EN FAIT
Considérant que les faits de la cause peuvent se résumer comme suit:
Le requérant, né en 1936, ressortissant allemand, chauffeur de profession, était, au moment de l'introduction de sa requête, détenu au pénitencier de Bernau (Bavière). Le .. août 1967, le Tribunal régional (Landgericht) de Munich I l'a condamné à une peine d'ensemble de vingt mois d'emprisonnement pour instigation au vol et recel - ces deux infractions en concours l'une avec l'autre - ainsi que pour escroquerie. Le .. juillet 1968, la Cour suprême fédérale (Bundesgerichtshof) a rejeté un pourvoi en cassation formé par le requérant contre ce jugement. Elle a imputé sur la durée de la peine la détention préventive, à l'exception de celle subie entre le .. août et le .. novembre 1967. Il ressort de l'arrêt de la Cour suprême que le requérant n'a pas attaqué sa condamnation pour escroquerie mais que, semble-t-il, il a soutenu que les actes qualifiés par le tribunal régional d'instigation au vol et de recel ne constituaient qu'une seule infraction et non deux infractions en concours entre elles. Cette thèse n'a pas été retenue par la Cour suprême.
Le tribunal régional avait en effet reconnu le requérant coupable d'avoir persuadé un certain R. de voler deux tableaux au Musée national de Bavière et d'avoir reçu ces tableaux en dépôt pour tenter de les négocier.
De son côté, le requérant prétend avoir reçu les tableaux sans savoir qu'ils avaient été volés. Il les aurait exposés chez lui pendant une huitaine de jours. R. les aurait alors repris puis confiés successivement à plusieurs autres personnes qui, elles, n'auraient pas été accusées.
Selon le requérant, sa condamnation ne repose que sur de fausses déclarations de R., son co-accusé qui, pour avoir déjà subi plusieurs condamnations, ne serait pas digne de foi. En revanche, des témoins auraient affirmé que le requérant n'avait pas jamais tenté de négocier les tableaux. Toutefois, leurs déclarations auraient été mal enregistrées (verfälscht) par le tribunal.
Le .. juillet 1968, le requérant a déposé plainte contre R. pour accusations mensongères (falsche Anschuldigung). Cette plainte fut classée le .. septembre 1968 par le parquet près le tribunal régional de Munich I. Le requérant déclare avoir recouru contre cette décision auprès dudit tribunal. Le recours aurait été rejeté sans que les motifs aient été communiqués au requérant.
Le .. septembre 1968, le requérant s'est plaint auprès de la Cour suprême de son arrêt du .. juillet 1968 et en particulier de la non-imputation, sur la durée de la peine, de la détention préventive subie entre le .. août et le .. novembre 1967. Le Greffe de la Cour suprême lui répondit le ..septembre 1968 que l'arrêt du .. juillet 1968 était définitif et que, d'ailleurs, ses dispositions relatives à l'imputation de la détention préventive étaient conformes à la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale.
Le requérant s'élève contre la pratique de la Cour suprême consistant à n'imputer sur la durée de la peine que celle de la détention préventive (subie au cours de la procédure de cassation) qui excède trois mois: lorsque celui qui se pourvoit en cassation est détenu (comme l'était le requérant), la décision de la Cour suprême aurait pour effet de prolonger la durée de la peine. Ce résultat serait incompatible avec l'article 358, par. 2, du Code de procédure pénale allemand, selon lequel la juridiction de cassation ne peut statuer au détriment du condamné, lorsque le pourvoi émane de ce dernier. D'autre part, les condamnés qui se trouvent en liberté ou ceux qui purgent une autre peine au moment de la procédure de cassation ne courraient pas le risque de voir leur détention prolongée de trois mois.
Le .. octobre 1968, le requérant a formulé un recours en grâce. Ce recours a été rejeté le .. novembre 1968 par le procureur général près le tribunal régional supérieur (Oberlandesgericht) de Munich, au nom du Ministère bavarois de la justice.
Le requérant déclare avoir formé un recours auprès de la Cour constitutionnelle fédérale, mais ne fournit aucun détail à ce sujet. Il ressort toutefois d'une lettre de la Cour constitutionnelle fédérale, versée au dossier par le requérant, que ce recours doit avoir été déclaré irrecevable à une date se situant avant fin janvier 1969. Le requérant déclare n'avoir pas eu connaissance des motifs de cette décision.
Le requérant, qui n'invoque aucun article de la Convention, se prétend condamné à tort et, d'une façon générale, demande l'aide de la Commission.
EN DROIT
Considérant, dans la mesure où le requérant se plaint de sa condamnation, prononcée le .. août 1967 par le tribunal régional de Munich I, que l'examen du dossier ne permet de dégager en l'état, même d'office, aucune apparence de violation des droits et libertés définis dans la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales;
Qu'il importe spécialement de rappeler que la Commission a pour seule tâche d'assurer le respect des engagements résultant de la Convention pour les Etats contractants (article 19 (art. 19)); qu'il en découle notamment qu'elle ne peut retenir une requête individuelle (article 259 relative à des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où ces erreurs lui semblent susceptibles d'avoir entraîné une atteinte aux droits et libertés garantis par la Convention (cf. parmi beaucoup d'autres, les décisions relatives aux requêtes No 458/59, alinéa II, p. 233 et No 1140/61, Recueil VIII, p. 57), ce qui n'est point le cas en l'espèce;
Qu'il appert donc que, sur ce point, la requête est manifestement mal fondée (article 27, par. 2 (art. 27-2) de la Convention);
Considérant, dans la mesure où le requérant se plaint que, dans son arrêt du .. juillet 1968, la Cour suprême fédérale n'ait pas imputé sur la durée de la peine celle de la détention préventive subie entre le .. août et le .. novembre 1967, qu'aux termes de son article 1er (art. 1), la Convention garantit uniquement "les droits et libertés définis (en son) Titre I"; que tout grief formulé par une personne physique, une organisation non gouvernementale ou un groupe de particuliers doit avoir trait, selon l'article 25, par. 1 (art. 25-1), à une atteinte alléguée à ces droits et libertés, faute de quoi son examen échappe à la compétence ratione materiae de la Commission; que le droit à l'imputation de la détention préventive sur la durée de la peine ne figure pas, en soi, au nombre des droits et libertés reconnus dans la Convention ainsi que la Commission l'a constaté dans de nombreuses décisions antérieures (cf. par exemple la décision du .. avril 1967 sur la recevabilité de la requête No 2412/65, Recueil 23, p. 38); que la requête est donc, sur ce point, incompatible avec les dispositions de la Convention, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention;
Considérant enfin que le requérant s'en prend à pratique des tribunaux allemands selon laquelle, en cas de pourvoi en cassation, la détention préventive subie après la date du jugement attaqué n'est imputée sur la durée de la peine qu'à concurrence de ce qui excède un terme de trois mois; que le requérant paraît soutenir que cette pratique est discriminatoire en ce qu'elle aboutit, en fait, à prolonger la durée de la peine de ceux qui, pendant l'examen de leur pourvoi en cassation, se trouvent en détention préventive, par rapport à ceux qui se trouvent en liberté provisoire ou à ceux qui purgent une autre peine privative de liberté; qu'il convient de relever tout d'abord qu'à teneur des paragraphes 268 b et 343 du Code de procédure pénale allemand (Strafprozessordnung), l'exécution de la peine ne peut commencer qu'après que le jugement de condamnation soit passé en force de chose jugée, c'est-à-dire, notamment, en cas de pourvoi en cassation, après la décision de la juridiction de cassation lorsque cette décision comporte rejet du pourvoi; qu'en conséquence, la détention subie pendant la procédure d'examen d'un pourvoi en cassation ne peut être considérée comme une détention après condamnation, au sens de l'article 5, paragraphe 1 (a) (art. 5-1-a) de la Convention, mais qu'elle s'analyse en une détention préventive, au sens de l'article 5, paragraphe 1 (c) (art. 5-1-c) de la Convention; que cette dernière disposition, de caractère permissif, n'érige nullement en règle absolue la mise en détention préventive des personnes soupçonnées d'une infraction pénale, mais au contraire implique donc une différence de traitement entre accusés pendant la durée de la procédure, les uns étant détenus, les autres étant en liberté; qu'une telle différence de traitement étant légitime, au regard de la Convention, le fait qu'une partie seulement de la détention préventive, subie pendant la procédure de cassation, soit imputée sur la durée de la peine ne saurait a fortiori être qualifié de discriminatoire, au sens de l'article 14 (art. 14) de la Convention; qu'en l'espèce, l'examen du dossier ne révèle donc, en l'état, aucune apparence de violation de la Convention, notamment de son Article 14 (art. 14), combiné avec son Article 5 (art. 5), de sorte que la requête doit être rejetée, sur ce point, pour défaut manifeste de fondement, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
Par ces motifs, DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE.