ORDONNANCE DU TRIBUNAL (neuvième chambre)
17 octobre 2024 ( *1 )
« Recours en annulation – Agriculture – Plan stratégique relevant de la politique agricole commune (PAC) – Règlement (UE) 2021/2115 – Règles régissant l’aide aux plans stratégiques établis par les États membres dans le cadre de la PAC – Approbation de la Commission – Procédure administrative composite ou complexe – Compétence du Tribunal – Recevabilité – Respect du délai de recours – Prise de connaissance de l’acte attaqué – Qualité pour agir »
Dans l’affaire T‑729/22,
Complejo Agrícola Las Lomas, SL, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me J. Sedano Lorenzo, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par Mmes A.-C. Becker et F. Castilla Contreras, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre),
composé de MM. L. Truchot, président, H. Kanninen (rapporteur) et Mme T. Perišin, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Complejo Agrícola Las Lomas, SL, demande l’annulation de la décision d’exécution C(2022) 6017 final de la Commission, du 31 août 2022, portant approbation du plan stratégique de l’Espagne relevant de la PAC 2023-2027 en vue d’une aide de l’Union financée par le Fonds européen agricole de garantie et le Fonds européen agricole pour le développement rural (ci-après la « décision attaquée »), en ce que celle-ci a approuvé le point 3.4 du
plan stratégique espagnol relevant de la politique agricole commune (PAC) selon lequel le montant maximal de l’aide de base au revenu pour un développement durable à octroyer à un agriculteur en vertu de l’article 21 du règlement (UE) 2021/2115 du Parlement européen et du Conseil, du 2 décembre 2021, établissant des règles régissant l’aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (plans stratégiques relevant de la PAC) et
financés par le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), et abrogeant les règlements (UE) no 1305/2013 et (UE) no 1307/2013 (JO 2021, L 435, p. 1), ne pourra excéder la somme de 200000 euros (ci-après la « mesure litigieuse »).
Antécédents du litige
2 La requérante est une société espagnole, établie à Madrid (Espagne), ayant pour objet, notamment, l’acquisition et l’exploitation de terres agricoles pour des activités agricoles, forestières et d’élevage.
3 Le 29 décembre 2021, le Royaume d’Espagne, au titre de l’article 118, paragraphe 1, du règlement 2021/2115, a présenté à la Commission européenne une proposition de plan stratégique relevant de la PAC (ci-après le « PSPAC ») pour la période 2023-2027.
4 Le 31 mars 2022, conformément à l’article 118, paragraphe 2, du règlement 2021/2115, la Commission, après avoir évalué la proposition de PSPAC élaborée par le Royaume d’Espagne (ci-après le « PSPAC espagnol »), a formulé des observations et demandé des informations supplémentaires.
5 Le 27 juillet 2022, le Royaume d’Espagne a communiqué à la Commission des informations pour donner suite à ses observations et a présenté une version révisée de sa proposition de PSPAC.
6 Le 31 août 2022, la Commission a adopté la décision attaquée, approuvant le PSPAC espagnol proposé, au titre de l’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115.
Procédure et conclusions des parties
7 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée, en ce que la Commission a approuvé la mesure litigieuse ;
– condamner la Commission aux dépens.
8 La requérante demande également que la Commission produise le rapport de la procédure d’élaboration de la proposition de PSPAC espagnol qui serait en sa possession.
9 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 16 février 2023, la Commission, au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, a soulevé une exception d’irrecevabilité dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme irrecevable ;
– condamner la requérante aux dépens.
10 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 27 février 2023, le Royaume d’Espagne a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission.
11 Le 17 avril 2023, la requérante a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission. Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter ladite exception.
En droit
12 En vertu de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande par acte séparé, le Tribunal peut statuer sur l’incompétence ou l’irrecevabilité, sans engager le débat au fond.
13 En l’espèce, la Commission ayant demandé qu’il soit statué sur l’exception d’irrecevabilité, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sans poursuivre la procédure.
14 À l’appui de l’exception d’irrecevabilité, la Commission invoque, premièrement, le non-respect des exigences prévues à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure, deuxièmement, l’absence de compétence du Tribunal pour contrôler la mesure litigieuse et, troisièmement, un défaut de qualité pour agir de la requérante.
15 Interrogée par le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure adoptées au titre de l’article 89 du règlement de procédure, sur le respect du délai de recours à l’encontre de la décision attaquée, la Commission estime également que la requête a été déposée hors délai.
Sur le respect du délai de recours
16 La Commission fait valoir que le point de départ du délai pour introduire le présent recours était la date d’adoption de la décision attaquée, le 31 août 2022, ou au plus tard sa date de publication sur son site Internet, à savoir le 8 septembre 2022. Selon elle, la requérante avait connaissance de l’existence de ladite décision au plus tard à partir de cette dernière date. Or, la requérante n’aurait pas satisfait à son obligation de diligence pour demander, dans un délai raisonnable, l’accès au
texte intégral de cette décision. Ainsi, le délai de deux mois et dix jours aurait expiré le 21 novembre 2022 et le recours a été introduit le lendemain.
17 La requérante fait valoir que, en l’absence de publication au Journal officiel de l’Union européenne ou de notification de la décision attaquée, il convient d’appliquer le critère de la prise de connaissance au sens de l’article 263, sixième alinéa, TFUE. Elle affirme n’avoir pris connaissance de la décision attaquée que vers le milieu du mois d’octobre 2022 en consultant le site Internet du ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation espagnol.
18 Aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification à la partie requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance. Il découle du libellé même de cette disposition que le critère de la date de prise de connaissance de l’acte en tant que point de départ du délai de recours présente un caractère subsidiaire par rapport à ceux de la
publication ou de la notification de l’acte (arrêt du 10 mars 1998, Allemagne/Conseil, C‑122/95, EU:C:1998:94, point 35).
19 De plus, conformément à l’article 60 du règlement de procédure, ce délai doit en outre être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.
20 En premier lieu, il n’est pas contesté que la décision attaquée n’a pas été notifiée à la requérante, celle-ci n’en étant pas la destinataire.
21 En second lieu, selon la jurisprudence, pour que la publication de l’acte attaqué soit le point de départ du délai de recours, au sens de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, une telle publication doit être exigée par une disposition du droit primaire ou dérivé de l’Union européenne, ou découler à tout le moins d’une pratique établie que la partie requérante pouvait légitimement escompter (voir, en ce sens, ordonnance du 15 mai 2019, Metrans/Commission et INEA, T‑262/17, EU:T:2019:341, point 39
et jurisprudence citée).
22 En l’espèce, premièrement, il est constant que la décision attaquée n’a pas été publiée au Journal officiel.
23 Deuxièmement, ni l’article 118 du règlement 2021/2115 ni aucune autre disposition de ce règlement ne prévoit un mode de publication spécifique des décisions d’approbation des PSPAC.
24 Troisièmement, il y a lieu de constater que, ainsi que la Commission l’indique dans sa réponse à une question du Tribunal, il n’existe pas de pratique établie de cette institution en matière de publication des décisions, telle que la décision attaquée, que la requérante pouvait légitimement escompter.
25 Dès lors, la décision attaquée n’ayant été ni publiée, ni notifiée à la requérante, le délai de recours contre cet acte a commencé à courir, comme le prévoit l’article 263, sixième alinéa, TFUE, lorsque la requérante en a eu connaissance.
26 Or, il est de jurisprudence constante que, à défaut de publication ou de notification, le délai de recours ne court qu’à partir du moment où l’intéressé a une connaissance exacte du contenu et des motifs de l’acte en cause, à condition qu’il en demande le texte intégral dans un délai raisonnable à compter de la connaissance de l’existence de l’acte (voir, en ce sens, ordonnance du 19 novembre 2018, Landesbank Baden-Württemberg/CRU, T‑14/17, non publiée, EU:T:2018:812, point 35 et jurisprudence
citée).
27 Ainsi, la jurisprudence met à la charge du tiers concerné, pour que le délai ne commence à courir à son égard qu’au moment où il connaît l’ensemble des éléments pertinents pour l’introduction du recours, l’obligation de demander avec diligence le texte intégral de l’acte le concernant (voir ordonnance du 8 décembre 2021, Alessio e.a./BCE, T‑620/20, non publiée, EU:T:2021:877, point 44 et jurisprudence citée).
28 Il ressort de la jurisprudence que la connaissance de l’existence d’un acte peut être déduite de diverses circonstances comme, premièrement, les déclaration orales ou écrites du tiers concerné, deuxièmement, la publication au Journal officiel d’une communication succincte concernant l’acte attaqué, troisièmement, la publication au Journal officiel d’un État membre d’un acte national se référant, même de manière imprécise, à l’acte attaqué, quatrièmement, des situations dans lesquelles ces
circonstances sont combinées, par exemple lorsque l’acte attaqué a été diffusé dans les médias et que des déclarations émanant du tiers concerné laissent entendre qu’il savait qu’un acte avait été adopté, dans un contexte où il était manifeste qu’il suivait de près l’évolution du dossier (voir, en ce sens, ordonnance du 8 décembre 2021, Alessio e.a./BCE, T‑620/20, non publiée, EU:T:2021:877, points 47 à 49 et jurisprudence citée).
29 Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que le délai de deux mois prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE, qui court, à défaut de publication ou de notification de l’acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation, à compter de la date à laquelle la partie requérante en a eu connaissance, est différent du délai raisonnable dont cette partie dispose pour demander la communication du texte intégral de ce même acte afin d’en avoir une connaissance exacte (voir ordonnance du
19 novembre 2018, Landesbank Baden-Württemberg/CRU, T‑14/17, non publiée, EU:T:2018:812, point 36 et jurisprudence citée).
30 Le critère du délai raisonnable pour demander la communication d’un acte après prise de connaissance de son existence n’est donc pas un délai préfix qui se déduirait automatiquement de la durée du délai du recours en annulation, mais un délai dépendant des circonstances du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2013, Réexamen Arango Jaramillo e.a./BEI, C‑334/12 RX‑II, EU:C:2013:134, points 32 à 34).
31 À cet égard, il y a lieu de noter qu’il a été jugé dans certaines affaires qu’une demande de communication du texte intégral d’un acte présentée deux mois (voir, en ce sens, ordonnance du 5 mars 1993, Ferriere Acciaierie Sarde/Commission, C‑102/92, EU:C:1993:86, point 19), plus de quatre mois (voir, en ce sens, ordonnances du 10 novembre 2011, Agapiou Joséphidès/Commision et EACEA, C‑626/10 P, non publiée, EU:C:2011:726, points 130 à 132 ; du 15 juillet 1998, LPN et GEOTA/Commission, T‑155/95,
EU:T:1998:167, point 44, et du 19 novembre 2018, VR-Bank Rhein-Sieg/CRU, T‑42/17, non publiée, EU:T:2018:813, points 44 à 49) ou plus de six mois (voir, en ce sens, ordonnance du 18 mai 2010, Abertis Infraestructuras/Commission, T‑200/09, non publiée, EU:T:2010:200, point 63) après que la partie requérante avait pris connaissance de son existence dépassait le délai raisonnable.
32 Par ailleurs, dans des circonstances différentes, il a été considéré qu’un délai de deux semaines (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 1995, Socurte e.a./Commission, T‑432/93 à T‑434/93, EU:T:1995:43, point 50) ou d’un mois constituait un délai raisonnable (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 1994, Consorzio gruppo di azione locale Murgia Messapica /Commission, T‑465/93, EU:T:1994:56, point 32).
33 En l’espèce, d’une part, l’adoption de la décision attaquée a été annoncée par des communiqués de presse du 31 août 2022 émanant de la représentation de la Commission en Espagne ainsi que du gouvernement espagnol et, d’autre part, la décision attaquée a été mise en ligne sur le site Internet de la Commission le 8 septembre 2022 ainsi que sur le site Internet du ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation espagnol le 19 septembre 2022.
34 La requérante déclare avoir eu connaissance de la décision attaquée vers le milieu du mois d’octobre 2022 en consultant le site Internet du ministère de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation espagnol sans être en mesure d’en identifier le jour exact.
35 En tout état de cause, même si la requérante avait eu connaissance de l’existence de la décision attaquée le 31 août ou le 8 septembre 2022 comme l’affirme la Commission, sa prétendue inactivité entre ces dates et la mi-octobre 2022 est tout au plus d’environ un mois et demi. Or, un tel délai ne saurait être considéré, dans les circonstances de l’espèce, comme dépassant le délai raisonnable.
36 En effet, il convient également de tenir compte en l’espèce de la circonstance que le recours en annulation a été introduit le 22 novembre 2022 et ne saurait donc être considéré comme tardif que si la requérante a eu connaissance du contenu de la décision attaquée avant le 12 septembre 2022.
37 À cet égard, il convient de rappeler qu’il appartient à la partie qui se prévaut de la tardiveté d’un recours, au regard du délai fixé, notamment, par l’article 263, sixième alinéa, TFUE, de fournir la preuve de la date à laquelle l’événement faisant courir le délai est survenu (voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑167/10, non publié, EU:T:2012:651, point 39 et jurisprudence citée).
38 Or, en l’espèce, la Commission n’a pas présenté d’éléments pour démontrer que la requérante avait pris connaissance du contenu de la décision attaquée avant le 12 septembre 2022, mais s’est contentée de soutenir que la requérante avait eu connaissance de son existence au plus tard le 8 septembre 2022.
39 Dès lors, le présent recours ne saurait être considéré comme ayant été introduit tardivement.
Sur le respect des exigences de forme
40 La Commission fait valoir que le recours est irrecevable au motif que la requête ne remplit pas les conditions prévues à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure. Selon elle, même si la requête indique qu’il s’agit d’un recours visant à obtenir l’annulation partielle de la décision attaquée, l’objet du litige serait en réalité la légalité de la mesure litigieuse. Ainsi, les conclusions de la requérante ne
tendraient pas à l’annulation de ladite décision, mais à celle de cette mesure. Enfin, les moyens d’annulation n’identifieraient aucune erreur ou illégalité commise lors de l’adoption de cette décision, mais mentionneraient des manquements de la part des autorités espagnoles. De plus, les moyens invoqués dans la requête seraient insuffisamment clairs et se borneraient à faire des références abstraites et généralisées à la jurisprudence sans l’appliquer au cas d’espèce.
41 La requérante estime que l’objet du litige est clairement identifié et consiste à contester la légalité de la décision attaquée en ce qu’elle approuve la proposition de PSPAC espagnol. Elle considère que la mesure litigieuse fait partie de ladite décision et que le PSPAC espagnol n’est pas une mesure autonome et distincte de cette décision. À cet égard, elle fait référence aux compétences de la Commission en vertu de l’article 118 du règlement 2021/2115.
42 En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, ainsi que de l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens et les conclusions de la partie requérante.
43 Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et
compréhensible du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 4 juillet 2019,Italie/Commission, T‑598/17, non publié, EU:T:2019:482, point 29 et jurisprudence citée, et ordonnance du 9 juillet 2019, Scaloni et Figini/Commission, T‑158/18, non publiée, EU:T:2019:491, point 29 et jurisprudence citée).
44 S’agissant plus particulièrement des conclusions des parties, il y a lieu de rappeler que ces dernières définissent l’objet du litige porté devant les juridictions de l’Union et que, en conséquence, ces conclusions doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que le juge de l’Union ne statue ultra petita (voir arrêt du 14 septembre 2017, Università del Salento/Commission, T‑393/15, non publié, EU:T:2017:604, point 75 et jurisprudence citée ; ordonnance du 19 novembre 2020, Comune
di Stintino/Commission, T‑174/20, non publiée, EU:T:2020:551, point 45). En particulier, lorsqu’il s’agit d’un recours en annulation, il convient que l’acte dont l’annulation est demandée soit clairement désigné (voir, en ce sens, ordonnance du 6 novembre 2018, Chioreanu/ERCEA, T‑717/17, EU:T:2018:765, point 24 et jurisprudence citée).
45 En l’espèce, il est vrai que, dans la requête, la requérante demande, d’une part, l’annulation partielle de la décision attaquée et, d’autre part, la constatation de l’illégalité de la mesure litigieuse. Toutefois, il résulte d’une lecture d’ensemble de la requête que, par son recours, la requérante demande l’annulation de ladite décision en ce qu’elle approuve cette mesure en violation du droit de l’Union.
46 D’ailleurs, c’est également ainsi que la Commission a compris les conclusions de la requérante dans l’exception d’irrecevabilité. En effet, si elle reproche à la requérante de faire une confusion entre la décision attaquée et le PSPAC espagnol qui seraient en réalité deux actes distincts, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une question ayant trait à l’imputabilité des griefs invoqués par la requérante à la Commission et non à la clarté ou à la précision de la requête. Or, cette question de
l’imputabilité relève du motif d’irrecevabilité tiré de l’incompétence du Tribunal pour contrôler la mesure litigieuse (voir point 14 ci-dessus).
47 Quant aux moyens et éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours en annulation est fondé, ils ressortent suffisamment clairement de la requête. Cette dernière comprend quatre moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 17 du règlement 2021/2115, le deuxième, de l’absence d’évaluation de l’incidence de la mesure litigieuse quant à sa compatibilité avec les objectifs de la PAC, le troisième, d’une distorsion du marché intérieur au détriment des agriculteurs espagnols
ayant pour conséquence la fragmentation de la PAC et, le quatrième, d’une violation du principe de proportionnalité. De plus, la requérante mentionne des arrêts du Tribunal et de la Cour qu’elle met en lien avec les faits de l’espèce.
48 Il découle de ce qui précède que le recours n’est pas irrecevable pour cause de violation des exigences prévues à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure.
49 Partant, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée du non-respect des exigences de forme de la requête.
Sur la compétence du Tribunal pour contrôler la mesure litigieuse et l’imputabilité des griefs invoqués à la Commission
50 La Commission fait valoir que le recours est irrecevable en ce que le véritable objet du litige est le contrôle de légalité du PSPAC espagnol qui est un acte juridique adopté par un État membre dont le contrôle ne relève pas de la compétence du Tribunal. Ainsi, le Tribunal ne serait pas compétent pour statuer sur la légalité de la mesure litigieuse. La Commission soutient que son approbation de l’ensemble dudit PSPAC n’a aucune incidence sur l’auteur et la nature de ce texte, celui-ci demeurant
un acte adopté par les autorités espagnoles. Les PSPAC seraient des mesures nationales produisant des effets juridiques dans l’ordre juridique de l’État membre concerné et non des actes des institutions, des organes ou des organismes de l’Union au sens de l’article 263 TFUE. Il reviendrait aux juridictions nationales de contrôler la légalité des PSPAC et de leurs mesures à la lumière du droit de l’Union, notamment du règlement 2021/2115, et le cas échéant de saisir la Cour à titre préjudiciel, en
vertu de l’article 267 TFUE.
51 La requérante considère que le Tribunal est compétent pour contrôler la légalité des décisions de la Commission, y compris celles approuvant les propositions de PSPAC. Selon elle, le PSPAC espagnol et la décision attaquée forment un acte unique qui relève de la compétence exclusive de la Commission dans la mesure où le Royaume d’Espagne a seulement collaboré à son élaboration. De plus, l’approbation des propositions de PSPAC constituerait une procédure régie par le droit de l’Union dont le seul
acte attaquable serait la décision de la Commission les approuvant. La distinction opérée par la Commission entre la décision attaquée et le PSPAC espagnol reviendrait à vider de sa substance l’examen mené par la Commission et à soustraire les PSPAC à tout contrôle juridictionnel, ce qui irait à l’encontre du droit à un recours juridictionnel effectif. Par ailleurs, le PSPAC espagnol ne pourrait pas davantage être contesté devant les juridictions espagnoles dans la mesure où il s’agirait d’un
acte préparatoire réalisé dans le cadre d’une procédure de droit de l’Union.
52 En l’espèce, les conclusions en annulation sont formellement dirigées contre la décision attaquée qui est une décision d’exécution. Une telle décision de la Commission fait partie des actes dont le contrôle de légalité relève, conformément à l’article 263 TFUE, de la compétence du juge de l’Union, en l’occurrence du Tribunal. Cela n’est d’ailleurs pas contesté par la Commission.
53 La thèse de la Commission, pour contester la compétence du Tribunal en l’espèce, consiste à soutenir que la mesure litigieuse relève du PSPAC espagnol et non de la décision attaquée et ne lui est donc pas imputable. L’approbation de la proposition de PSPAC espagnol par ladite décision n’aurait pas modifié la nature de cet acte qui demeurerait une mesure nationale dont le contrôle de légalité serait du seul ressort du juge national.
54 Il importe de rappeler que l’argumentation de la Commission s’appuie sur des éléments tirés, d’une part, de l’imputabilité des griefs présentés par la requérante à la Commission, ce qui constitue une question relative à la recevabilité du recours et, d’autre part, de la compétence du Tribunal pour examiner ces griefs et, par voie de conséquence, la mesure litigieuse.
55 En l’espèce, il y a lieu de relever que l’élaboration et l’approbation de la proposition de PSPAC espagnol ont fait intervenir les autorités espagnoles et la Commission. Il convient donc d’examiner qui du juge de l’Union ou du juge national est compétent dans une telle procédure pour statuer sur la légalité, au regard du droit de l’Union, de la mesure litigieuse.
56 À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que l’éventuelle implication des autorités nationales dans le cours de la procédure conduisant à l’adoption des actes pris par les institutions de l’Union ne saurait mettre en cause leur qualification d’actes de l’Union, lorsque les actes pris par les autorités nationales sont une étape dans une procédure dans laquelle une institution de l’Union exerce, seule, le pouvoir décisionnel final sans être liée par les actes préparatoires ou les
propositions émanant des autorités nationales (arrêt du 19 décembre 2018, Berlusconi et Fininvest, C‑219/17, EU:C:2018:1023, point 43).
57 En effet, dans un tel cas de figure, où le droit de l’Union ne vise pas à instaurer un partage entre deux compétences, l’une nationale, l’autre de l’Union, qui auraient des objets distincts, mais consacre, au contraire, le pouvoir décisionnel exclusif d’une institution de l’Union, il revient au juge de l’Union, au titre de sa compétence exclusive pour contrôler la légalité des actes de l’Union sur le fondement de l’article 263 TFUE, de statuer sur la légalité de la décision finale prise par
l’institution de l’Union en cause et d’examiner, afin d’assurer une protection juridictionnelle effective des intéressés, les éventuels vices entachant les actes préparatoires ou les propositions émanant des autorités nationales qui seraient de nature à affecter la validité de cette décision finale (arrêt du 19 décembre 2018, Berlusconi et Fininvest, C‑219/17, EU:C:2018:1023, point 44).
58 Cela étant, un acte d’une autorité nationale qui s’insère dans un processus décisionnel de l’Union ne relève pas de la compétence exclusive du juge de l’Union lorsqu’il résulte de la répartition des compétences opérée dans le domaine considéré entre les autorités nationales et les institutions de l’Union que l’acte pris par l’autorité nationale est une étape nécessaire dans une procédure d’adoption d’un acte de l’Union dans laquelle les institutions de l’Union ne disposent que d’une marge
d’appréciation limitée ou inexistante, de sorte que l’acte national lie l’institution de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 1992, Oleificio Borelli/Commission, C‑97/91, EU:C:1992:491, points 9 et 10).
59 C’est alors aux juridictions nationales de connaître des irrégularités dont un tel acte national serait éventuellement entaché, en saisissant le cas échéant la Cour à titre préjudiciel, dans les mêmes conditions de contrôle que celles réservées à tout acte définitif qui, pris par la même autorité nationale, est susceptible de faire grief à des tiers, et de considérer d’ailleurs, au nom du principe de protection juridictionnelle effective, comme recevable le recours introduit à cette fin quand
bien même les règles de procédure nationales ne le prévoiraient pas (voir, en ce sens, arrêts du 3 décembre 1992, Oleificio Borelli/Commission, C‑97/91, EU:C:1992:491, points 11 à 13 ; du 6 décembre 2001, Carl Kühne e.a., C‑269/99, EU:C:2001:659, point 58, et du 2 juillet 2009, Bavaria et Bavaria Italia, C‑343/07, EU:C:2009:415, point 57).
60 Il convient également de rappeler que l’approbation d’une mesure nationale par la Commission n’a nullement pour effet de lui conférer la nature d’acte de droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 19 septembre 2002, Huber, C‑336/00, EU:C:2002:509, point 40, et du 4 juin 2009, JK Otsa Talu, C‑241/07, EU:C:2009:337, point 37).
61 C’est à l’aune de ces considérations qu’il convient d’examiner la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée aux fins de déterminer la juridiction compétente pour connaître du présent litige portant sur la compatibilité avec le droit de l’Union de la mesure litigieuse prévue dans la proposition de PSPAC espagnol telle qu’approuvée par la décision attaquée.
Sur l’élaboration et l’approbation du PSPAC espagnol
62 La décision attaquée est l’acte par lequel la Commission a approuvé la proposition de PSPAC espagnol conformément à la procédure prévue à l’article 118 du règlement 2021/2115.
63 Dans un premier temps, il convient d’analyser les rôles respectifs de la Commission et des États membres dans la mise en œuvre de la PAC, tels que définis par le règlement 2021/2115.
64 À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que, conformément à l’article 4, paragraphe 2, TFUE, les compétences partagées entre l’Union et les États membres s’appliquent, notamment, au domaine de l’agriculture.
65 La réforme du cadre juridique de la PAC a été réalisée par le règlement 2021/2115. Comme le rappelle le considérant 36 de ce dernier, il a été décidé de prévoir un règlement unique.
66 Selon l’article 1er, paragraphe 2, du règlement 2021/2115, celui-ci s’applique aux aides de l’Union financées par le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) pour les interventions mentionnées dans un PSPAC élaboré par un État membre et approuvé par la Commission, portant sur la période allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027. Il ressort du considérant 36 de ce règlement que ce dernier remplace les dispositions qui
figuraient dans le règlement (UE) no 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au soutien au développement rural par le Feader et abrogeant le règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 487), et le règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la PAC et abrogeant le règlement (CE)
no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 608).
67 Ensuite, s’agissant du mode de gestion de la PAC issue de cette réforme, selon le considérant 3 du règlement 2021/2115, la nouvelle approche suivie repose sur l’idée que l’Union doit fixer les paramètres essentiels de la politique, tandis que les États membres doivent assumer une plus grande part de responsabilité dans la manière dont ils réalisent ces objectifs et atteignent les valeurs cibles. De ce fait, une plus grande subsidiarité permet de mieux tenir compte des conditions et des besoins
locaux ainsi que de la nature particulière de l’activité agricole.
68 De plus, il ressort du considérant 27 du règlement 2021/2115 que la répartition des compétences au sein de ce nouveau modèle de mise en œuvre de la PAC prévoit que les objectifs, les types d’intervention et les exigences communes sont fixés au niveau de l’Union afin de garantir le caractère commun de la PAC tout en laissant aux États membres le soin de les traduire en modalités d’aide applicables aux bénéficiaires.
69 Enfin, en ce qui concerne le mode d’exécution budgétaire de la PAC, l’article 5 du règlement (UE) 2021/2116 du Parlement européen et du Conseil, du 2 décembre 2021, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la PAC et abrogeant le règlement (UE) no 1306/2013 (JO 2021, L 435, p. 187), prévoit que le FEAGA est mis en œuvre soit en gestion partagée entre les États membres et l’Union soit en gestion directe. L’article 6 du même règlement dispose que le Feader est mis en œuvre en gestion
partagée par les États membres et l’Union.
70 Dès lors, il découle des dispositions mentionnées aux points 67 à 69 ci-dessus que le nouveau mode de gestion de la PAC mis en place par le législateur de l’Union repose sur un système de collaboration qui laisse aux États membres une marge de manœuvre afin d’adapter les interventions aux nécessités et aux besoins spécifiques de leur agriculture nationale tout en prévoyant un contrôle de l’Union pour en assurer la compatibilité avec la PAC.
71 Dans un second temps, il convient d’examiner les règles applicables aux PSPAC qui viennent traduire les objectifs de ce nouveau système de gestion.
72 S’agissant de l’élaboration des PSPAC, premièrement, il ressort de l’article 104, paragraphe 1, du règlement 2021/2115 que les États membres établissent des PSPAC afin de mettre en œuvre les aides de l’Union financées par le FEAGA et le Feader.
73 À cet égard, les articles 5 et 6 du règlement 2021/2115 fixent les objectifs de l’Union et l’article 7 établit les indicateurs qui seront utilisés pour évaluer leur réalisation. De plus, l’article 9 prévoit notamment que les États membres conçoivent les interventions de leurs PSPAC dans le respect de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et des principes généraux du droit de l’Union. En outre, les articles 8 à 84 déterminent les types d’intervention
ainsi que les exigences communes à appliquer par les États membres afin de garantir le caractère commun de la PAC.
74 Deuxièmement, l’article 106, paragraphe 1, du règlement 2021/2115 précise que les États membres élaborent les PSPAC conformément à leur cadre institutionnel et juridique.
75 Troisièmement, les articles 107 à 115 du règlement 2021/2115 fixent des exigences en matière de contenu et de présentation des PSPAC. Ceux-ci constituent des documents d’orientation sur la stratégie adoptée par chaque État membre afin de mettre en œuvre la PAC.
76 S’agissant de l’approbation des PSPAC par la Commission, le considérant 110 du règlement 2021/2115 précise qu’elle constitue une étape primordiale afin de garantir que la PAC est mise en œuvre conformément aux objectifs communs.
77 À cette fin, l’article 118 du règlement 2021/2115 organise la procédure d’évaluation et d’approbation de chaque PSPAC proposé. Son paragraphe 1 prévoit que chaque État membre soumet à la Commission une proposition de PSPAC.
78 Ensuite, l’article 118, paragraphe 2, du règlement 2021/2115 dispose que la Commission se livre à une évaluation du PSPAC qui lui est soumis au regard de son exhaustivité, de sa cohérence, de sa compatibilité avec les principes généraux du droit de l’Union, avec ledit règlement et les actes délégués et d’exécution adoptés en application de celui-ci et avec le règlement 2021/2116, de sa contribution effective à la réalisation des objectifs spécifiques énoncés à l’article 6, paragraphes 1 et 2, du
règlement 2021/2115, et de ses incidences sur le bon fonctionnement du marché intérieur et les distorsions de concurrence et sur le niveau de charge administrative pesant sur les bénéficiaires et l’administration.
79 L’article 118, paragraphe 3, du règlement 2021/2115 permet à la Commission de formuler des observations dans le cas où l’évaluation du PSPAC proposé aurait mis en lumière des problèmes. En retour, l’État membre est tenu de lui communiquer toutes les informations supplémentaires nécessaires et, s’il y a lieu, de revoir sa proposition.
80 L’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115 fixe les critères d’approbation des PSPAC, à savoir que, premièrement, les informations nécessaires visées à l’article 118, paragraphe 3, du même règlement doivent avoir été communiquées à la Commission et que, deuxièmement, le plan doit être compatible avec l’article 9 et les autres exigences énoncées dans ledit règlement et dans le règlement 2021/2116 ainsi qu’avec les actes délégués et d’exécution adoptés en application de ces actes.
81 Conformément à l’article 118, paragraphes 5 et 6, du règlement 2021/2115, l’approbation de chaque PSPAC doit intervenir au moyen d’une décision d’exécution au plus tard six mois après la soumission de celui-ci par l’État membre concerné.
82 De plus, l’article 118, paragraphe 7, du règlement 2021/2115 conditionne la production d’effets juridiques par les PSPAC à leur approbation par la Commission.
83 Enfin, le règlement 2021/2115 prévoit en ses articles 119 et 120 deux procédures analogues à celle prévue par son article 118 en cas de modification ou de réexamen des PSPAC.
84 Il résulte de l’ensemble des dispositions mentionnées aux points 72 à 83 ci-dessus que, premièrement, la Commission ne peut pas directement modifier une proposition de PSPAC élaborée par un État membre, que, deuxièmement, elle exerce un contrôle de la conformité de la proposition avec certaines règles du droit de l’Union, que, troisièmement, elle peut présenter des observations par lesquelles elle subordonne l’approbation à ce que le PSPAC soit modifié par l’État membre, que, quatrièmement, elle
doit refuser l’approbation d’un PSPAC proposé uniquement si ce dernier ne remplit pas des exigences limitativement énumérées tirées du droit de l’Union et que, cinquièmement, un PSPAC ne produit pas d’effets juridiques avant son approbation par la Commission.
85 Ainsi, la Commission possède bien un pouvoir décisionnel propre dans le cadre de la procédure d’approbation du PSPAC dont l’exercice emporte nécessairement l’examen du contenu dudit plan.
86 Néanmoins, la décision d’approbation d’un PSPAC par la Commission doit être distinguée de la proposition de PSPAC soumise par un État membre, qui reste un acte national dans le cadre duquel ce dernier exerce sa compétence, notamment, dans le choix des interventions à intégrer dans cette proposition. Le lien entre ces deux actes est établi par le mécanisme prévu à l’article 118 du règlement 2021/2115.
Sur les conséquences à tirer du cadre juridique dans la présente affaire
87 Compte tenu des compétences distinctes de la Commission et des autorités nationales, le PSPAC espagnol tel qu’approuvé par la Commission ne constitue pas un acte préparatoire de la décision attaquée ou faisant autrement partie de cette dernière au sens de la jurisprudence rappelée aux points 56 et 57 ci-dessus. En effet, le règlement 2021/2115 a instauré un système de partage des compétences entre l’État membre et la Commission.
88 De même, il résulte de la procédure d’approbation du PSPAC prévue à l’article 118 du règlement 2021/2115 que, bien que l’acte pris par l’autorité nationale soit une étape nécessaire dans le cadre d’une procédure conduisant à l’adoption d’un acte de l’Union, la Commission n’est pas liée par l’acte national, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 58 et 59 ci-dessus.
89 Partant, le Tribunal est compétent pour contrôler la légalité de la décision d’approbation d’un PSPAC en tant qu’acte de l’Union en vertu de l’article 263 TFUE même si ce contrôle implique nécessairement l’examen, notamment, de la compatibilité du contenu du PSPAC proposé, qui reste un acte national, avec le droit de l’Union, en vertu de l’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115.
90 Or, dans la requête, la requérante invoque l’illégalité de la décision attaquée au motif que la Commission a approuvé le PSPAC espagnol alors que ce dernier viole plusieurs règles du droit de l’Union, dont notamment des dispositions du règlement 2021/2115 et des principes généraux du droit de l’Union, ainsi que la législation nationale relative à l’évaluation environnementale.
91 Il convient de relever que, contrairement à la législation nationale, les dispositions du règlement 2021/2115 et les principes généraux du droit de l’Union font partie des règles dont le respect par les PSPAC proposés est contrôlé par la Commission dans le cadre de la procédure d’approbation prévue à l’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115 (voir point 47 ci-dessus).
92 Il en résulte que, dans le cadre du contrôle de la légalité de la décision attaquée, il peut être vérifié si, comme le soutient la requérante, la Commission n’aurait pas dû approuver le PSPAC espagnol proposé au motif que ce dernier ne remplit pas toutes les conditions prévues à l’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115.
93 Par conséquent, la fin de non-recevoir présentée dans l’exception d’irrecevabilité, tirée de ce que les irrégularités invoquées à l’encontre de la décision attaquée sont imputables uniquement au PSPAC espagnol, c’est-à-dire aux autorités espagnoles, doit être écartée s’agissant des irrégularités dont l’examen entre dans le cadre du contrôle de compatibilité prévu à l’article 118, paragraphe 4, du règlement 2021/2115, tel que rappelé au point 91 ci-dessus. Ainsi, le recours ne doit pas être rejeté
sur le fondement de cette fin de non-recevoir, bien que les arguments tirés du non-respect de la législation nationale doivent être écartés.
Sur la qualité pour agir
94 La Commission fait valoir que le recours est irrecevable, car la requérante n’a pas qualité pour agir. La requérante ne serait ni directement ni individuellement concernée par la décision attaquée, contrairement à ce qu’exige l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et du reste seul le Royaume d’Espagne serait destinataire de la décision attaquée.
95 La requérante estime qu’elle satisfait aux conditions tenant à l’affectation directe et individuelle.
96 En vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.
97 En l’espèce, c’est le Royaume d’Espagne et non la requérante qui est le destinataire de la décision attaquée. Dans ces conditions, le premier cas de figure pour qu’une personne physique ou morale ait qualité pour agir en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE doit être écarté.
98 Il convient donc d’examiner si le deuxième ou le troisième cas de figure dans lesquels, en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, la qualité pour agir est reconnue à une personne physique ou morale pour former un recours contre un acte dont elle n’est pas le destinataire peuvent correspondre au cas d’espèce. Selon le deuxième cas de figure, un recours peut être formé à condition que cet acte concerne directement et individuellement la personne physique ou morale qui forme un recours.
Selon le troisième cas de figure, une telle personne peut introduire un recours contre un acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution si celui-ci la concerne directement (arrêts du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P,EU:C:2013:852, point 19 ; du 27 février 2014, Stichting Woonpunt e.a./Commission, C‑132/12 P, EU:C:2014:100, point 44, et du 27 février 2014, Stichting Woonlinie e.a./Commission, C‑133/12 P, EU:C:2014:105, point 31).
99 En l’espèce, le Tribunal estime opportun d’examiner le troisième cas de figure avant d’analyser, s’il y a lieu, le deuxième.
Sur l’existence d’un acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution
100 La Commission estime que la décision attaquée, même dans l’hypothèse où elle pourrait être qualifiée d’acte réglementaire, nécessite des mesures d’exécution de la part des autorités espagnoles consistant à adopter la réglementation nécessaire à la mise en œuvre du PSPAC dont la mesure litigieuse fait partie.
101 La requérante conteste que si la décision attaquée devait être considérée comme un acte réglementaire, celle-ci comporterait des mesures d’exécution au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, TFUE.
102 Indépendamment de la nature d’acte réglementaire de la décision attaquée, il suffit en l’espèce d’examiner si celle-ci comporte des mesures d’exécution.
103 Ainsi que la Cour l’a jugé, il y a lieu, aux fins d’apprécier si un acte réglementaire comporte des mesures d’exécution, de s’attacher à la position de la personne invoquant le droit de recours au titre de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, TFUE. Il est donc sans pertinence de savoir si l’acte en question comporte des mesures d’exécution à l’égard d’autres justiciables (voir arrêt du 13 mars 2018, European Union Copper Task Force/Commission, C‑384/16 P, EU:C:2018:176,
point 38 et jurisprudence citée).
104 Par ailleurs, il est dépourvu de pertinence, à cet égard, de savoir si lesdites mesures ont ou non un caractère mécanique (voir arrêt du 13 mars 2018, European Union Copper Task Force/Commission, C‑384/16 P, EU:C:2018:176, point 40 et jurisprudence citée).
105 Conformément à l’article 9, troisième alinéa, du règlement 2021/2115, les États membres établissent le cadre juridique régissant l’octroi des aides de l’Union aux agriculteurs et aux autres bénéficiaires conformément aux PSPAC approuvés par la Commission au titre de l’article 118 du même règlement. Ils mettent en œuvre ces PSPAC tels qu’ils ont été approuvés par la Commission.
106 Ainsi, le PSPAC constitue un document sur la base duquel chaque État membre met en œuvre la PAC pour la période allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027.
107 Dans ce cadre, la mise en œuvre de la mesure litigieuse, qui peut produire des effets juridiques sur l’activité économique de la requérante, nécessite des mesures nationales d’exécution. Au demeurant, l’existence de telles mesures d’exécution est confirmée par le projet de Real Decreto sobre la aplicación, a partir de 2023, de las intervenciones en forma de pagos directos y el establecimiento de requisitos comunes en el marco del Plan Estratégico de la Política Agrícola Común, y la regulación de
la solicitud única del sistema integrado de gestión y control (décret royal sur la mise en œuvre, à partir de 2023, des interventions sous forme de paiements directs et l’établissement d’exigences communes dans le cadre du PSPAC, et sur l’encadrement de la demande unique pour le système intégré de gestion et de contrôle), préparé par le Royaume d’Espagne afin de mettre en œuvre le PSPAC espagnol et produit par la requérante en annexe à ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.
108 Ainsi, puisque la décision attaquée ne fait qu’approuver le PSPAC espagnol contenant la mesure litigieuse, et qu’il incombe au Royaume d’Espagne de la mettre en œuvre de même que l’ensemble dudit PSPAC, cette décision ne peut produire ses éventuels effets juridiques à l’égard de la requérante que par l’intermédiaire de mesures nationales d’exécution.
109 Il résulte de ce qui précède que la décision attaquée comporte à l’égard de la requérante des mesures d’exécution, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, TFUE.
110 Dès lors, la requérante ne saurait se fonder sur le troisième cas de figure envisagé par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE pour contester la décision attaquée.
111 Il convient ensuite d’examiner si la qualité pour agir de la requérante peut se fonder sur le deuxième cas de figure exposé au point 98 ci-dessus, qui exige que la décision attaquée concerne directement et individuellement la requérante. À cette fin, il importe d’abord d’examiner la seconde de ces deux conditions.
Sur l’affectation individuelle
112 Selon une jurisprudence constante, une personne physique ou morale autre que le destinataire d’un acte ne saurait prétendre être concernée individuellement, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, que si elle est atteinte par l’acte en cause, en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de l’acte
(arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17, p. 223 ; voir, également, arrêt du 27 février 2014, Stichting Woonlinie e.a./Commission, C‑133/12 P, EU:C:2014:105, point 44 et jurisprudence citée).
113 La Commission estime que si la décision attaquée concerne la requérante, ce n’est qu’en sa qualité objective d’exploitant agricole à l’instar de tout autre opérateur économique se trouvant actuellement ou potentiellement dans une situation identique. De plus, selon elle, le groupe le plus affecté par la décision attaquée n’était pas identifiable au moment de son adoption en l’absence de demandes d’aides de base au revenu pour un développement durable introduites sur la base du cadre juridique
national régissant leur octroi en application du PSPAC espagnol.
114 La requérante soutient qu’elle satisfait à la condition d’affectation individuelle en raison de son appartenance à un cercle restreint d’opérateurs économiques qui était parfaitement identifiable au moment de l’adoption de la décision attaquée en raison, d’une part, de sa qualité d’entreprise agricole pratiquant l’agriculture extensive sur un grand nombre d’hectares et, d’autre part, de sa qualité de bénéficiaire d’une aide de base au revenu pour un développement durable s’élevant à plus de
200000 euros si la mesure litigieuse n’existait pas. Ainsi, depuis l’adoption de la décision attaquée, la requérante ne pourrait plus bénéficier de cette aide pour un montant supérieur à 200000 euros.
115 À cet égard, selon une jurisprudence constante, lorsque l’acte affecte un groupe de personnes qui étaient identifiées ou identifiables au moment où cet acte a été pris et en fonction de critères propres aux membres du groupe, ces personnes peuvent être individuellement concernées par cet acte en tant qu’elles font partie d’un cercle restreint d’opérateurs économiques et qu’il peut en être notamment ainsi lorsque l’acte modifie les droits acquis par le particulier antérieurement à son adoption
(voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Stichting Woonlinie e.a./Commission, C‑133/12 P, EU:C:2014:105, point 46 et jurisprudence citée).
116 Toutefois, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme étant concernés individuellement par cette mesure, dès lors que cette application est effectuée en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (arrêt du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, EU:C:2013:852, point 47).
117 En l’espèce, la requérante est une entreprise agricole qui exerce une activité qui relève du champ d’application de la décision attaquée, dans la mesure où cette dernière concerne les agriculteurs et autres bénéficiaires potentiels de contributions financières de l’Union prévues par le PSPAC espagnol sur le fondement du règlement 2021/2115.
118 Cependant, le simple fait que la requérante soit une entreprise agricole bénéficiaire potentielle de contributions financières de l’Union au titre de la PAC ne suffit pas à l’individualiser et à la caractériser par rapport à toute autre entreprise agricole dans la mesure où le plafonnement prévu par la mesure litigieuse ne désigne pas un groupe restreint d’entreprises agricoles mais s’adresse à ces dernières en raison de leur qualité objective d’agriculteurs au même titre que tout autre
opérateur économique se trouvant actuellement ou potentiellement dans une situation identique.
119 De même, le seul fait que la requérante aurait été éligible à percevoir un montant d’aide de base au revenu pour un développement durable supérieur au plafond fixé par la mesure litigieuse n’est pas susceptible de l’individualiser dans la mesure où ce droit à percevoir l’aide est accordé, en application d’une règle générale et abstraite, à une multitude d’opérateurs déterminés objectivement.
120 De plus, un tel constat n’est pas remis en cause par l’argument de la requérante selon lequel elle estime posséder un droit acquis à percevoir une aide de base au revenu pour un développement durable d’un montant supérieur à 200000 euros sur le fondement du régime de conversion, mis en place par l’article 23 du règlement 2021/2115, du droit au paiement de base dont elle bénéficiait dans le cadre de la PAC 2015-2022.
121 En effet, il y a lieu de constater que, d’une part, la décision attaquée ne modifie pas les droits acquis de la requérante à percevoir une aide étant donné qu’elle instaure un nouveau droit pour la PAC pour la période allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027. Le fait que le PSPAC espagnol ait opté pour octroyer l’aide de base au revenu pour un développement durable sur le fondement de la méthode des droits au paiement dont la valeur unitaire est déterminée grâce à un mécanisme de
convergence ajustant leur valeur proportionnellement à celle établie par le règlement no 1307/2013 dans le cadre de la PAC 2015-2022 ne permet pas de considérer que la requérante possède un droit acquis à une aide de base au revenu pour un développement durable telle qu’issue du règlement 2021/2115. À ce titre, le mécanisme proposé par les articles 23 et 24 de ce dernier règlement ne confère pas le droit de percevoir ladite aide pour chaque exploitant agricole.
122 D’autre part, à la date d’adoption de la décision attaquée, les exploitants agricoles, à l’égard desquels ce plafonnement devait être appliqué, n’étaient nullement identifiables, dès lors que, en tout état de cause, l’application de la mesure litigieuse présupposait que les exploitants concernés introduisent une demande visant à obtenir l’aide de base au revenu pour un développement durable sur le fondement du cadre juridique national établi par le Royaume d’Espagne en application de son PSPAC,
conformément à l’article 9 du règlement 2021/2115.
123 Dès lors, la requérante n’est concernée par la décision attaquée qu’en raison de sa qualité objective d’entreprise agricole, au même titre que tout autre opérateur économique se trouvant actuellement ou potentiellement dans une situation identique.
124 Il résulte de ce qui précède que la requérante n’est pas fondée à soutenir qu’elle est individuellement concernée par la décision attaquée.
125 Les conditions de l’affectation directe et de l’affectation individuelle par l’acte dont l’annulation est demandée étant cumulatives, il s’ensuit que, sans qu’il soit besoin d’examiner si la requérante est directement affectée par la décision attaquée, celle-ci n’a pas démontré sa qualité pour agir à l’encontre de cette dernière.
126 Une telle conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le droit à une protection juridictionnelle effective, consacré notamment par l’article 47 de la Charte, commande d’accueillir le recours contre la décision attaquée devant le Tribunal. Selon elle, la légalité du PSPAC espagnol ne pourrait être contestée devant le juge national dans la mesure où la proposition de PSPAC à la Commission ne constitue pas un acte administratif attaquable.
127 S’agissant du principe de protection juridictionnelle effective, l’article 47, premier alinéa, de la Charte énonce que toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues audit article.
128 À cet égard, il convient de rappeler que si les conditions de recevabilité prévues à l’article 263 TFUE doivent être interprétées à la lumière du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective, cette lecture ne peut pour autant aboutir à écarter les conditions expressément prévues par ledit traité (voir, en ce sens, arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 98 et jurisprudence citée, et ordonnance du 28 février
2017, NF/Conseil européen, T‑192/16, EU:T:2017:128, point 74).
129 La Cour a rappelé que la protection conférée par l’article 47 de la Charte n’exige pas qu’un justiciable puisse de manière inconditionnelle intenter un recours en annulation, directement devant la juridiction de l’Union, contre des actes de l’Union (arrêt du 28 octobre 2020, Associazione GranoSalus/Commission, C‑313/19 P, non publié, EU:C:2020:869, point 62).
130 Il convient d’ajouter que la protection juridictionnelle effective doit s’apprécier en tenant compte également de la protection offerte par les juridictions nationales. En effet, il incombe aux États membres de prévoir un système de voies de recours et de procédures permettant d’assurer le respect du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective (voir arrêt du 13 mars 2018, European Union Copper Task Force/Commission, C‑384/16 P, EU:C:2018:176, point 116 et jurisprudence citée).
131 En l’espèce, il convient de relever que la mesure litigieuse requiert des mesures nationales d’exécution (voir point 107 ci-dessus).
132 En effet, ainsi qu’il ressort des éléments rappelés aux points 105 à 109 ci-dessus, le PSPAC ne constitue qu’un document sur la base duquel chaque État membre met en œuvre la PAC pour la période allant du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027 à travers l’adoption du cadre juridique national. L’existence de telles mesures d’exécution est d’ailleurs confirmée par le projet de décret royal mentionné au point 107 ci-dessus.
133 Il en résulte que l’argument de la requérante tiré de l’absence de protection juridictionnelle effective ne permet pas, à lui seul, de fonder la recevabilité du présent recours.
134 Par conséquent, l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission doit être accueillie et le présent recours déclaré irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la demande de production de document (voir point 8 ci-dessus).
135 Aux termes de l’article 142, paragraphe 2, du règlement de procédure, l’intervention perd son objet lorsque, notamment, le recours est déclaré irrecevable. En l’espèce, il n’y a donc plus lieu de statuer sur la demande d’intervention présentée par le Royaume d’Espagne.
Sur les dépens
136 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
137 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre)
ordonne :
1) Le recours est rejeté comme irrecevable.
2) Il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’intervention du Royaume d’Espagne.
3) Complejo Agrícola Las Lomas, SL est condamnée aux dépens.
4) Le Royaume d’Espagne supportera ses dépens afférents à la demande d’intervention.
Fait à Luxembourg, le 17 octobre 2024.
Le greffier
V. Di Bucci
Le président
L. Truchot
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( *1 ) Langue de procédure : l’espagnol.