dû en plus traverser le quartier dans lequel s’étaient déroulés en 2004-2005 les incidents racistes à l’origine de la création de l’annexe préfabriquée de la 10e école réservée aux élèves roms.

36. Toujours selon les requérants, à la suite de la fixation de la carte scolaire, en avril 2008, la direction de la 10e école aurait dû fournir à la 12e école les noms des élèves scolarisés dans la 10e et qui, d’après la nouvelle délimitation, devaient être transférés à la 12e pour l’année scolaire 2008-2009. Les intéressés précisent que, si ce transfert avait eu lieu, la 12e école aurait eu dès le début de son fonctionnement des centaines d’élèves non roms en plus des élèves roms, et aurait ainsi été une école ordinaire. Cela ne se serait jamais produit, car la nouvelle école aurait été conçue pour fonctionner seulement avec des élèves roms.

C. Situation individuelle des élèves requérants

1. Thèse du Gouvernement

a) Année scolaire 2008/2009

37. Selon le Gouvernement, les requérants Zografo Sampani, Andreas Sampanis, Georgia Sampani, Ioanna Sampani et Thomas Christakis avaient une scolarité qualifiée de « suffisante » du point de vue de leur participation aux cours.

38. Les requérants Ioannis Sampanis, Christos Sampanis, Kyprianos Velios, Christina Veliou, Panayotis Liakopoulos, Kyriakos Sampanis, Panayota Passiou, Ekias Bantis, Ako Passiou, Kyriaki Karahaliou, Vasilios Sampanis, Maria Sampani, Ako Sampani, Giannoula Sampani, Nikolaos Mouratis, Ako Tsakiris, Ako Tsakiri et Antonios Karagounis auraient eu une scolarité qualifiée d’« occasionnelle » : ils se seraient rendus en classe de temps à autre, de sorte que leur scolarité aurait été interrompue par de longues périodes d’absence.

39. Les autres enfants requérants, soit 75 enfants sur 98, n’auraient pas été inscrits à l’école et n’auraient pas eu la qualité d’élève de la 12e école.

b) Année scolaire 2009/2010

40. Sur l’intervention du Greek Helsinki Monitor et de son directeur exécutif agissant en sa qualité de représentant des parents, la 12e école aurait procédé à l’inscription de l’ensemble des enfants requérants, à l’exception d’Ako Sampani, de Vasiliki Sampani, d’Ako Pasios et de Paraskevi Sampani. Cette dernière avait achevé son cycle primaire en 2008 dans une école autre que la 12e école d’Aspropyrgos. Parmi les élèves inscrits, 59 auraient abandonné l’école en cours d’année. La scolarité des 35 autres aurait été occasionnelle.

2. Thèse des requérants

41. En premier lieu, les requérants allèguent que la divulgation par le Gouvernement des éléments ci-dessus les concernant personnellement constitue une violation de la loi no 2472/1997 relative à la protection des données personnelles, et de l’article 8 de la Convention.

42. En deuxième lieu, ils indiquent que ces éléments ne sont pas fiables : les termes employés par le Gouvernement, tels que scolarité « suffisante » et « occasionnelle », seraient vagues, ce qui indiquerait que les autorités de la 12e école n’avaient pas un aperçu précis de la scolarité des requérants mais qu’elles se fondaient sur des impressions. De plus, les informations fournies par le Gouvernement quant à certains des élèves requérants auraient contredit celles produites par le Gouvernement dans le cadre de l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (précité).

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

43. Les articles pertinents en l’espèce du décret législatif no 18/1989 sur la codification des dispositions des lois sur le Conseil d’Etat se lisent comme suit :

Article 45

Actes incriminés

« 1. Le recours en annulation pour excès de pouvoir ou violation de la loi est recevable uniquement contre les actes exécutoires des autorités administratives et des personnes morales de droit public qui ne sont susceptibles de recours devant aucune autre juridiction.

(...)

4. Dans les cas où la loi impose à une autorité de régler une question déterminée en édictant un acte exécutoire soumis aux dispositions du paragraphe 1, le recours en annulation est recevable même contre la carence de cette autorité à édicter un tel acte.

L’autorité est présumée refuser d’édicter l’acte soit lorsque le délai spécial fixé le cas échéant par la loi arrive à expiration, soit après l’écoulement d’un délai de trois mois à partir du dépôt de la requête auprès de l’administration, qui est tenue de délivrer un accusé de réception (...) indiquant le jour dudit dépôt. Le recours en annulation exercé avant l’expiration des délais susmentionnés est irrecevable.

Le recours en annulation valablement introduit contre un refus implicite [de l’administration] vaut également recours contre l’acte négatif qui serait, le cas échéant, adopté ultérieurement par l’administration ; toutefois, cet acte peut aussi être attaqué séparément. »

Article 48

« Les moyens d’un recours en annulation sont :

1. l’incompétence de l’autorité administrative ayant émis l’acte administratif ;

2. le vice de forme ;

3. l’excès de pouvoir ;

4. le détournement de pouvoir, lorsque l’acte administratif possède tous les éléments de la légalité, mais vise un autre but que celui pour lequel il a été adopté. »

III. LES TEXTES INTERNATIONAUX

A. La Résolution CM/ResDH(2011)119, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 14 septembre 2011 lors de la 1120e réunion des délégués des Ministres

44. En surveillant l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres précité, le Comité des Ministres a adopté la Résolution qui clôturait l’examen de l’affaire dans les termes suivants :

« Le Comité des Ministres, en vertu de l’article 46, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui prévoit que le Comité surveille l’exécution des arrêts définitifs de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après nommées « la Convention » et « la Cour ») ;

Vu l’arrêt transmis par la Cour au Comité une fois définitif ;

Rappelant que les violations de la Convention constatées par la Cour dans cette affaire concernent la non-scolarisation des enfants des requérants d’origine rom, puis leur scolarisation dans des classes préparatoires spéciales, ainsi que le défaut de recours effectif pour obtenir un redressement à cet égard (violation de l’article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 et violation de l’article 13) (voir détails dans l’Annexe) ;

Ayant invité le gouvernement de l’Etat défendeur à l’informer des mesures qu’il a prises pour se conformer à l’arrêt de la Cour en vertu de l’obligation qui lui incombe au regard de l’article 46, paragraphe 1, de la Convention ;

Ayant examiné les informations transmises par le gouvernement conformément aux Règles du Comité pour l’application de l’article 46, paragraphe 2, de la Convention ;

S’étant assuré que, dans le délai imparti, l’Etat défendeur a versé à la partie requérante, la satisfaction équitable prévue dans l’arrêt (voir détails dans l’Annexe),

Rappelant que les constats de violation par la Cour exigent, outre le paiement de la satisfaction équitable octroyée par la Cour dans ses arrêts, l’adoption par l’Etat défendeur, si nécessaire :

– de mesures individuelles mettant fin aux violations et en effaçant les conséquences, si possible par restitutio in integrum ; et

– de mesures générales, permettant de prévenir des violations semblables ;

Rappelant que les décisions du Comité des Ministres en vertu de l’article 46, paragraphe 2 de la Convention ne préjugent en rien l’examen par la Cour d’autres affaires actuellement pendantes devant elle ;

Déclare, après avoir examiné les mesures prises par l’Etat défendeur (voir Annexe), qu’il a rempli ses fonctions en vertu de l’article 46, paragraphe 2, de la Convention dans la présente affaire et

Décide d’en clore l’examen.

Annexe à la Résolution CM/ResDH(2011)119

Informations sur les mesures prises afin de se conformer à l’arrêt dans l’affaire Sampanis et autres c. Grèce

Résumé introductif de l’affaire

L’affaire concerne la non-scolarisation des enfants des requérants pour l’année scolaire 2004-2005, puis leur scolarisation, en 2005, dans des classes préparatoires spéciales. En particulier, la Cour a conclu qu’en dépit de la volonté des autorités de scolariser les enfants roms, les modalités d’inscription de ces enfants à l’école et leur affectation dans des classes préparatoires spéciales – dans une annexe au bâtiment principal de l’école – ont en définitive eu pour résultat de les discriminer (violation de l’article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole no 1). L’affaire concerne également l’absence de recours effectif pour obtenir un redressement à cet égard. En particulier, la Cour a noté que le gouvernement grec n’avait produit aucun exemple jurisprudentiel propre à démontrer que l’utilisation d’un tel recours aurait pu entraîner l’annulation de l’omission alléguée de l’administration de procéder à l’inscription des enfants (violation de l’article 13).

S’agissant de la non-scolarisation des enfants en 2004-2005, la Cour a noté que le droit grec reconnaît la particularité de la situation des Roms, en facilitant la procédure d’inscription de leurs enfants à l’école. Dans le cas d’espèce, les autorités auraient dû reconnaître la particularité de la situation de la communauté rom et faciliter l’inscription à l’école primaire. Or, même si les autorités n’ont pas explicitement refusé d’inscrire les enfants, elles ont omis d’y procéder, en dépit de la volonté explicite des parents de les scolariser, manifestée auprès des autorités scolaires compétentes.

Quant aux classes préparatoires spéciales situées dans une annexe de la 10e école primaire d’Aspropyrgos, dans lesquelles les enfants des requérants avaient été placés en 2005, la Cour a estimé que les autorités compétentes ne s’étaient pas fondées sur un critère unique et clair pour le placement des enfants. Elle a noté en particulier que les autorités n’avaient pas fait état de tests adéquats auxquels les enfants concernés auraient été soumis aux fins d’évaluation de leurs aptitudes ou de leurs difficultés éventuelles d’apprentissage. En outre, bien que l’objectif affiché de ces classes fût que les élèves concernés se retrouvent à niveau pour intégrer en temps utile les classes ordinaires, aucun exemple d’élève n’a été cité (parmi les 50 élèves concernés) qui aurait intégré les classes ordinaires de l’école primaire d’Aspropyrgos. De surcroît, il n’avait pas été établi qu’il existait des tests d’évaluation auxquels les élèves roms auraient dû être périodiquement soumis pour permettre aux autorités scolaires d’apprécier leur aptitude à intégrer les classes ordinaires, sur la base de données objectives et non d’évaluations approximatives.

I. Paiement de la satisfaction équitable et mesures individuelles

(...)

b) Mesures individuelles

Les classes préparatoires spéciales situées dans une annexe de la 10e école primaire d’Aspropyrgos ont été supprimées.

Les autorités grecques ont adopté des mesures pour faciliter l’inscription des enfants des requérants dans une école ordinaire à la suite de l’arrêt de la Cour. Une nouvelle école primaire ordinaire (la 12e école primaire d’Aspropyrgos) a été créée en vertu de la décision ministérielle no10781/D4/2008. L’école qui est censée accueillir tant des enfants roms que des enfants non roms, couvre le secteur dans lequel réside essentiellement la communauté rom d’Aspropyrgos. Ces mesures étaient ainsi destinées à assurer la scolarisation des enfants des requérants dans une école ordinaire.

A la suite de l’arrêt de la Cour, presque tous les enfants des requérants ont été inscrits dans la 12e école primaire d’Aspropyrgos. Toutefois, ils ne se sont pas rendus régulièrement à l’école. Trois enfants ont atteint l’âge à partir duquel la scolarisation n’est plus obligatoire. Par ailleurs, les parents n’ont pas inscrit quatre autres enfants à l’école tandis qu’un enfant avait déjà achevé sa scolarité dans une autre école primaire.

II. Mesures générales

1) Concernant la violation de l’article 14 combiné avec l’article 2 du Protocole no 1

Les autorités grecques ont fourni de nombreuses informations dans le cadre de leur plan d’action consolidé (DH‑DD(2011)52) ainsi que des informations supplémentaires par la suite. Ces informations sont résumées ci-dessous :

Mesures concernant l’inscription et la scolarisation des enfants roms

Des mesures spécifiques ont été adoptées pour faciliter l’inscription des élèves roms à l’école primaire. Contrairement aux autres élèves, les enfants roms sont inscrits en primaire selon une procédure simplifiée sur la base d’une simple déclaration, sans qu’il soit nécessaire de fournir des certificats. Les autorités ont publié plusieurs circulaires visant à donner des instructions aux administrations des écoles sur l’inscription simplifiée des enfants roms et à contrôler que ces derniers suivent régulièrement les cours (nos F.1.T.Y./1073/117052/G1/23-9-2009, F.3/960/102679/G1/20-8-2010, 114893/G2/14-9-2010).

Les autorités grecques ont également adopté un certain nombre de mesures pour intégrer les enfants roms dans l’éducation nationale et mettre fin à la discrimination dont ils font l’objet dans ce domaine. Ces mesures incluent en particulier la mise en place d’une nouvelle politique d’éducation fondée sur le modèle français des « Zones d’éducation prioritaire ». Ces zones – y compris dans la région d’Aspropyrgos – visent à renforcer l’intégration des groupes sociaux les plus vulnérables (Roms, migrants, etc.) par le biais de plusieurs actions et au moyen de l’éducation (décision ministérielle AF.821/3412P/157476/Z1/31-12/2010). Par ailleurs, la campagne de sensibilisation Dosta ! promue par le Conseil de l’Europe et visant à combattre les stéréotypes et les préjugés concernant les Roms a également été lancée en Grèce par le ministère de l’Education en février 2011. La campagne grecque se concentre sur l’enseignement primaire et secondaire.

En outre, les autorités ont lancé, à partir de l’année scolaire 2010-2011, un programme spécifique en faveur de l’adhésion active des enfants roms à l’éducation nationale, qui sera mis en œuvre par deux grandes universités grecques. Conformément audit programme, les autorités ont mis en place des médiateurs spéciaux parlant couramment le romani, afin qu’ils aident les familles roms pour la scolarité de leurs enfants. Elles ont ainsi recruté 15 médiateurs dans la région de l’Attique, dont un dans la région d’Aspropyrgos. Le Conseil de l’Europe est en train d’organiser un certain nombre de formations à leur intention dans le cadre de son programme de formation européen pour les médiateurs roms (ROMED). Conformément au programme « Education pour les enfants roms », les autorités ont également mis en place des travailleurs sociaux chargés d’apporter un soutien psychologique aux familles roms. L’une des tâches des travailleurs sociaux est de se rendre dans les écoles comprenant des élèves roms et dans les campements roms afin d’identifier les enfants roms qui devraient aller à l’école et d’inciter leurs parents à les y envoyer. Un soutien scolaire est proposé aux enfants roms ayant des difficultés d’apprentissage, par le biais d’activités extrascolaires de soutien (cours supplémentaires et activités scolaires renforcées), y compris dans la région d’Aspropyrgos. Les autorités ont également dispensé des formations spéciales sur l’éducation interculturelle aux enseignants. Au début de l’année 2011, le ministère de l’Education a créé un Comité consultatif pour le programme « Education pour les enfants roms » qui joue un rôle consultatif sur les questions pertinentes mais aussi un rôle de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre et de l’avancement du programme « Education pour les enfants roms ». Ce comité comprend des représentants du Conseil de l’Europe, de la Commission européenne, de l’OSCE/BIDDH et d’autres acteurs majeurs.

Les autorités grecques ont également créé trois centres éducatifs pour l’éducation des adultes – l’Institut de formation continue pour adultes, le Centre de formation pour adultes et l’Ecole des parents. Les personnes d’origine rom peuvent y participer dès l’âge de 15 ans.

Enfin, les autorités grecques ont régulièrement fourni des informations sur les mesures prises visant à améliorer les installations et les conditions de travail de la 12e école primaire d’Aspropyrgos, tout en notant que les questions liées au fonctionnement de ladite école sont à présent examinées par la Cour européenne dans le cadre d’une nouvelle requête (requête no 59608/09, communiquée aux autorités le 11/04/2011).

2) Concernant la violation de l’article 13 relative à l’omission des autorités d’inscrire les enfants des requérants

Les autorités grecques ont indiqué que les actes ou omissions des autorités scolaires sont en fait des actes administratifs. Ces derniers peuvent être contestés dans le cadre d’une procédure administrative (devant les cours administratives d’appel en première instance et devant le Conseil d’Etat en seconde instance). Dans la présente affaire, la Cour a conclu à une violation du fait de l’absence de recours effectif, les autorités n’ayant pu produire des exemples jurisprudentiels dans un contexte similaire. Ces dernières indiquent qu’une telle jurisprudence ad hoc n’existe pas encore. Toutefois, les tribunaux internes ont jugé dans une série de décisions rendues après l’arrêt de la Cour, que la cour administrative d’appel était compétente pour examiner les requêtes tendant à l’annulation des actes administratifs pris en application de la législation sur l’éducation (par exemple, décisions des autorités scolaires ordonnant le changement d’environnement scolaire de certains élèves suite à leur conduite ; décision de non-inscription suite à une interruption des études ; décision de ne pas accepter un élève à un degré précis du collège suite aux examens de qualification). »

B. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance

45. Le rapport de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) sur la Grèce, adopté le 2 avril 2009 et publié le 15 septembre 2009, précisait ce qui suit :

« 52. Dans son troisième rapport, l’ECRI a vivement recommandé aux autorités grecques de promouvoir l’égalité des chances en matière d’accès à l’éducation des enfants de groupes minoritaires en organisant notamment des cours de grec, des cours de rattrapage et en assurant l’accès de ces enfants à un enseignement dispensé dans leur langue maternelle.

53. L’ECRI note avec préoccupation que les Roms continuent d’être défavorisés en matière d’éducation. Certaines écoles refusent toujours d’inscrire des enfants roms, ce qui peut parfois s’expliquer par la pression exercée par les parents d’élèves non roms. L’ECRI est profondément préoccupée par le fait que dans certains cas, les enfants roms sont séparés des autres enfants, au sein de l’établissement même ou à proximité. Dans un cas, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la Grèce avait violé l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme (interdiction de la discrimination dans la jouissance des droits énoncés dans la Convention) pris ensemble avec l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention européenne des droits de l’homme (droit à l’éducation). L’ECRI a appris qu’à Spata, où des enfants roms s’étaient tout d’abord vu refuser l’inscription à l’école, une classe séparée a été créée pour les accueillir afin de leur permettre de s’adapter progressivement à l’environnement scolaire. Tout en étant consciente de la nécessité d’une intégration progressive dans le système scolaire, l’ECRI voudrait attirer l’attention des autorités grecques sur son point de vue sur cette question, tel qu’énoncé dans sa Recommandation de politique générale no 10 sur le racisme et la discrimination raciale dans et à travers l’éducation scolaire. Dans cette recommandation de politique générale, elle recommande la création, dans des cas particuliers et limités dans le temps, de classes préparatoires pour les élèves issus de groupes minoritaires, si un tel besoin est justifié par des critères objectifs et raisonnables et si l’intérêt supérieur de l’enfant le commande.

54. Comme les autorités grecques l’ont elles-mêmes relevé et comme l’Ombudsman l’a confirmé, le taux d’abandon scolaire parmi les élèves roms est très élevé. Les autorités ont signalé que des programmes spéciaux prévoyant un soutien psychologique et une aide sociale, y compris une éducation interculturelle, avaient été mis sur pied pour traiter ce problème. Toutefois, en l’absence de données ventilées sur la situation des élèves roms, il est difficile de procéder à une évaluation approfondie et de concevoir des programmes visant spécifiquement ce groupe. A ce sujet, l’ECRI voudrait attirer l’attention des autorités grecques sur sa Recommandation de politique générale no 10 sur la lutte contre le racisme et la discrimination raciale dans et à travers l’éducation scolaire, dans laquelle elle recommande que soient effectuées, en collaboration avec la société civile, des études sur la situation des enfants issus de groupes minoritaires dans le système scolaire en recueillant des données statistiques sur : 1) leur taux de fréquentation et de réussite ; 2) leur taux d’abandon ; 3) leurs résultats scolaires et 4) leurs progrès. Dans cette Recommandation de politique générale, l’ECRI recommande aux Etats membres de collecter les informations nécessaires pour prendre la mesure des problèmes auxquels sont confrontés les élèves issus de groupes minoritaires dans le domaine de l’éducation scolaire en vue de mettre en place des politiques pour résoudre ces problèmes.

55. Les autorités ont fait savoir qu’un programme, cofinancé par l’Union européenne et l’Etat grec, traite des questions telles que des cours de rattrapage de grec, de mathématiques et d’histoire pour les enfants roms et prévoit en outre la formation continue des enseignants. L’ECRI a toutefois été informée des besoins en classes préparatoires pour les élèves roms et en professeurs formés de manière adéquate. Cela est d’autant plus nécessaire que les avantages qui en découlent pour les enfants roms sont significatifs. L’éducation est l’un des objectifs du Programme d’action intégré pour l’insertion sociale des Roms adopté en 2002. Cependant, davantage de mesures doivent être adoptées afin, notamment, que les difficultés rencontrées par les Roms dans le domaine de l’éducation soient traitées dans le cadre de ce programme. Une commission interministérielle coordonne, au sein du ministère de l’Intérieur, les activités de tous les ministères qui participent à l’application du Programme d’action intégré pour l’insertion sociale des Roms. Il est d’une importance cruciale que tous les ministères concernés travaillent de concert, dans la mesure où la situation des enfants roms dans le système scolaire est inextricablement liée à leur situation socio-économique, y compris leurs conditions de logement et le taux élevé de chômage de leurs parents.

56. L’ECRI exhorte les autorités grecques à renforcer les mesures prises pour faire face aux difficultés que les enfants roms rencontrent dans le domaine de l’éducation, notamment l’exclusion, la discrimination et le faible taux de réussite, conformément à, entre autres, l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme sur la question et sa Recommandation de politique générale no 10 sur la lutte contre le racisme et la discrimination raciale dans et à travers l’éducation scolaire. Elle leur recommande en outre d’adopter une démarche globale pour traiter ces difficultés, notamment par l’intermédiaire de la commission interministérielle sur les questions roms. »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION COMBINÉ AVEC L’ARTICLE 2 DU PROTOCOLE No 1 À LA CONVENTION

46. Les requérants se plaignent d’une discrimination du fait des conditions de leur scolarisation pendant les années scolaires 2008-2009 et 2009-2010 : ils auraient été scolarisés dans une école installée dans un bâtiment préfabriqué, fréquentée uniquement par les enfants de leur communauté et offrant un niveau d’études inférieur à celui des autres écoles. Ils dénoncent une violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention. Ces dispositions sont ainsi libellées :

Article 14 de la Convention

« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (...) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

Article 2 du Protocole no 1

« Nul ne peut se voir refuser le droit à l’instruction. L’Etat, dans l’exercice des fonctions qu’il assumera dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, respectera le droit des parents d’assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques. »

A. Sur la recevabilité

1. Non-respect du délai de six mois

47. Le Gouvernement excipe du non-respect du délai de six mois, car la requête aurait été introduite plus de six mois après l’adoption des actes fixant la situation dont se plaignent les requérants : la décision de la direction de l’éducation primaire de l’Attique de l’Ouest, du 10 avril 2008, qui a établi la carte scolaire de la région, l’arrêté préfectoral du 24 juin 2008, qui a approuvé le fonctionnement de la 12e école dans le bâtiment préfabriqué jouxtant la 10e école, et l’arrêté préfectoral du 17 octobre 2007, qui a rejeté la proposition du département régional de l’éducation d’intégrer la 12e école dans les bâtiments de la 11e école. De plus, le Gouvernement soutient que, la requête ayant été introduite le 7 octobre 2009, l’année scolaire 2009-2010, qui aurait débuté en septembre 2009 et se serait achevée en juin 2010, ne peut pas faire l’objet de l’examen de la présente requête.

48. Les requérants indiquent que ces actes ne comportent en eux-mêmes rien de discriminatoire. Pourtant, la situation litigieuse constituerait une situation continue, car, selon les requérants, les autorités auraient pu prendre à tout moment, et notamment au début de chaque année scolaire, des mesures de nature à leur offrir un enseignement adéquat et conforme aux exigences de l’article 14 de la Convention et de l’article 2 du Protocole no 1.

49. La Cour rappelle que les requérants se plaignent des conditions de leur scolarité pendant les années scolaires 2008-2009 et 2009-2010. Elle note qu’ils ont saisi la Cour le 7 octobre 2009, alors que la deuxième année scolaire venait de commencer en soutenant que pendant cette année scolaire, les problèmes dont ils se plaignent se poursuivaient et ont persisté et que les autorités n’ont pas pris de mesures pour y remédier. Partant, il convient d’écarter cette exception préliminaire.

2. Défaut de qualité de « victime »

50. Le Gouvernement soutient, d’une part, que, à l’exception de Zografo Sampani, Andreas Sampanis, Georgia Sampani, Ioanna Sampani et Thomas Christakis qui auraient bénéficié d’une scolarité qualifiée de « suffisante », les élèves requérants n’ont suivi aucune scolarité, soit parce qu’ils n’auraient pas été inscrits à l’école, soit parce que, en dépit de leur inscription, ils auraient cessé les cours et qu’ils ne seraient donc pas en mesure de se plaindre de mauvaises conditions d’une scolarité qu’ils n’auraient jamais suivie.

51. D’autre part, le Gouvernement soutient que, dans la mesure où les 98 élèves ont saisi la Cour, il n’y avait plus lieu pour les 42 adultes exerçant l’autorité parentale sur ces requérants de saisir eux aussi la Cour.

52. Les requérants soutiennent que 98 d’entre eux ont été privés d’accès à un enseignement primaire en raison de la transformation de l’annexe de la 10e école en, selon eux, une école ghetto, dévaluée, sous-équipée et manquant de personnel. La question de savoir s’ils ont ou non suivi les cours n’aurait pas d’importance car même ceux d’entre eux qui les ont suivis n’auraient pas reçu un enseignement correspondant à celui d’une école ordinaire permettant aux élèves de passer d’une classe à l’autre.

53. La Cour, considérant que l’objection du Gouvernement est étroitement liée à la substance du grief énoncé par les requérants sur le terrain de l’article 14 de la Convention et de l’article 2 du Protocole no 1, décide de la joindre au fond.

54. Quant à la distinction faite par le Gouvernement entre requérants mineurs et requérants adultes, la Cour la considère comme non pertinente en l’espèce. En effet, elle a reconnu la qualité de « victime » tant à des requérants mineurs placés dans des situations similaires à celles des requérants de l’espèce, dans les arrêts D.H. et autres c. République tchèque ([GC], no 57325/00, CEDH 2007-XII), et Oršuš et autres c. Croatie ([GC], no 15766/03, 16 mars 2010), qu’à des requérants adultes, parents de ces élèves mineurs (Sampanis et autres, précité).

3. Non-épuisement des voies de recours internes

55. Le Gouvernement excipe aussi du non-épuisement des voies de recours internes par les requérants. Il affirme que les trois actes ayant fixé la situation dont se plaignent les requérants, à savoir, la décision des ministres de l’Education et des Finances, du 25 janvier 2008, créant la 12e école, la décision du chef du département régional de l’éducation définissant la zone de recrutement de cette école, du 8 avril 2008, et l’arrêté préfectoral du 24 juin 2008 ayant permis l’installation provisoire de la 12e école dans l’annexe préfabriquée de la 10e école, constituaient des actes administratifs exécutoires susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’Etat, en application des articles 45 et 48 du décret no 18/1989.

56. Le Gouvernement soutient aussi que les démarches effectuées par le représentant des requérants, en sa qualité de dirigeant du Greek Helsinki Monitor, auprès du ministère de l’Education et auprès du médiateur ne pouvaient pas se substituer aux recours contentieux prévus par l’ordre juridique interne. En outre, il affirme que le représentant des requérants a sciemment évité de saisir les juridictions internes : il en veut pour preuve une lettre que ce représentant aurait adressée au directeur de la 12e école, demandant de lui faire connaître la zone de recrutement de cette école « dans la perspective de nouvelles démarches judiciaires ». Or, selon le Gouvernement, de telles démarches n’ont jamais été entreprises.

57. Les requérants indiquent qu’ils ont utilisé deux voies de recours internes susceptibles d’avoir un effet sur la question de la ségrégation en matière d’éducation dont ils s’estiment victimes : la saisine du médiateur et la plainte avec constitution de partie civile contre les directeurs des deux écoles. Ils ajoutent que l’examen de la plainte est toujours pendante, deux ans après son introduction, ce qui démontrerait qu’elle n’a aucune effectivité. Enfin, selon les requérants, s’agissant du recours devant le Conseil d’Etat, préconisé par le Gouvernement, une décision prise par cette juridiction, après une procédure très longue, pourrait seulement annuler la création de la 12e école mais non pas forcer l’Etat à inscrire les élèves roms à la 10e école ou l’empêcher de rebaptiser la 12e en annexe de la 10e.

58. La Cour rappelle que la règle de l’épuisement des voies de recours internes, énoncée à l’article 35 § 1 de la Convention, se fonde sur l’hypothèse, incorporée dans l’article 13 (avec lequel elle présente d’étroites affinités), que l’ordre interne offre un recours effectif, en pratique comme en droit, quant à la violation alléguée (Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 152, CEDH 2000-XI, et Hassan et Tchaouch c. Bulgarie [GC], no 30985/96, §§ 96-98, CEDH 2000‑XI). La Cour rappelle également que, en vertu de la règle de l’épuisement des voies de recours internes, le requérant doit, avant de saisir la Cour, avoir donné à l’Etat responsable, en utilisant les ressources judiciaires pouvant être considérées comme effectives et suffisantes offertes par la législation nationale, la faculté de remédier par des moyens internes aux violations alléguées (voir, entre autres, Fressoz et Roire c. France [GC], no 29183/95, § 37, CEDH 1999‑I).

59. La Cour rappelle en outre que, dans l’affaire Sampanis et autres précitée, elle a conclu à la violation de l’article 13 au motif que le Gouvernement n’avait produit aucun exemple jurisprudentiel propre à démontrer que l’utilisation des recours offerts par les articles 45 et 52 du décret législatif no 18/1989 aurait pu entraîner l’annulation de l’omission alléguée de l’administration de procéder à l’inscription des enfants non scolarisés, et qu’il n’avait fait état d’aucun autre recours que les requérants auraient pu exercer afin d’obtenir le redressement de la violation alléguée au titre de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1.

60. La Cour note que, à l’appui de sa thèse, le Gouvernement a produit quelques arrêts du Conseil d’Etat relatifs à un acte ordonnant la suspension du fonctionnement d’une école primaire privée (arrêt no 2149/2002), à une décision du ministre de l’Education de créer un comité chargé de l’élaboration d’un livre scolaire sur les religions (4296/2009) ou à un acte du directeur de l’enseignement primaire ayant suspendu le fonctionnement d’une école primaire (arrêt no 3566/1996).

61. La Cour considère que, étant donné leur nombre limité, ces exemples ne sauraient être invoqués en l’espèce par rapport aux actes administratifs indiqués par le Gouvernement (paragraphe 55 ci-dessus). Elle estime en outre que ces actes ne comportaient aucun des aspects discriminatoires que dénoncent les requérants dans la présente affaire. Les actes litigieux n’étaient donc pas susceptibles de faire l’objet d’un recours utile devant le Conseil d’Etat pour se plaindre des circonstances de l’espèce. Ils se limitaient à créer une nouvelle école en raison du grand nombre d’élèves qu’accueillait la 10e école, fixaient la zone de recrutement de la nouvelle école et réglaient des questions relatives au lieu de son établissement. Un recours en annulation de ces actes devant le Conseil d’Etat ne pouvait donc assurer un accès des élèves roms à un enseignement non discriminatoire par rapport aux élèves non roms pendant la période 2008-2010.

62. Partant, il y a lieu d’écarter l’exception du Gouvernement sur ce point.

63. La Cour constate que ce grief des requérants n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

a) Le Gouvernement

64. Le Gouvernement exprime d’emblée l’avis que les conclusions de la Cour dans l’arrêt Sampanis et autres (précité) n’ont pas à interférer dans l’examen de la présente affaire, dont les circonstances et les griefs seraient totalement différents. Dans l’arrêt précité, la Cour n’aurait en aucune manière considéré les conditions matérielles du local abritant les cours préparatoires comme ayant eu une influence négative sur les études et comme ayant entravé le droit d’accès à l’instruction.

65. Le Gouvernement soutient ensuite que la 12e école est une école ordinaire, intégrée dans le réseau des écoles publiques, créée dans les mêmes conditions que toute autre école publique et destinée à répondre aux besoins scolaires de la région. Le programme d’études y serait le même que dans toute autre école et permettrait aux élèves qui vont jusqu’au bout de leur scolarité d’obtenir un certificat de fin d’études de l’enseignement primaire.

66. Le Gouvernement expose en outre que les élèves requérants ont de leur propre chef abandonné leur scolarité, ce qui les priverait de toute possibilité de la critiquer. Il considère que, à l’exception de quatre d’entre eux, ils ne peuvent être vus comme ayant eu la qualité d’élève pendant l’année scolaire 2008-2009. Tous auraient cessé de fréquenter l’école en 2009-2010, peu après leur inscription. Il s’ensuivrait que, au moment des faits, les conditions de scolarisation dans la 12e école ne pouvaient avoir un quelconque impact sur l’instruction. Aucun des élèves requérants ne se serait vu refuser l’accès à l’école faute de place. Le véritable problème de l’école aurait été l’absentéisme et non une surcharge des classes. Le choix fait par certains élèves en faveur d’une scolarité défaillante ou même de l’abandon total de celle-ci, ce qui aurait affecté leur niveau d’études, ne peut en aucun cas, d’après le Gouvernement, être considéré comme le résultat d’un comportement discriminatoire des autorités à leur égard.

67. Le Gouvernement soutient également que les requérants avancent des arguments confus et contradictoires et qu’ils justifient leur refus de s’inscrire à la 12e école pour l’année 2008-2009 par l’offre de conditions de scolarisation prétendument défaillantes ; or, aux dires du Gouvernement, si cela était vrai, ils auraient dû également refuser de s’inscrire pour l’année 2009-2010, ce qui n’aurait pas été le cas. En outre, les requérants auraient affirmé être gênés par une fréquentation exclusive de leur école par des Roms ; cependant, d’après le Gouvernement, ils se sont déclarés disposés à avoir une école à l’intérieur de leur campement.

68. Le Gouvernement déplore de plus les actes de violence ayant endommagé le bâtiment de la 12e école. Il indique à cet égard que les autorités régionales ont réagi immédiatement et remplacé les installations et le matériel, de sorte qu’à la rentrée des classes, en 2008, l’école était opérationnelle.

69. Le Gouvernement précise enfin que la 12e école n’est pas la seule à accueillir des élèves d’origine rom dans la région d’Aspropyrgos et que d’autres écoles, dont la population scolaire serait mixte et en grande majorité d’origine rom, comme la 7e école, fonctionnent de manière satisfaisante.

70. Il conclut que la 12e école est une école publique ordinaire, pourvue, en pratique et dans les textes, de toutes les caractéristiques d’une telle école et accordant à ses élèves toutes les chances d’achever leurs études primaires.

b) Les requérants

71. Les requérants soutiennent qu’ils se trouvent dans une situation qui serait le prolongement de celle déclarée comme contraire à la Convention et au Protocole no 1 par l’arrêt Sampanis et autres (précité). Ils continueraient à être placés dans des classes spéciales ne correspondant pas à la structure éducative classique de six classes pour le primaire, à l’étroit dans un bâtiment préfabriqué – qui aurait été rebaptisé « 12e école primaire » – et sans instituteurs compétents. Aucun des 200 élèves inscrits à l’école ne serait jamais arrivé au terme de sa scolarité.

72. Les requérants affirment en outre qu’ils n’ont à aucun moment reconnu avoir cessé les cours en 2009 peu après leur inscription à l’école. Ils n’auraient pas non plus choisi de s’inscrire à la 12e école, dès lors que la législation grecque exclurait la possibilité pour les élèves de choisir leur école publique.

73. Les requérants précisent qu’ils voulaient intégrer la 10e école – et non pas une annexe de celle-ci – d’où certains d’entre eux avaient été exclus en septembre 2005. Ils ajoutent qu’ils étaient prêts, si cette inscription n’était pas immédiatement possible, à accepter en attendant de suivre des cours dans le bâtiment préfabriqué, à condition que celui-ci fût placé plus près du campement afin d’éviter aux élèves de traverser un quartier dont les habitants feraient preuve d’hostilité à leur égard.

74. Les requérants affirment enfin que 89 % des élèves de la 7e école sont d’origine rom, ce qui ne la distinguerait pas beaucoup de la 12e école dont le pourcentage serait de 100 %. Toutefois, la 7e école serait pourvue d’un nombre d’instituteurs et de classes suffisant, ce qui n’aurait jamais été le cas de la 12e école.

2. Appréciation de la Cour

a) Principes généraux

75. La Cour rappelle que, selon sa jurisprudence bien établie, le droit à l’instruction, tel qu’il est prévu par la première phrase de l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention, garantit à quiconque relève de la juridiction des Etats contractants « un droit d’accès aux établissements scolaires existant à un moment donné », l’accès à ces derniers ne formant qu’une partie de ce droit fondamental. Pour que ce droit « produise des effets utiles, il faut encore, notamment, que l’individu qui en est titulaire ait la possibilité de tirer un bénéfice de l’enseignement suivi, c’est-à-dire le droit d’obtenir, conformément aux règles en vigueur dans chaque Etat, sous une forme ou une autre, la reconnaissance officielle des études accomplies » (Affaire « relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique », 23 juillet 1968, §§ 3-5, série A no 6 ; Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark, 7 décembre 1976, § 52, série A no 23 ; Leyla Şahin c. Turquie [GC], no 44774/98, § 152, CEDH 2005‑XI, Oršuš et autres, précité, § 146 et Catan et autres c. République de Moldova et Russie [GC], nos 43370/04, 8252/05 et 18454/06, § 137, 19 octobre 2012).

76. Dans l’arrêt Oršuš et autres (précité), la Cour a souligné que, bien que cette affaire concernât la situation individuelle des requérants, elle ne pouvait faire abstraction de ce que ceux-ci appartenaient à la minorité rom et qu’elle tiendrait compte dans son analyse du fait que, par son histoire, la minorité rom était un type particulier de minorité vulnérable ayant besoin d’une protection spéciale. La Cour rappelle également que, comme en témoignent les activités de nombreux organismes européens et internationaux et les recommandations des organes du Conseil de l’Europe, cette protection s’étend également au domaine de l’éducation. Comme indiqué dans de précédentes affaires, la vulnérabilité des Roms/Tsiganes implique d’accorder une attention spéciale à leurs besoins et à leur mode de vie propre tant dans le cadre réglementaire considéré que lors de la prise de décisions dans des cas particuliers (Oršuš et autres, précité, §§ 147-148).

77. La Cour rappelle aussi que l’article 14 n’a pas d’existence autonome, mais qu’il joue un rôle important de complément des autres dispositions de la Convention et de ses Protocoles puisqu’il protège les individus placés dans des situations analogues contre toute discrimination dans la jouissance des droits énoncés dans ces autres dispositions. Lorsqu’elle a constaté une violation séparée d’une clause normative de la Convention, invoquée devant elle à la fois comme telle et conjointement avec l’article 14, elle n’a en général pas besoin d’examiner aussi l’affaire sous l’angle de celui-ci, mais il en va autrement si une nette inégalité de traitement dans la jouissance du droit en cause constitue un aspect fondamental du litige (Dudgeon c. Royaume-Uni, 22 octobre 1981, § 67, série A no 45, Chassagnou et autres c. France [GC], nos 25088/94, 28331/95 et 28443/95, § 89, CEDH 1999‑III, et Timichev c. Russie, nos 55762/00 et 55974/00, § 53, CEDH 2005‑XII).

78. La Cour rappelle en outre avoir également admis qu’une discrimination potentiellement contraire à la Convention pouvait résulter d’une situation de fait (Zarb Adami c. Malte, no 17209/02, § 76, CEDH 2006‑VIII). Lorsqu’un requérant produit un commencement de preuve de discrimination relativement à l’effet d’une mesure ou d’une pratique, la charge de la preuve incombe ensuite à l’Etat défendeur, qui doit démontrer que la différence de traitement est justifiée (D.H. et autres c. République tchèque, précité, §§ 180 et 189).

b) Application des principes à la présente affaire

79. En l’espèce, les requérants se plaignent d’une discrimination relativement à leur droit d’instruction en ce que, en dépit des conclusions de la Cour dans l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (précité), ils auraient continué à être placés, sur la base de critères purement ethniques, pendant les années scolaires 2008-2009 et 2009-2010, dans une école qui aurait été séparée des écoles fréquentées par les élèves non roms et dont l’état aurait exclu de fait toute scolarité effective.

80. La Cour observe d’emblée qu’elle se trouve confrontée à des versions divergentes sur certains éléments de fait, notamment en ce qui concerne l’état général de la 12e école et la situation individuelle de certains élèves.

81. La Cour rappelle qu’elle demeure libre de se livrer à sa propre évaluation à la lumière de l’ensemble des éléments dont elle dispose. Elle note aussi que, même si plusieurs faits demeurent incertains, il existe suffisamment d’éléments factuels objectifs ressortant des documents soumis par les parties pour qu’elle puisse apprécier l’affaire (voir, mutatis mutandis, Sampanis et autres, précité, § 75).

82. La Cour examinera, dans un premier temps, si les faits de la cause laissent ou non présumer l’existence d’une différence de traitement. Dans l’affirmative, elle recherchera ensuite si la distinction présumée se fondait sur une base objective et raisonnable.

i. Sur le point de savoir s’il y a eu une différence de traitement

83. La Cour rappelle que, dans l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (précité), elle a conclu que les éléments de preuve présentés par les requérants et ceux figurant au dossier de l’affaire faisaient naître une forte présomption de discrimination exercée contre les intéressés : celle-ci résultait de la pratique consistant, pendant l’année scolaire 2004-2005, à commencer par refuser d’inscrire les enfants roms à l’école pour ensuite les placer dans des classes spéciales logées dans une annexe du bâtiment principal de la 10e école primaire, combinée à un certain nombre d’incidents à caractère raciste survenus dans l’école à l’instigation des parents d’enfants non roms (Sampanis et autres, précité, §§ 81-83). A cet égard, la Cour note que la réunion du 11 mars 2008, organisée à la 10e école par le médiateur de la République dans le but de convaincre les parents d’élèves non roms de renoncer à leur opposition à l’intégration d’élèves roms dans des classes ordinaires n’a pas abouti en raison d’une intervention hostile du maire d’Aspropyrgos. Il n’a même pas été possible d’inscrire dans les classes ordinaires trois élèves roms qui avaient un niveau scolaire suffisant.

84. Or la Cour note que, pour les années scolaires 2008-2009 et 2009‑2010 qui sont en cause en l’espèce, la situation n’avait guère évolué. Certes, les classes préparatoires spéciales situées dans l’annexe de la 10e école avaient été supprimées et les ministres de l’Education et des Finances avaient créé, le 25 janvier 2008, la 12e école primaire d’Aspropyrgos, qui était censée accueillir indistinctement des élèves roms et non roms.

85. Toutefois, certains éléments sont de nature à démontrer que la 12e école, malgré les intentions des autorités éducatives, était restée une école réservée aux élèves roms.

86. La Cour note ainsi que les élèves roms du quartier de Psari ont continué à fréquenter, durant toute la période mise en cause dans la présente affaire, les locaux de l’annexe de la 10e école d’Aspropyrgos, rebaptisés 12e école primaire d’Aspropyrgos.

87. La Cour relève que, lorsque les autorités ont fixé, le 8 avril 2008, les limites de la zone de recrutement de la 12e école, les 9e, 10e et 12e écoles se sont vu attribuer la même zone. Toutefois, aucun des enfants non roms domiciliés dans ce périmètre n’a été inscrit à la 12e école, ni pour l’année scolaire 2008-2009 ni pour l’année scolaire 2009-2010.

88. C’est d’ailleurs le constat auquel est parvenu le médiateur lui-même, qui s’est impliqué activement dans la recherche d’une solution pour la scolarisation des élèves roms d’Aspropyrgos en multipliant les démarches auprès des autorités. Dans sa lettre du 8 décembre 2008 au préfet, il qualifiait la 12e école d’« école ghetto », notant que tous les élèves inscrits pour l’année 2008-2009 faisaient partie de la communauté rom alors que le décret présidentiel no 201/1998 disposait que le transfert de tous les élèves résidant dans la zone de recrutement d’une école à cette école était obligatoire et devait s’effectuer même en l’absence de demande des parents. Il ajoutait que le refus d’autoriser la fusion des 12e et 11e écoles constituait une discrimination injustifiée à l’égard des élèves roms en ce qu’il les aurait empêchés de se fondre dans l’environnement culturel de la région. Le médiateur faisait ici référence au fait que le 17 octobre 2008, le préfet de l’Attique de l’Ouest a refusé de donner son autorisation pour la fusion des 12e et 11e écoles au motif qu’il souhaitait éviter des problèmes d’ordre social, culturel et éducatif.

89. La Cour relève donc qu’il n’y a eu aucun changement notable dans les faits à l’origine de l’arrêt Sampanis et autres, si ce n’est la volonté affichée du ministère de l’Education d’intégrer les élèves roms dans le système éducatif ordinaire, manifestée par la création de la 12e école, laquelle, pour diverses raisons relevant de la politique des autorités municipales et préfectorales, n’a pas pu fonctionner comme prévu, ce qui a eu pour effet de faire perdurer une différence de traitement à l’égard de la communauté rom de l’aire de Psari. Il existe donc un commencement de preuve d’une pratique de discrimination.

ii. Sur le point de savoir si la différence de traitement avait une justification objective et raisonnable

90. Selon la jurisprudence de la Cour, une différence de traitement est discriminatoire si elle « manque de justification objective et raisonnable », c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un « but légitime » ou s’il n’existe pas de « rapport raisonnable de proportionnalité » entre les moyens employés et le but visé (voir, parmi beaucoup d’autres, Larkos c. Chypre [GC], no 29515/95, § 29, CEDH 1999-I, et D.H. et autres c. République tchèque, précité, § 196). En cas de différence de traitement fondée sur la race, la couleur ou l’origine ethnique, la notion de justification objective et raisonnable doit être interprétée de manière aussi stricte que possible (Sampanis et autres, précité, § 84).

91. La scolarisation des enfants roms dans des conditions satisfaisantes soulève de grandes difficultés dans un certain nombre d’Etats européens. Toutefois, dans leurs efforts pour parvenir à l’intégration sociale et éducative du groupe défavorisé que forment les Roms, les autorités nationales se heurtent à de nombreuses difficultés tenant notamment aux particularités culturelles de cette minorité et à une certaine hostilité manifestée par les parents d’enfants non roms (voir Oršuš et autres précité, § 180). Il n’est pas facile de choisir le meilleur moyen de résoudre les difficultés d’apprentissage d’enfants n’ayant pas une connaissance suffisante de la langue dans laquelle l’enseignement est dispensé. Cela implique de procéder à un exercice difficile de mise en balance des divers intérêts en jeu. Pour ce qui est de la définition et de l’aménagement du programme des études, il s’agit, dans une large mesure, d’un problème d’opportunité sur lequel la Cour n’a pas à se prononcer (D.H. et autres, précité, § 205, et Valsamis c. Grèce, 18 décembre 1996, § 28, Recueil des arrêts et décisions 1996‑VI).

92. Malgré les particularités et différences factuelles que peut présenter chaque affaire, ces considérations valent aussi en l’espèce.

93. En premier lieu, la Cour note que la 12e école d’Aspropyrgos, créée en janvier 2008 sur les prémices de la 10e école où fonctionnaient auparavant les classes préparatoires fréquentées exclusivement par des élèves roms, était censée accueillir indistinctement des élèves roms et non roms. Cependant, seuls des élèves roms l’ont fréquentée durant les années 2008-2009 et 2009-2010.

94. En deuxième lieu, elle relève que les salles de l’école ont été endommagées pendant les vacances d’été 2008. Peu avant la rentrée scolaire, le 8 septembre 2008, le directeur de la 12e école a rapporté en détail aux autorités scolaires régionales du ministère de l’Education les dommages causés en concluant que cet établissement n’était pas en état d’accueillir des élèves. Il affirmait que les installations ne pouvaient pas couvrir les besoins élémentaires de l’école et qu’elles mettaient en péril la sécurité des élèves et du personnel enseignant (paragraphe 15 ci-dessus).

95. A plusieurs reprises entre septembre 2008 et juin 2009, le directeur de la 12e école a adressé des lettres aux autorités régionales d’éducation, au préfet et au maire d’Aspropyrgos pour les alerter sur les carences auxquelles l’école avait à faire face, notamment en ce qui concernait l’itinéraire du bus scolaire affecté à l’école, la construction d’un préau, l’installation du chauffage et de toilettes supplémentaires, la construction de deux salles de classe supplémentaires et la création d’un jardin d’enfants. Le 11 juin 2009, le directeur de la 12e école a en vain attiré l’attention du ministre de l’Education sur le fait que les livres scolaires étaient inappropriés pour les Roms, dont la langue maternelle n’était pas le grec (paragraphe 27 ci‑dessus).

96. Le 23 juillet 2009, donc après la fin de l’année scolaire 2008-2009, le médiateur a écrit au ministère de l’Education pour l’informer que le maire d’Aspropyrgos avait ignoré une invitation du ministère à faire le nécessaire pour la remise en état immédiate de la 12e école (paragraphe 28 ci-dessus).

97. Il existe donc plusieurs éléments établissant que, pendant l’année scolaire 2008-2009, les élèves de la 12e école ont été maintenus dans des conditions matérielles telles qu’elles rendaient sinon impossible, du moins très difficile la poursuite de leur scolarité. Prévue pour une durée provisoire à l’époque, faute d’espace disponible, la scolarisation des enfants dans l’annexe du bâtiment de la 10e école s’est poursuivie pendant la période 2009-2010.

98. En troisième lieu, la Cour note que le 8 octobre 2008, les autorités scolaires régionales du ministère de l’Education ont élaboré un plan visant à la fusion des 11e et 12e écoles afin que cette dernière perde son caractère d’école ghetto. Toutefois, tant le maire d’Aspropyrgos que le préfet de l’Attique de l’Ouest ont refusé d’autoriser une telle fusion par souci d’éviter de nouveaux incidents de la part des parents d’élèves non roms de la 11e école (paragraphes 20 et 28 ci-dessus). De plus, dans sa lettre du 26 septembre 2008 au ministère de l’Education, le maire affirmait qu’une ségrégation des enfants roms des autres élèves était devenue une nécessité incontournable, car les « Tsiganes auraient choisi de vivre dans des décharges qu’ils auraient eux-mêmes créées » et de « s’adonner à des activités illégales ». Il concluait que leurs enfants ne pouvaient par conséquent pas « exiger de partager les mêmes salles de classe que les autres élèves d’Aspropyrgos » (paragraphe 19 ci-dessus).

99. La Cour constate de surcroît que le ministère de l’Education n’a pas répondu aux lettres des requérants du 30 mai et du 20 juillet 2009 lui demandant d’autoriser les élèves roms à fréquenter la 10e école et l’invitant à établir un programme scolaire spécialement conçu pour leurs besoins (paragraphe 26 ci-dessus).

100. A cela s’ajoute l’attitude des autorités municipales et préfectorales qui, par crainte de susciter de nouveaux incidents de la part de la population locale hostile aux Roms, sont restées inactives face aux appels du directeur de l’école et du médiateur demandant que les élèves roms puissent être intégrés dans des écoles ordinaires et y bénéficier de cours adaptés à leur niveau éducatif et linguistique.

101. Quant à l’année scolaire 2009-2010, la Cour note que, alors que tous les mineurs requérants sauf quatre (paragraphe 40 ci-dessus) avaient été inscrits à l’école avec l’aide de leur représentant devant la Cour, un grand nombre d’entre eux ont cessé de fréquenter les cours au courant de l’année. Compte tenu de la manière dont l’école avait fonctionné pendant l’année 2008-2009 et de l’absence de toute mesure par l’Etat ou les autorités locales pour améliorer la situation, la Cour ne peut pas conclure que les élèves roms et leurs parents se sont simplement désintéressés de la poursuite de la scolarité.

102. Dans ces conditions et eu égard au fait qu’il n’a pas été possible d’inscrire dans des classes ordinaires trois élèves roms de la 12e école qui avaient le niveau suffisant pour intégrer la 10e école (paragraphe 9 ci‑dessus), la Cour estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la situation individuelle des requérants mineurs et de se prononcer sur leur assiduité, sur la signification des termes scolarité « suffisante » ou occasionnelle » ou sur le taux d’absentéisme, comme le font les parties. Au vu de ses conclusions quant à l’année 2008-2009, la Cour n’estime pas non plus nécessaire de se pencher sur le cas des trois premiers requérants mentionnés au paragraphe 40 pour l’année 2009-2010. Toutefois, la Cour constate qu’aucun problème ne se pose pour Paraskevi Sampani qui avait terminé ses études primaires en 2008 dans une autre école.

103. Il apparaît donc que les mesures prises pour la scolarisation des enfants roms de l’aire de Psari à Aspropyrgos n’étaient pas accompagnées des garanties suffisantes permettant la prise en compte suffisante par l’Etat, dans l’exercice de sa marge d’appréciation dans le domaine de l’éducation, des besoins particuliers de ces enfants en tant que membres d’un groupe défavorisé (voir, mutatis mutandis, Oršuš et autres, précité, § 182). En outre, la Cour ne peut que constater que le Gouvernement ne fournit pas d’explication convaincante sur les raisons pour lesquelles aucun élève non rom n’était scolarisé à la 12e école, à part une vague mention au fait qu’ils étaient « inscrits ailleurs ».

104. La Cour considère que, dans les circonstances de la présente espèce, les conditions dans lesquelles la 12e école a fonctionné pendant les années scolaires 2008-2009 et 2009-2010 ont en définitive eu pour résultat de discriminer une nouvelle fois les requérants.

105. Partant, il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 dans le chef des requérants.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 13 DE LA CONVENTION

106. Les requérants se plaignent de l’absence d’un recours effectif au travers duquel ils auraient pu formuler leurs griefs sur le terrain de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 à la Convention.

107. La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle relève par ailleurs qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

108. Cependant, la Cour estime, compte tenu de ses conclusions relatives à l’exception de non-épuisement des voies de recours internes, qu’il n’y a pas lieu d’examiner séparément ce grief.

III. SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES

109. Invoquant l’article 34 de la Convention, les requérants se plaignent de n’avoir aucun accès à tous les documents officiels concernant leur école. Invoquant l’article 46 de la Convention, ils se plaignent aussi d’un refus des autorités de se conformer à l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (précité).

110. S’agissant du premier grief, la Cour estime qu’il n’est pas étayé et qu’il ne suffit pas à établir en quoi les requérants ont été empêchés d’exercer leur droit de recours individuel.

111. S’agissant du deuxième grief, la Cour rappelle que l’Etat défendeur reste libre, sous le contrôle du Comité des Ministres, de choisir les moyens de s’acquitter de son obligation juridique au regard de l’article 46 de la Convention pour autant que ces moyens soient compatibles avec les conclusions contenues dans l’arrêt de la Cour. Pour sa part, la Cour ne saurait assumer aucun rôle dans ce dialogue. Dès lors, elle ne saurait estimer qu’un Etat a enfreint la Convention parce qu’il n’a pas pris l’une ou l’autre de ces mesures dans le cadre de l’exécution d’un de ses arrêts. En outre, la Cour n’a pas compétence pour examiner si une Partie contractante s’est conformée aux obligations que lui impose un de ses arrêts. Elle a alors refusé d’examiner des griefs relatifs au manquement des Etats d’exécuter ses arrêts. Le rôle du Comité des Ministres dans ce domaine ne signifie pas pour autant que les mesures prises par un Etat défendeur en vue de remédier à la violation constatée par la Cour ne puissent pas soulever un problème nouveau, non tranché par l’arrêt et, dès lors, faire l’objet d’une nouvelle requête dont la Cour pourrait avoir à connaître (Egmez c. Chypre (no 2) (déc.), no 12214/07, §§ 48-51, 18 septembre 2012).

112. En l’espèce, la Cour note que, au moment de l’introduction de la requête, le 7 octobre 2009, et de la communication de celle-ci, le 25 mars 2011, la question de l’exécution de l’arrêt précité était encore pendante devant le Comité des Ministres. Le 14 septembre 2011, le Comité des Ministres a décidé de clore l’examen de l’affaire après avoir pris connaissance des mesures individuelles et générales adoptées par le gouvernement dans le cadre de l’exécution de l’arrêt, constatant que presque tous les enfants des requérants avaient été inscrits dans la 12e école primaire d’Aspropyrgos et que l’Etat avait pris des mesures satisfaisantes concernant en général l’inscription et la scolarisation des enfants roms (paragraphe 44 ci-dessus). Eu égard à ce constat du Comité des Ministres, la Cour n’est pas appelée, dans le cadre de l’examen de la présente requête telle que présentée par les requérants, à se prononcer sur les questions de l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres précité.

113. Il s’ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée, en application de l’article 35 §§ 1, 3 a) et 4 de la Convention.

IV. SUR L’APPLICATION DES ARTICLES 41 ET 46 DE LA CONVENTION

A. Article 41

114. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

1. Dommage

115. Les requérants réclament chacun la somme de 9 000 euros (EUR) pour préjudice moral.

116. Le Gouvernement estime que le constat d’une violation serait suffisant pour compenser l’éventuel dommage moral des requérants. Il considère en outre que la somme réclamée est exorbitante, d’autant plus qu’elle serait sollicitée pour chacun des requérants et non pas par famille ou par élève. Il affirme enfin que les nouvelles procédures de comptabilité publique exigent que le bénéficiaire d’un versement effectué à partir de comptes publics possède une identité bancaire et fiscale concrète et valide. Ainsi, au cas où la Cour allouerait des montants en application de l’article 41, les noms des personnes titulaires de l’indemnité devraient, selon le Gouvernement, être complétés par l’indication du lieu de résidence, du registre fiscal et du compte bancaire.

117. La Cour considère que les requérants ont sans nul doute subi un dommage moral – en particulier du fait de la frustration due à la discrimination indirecte dont ils ont été victimes – et que le constat de violation de la Convention ne constitue pas une réparation suffisante à cet égard. Elle juge toutefois excessifs les montants réclamés par les intéressés. Statuant en équité, elle alloue à chacune des familles requérantes la somme de 1 000 EUR au titre du dommage moral.

2. Frais et dépens

118. Les requérants demandent également 12 000 EUR pour les frais et dépens exposés dans les procédures engagées devant les autorités internes (autorités administratives, autorités compétentes de l’Education nationale, médiateur, procureur du tribunal correctionnel) et pour ceux engagés devant la Cour. Ils évaluent le temps de travail de leur représentant sur cette affaire à 120 heures, pour un tarif de 100 EUR l’heure. Ils produisent à cet égard un document détaillant le temps que leur représentant a consacré à la rédaction des différents mémoires et observations déposés auprès des autorités internes et de la Cour. Ils demandent que la somme qui serait accordée soit versée directement sur le compte de leur représentant.

119. Le Gouvernement réplique que les procédures menées devant les autorités internes n’ont pas entraîné de frais. Quant aux honoraires du représentant des requérants, le Gouvernement note que les organisations non gouvernementales, comme le Greek Helsinki Monitor, fournissent d’habitude leur aide juridique gratuitement et que, dans le cas où elles percevraient des honoraires à l’instar des avocats, elles doivent produire des pièces justificatives. Il déclare ne pas pouvoir accepter le document produit par les requérants, qui ne remplirait pas les critères de la loi relative aux factures établies par les avocats et qui ne prouverait ni la nécessité ni le caractère raisonnable des sommes réclamées.

120. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. La Cour rappelle aussi que, dans l’arrêt Sampanis et autres c. Grèce (précité), elle a accordé au Greek Helsinki Monitor, qui représentait aussi les requérants dans cette affaire, une somme pour frais et dépens, tout comme elle l’a fait dans d’autres affaires introduites par cette organisation (voir, par exemple et parmi d’autres, Vihos c. Grèce, no 34692/08, 10 février 2011). En l’espèce, elle note que le fait que le document produit par le représentant des requérants ne remplit pas les critères des factures établies par les avocats ne peut pas occulter le fait que le Greek Helsinki Monitor a fourni l’assistance juridique nécessaire aux requérants (voir, mutatis mutandis, Patsuria c. Georgie, no 30779/04, § 103, 6 novembre 2007). A la lumière des documents dont elle dispose et compte tenu de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable d’accorder conjointement aux requérants la somme de 2 000 EUR. Elle accueille aussi leur demande concernant le versement direct de cette somme sur le compte bancaire du représentant des intéressés.

3. Intérêts moratoires

121. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

B. Article 46

122. Les requérants invitent la Cour à indiquer au Gouvernement des mesures à prendre aux fins de l’article 46 de la Convention, mesures qui devraient consister, selon eux, en la fusion des 11e et 12e écoles. Ils précisent à cet égard que, depuis leur expulsion de l’aire de Psari et leur installation sur l’aire de Sofo, en août 2010, ils relèvent de la 11e école. Ils ajoutent que le gouvernement devrait aussi fournir au sein de la 11e école des « cours de la deuxième chance » pour ceux d’entre eux à qui leur âge ne permet plus de s’inscrire à l’école primaire.

123. Le Gouvernement soutient que la demande d’application de l’article 46 en l’espèce n’est pas fondée, car il n’existerait aucun problème structurel sous-jacent aux griefs des requérants. A cet égard, il affirme, d’une part, que, dans son arrêt du 8 juillet 2008, la Cour a constaté que le système national de l’éducation prenait en compte le mode de vie des enfants roms et facilitait leur inscription à l’école et, d’autre part, que le Comité des Ministres a, dans le cadre de l’exécution de l’arrêt précité, reconnu que la Grèce aurait adopté les mesures générales nécessaires pour intégrer les enfants roms dans le système éducatif national.

124. La Cour rappelle qu’un constat de violation dans ses arrêts est essentiellement déclaratoire et que, par l’article 46 de la Convention, les Hautes Parties contractantes se sont engagées à se conformer aux arrêts de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties, le Comité des Ministres étant chargé d’en surveiller l’exécution. Le rôle du Comité des Ministres dans ce domaine ne signifie pas pour autant que les mesures prises par un Etat défendeur en vue de remédier à la violation constatée par la Cour ne puissent pas soulever un problème nouveau, non tranché par l’arrêt et, dès lors, faire l’objet d’une nouvelle requête dont la Cour pourrait avoir à connaître (Verein gegen Tierfabriken Schweiz (VgT) c. Suisse (no 2) [GC], no 32772/02, §§ 62-63, 30 juin 2009 et Egmez, § 51, précité).

125. En outre, dans le cadre spécifique d’une violation continue d’un article de la Convention à la suite d’un arrêt dans lequel la Cour a constaté la violation d’un droit pendant une certaine période, il n’est pas inhabituel que la Cour examine une deuxième requête portant sur la violation du même droit pendant une période ultérieure. Dans de telles affaires, la « question nouvelle » résulte de la persistance de la violation qui a fondé la décision initiale de la Cour. L’examen de la Cour sera cependant limité aux nouvelles périodes et aux nouveaux griefs invoqués à cet égard (Egmez précitée, § 53).

126. En clôturant la surveillance de l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres précité, le Comité des Ministres a constaté que les classes préparatoires spéciales situées dans une annexe de la 10e école avaient été supprimées, que les autorités avaient adopté des mesures pour faciliter l’inscription des enfants des requérants dans une école ordinaire et qu’une nouvelle école ordinaire qui était censée accueillir tant des enfants roms que des enfants non roms avait été créée (la 12e) (paragraphe 44 ci-dessus).

127. Or, ces mesures prises par les autorités grecques concernaient l’exécution de l’arrêt Sampanis et autres précité. Elles ne couvrent pas les nouveaux faits et les nouvelles questions soulevées par la présente requête et qui ont donné lieu aux violations alléguées et constatées dans le présent arrêt. D’ailleurs, la Résolution CM/resDH(2011)119 (paragraphe 44 ci‑dessus), précise que les décisions du Comité des Ministres en vertu de l’article 46 § 2 de la Convention ne préjugent en rien l’examen par la Cour d’autres affaires actuellement pendantes devant elle.

128. Eu égard aux circonstances de l’espèce, la Cour s’estime donc compétente pour aider l’Etat défendeur à remplir ses obligations au titre de l’article 46 et indiquer certaines mesures concrètes, préconisées d’ailleurs par les requérants mais aussi par le Gouvernement dans ses observations en réponse, de nature à mettre un terme à la violation constatée : ainsi, ceux des requérants qui sont encore en âge d’être scolarisés pourraient être inscrits par la direction de l’éducation primaire de l’Attique de l’Ouest dans une autre école publique et ceux qui ont atteint la majorité pourraient s’inscrire dans les « écoles de la deuxième chance » ou bien les écoles pour adultes, mises en place par le ministère de l’Education dans le cadre du Programme de l’instruction pérenne.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés de l’article 14 de la Convention, combiné avec l’article 2 du Protocole no 1, et de l’article 13 de la Convention, et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 14 de la Convention, combiné avec l’article 2 du Protocole no 1 ;

3. Dit qu’il n’y a pas lieu d’examiner séparément le grief tiré de l’article 13 de la Convention ;

4. Dit

a) que l’Etat défendeur doit verser, dans les trois mois, à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :

i. 1 000 EUR (mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, à chacune des familles requérantes, pour dommage moral ;

ii. 2 000 EUR (deux mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par les requérants, conjointement à ceux-ci, pour frais et dépens, à verser sur le compte bancaire de leur représentant ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 11 décembre 2012, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

André WampachIsabelle Berro-Lefèvre
Greffier adjointPrésidente

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l’opinion concordante du juge Kovler.

I.B.-L.
A.M.W.

OPINION CONCORDANTE DU JUGE KOVLER

Je prends note de la décision de la Cour d’allouer une somme assez modeste, à savoir 1 000 euros (EUR), à chacune des familles requérantes pour dommage moral. Je trouve cette approche objective et rationnelle, compte tenu de l’accent mis par la Cour sur les mesures générales nécessaires pour intégrer des enfants roms dans le système éducatif national. Cette approche contraste avec celle de la Cour adoptée dans les affaires précédentes : 4 000 EUR à chacun des requérants dans D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, CEDH 2007-IV ; 4 500 EUR à chacun dans Oršuš et autres c. Croatie [GC], no 15766/03, CEDH 2010 ; 6 000 EUR à chacun dans Sampanis et autres c. Grèce, no 32526/05, 5 juin 2008 ; et 6 000 EUR à chacun (enfants âgés de six ans au moment des faits et parents confondus) dans le récent arrêt Catan et autres c. République de Moldova et Russie [GC], nos 43370/04, 8252/05 et 18454/06. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.

ANNEXE

(Le terme « Ako » est utilisé par les requérants pour désigner les enfants dont le prénom n’est pas enregistré)

Première famille (4 enfants et 2 parents)

1) Ioanna SAMPANI, née le 1er janvier 1994

2) Paraskevi SAMPANI, née le 15 avril 1995

3) Ioannis SAMPANIS, né le 10 août 1996

4) Christos SAMPANIS, né le 18 août 1999

5) Spyridon SAMPANIS, né le 31août 1972

6) Vasiliki MORATI, née le 20 janvier 1976

Deuxième famille (4 enfants et 2 tuteurs)

7) Aglaïa SAMPANI, née le 9 novembre 1994

8) Zografo SAMPANI, née le 29 mars 1996

9) Andreas SAMPANIS, né le 29 mars 1996

10) Georgia SAMPANI, née le 29 mars 1996

11) Athanasios SAMPANIS, né le 20 mars 1942

12) Maria KARAGOUNI, née le 15 avril 1948

Troisième famille ( 3 enfants et 2 parents)

13) Ioanna VELIOU, née le 30 mars 1994

14) Kyprianos VELIOS, né le 22 mars 1995

15) Christina VELIOU, née le 15 avril 2000

16) Nikolaos VELIOS, né le 1er mars 1966

17) Maria KARAHALIOU, née le 15 mars 1970

Quatrième famille (4 enfant et 1 parent)

18) Chrysovalanto KARAHALIOU, née le 24 décembre 1995

19) Paraskevi-Aikaterini KARAHALIOU, née le 6 juin 1998

20) « Ako » KARAHALIOS, né le 27 août 1999

21) « Ako » KARAHALIOS, né le 16 novembre 2000

22) Vasiliki KOURAKI, née le 29 novembre 1976

Cinquième famille (5 enfants et 1 parent)

23) Panayotis LIAKOPOULOS, né le 16 mai 1995

24) Georgios LIAKOPOULOS, né le 2 février 1997

25) « Ako » LIAKOPOULOU, née le 30 mars 1998

26) Gerasimos LIAKOPOULOS, né le 4 mai 2000

27) « Ako » LIAKOPOULOU, née le 10 août 2002

28) Eleni LIAKOPOULOU, née le 26 mars 1977

Sixième famille (1 enfant et deux parents)

29) Kyriakos SAMPANIS, né le 30 avril 1996

30) Sotirios SAMPANIS, né le 1er janvier 1970

31) Aikaterini KARAHALIOU, née le 25 juin 1970

Septième famille (1 enfant et 1 parent)

32) « Ako » PASIOS, né le 22 mars 2004

33) Maria-Patra PASIOU, née le 29 septembre 1985

Huitième famille (3 enfants et 1 parent)

34) Georgios KARAGOUNIS, né le 26 octobre 1994

35) Nikolaos KARAGOUNIS, né le 23 juin 1999

36) Tsabika KARAGOUNI, née le 9 juin 2002

37) Vasilios KARAGOUNIS, né le 13 mai 1975

Neuvième famille (1 enfant et 1 parent)

38) Panayota PASIOU, née le 27 février 2002

39) Sofia PASIOU, née le 21 août 1981

Dixième famille (4 enfants et 1 parent)

40) Ioanna BANDI, née le 28 mai 1995

41) « Ako » BANDI, née le 10 juillet 1996

42) « Ako » BANDI, née le 5 décembre 1997

43) Ilias BANDIS, né le 23 juillet 1999

44) Magdalini LAZOU, née le 9 décembre 1979

Onzième famille (6 enfants et 1 parent)

45) Evangelia PASIOU, née le 2 janvier 1995

46) Vasiliki PASIOU, née le 13 décembre 1995

47) Mariana PASIOU, née le 20 septembre 1996

48) « Ako » PASIOU, née le 23 juillet 1997

49) « Ako » PASIOS, né le 26 août 2000

50) « Ako » PASIOS, né le 16 janvier 2003

51) Maria SIAMPANI, née le 14 mai 1980

Douzième famille (2 enfants et 1 parent)

52) Ioannis SAMPANIS, né le 27 juin 1999

53) « Ako » SAMPANIS, né le 19 juillet 2001

54) Christina LIATIFI, née le 15 décembre 1983

Treizième famille (5 enfants et 1 parent)

55) Anastasia SIAMPANI, née le 2 août 1999

56) Vasiliki SIAMPANI, née le 10 mars 1992

57) « Ako » SIAMPANI, née le 5 juillet 1994

58) « Ako » SIAMPANI, née le 5 juillet 1994

59) « Ako » SIAMPANI, née le 23 janvier 1997

60) Eleftheria KAMPERI, née le 1er mai 1976

Quatorzième famille (4 enfants et 1 parent)

61) « Ako » DALIPIS, né le 18 août 1998

62) « Ako » DALIPI, née le 23 janvier 2000

63) « Ako » DALIPIS, né le 20 avril 2002

64) « Ako » DALIPI, née le 14 octobre 2003

65) Polyxeni DALIPI, née le 29 avril 1985

Quinzième famille (3 enfants et 1 parent)

66) Anastasios TRIANTAFILIDIS, né le 6 juin 1997

67) Maria TRIANTAFILIDI, née le 12 juillet 2000

68) Ioanna TRIANTAFILIDOU, née le 27 août 2002

69) Davidoula TRIANTAFILIDOU, née le 28 juin 1979

Seizième famille (6 enfants et 1 parent)

70) « Ako » TSAKIRI, née le 1er avril 1995

71) « Ako » TSAKIRI, née le 1er avril 1995

72) « Ako » TSAKIRIS, né le 12 août 1996

73) « Ako » TSAKIRI, née le 7 juillet 1997

74) « Ako » TSAKIRI, née le 15 octobre 1998

75) « Ako » TSAKIRI, née le 11 février 2003

76) Panayotis TSAKIRIS, né le 15 mars 1976

Dix-septième famille ( 1 enfant et 1 parent)

77) « Ako » RAMOS, né le 26 septembre 1998

78) Margarita PASIOU, née le 22 juillet 1973

Dix-huitième famille (1 enfant et 1 parent)

79) Eleni SIAMPANI, née 1er août 2003

80) Aikaterini SIAMPANI, née le 21 décembre 1984

Dix-neuvième famille (2 enfants et 1 parent)

81) « Ako » LAZOU, née le 7 juillet 2000

82) « Ako » LAZOS, né le 21 août 2003

83) Paraskevi BANDI, née le 9 février 1983

Vingtième famille (2 enfants et 1 parent)

84) « Ako » PASIOU, née le 25 avril 1995

85) Irini Chrysovalandi PASIOU, née le 3 mars 2004

86) Antonia BANDI, née le 10 mars 1978

Vingt et unième famille ( 3 enfants et 1 parent)

87) « Ako » KARAHALIOS, né le 17 août 1995

88) « Ako » KARAHALIOU, née le 9 novembre 1998

89) « Ako » KARAHALIOU, née le 28 septembre 2003

90) Irini KARAHALIOU, née le 24 novembre 1979

Vingt-deuxième famille (3 enfants et 1 parent)

91) Kyriaki KARAHALIOU, née le 16 avril 1998

92) Aikaterini KARAHALIOU, née le 7 mars 2000

93) Vaïa KARAHALIOU, née le 10 avril 2002

94) Georgios KARAHALIOS, né le 10 octobre 1978

Vingt-troisième famille ( 2 enfants et 1 parent)

95) Vasilios SAMPANIS, né le 16 juillet 2001

96) « Ako » SAMPANI, née le 13 juin 2002

97) Kalliopi SAMPANI, née le 6 juin 1984

Vingt-quatrième famille (3 enfants et 1 parent)

98) Maria SIAMPANI, née le 27 août 1995

99) « Ako » SIAMPANI, née le 28 mai 1998

100) Yannoula SIAMPANI, née 1er mars 2003

101) Angeliki SIAMPANI, née le 7 janvier 1974

Vingt-cinquième famille (4 enfants et 1 parent)

102) Nikolaos MOURATIS, né le 12 mars 1995

103) Eleni MOURATI, née le 28 février 1996

104) Anastasia MOURATI, née le 12 janvier 1997

105) « Ako » MOURATI, née le 14 janvier 1998

106) Ioanna SIAMPANI, née le 27 octobre 1979

Vingt-sixième famille (1 enfant et 1 parent)

107) « Ako » KARAHALIOU, née le 19 février 1999

108) Zoe KARAHALIOU, née le 22 octobre 1969

Vingt-septième famille (2 enfants et 1 parent)

109) « Ako » TSAKIRIS, né le 27 mars 1997

110) « Ako » TSAKIRIS, né le 25 janvier 2002

111) Christos TSAKIRIS, né le 14 septembre 1967

Vingt-huitième famille (1 enfant et 1 parent)

112) « Ako » KAMPERI, née le 1er août 2003

113) Chrysovalandi KAMPERI, née le 11 mars 1981

Vingt-neuvième famille (2 enfants et 1 parent)

114) Ioanna SIAMPANI, née le 29 décembre 1999

115) « Ako » SIAMPANI, née le 12 janvier 2004

116) Zoe SIAMPANI, née le 20 juin 1981

Trentième famille (3 enfants et 1 parent)

117) « Ako » SAÏNI, née le 5 décembre 1994

118) « Ako » SAÏNI, née le 5 décembre 1994

119) Ioannis SAÏNIS, né le 25 décembre 1995

120) Yannoula SAÏNI, née le 30 décembre 1977

Trente et unième famille (1 enfant et 1 parent)

121) Maria-Eleni SIAMPANI, née le 12 décembre 2002

122) Vasiliki SIAMPANI, née le 30 mars 1984

Trente-deuxième famille (1 enfant et 1 parent)

123) Eleni SAMPANI, née le 6 décembre 2003

124) Christina SAÏNI, née le 3 mai 1987

Trente-troisième famille (2 enfants et 1 parent)

125) Ioanna CHRISTAKI, née 21 avril 1995

126) Thomas CHRISTAKIS, né le 22 mai 1997

127) Ioannis CHRISTAKIS, né le 20 juin 1974

Trente-quatrième famille (3 enfants et 1 parent)

128) Maria TSAKIRI, née le 3 avril 1994

129) Ioannis TSAKIRIS, né le 16 octobre 1996

130) « Ako » TSAKIRI, née le 14 juillet 2001

131) Dimitroula TSAKIRI, née le 15 septembre 1976

Trente-cinquième famille (1 enfant et 1 parent)

132) Evangelia SIAMPANI, née le 1er février 2003

133) Zoe SIAMPANI, née le 18 février 1982

Trente-sixième famille (2 enfants et 1 parent)

134) Panayotis TAFILIS, né le 31 juillet 1994

135) Paraskevas TAFILIS, né le 14 septembre 1996

136) Irini TAFILI, née le 8 août 1973

Trente-septième famille (1 enfant et 1 parent)

137) Antonios GARAGOUNIS, né le 3 septembre 1994

138) Konstantia SALI, née le 10 novembre 1967

Trente-huitième famille (1 enfant et 1 parent)

139) « Ako » SAMPANIS, né le 27 avril 1994

140) Vaïa TSAKIRI, née le 10 mars 1956


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