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04/06/2025 | CJUE | N°T-100/23

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, ABLV Bank AS contre Banque centrale européenne., 04/06/2025, T-100/23


 ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

4 juin 2025 ( *1 )

« Accès aux documents – Décision 2004/258/CE – Documents afférents à l’annonce d’une autorité américaine (FinCEN) à l’égard d’ABLV Bank – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection de la confidentialité des informations protégées en tant que telles en vertu du droit de l’Union – Exception relative à la protection des documents destinés à l’utilisation interne – Exception relative à la protection des échanges de vues entre la BCE et les autorités

concernées – Caractère suffisamment
précis d’une demande d’accès – Devoir d’assistance de la BCE – Article 6, par...

 ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

4 juin 2025 ( *1 )

« Accès aux documents – Décision 2004/258/CE – Documents afférents à l’annonce d’une autorité américaine (FinCEN) à l’égard d’ABLV Bank – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection de la confidentialité des informations protégées en tant que telles en vertu du droit de l’Union – Exception relative à la protection des documents destinés à l’utilisation interne – Exception relative à la protection des échanges de vues entre la BCE et les autorités concernées – Caractère suffisamment
précis d’une demande d’accès – Devoir d’assistance de la BCE – Article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2004/258 »

Dans l’affaire T‑100/23,

ABLV Bank AS, établie à Riga (Lettonie), représentée par Me O. Behrends, avocat,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par MM. F. von Lindeiner, D. Báez Seara et J. Ruiz Jiménez, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. E. Buttigieg et G. Hesse (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 5 juin 2024 et les réponses respectives de la requérante et de la BCE déposées le 21 juin 2024,

vu la mesure d’instruction du 18 juin 2024 et la réponse de la BCE déposée au greffe du Tribunal le 3 juillet 2024,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt ( 1 )

1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, ABLV Bank AS, demande l’annulation de la décision LS/CL/2022/261 de la Banque centrale européenne (BCE), du 8 décembre 2022, rejetant sa demande d’accès à des documents (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

[omissis]

7 Le 25 mai 2022, la requérante a adressé une demande d’accès aux documents à la BCE. Elle demandait l’accès à :

– tout document relatif, directement ou indirectement, au Financial Crimes Enforcement Network (FinCEN, réseau de lutte contre la criminalité financière) et/ou à d’autres services ou responsables d’autres services du département du Trésor américain ou à d’autres autorités américaines ou à d’autres autorités aux États-Unis et/ou à la requérante et/ou à sa filiale luxembourgeoise ;

– tout document contenant des communications, directement ou indirectement, avec le FinCEN et/ou ses responsables et/ou d’autres services ou responsables d’autres services du département du Trésor américain ou d’autres autorités américaines ou d’autres autorités aux États-Unis ;

– tout document relatif, directement ou indirectement, à la décision du Korupcijas novēršanas un apkarošanas birojs (Bureau de prévention et de lutte contre la corruption, Lettonie, ci-après le « KNAB »), aux faits mentionnés dans la décision du KNAB et/ou aux constatations factuelles figurant dans la décision du KNAB, que ces communications aient eu lieu avant ou après l’annonce du FinCEN ;

– tout document relatif, directement ou indirectement, à des actes ou des omissions de la BCE, du Conseil de résolution unique (CRU), de la Finanšu un kapitāla tirgus komisija (Commission des marchés financiers et des capitaux, Lettonie, ci-après la « CMFC »), du FinCEN ou de toute autre autorité à la suite de l’annonce du FinCEN ou avant l’annonce du FinCEN ;

– tout document relatif, directement ou indirectement, à Euroclear concernant son rôle à l’égard de la requérante et/ou de sa filiale luxembourgeoise, y compris, sans limitation, toute communication entre la BCE et/ou le CRU et Euroclear concernant, directement ou indirectement, la requérante et/ou sa filiale luxembourgeoise ;

– tout autre document concernant, directement ou indirectement, la requérante et/ou sa filiale luxembourgeoise.

[omissis]

11 Le 8 août 2022, la BCE a adressé à la requérante un courriel l’informant que la demande d’accès serait traitée en deux lots. Selon ce courriel, le premier lot couvre les documents mentionnés dans les trois premiers tirets de la demande d’accès exposés au point 7 ci-dessus. Le second lot couvrirait les documents mentionnés dans les trois autres tirets mentionnés à ce point. En ce qui concerne le premier lot, la BCE a prolongé le délai de réponse en application de l’article 7, paragraphe 1, de la
décision 2004/258. En ce qui concerne le second lot, la BCE a estimé que la demande d’accès n’était pas suffisamment précise au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258. La BCE a alors invité la requérante, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2004/258, à indiquer les sujets spécifiques ou les thèmes qui l’intéressaient ainsi qu’une période définie. La BCE a informé la requérante que le traitement du second lot était suspendu jusqu’à ce que la portée de la
demande d’accès soit précisée.

12 Par un courriel du 13 septembre 2022, la BCE a communiqué à la requérante sa décision initiale adoptée sous la référence LS/PS/2022/48. Par le même courriel, elle a informé la requérante que les trois derniers tirets de la demande d’accès n’étaient pas suffisamment précis au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258 et l’a invitée, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de la même décision, à indiquer les sujets spécifiques ou les thèmes qui l’intéressaient ainsi qu’une
période définie. Dans sa décision initiale, la BCE a notamment indiqué que, après avoir examiné les trois premiers tirets de la demande d’accès mentionnés au point 7 ci-dessus, elle avait identifié neuf documents pertinents au regard des deux premiers tirets. Aucun document de la BCE correspondant au troisième tiret n’aurait, en revanche, pu être identifié. Selon la BCE, deux des documents pertinents étaient accessibles au public (documents nos 1 et 2 ci-après) et l’accès, intégral ou partiel,
aux sept autres documents devait être refusé (documents nos 3 à 9 ci-après).

[omissis]

14 Le 11 octobre 2022, la requérante a adressé à la BCE une demande confirmative, conformément à l’article 7, paragraphe 2, de la décision 2004/258. En particulier, elle demandait que la BCE reconsidère sa position et complète la liste des documents liés à la demande d’accès. En outre, la requérante demandait, en vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’accès au dossier de la procédure en cours dans le cadre de sa demande d’accès aux
documents.

15 Le 8 décembre 2022, la BCE a adopté la décision attaquée.

[omissis]

Conclusions des parties

22 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée ;

– condamner la BCE aux dépens.

23 La BCE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

24 À l’appui du recours, la requérante invoque cinq moyens. Le premier moyen est tiré de ce que la liste des documents identifiés par la BCE serait incomplète. Le deuxième moyen est tiré de ce que, s’agissant des documents nos 1 et 2, la BCE aurait fait référence à tort au site Internet du FinCEN. Le troisième moyen est tiré de l’illégalité du refus d’accès aux documents nos 3 à 9 opposé par la BCE. Le quatrième moyen est tiré du refus de lui octroyer l’accès au dossier. Le cinquième moyen est tiré
de la suspension irrégulière de la procédure d’accès aux documents s’agissant du second lot.

[omissis]

Sur le cinquième moyen, tiré de la suspension irrégulière de la procédure s’agissant du second lot de documents liés à la demande d’accès

151 La requérante fait valoir que la BCE ne pouvait pas interrompre le traitement du second lot de documents correspondant aux trois derniers tirets de la demande d’accès. Tout d’abord, elle soutient que la décision attaquée ne contient pas de motivation suffisante à cet égard. Ensuite, elle met en exergue le fait que, bien que la BCE considère que la demande d’accès n’est pas suffisamment précise au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258, cette disposition ne permet pas
d’interrompre le traitement de la demande d’accès, à savoir suspendre les délais fixés par la décision 2004/258. Par ailleurs, la requérante indique qu’elle n’a pas répondu au courriel de la BCE du 8 août 2022 lui demandant de préciser sa demande d’accès, parce qu’elle n’y était pas tenue. La requérante y aurait vu une tactique dilatoire. Enfin, la requérante soutient que rien, dans l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la décision 2004/258, n’indique qu’une prétendue absence de précision ou un
nombre prétendument élevé de documents pourraient avoir une incidence sur les délais ou la règle de la décision négative implicite prévue à l’article 8, paragraphe 3, de la décision 2004/258.

152 La BCE fait valoir, en substance, que le cinquième moyen est irrecevable, inopérant et, en tout état de cause, non fondé. Elle soutient qu’elle a invité la requérante, en application de l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2004/258, à clarifier l’objet des trois derniers tirets de sa demande d’accès par deux courriels envoyés respectivement les 8 août et 13 septembre 2022. La requérante n’aurait pas réagi à ce sujet dans sa demande confirmative. La BCE soutient que le présent moyen
est irrecevable en ce qu’il n’est pas dirigé contre la décision attaquée, mais contre le courriel du 8 août 2022. Selon elle, ce moyen est sans rapport avec l’objet du litige et elle est donc dans l’incapacité de préparer sa défense. La requérante serait, en outre, forclose à contester ce courriel. En tout état de cause, la BCE soutient avoir agi dans le respect de l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2004/258 en qualifiant d’insuffisamment précis les trois derniers tirets de la
demande d’accès et en demandant des précisions complémentaires.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par la BCE

153 En premier lieu, s’agissant de la fin de non-recevoir tirée de ce que le présent moyen, qui concerne les trois derniers tirets de la demande d’accès, serait sans rapport avec l’objet du litige, la requérante fait valoir à juste titre que l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258, dont le libellé est repris au point 171 ci-après, ne permet pas d’interrompre le traitement d’une demande d’accès ou, autrement dit, de « suspendre » les délais fixés par les articles 7 et 8 de la
décision 2004/258. En effet, ces délais, institués dans l’intérêt général, ne sont pas à la disposition des parties (voir, par analogie, arrêt du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 24).

154 En l’espèce, il y a lieu, toutefois, de relever que, dans la décision attaquée, la BCE a indiqué ce qui suit :

« [...] Dans [la décision initiale], le directeur général a examiné le premier lot de votre demande d’accès (les trois premiers éléments de votre demande initiale). Le traitement des autres éléments de votre demande initiale a été suspendu, sous réserve de précisions supplémentaires de votre part. Cela signifie que votre demande confirmative ne peut être évaluée que dans la mesure où elle concerne la non-divulgation de documents identifiés dans la [décision initiale]. […] Enfin, nous vous
rappelons que pour traiter le second lot de documents relevant du champ d’application de votre demande initiale, votre contribution est toujours nécessaire. »

155 À cet égard, la note en bas de page no 2 de la décision attaquée renvoie aux courriels de la BCE envoyés à la requérante les 8 août et 13 septembre 2022, et précise : « [é]tant donné que votre demande confirmative faisait suite à ces courriels, la BCE conclut que vous avez reçu la correspondance et avez choisi de ne pas saisir cette occasion pour apporter des éclaircissements ».

156 Il ressort du dossier que, dans le courriel du 8 août 2022, la BCE précisait :

« En ce qui concerne le second lot couvrant les trois autres éléments de votre demande [...] nous notons que leur portée est extrêmement large et générale et que la demande n’est pas, en tant que telle, suffisamment précise au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la décision [2004/258]. Par conséquent, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de cette décision, nous vous invitons à indiquer le(s) sujet(s) spécifique(s) ou sujet(s) présentant un intérêt pour ABLV Bank et une période définie. »

157 Ce constat a été réitéré dans les mêmes termes par la BCE dans son courriel du 13 septembre 2022.

158 Il s’ensuit que même si, dans la décision attaquée, la BCE a indiqué que le traitement des trois derniers tirets de la demande d’accès était « suspendu », cette indication ne l’a pas empêchée d’examiner la portée de cette partie de la demande pour conclure, en substance, que cette dernière n’était pas suffisamment précise pour lui permettre de comprendre sur quels documents elle portait. Ce faisant, la BCE a considéré, en réalité, que les trois derniers tirets de la demande d’accès ne
remplissaient pas les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258, ce que la requérante est en droit de contester dans le cadre du présent recours visant la décision attaquée.

159 Par ailleurs, contrairement à ce que suggère la BCE, il ressort, respectivement, de la requête et du mémoire en défense que les arguments de la requérante concernant le second lot de documents liés aux trois derniers tirets de la demande d’accès sont intelligibles et que la BCE a été en mesure d’y répondre. Le Tribunal n’a pas eu non plus de difficulté à comprendre l’argumentation de la requérante à la lecture de la requête.

160 Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par la BCE, tirée de ce que le présent moyen serait sans rapport avec l’objet du litige, ne saurait être accueillie.

[omissis]

Sur le fond

[omissis]

– Sur la violation de l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2004/258

170 Étant donné que la BCE a considéré que les trois derniers tirets de la demande d’accès ne remplissaient pas les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258, il convient d’examiner, dans un premier temps, si cette partie de la demande d’accès était suffisamment précise au sens de l’article 6, paragraphe 1, de ladite décision et, dans un second temps, si la BCE a respecté son devoir d’assistance visé à l’article 6, paragraphe 2, de la même décision.

171 En premier lieu, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258, la demande d’accès devait être formulée de manière « suffisamment précise pour permettre à [l’institution] d’identifier le document [demandé] ». Il importe de préciser que la charge de travail requise par l’exercice du droit d’accès et l’intérêt du demandeur ne sont, en principe, pas pertinents (voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125,
point 108).

172 Il convient donc de déterminer, compte tenu des termes de la demande d’accès, si la BCE était en mesure d’identifier les documents demandés, quel qu’ait été leur nombre ou l’intérêt poursuivi par la requérante.

173 À cet égard, les trois derniers tirets de la demande d’accès concernaient :

– tout document relatif, directement ou indirectement, à des actes ou des omissions de la BCE, du CRU, de la CMFC, du FinCEN ou de toute autre autorité à la suite de l’annonce du FinCEN ou avant l’annonce du FinCEN ;

– tout document relatif, directement ou indirectement, à Euroclear concernant son rôle à l’égard de la requérante et/ou de sa filiale luxembourgeoise, y compris, sans limitation, toute communication entre la BCE et/ou le CRU et Euroclear concernant directement ou indirectement la requérante et/ou sa filiale luxembourgeoise ;

– tout autre document concernant, directement ou indirectement, la requérante et/ou sa filiale luxembourgeoise.

174 Au vu des termes généraux des trois derniers tirets de la demande d’accès, la BCE pouvait légitimement demander une clarification pour ces catégories de documents. En effet, ainsi que le fait valoir la BCE à juste titre, au regard du libellé des trois derniers tirets de la demande d’accès et notamment en l’absence d’une période définie, il n’était pas possible de savoir si cette partie de la demande portait sur des documents liés à l’annonce du FinCEN ou sur d’autres questions de surveillance.

175 En second lieu, il y a lieu de déterminer si la BCE a rempli son devoir d’assistance (arrêt du 10 septembre 2008, Williams/Commission, T‑42/05, non publié, EU:T:2008:325, points 74 à 78).

176 Selon l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2004/258, « [s]i une demande n’est pas suffisamment précise, la BCE invite le demandeur à la clarifier et assiste celui-ci à cette fin ». Selon la jurisprudence, les verbes « invite » et « assiste » indiquent que le seul constat de l’insuffisance de précision de la demande d’accès, quelles qu’en soient les raisons, doit amener l’institution destinataire à prendre contact avec le demandeur afin de définir au mieux les documents demandés. Il s’agit
donc d’une disposition qui, dans le domaine de l’accès du public aux documents, constitue la transcription formelle du principe de bonne administration, qui figure parmi les garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives. Le devoir d’assistance est ainsi fondamental pour assurer l’effet utile du droit d’accès défini par la décision 2004/258 (voir arrêt du 26 octobre 2011, Dufour/BCE, T‑436/09, EU:T:2011:634, point 30 et jurisprudence citée).

177 En l’espèce, il convient de rappeler que, par un courriel du 8 août 2022, la BCE a informé la requérante que les trois derniers tirets de sa demande d’accès n’étaient pas suffisamment précis et l’a invitée à lui indiquer un ou plusieurs sujets spécifiques qui l’intéressaient ainsi qu’une période définie. Par un courriel du 13 septembre 2022, la BCE a réitéré cette demande selon les mêmes termes.

178 Dans la demande confirmative, il est indiqué ce qui suit : « [...] [l]a portée de la demande d’accès de [la requérante] comprend, notamment, tous les documents se rapportant directement ou indirectement à [la requérante] ou à sa filiale luxembourgeoise [...] [j]e vous demande spécifiquement de compléter la liste des documents [...] ». Elle n’a rien indiqué d’autre s’agissant des trois derniers tirets de la demande d’accès. Elle n’a pas non plus expressément contesté que la demande d’accès
n’était pas suffisamment précise au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258.

179 Au vu des éléments exposés aux points 177 et 178 ci-dessus, la BCE a mis en œuvre son devoir d’assistance, puisqu’elle a invité la requérante à clarifier la demande d’accès en lui indiquant la période et les sujets qui l’intéressaient. Toutefois, la requérante ne lui a donné aucune information utile pour lui permettre d’identifier des documents spécifiques correspondant à cette demande. En effet, la requérante s’est limitée à répéter, sans aucune autre précision, le libellé du sixième tiret de
la demande d’accès et est restée silencieuse quant aux quatrième et cinquième tirets de ladite demande. Au demeurant, aux points 182 à 185 de la requête, la requérante a expliqué qu’elle n’avait pas voulu répondre à la demande de clarifications de la BCE, car elle y avait vu une tactique dilatoire qui aurait entrainé des frais juridiques excessifs. Cependant, dans la mesure où les termes des trois derniers tirets de la demande d’accès n’étaient effectivement pas suffisamment précis en ce qu’ils
ne visaient aucun sujet particulier ni aucune période spécifique, il n’y avait pas lieu de considérer qu’il s’agissait d’une tactique dilatoire de la part de la BCE.

180 Si, comme le soutient la requérante, la charge de travail requise par l’exercice du droit d’accès aux documents et l’intérêt du demandeur ne sont en principe pas pertinents pour moduler l’exercice de ce droit, il n’en demeure pas moins que, sa demande d’accès étant insuffisamment précise, la requérante ne pouvait s’abstenir de préciser sa demande sans risquer de voir la BCE lui opposer que cette demande ne remplissait pas les conditions de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258
(voir, en ce sens, ordonnance du 7 septembre 2009, LPN/Commission, T‑186/08, non publiée, EU:T:2009:309, point 62).

181 En l’espèce, l’absence de clarifications de la part de la requérante n’est pas le fait de son incapacité à identifier les documents qui contiendraient les informations qu’elle recherche, mais est la conséquence de son absence de volonté de préciser la demande d’accès.

182 Il s’ensuit, d’une part, que la BCE a considéré à juste titre que les trois derniers tirets de la demande d’accès ne remplissaient pas les conditions de l’article 6, paragraphe 1, de la décision 2004/258 et, partant, ne pouvaient pas être considérés comme une « demande d’accès » au sens de cette disposition et, d’autre part, que la BCE a dûment mis en œuvre son devoir d’assistance en application de l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2004/258.

183 Par conséquent, le cinquième moyen, tiré de la suspension irrégulière de la procédure s’agissant du second lot de documents liés à la demande d’accès, doit être écarté.

[omissis]

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

  1) Le recours est rejeté.

  2) ABLV Bank AS supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Banque centrale européenne (BCE).

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

  Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 juin 2025.

Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.


Synthèse
Formation : Septième chambre
Numéro d'arrêt : T-100/23
Date de la décision : 04/06/2025
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Accès aux documents – Décision 2004/258/CE – Documents afférents à l’annonce d’une autorité américaine (FinCEN) à l’égard d’ABLV Bank – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection de la confidentialité des informations protégées en tant que telles en vertu du droit de l’Union – Exception relative à la protection des documents destinés à l’utilisation interne – Exception relative à la protection des échanges de vues entre la BCE et les autorités concernées – Caractère suffisamment précis d’une demande d’accès – Devoir d’assistance de la BCE – Article 6, paragraphes 1 et 2, de la décision 2004/258.

Dispositions institutionnelles

Accès aux documents


Parties
Demandeurs : ABLV Bank AS
Défendeurs : Banque centrale européenne.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Hesse

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2025:564

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