ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
17Â juillet 2024Â ( *1 )
« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Contrats d’achat anticipé et contrats d’achat conclus entre la Commission et des sociétés pharmaceutiques pour l’achat de vaccins contre la COVID-19 – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux d’un tiers – Obligation de motivation – Existence d’un risque prévisible et non purement hypothétique d’atteinte à l’intérêt invoqué – Principe de bonne administration – Liberté d’expression »
Dans l’affaire T‑689/21,
Margrete Auken,
Tilly Metz,
Jutta Paulus,
Emilie Mosnier, en qualité d’héritière de Michèle Rivasi,
Kimberly van Sparrentak,
représentées par Me B. Kloostra, avocate,
parties requérantes,
contre
Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara et A. Spina, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre),
composé de MM. J. Svenningsen, président, C. Mac Eochaidh (rapporteur) et J. MartÃn y Pérez de Nanclares, juges,
greffier : Mme S. Spyropoulos, administratrice,
vu la phase écrite de la procédure, notamment :
– la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 octobre 2021,
– la demande de non-lieu à statuer présentée par la Commission et déposée au greffe du Tribunal le 22 février 2022,
– l’ordonnance du 2 mars 2022 par laquelle le Tribunal a, au titre d’une mesure d’instruction, ordonné à la Commission de produire intégralement les contrats auxquels elle avait partiellement refusé l’accès,
– les observations des requérantes sur la demande de non-lieu à statuer et le mémoire en adaptation déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 22 mars et le 21 avril 2022,
– l’ordonnance du 31 mai 2022 par laquelle le Tribunal a décidé de joindre l’examen de la demande de non-lieu à statuer au fond,
– le mémoire en défense de la Commission, dans lequel étaient incluses ses observations sur le mémoire en adaptation, déposé au greffe du Tribunal le 22 juillet 2022,
– la réplique et la duplique déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 21 octobre et le 16 décembre 2022,
à la suite de l’audience du 17 octobre 2023, au cours de laquelle les requérantes ont renoncé au chef de conclusions visant l’annulation de la décision implicite,
vu le décès de Mme Rivasi, survenu le 29 novembre 2023,
vu la reprise de l’instance par Mme Mosnier, en qualité d’héritière de Mme Rivasi, déposée au greffe du Tribunal le 26 février 2024,
rend le présent
Arrêt
1 Par leur recours fondé sur l’article 263 TFUE, les requérantes, Mmes Margrete Auken, Tilly Metz, Jutta Paulus et Kimberly van Sparrentak, membres du Parlement européen, ainsi que Mme Emilie Mosnier, venant aux droits de sa mère, Mme Michèle Rivasi, membre du Parlement européen (décédée), demandent l’annulation de la décision C(2022) 1038 final de la Commission européenne, du 15 février 2022, prise en application de l’article 4 du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du
30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), leur accordant un accès partiel aux contrats d’achat anticipé et aux contrats d’achat conclus entre la Commission et les entreprises pharmaceutiques concernées pour l’achat de vaccins contre la COVID-19 (ci-après la « décision attaquée »).
I. Antécédents du litige
2 Le 14 avril 2020, le Conseil de l’Union européenne a adopté le règlement (UE) 2020/521 portant activation de l’aide d’urgence en vertu du règlement (UE) 2016/369 et modification des dispositions dudit règlement pour tenir compte de la propagation de la COVID-19 (JO 2020, L 117, p. 3). Par ce règlement, le Conseil a activé l’aide d’urgence établie par le règlement (UE) 2016/369 du Conseil, du 15 mars 2016, relatif à la fourniture d’une aide d’urgence au sein de l’Union (JO 2016, L 70, p. 1), en
tant que l’une des mesures devant permettre à l’Union européenne dans son ensemble de faire face à la crise liée à la pandémie de COVID-19, dans un esprit de solidarité compte tenu des contraintes liées à la propagation rapide du virus et dès lors que l’ampleur et le caractère transnational de cette propagation et de ses effets rendaient nécessaire une réponse globale.
3 Le 17 juin 2020, la Commission a publié la communication intitulée « Stratégie de l’Union européenne concernant les vaccins contre la COVID-19 » [COM(2020) 245 final]. Cette stratégie qui visait à accélérer la mise au point, la fabrication et le déploiement de vaccins contre la COVID‑19 reposait sur deux piliers. Le premier était d’assurer une production suffisante de vaccins dans l’Union et, ce faisant, un approvisionnement suffisant des États membres au moyen de contrats d’achat anticipé conclus
avec des producteurs de vaccins par l’intermédiaire de l’instrument d’aide d’urgence, tel qu’il a été activé par le règlement 2020/521. Le second était d’adapter le cadre réglementaire de l’Union à l’urgence alors actuelle et de mettre à profit la souplesse réglementaire alors existante pour accélérer la mise au point, l’autorisation et la disponibilité de vaccins, dans le respect des normes de qualité, d’innocuité et d’efficacité applicables aux vaccins.
4 Selon la Commission, le cadre proposé devait s’analyser comme une « police d’assurance », consistant à transférer une partie du risque qui pesait sur l’industrie pharmaceutique vers les autorités publiques, en échange de quoi les États membres étaient assurés de bénéficier d’un accès équitable et abordable à un vaccin, s’il venait à être trouvé.
5 Par courrier du 20 janvier 2021 adressé à la présidente et à la secrétaire générale de la Commission, enregistré le lendemain sous la référence GESTDEM 2021/0389, six membres du Parlement (ci-après les « six députés »), dont les cinq requérantes initiales, ont demandé l’accès, en vertu du règlement no 1049/2001, « aux différents contrats – contrats d’achat anticipé – conclus entre la Commission et les sociétés pharmaceutiques en vue de l’achat de vaccins anti-COVID-19 » (ci-après la « demande
initiale »). Il y était précisé que, à la connaissance des six députés, des contrats avaient déjà été signés avec les sociétés AstraZeneca, Sanofi-GSK, Johnson and Johnson, BioNTech-Pfizer, CureVac et Moderna, de sorte que la demande portait sur lesdits contrats ainsi que sur ceux qui pourraient être conclus après la date de la demande, tels que celui prévu avec Novavax.
6 Par courrier du 11 mars 2021, la directrice générale de la direction générale (DG) de la santé et de la sécurité alimentaire de la Commission (ci-après la « DG Santé ») a informé les six députés qu’elle avait identifié huit documents correspondant à la demande initiale, à savoir six contrats d’achat anticipé et deux contrats d’achat. Elle a indiqué avoir rendu publique, sur des pages Internet, une version expurgée de trois desdits contrats d’achat anticipé, à savoir ceux conclus avec AstraZeneca,
Sanofi-GSK et CureVac, et poursuivre son évaluation des documents restants et les consultations avec les tiers concernés en vue de l’adoption de décisions relatives à leur divulgation.
7 Par courrier du 9 juin 2021, la directrice générale de la DG Santé a informé les six députés que, en réponse à la demande initiale, un accès partiel avait été accordé à neuf documents identifiés comme relevant de celle-ci, à savoir les huit documents mentionnés au point 6 ci-dessus ainsi qu’un contrat d’achat supplémentaire conclu avec Pfizer-BioNTech. Elle a indiqué que les versions expurgées desdits documents avaient été rendues publiques sur une page Internet et que les passages avaient été
occultés sur le fondement des exceptions relatives à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, à la protection des intérêts commerciaux et à la protection du processus décisionnel des institutions prévues, respectivement, à l’article 4, paragraphe 1, sous b), à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, et à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001.
8 Par courrier du 30 juin 2021, enregistré le lendemain, les six députés ont présenté, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, une demande confirmative tendant à ce que la Commission révise sa position en ce qui concerne les neuf documents identifiés et les divulgue dans leur intégralité, à l’exclusion des passages relevant de l’exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), dudit
règlement (ci-après la « demande confirmative »). Ils y ont invoqué, notamment, la circonstance que les prix indiqués dans tous les contrats d’achat anticipé conclus ainsi que les versions intégrales des contrats d’achat anticipé conclus avec AstraZeneca, Pfizer-BioNTech et Moderna avaient fait l’objet de fuites sur un réseau social et dans les médias, entre décembre 2020 et avril 2021.
9 Le 13 août 2021, le secrétariat général de la Commission a informé les six députés qu’il n’était toujours pas en mesure de répondre à leur demande confirmative. À cette date, l’absence de réponse donnée à la demande confirmative a fait naître une décision implicite de rejet relative à ladite demande, conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.
10 Le 15 février 2022 et après consultation des entreprises pharmaceutiques concernées conformément à l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001 (ci-après les « entreprises concernées »), la Commission a adopté la décision attaquée. Dans cette décision, il est indiqué que, lors de l’évaluation de la demande confirmative, le secrétariat général de la Commission a procédé à un nouvel examen de la réponse apportée à la demande initiale par la DG Santé et que, à la suite de ce nouvel examen,
treize documents ont été identifiés comme relevant de la demande d’accès aux documents, à savoir les neuf documents mentionnés au point 7 ci-dessus ainsi que quatre documents supplémentaires.
11 Par la décision attaquée, la Commission a ainsi accordé un accès partiel aux documents suivants (ci-après, pris ensemble, les « contrats en cause ») :
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et AstraZeneca [référence ARES(2020)4849918, document 1] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Sanofi-GSK [référence ARES(2020)5034184, document 2] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Janssen Pharmaceutica [référence ARES(2020)5806059, document 3] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Pfizer-BioNTech [référence ARES(2021)256798, document 4] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et CureVac [référence ARES(2021)256728, document 5] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Moderna [référence ARES(2021)256592, document 6] ;
– le contrat d’achat conclu entre la Commission et Pfizer-BioNTech [référence ARES(2021)1601544, document 7] ;
– le contrat d’achat conclu entre la Commission et Moderna [référence ARES(2021)1601566, document 8] ;
– l’avenant I au contrat d’achat conclu entre la Commission et Moderna [référence ARES(2021)7098313, document 9] ;
– l’avenant II au contrat d’achat conclu entre la Commission et Moderna [référence ARES(2021)5602046, document 10] ;
– le second contrat d’achat conclu entre la Commission et Pfizer- BioNTech, parties 1 et 2 [référence ARES(2021)3404228, document 11] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Novavax [référence ARES(2021)6475411, document 12] ;
– le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Valneva [référence ARES(2021)7403909, document 13].
12 Plus précisément, la Commission a accordé un accès partiel plus large aux documents 1 à  8 et 11, précédemment divulgués, ainsi qu’un accès partiel aux documents 9, 10, 12 et 13, lesquels n’avaient jusqu’alors pas été divulgués publiquement, sous une forme expurgée. Les versions expurgées desdits documents étaient jointes à la décision attaquée.
13 La Commission a invoqué, dans la décision attaquée, l’exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu et l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées pour justifier l’accès uniquement partiel aux contrats en cause.
II. Conclusions des parties
14 Dans le mémoire en adaptation de la requête, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens, y compris les dépens afférents à la requête dans sa version initiale.
15 Dans le mémoire en défense, dans lequel étaient incluses, à la demande du Tribunal, ses observations sur le mémoire en adaptation, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours tel qu’il a été adapté ;
– condamner les requérantes aux dépens de l’instance.
III. En droit
16 À l’appui de leur recours, tel qu’adapté, les requérantes soulèvent six moyens, tirés :
– le premier, de l’application à tort de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à des informations ne relevant pas de ladite exception, d’un défaut de motivation à cet égard ainsi que d’une application incohérente de ladite exception ;
– le deuxième, de l’absence de justification de l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à sept catégories de stipulations ;
– le troisième, d’une application incohérente du règlement no 1049/2001 ayant conduit à une violation de celui-ci et d’une violation du principe de bonne administration, en ce que la Commission n’a pas occulté, dans la même mesure, des stipulations ou des informations de même nature, ainsi que d’un défaut de motivation à cet égard ;
– le quatrième, d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, en ce que la Commission n’a pas pris en compte l’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des informations demandées ainsi que d’un défaut de motivation à cet égard ;
– le cinquième, de la violation de l’article 42 et de l’article 52, paragraphe 3, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et de l’article 10, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») ;
– le sixième, de la violation des articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, en ce que, par la décision attaquée, la Commission a occulté certaines informations qu’elle avait divulguées auparavant, ainsi que d’un défaut de motivation à cet égard.
A. Sur le premier moyen et sur la première branche du deuxième moyen, tirés de l’application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à des informations ne relevant pas de ladite exception, d’un défaut de motivation à cet égard ainsi que d’une application incohérente de ladite exception
17 Par leur premier moyen et par la première branche de leur deuxième moyen tels qu’adaptés, les requérantes font valoir que la Commission a, à tort, appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à des informations qui ne relèveraient pas de ladite exception, en occultant, soit intégralement soit partiellement, les éléments suivants :
– les définitions et, notamment, celles des expressions « faute intentionnelle » (wilful misconduct) dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » (best reasonable efforts) dans les documents 4 et 7 ;
– les stipulations relatives aux calendriers des audits et au stockage des données ;
– les stipulations relatives aux frais concernant les études sur la sécurité après lancement et la gestion des risques ;
– les stipulations relatives aux donations et aux reventes ;
– les stipulations relatives au régime de responsabilité en cas de violation de la protection des données à caractère personnel.
18 Les requérantes soutiennent que les informations énumérées au point 17 ci-dessus ne présentent pas d’intérêt commercial, de sorte qu’elles ne relèveraient pas de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
19 Les requérantes soutiennent que la Commission n’a indiqué ni les raisons pour lesquelles l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux s’appliquait aux informations énumérées au point 17 ci-dessus, ni de quelle manière l’accès auxdites informations pouvait porter, de manière raisonnablement prévisible, concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées. Par ailleurs, la Commission aurait appliqué ladite exception de manière incohérente, en
expurgeant de certains contrats des informations pourtant accessibles dans d’autres.
20 En outre, les requérantes affirment que, compte tenu du contexte de la pandémie de COVID-19 dans lequel les contrats en cause, et notamment les contrats d’achat anticipé, ont été conclus et du financement par des fonds publics d’importantes activités de recherche et de développement pour la mise au point, au résultat alors incertain, d’un éventail de vaccins au moyen des paiements anticipés versés aux entreprises concernées au titre des contrats d’achat anticipé, il n’existait pas un marché
commercial pour les vaccins contre la COVID-19. La nature des contrats en cause serait ainsi différente de celle d’une relation commerciale habituelle. Partant, ce serait à tort que la Commission a appliqué, dans la décision attaquée, l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux et a occulté les définitions et les autres informations.
21 La Commission conteste cette argumentation.
22 La Commission soutient que tous les contrats en cause ont fait l’objet, dans leur intégralité, de négociations individuelles, de sorte que la formulation spécifique des diverses définitions et des autres stipulations contractuelles refléterait les compromis complexes trouvés dans le cadre desdites négociations individuelles. Elle expose que le critère pertinent pour apprécier si la divulgation de stipulations contractuelles est susceptible de compromettre l’intérêt protégé par l’article 4,
paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 est de savoir si la teneur des stipulations en cause met en jeu les intérêts commerciaux des parties contractantes. Or, les définitions préciseraient le champ d’application des obligations convenues et détermineraient d’un point de vue matériel le contenu du contrat, de sorte qu’elles seraient « normatives ». Par ailleurs, en l’espèce, certaines définitions clés, telles que les expressions « tous les efforts raisonnables possibles » ou
« faute intentionnelle », et d’autres obligations mutuelles mettraient en jeu les intérêts commerciaux des entreprises concernées, dès lors qu’elles pourraient engager leur responsabilité contractuelle et non contractuelle.
23 La Commission affirme avoir indiqué, dans la décision attaquée, le contexte et le caractère exceptionnel de la procédure de passation de marché pour les vaccins contre la COVID-19 afin d’expliquer la pertinence de certaines informations contenues dans les documents demandés du point de vue économique et commercial. Ces informations contextuelles clarifieraient les raisons qui sous-tendaient le processus de négociation individuelle des contrats d’achat de vaccins contre la COVID-19 et la dimension
mondiale de l’achat desdits vaccins, en soulignant la sensibilité, du point de vue commercial, de certaines informations contenues dans les contrats conclus entre la Commission et les entreprises concernées.
24 Par ailleurs, la Commission considère que l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux n’est pas subordonnée à l’existence d’un marché ouvert à la libre concurrence pour un produit. En outre, les circonstances particulières dans lesquelles l’achat de vaccins a eu lieu étayeraient le fait que les entreprises concernées étaient confrontées à une pression concurrentielle accrue pour livrer de très grandes quantités de vaccins dans un délai très court. Par ailleurs,
elle souligne que toutes les entreprises concernées sont incontestablement des entreprises actives à l’échelle mondiale et soumises aux forces concurrentielles du marché, dont les intérêts peuvent relever du champ d’application de l’exception en cause. La nature commerciale de leurs activités, notamment de fourniture de vaccins contre la COVID-19, ne serait pas altérée par la subvention publique partielle de la recherche et le développement afin d’accroître les chances d’avoir davantage de
vaccins et de les obtenir plus rapidement.
1. Â Observations liminaires
25 Le Tribunal relève que les griefs soulevés dans le cadre du premier moyen et de la première branche du deuxième moyen s’agissant des stipulations relatives aux donations et aux reventes se recoupent avec ceux soulevés dans le cadre de la septième branche du deuxième moyen. Partant, lesdits griefs seront traités dans le cadre de ladite branche du deuxième moyen (voir points 179 à  184 ci-après).
26 S’agissant des stipulations relatives aux calendriers des audits et au stockage des données, aux frais concernant les études sur la sécurité après lancement et la gestion des risques et au régime de responsabilité en cas de violation de la protection des données à caractère personnel, il y a lieu de constater que les requérantes y font référence seulement de manière sommaire aux points 32 et 43 de la requête ainsi qu’aux points 25 et 33 du mémoire en adaptation.
27 Or, la décision attaquée ne fait pas explicitement état d’un refus d’accès à ces stipulations. En outre, à défaut de précisions quant aux occultations concernées par cette argumentation des requérantes, le Tribunal n’a pas non plus été en mesure d’identifier de telles stipulations dans les documents produits par la Commission en réponse à la mesure d’instruction adoptée au titre de l’article 91, sous c), et de l’article 104 du règlement de procédure du Tribunal. Au demeurant, le Tribunal observe
que les stipulations sur les « vérifications et audits » (checks and audits) sont entièrement divulguées dans les documents 1, 2, 3, 5, 6, 8, 12 et 13. Par ailleurs, la période pendant laquelle ces « vérifications et audits » peuvent être engagés a été divulguée dans les documents 4, 7 et 11. Quant aux documents 9 et 10, ils ne mentionnent pas de tels « vérifications et audits ».
28 Au vu de ce qui précède, l’examen du bien-fondé du premier moyen et de la première branche du deuxième moyen peut seulement porter sur le refus d’accès aux définitions des expressions « faute intentionnelle » et « tous les efforts raisonnables possibles ».
29 Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, les institutions de l’Union refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.
30 Dans ce cadre, il convient de rappeler qu’il ressort du libellé même de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 qu’une simple atteinte aux intérêts visés est susceptible de justifier l’application, le cas échéant, de l’une des exceptions qui y sont énumérées, sans que cette ingérence doive atteindre un seuil de gravité particulier (arrêt du 22 janvier 2020, PTC Therapeutics International/EMA, C‑175/18 P, EU:C:2020:23, point 90).
31 S’agissant du concept d’intérêts commerciaux, il y a lieu de relever que le règlement no 1049/2001 ne définit pas cette notion, sauf en ce qu’il précise que ces intérêts peuvent couvrir la propriété intellectuelle d’une personne physique ou morale déterminée. De plus, il convient de rappeler que, pour justifier le refus d’accès à un document dont la divulgation a été demandée, il ne suffit pas, en principe, que ce document relève d’une activité commerciale, mais il incombe à l’institution
concernée de fournir des explications quant aux questions de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux et de démontrer que ce risque d’atteinte est raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir, en ce sens, arrêts du 3 juillet 2014, Conseil/in ’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 52 et jurisprudence citée, et du 27 février 2018, CEE Bankwatch Network/Commission, T‑307/16, EU:T:2018:97,
points 103 à  105 et jurisprudence citée).
32 Par ailleurs, l’examen auquel doit procéder l’institution afin d’appliquer une exception doit être effectué de façon concrète et doit ressortir des motifs de la décision (voir arrêt du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission, T‑380/04, non publié, EU:T:2008:19, point 86 et jurisprudence citée).
33 Dans ce cadre, il y a lieu de noter que toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (voir arrêt du 9 septembre 2014,
MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, point 81 et jurisprudence citée). Toutefois, cette protection peut couvrir des informations commerciales sensibles, telles que des informations relatives aux stratégies commerciales d’entreprises, aux montants de leurs ventes, à leurs parts de marché ou à leurs relations commerciales (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, points 54 à  56, et du 9 septembre 2014, MasterCard
e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, points 82 et 83).
34 Dans le contexte de l’application des dispositions du règlement no 1049/2001, l’obligation pour l’institution de motiver sa décision refusant l’accès à un document a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d’un vice permettant d’en contester la validité et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La portée de cette
obligation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (voir arrêt du 6 février 2020, CompañÃa de TranvÃas de la Coruña/Commission, T‑485/18, EU:T:2020:35, point 20 et jurisprudence citée).
35 Selon la jurisprudence, l’obligation de motivation n’implique toutefois pas pour l’institution concernée de devoir répondre à chacun des arguments avancés durant la procédure précédant l’adoption de la décision finale attaquée (voir arrêt du 25 septembre 2018, Psara e.a/Parlement, T‑639/15 à T‑666/15 et T‑94/16, EU:T:2018:602, point 134 et jurisprudence citée).
36 Néanmoins, si le contexte entourant la prise de décision peut alléger les exigences de motivation qui sont à la charge de l’institution concernée, il peut également, en revanche, les alourdir dans des circonstances particulières. Tel est le cas lorsque, pendant la procédure de demande d’accès à des documents, le demandeur avance des éléments susceptibles de mettre en cause le bien-fondé du premier refus. Dans ces circonstances, les exigences de motivation imposent à l’institution l’obligation de
répondre à une demande confirmative en indiquant les motifs pour lesquels ces éléments ne sont pas de nature à lui permettre de modifier sa position. À défaut, le demandeur ne serait pas en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles l’auteur de la réponse à la demande confirmative a décidé de maintenir les mêmes motifs pour confirmer le refus (arrêt du 6 avril 2000, Kuijer/Conseil, T‑188/98, EU:T:2000:101, points 45 et 46).
37 C’est à la lumière de ces considérations que doivent être analysés les arguments des requérantes selon lesquels la Commission a appliqué, à tort, l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux aux contrats en cause, notamment aux définitions et plus précisément aux définitions des expressions « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7.
2.  Sur la motivation de la décision attaquée s’agissant de l’occultation partielle des définitions
38 Les requérantes font valoir que les définitions dans les contrats en cause ne relèvent pas de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et contestent le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée pour justifier leur occultation partielle.
39 Le Tribunal relève que la seule lecture des contrats en cause tels que divulgués par la décision attaquée démontre que, si certaines définitions sont identiques, d’autres, y compris les définitions paraissant de nature technique et possiblement peu controversées, ont fait l’objet de négociations individuelles et spécifiques, comme l’indique la Commission et comme cela ressort notamment de divers ajouts ou de précisions supplémentaires.
40 Il s’ensuit que, même si la présence de définitions dans les contrats en cause peut être considérée comme usuelle, leur rédaction spécifique ne saurait être considérée, dans tous les cas, comme étant « générale et usuelle » au sens du point 98 de l’arrêt du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission (T‑380/04, non publié, EU:T:2008:19). Par ailleurs, dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt, l’institution avait refusé l’accès au contrat en question dans son intégralité, de sorte que sa pertinence
pour le cas d’espèce, dans lequel la Commission a envisagé à juste titre la possibilité d’accorder un accès partiel aux contrats en cause, doit être relativisée.
41 Plus particulièrement, s’agissant de l’occultation des définitions des expressions « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7, le Tribunal constate que, dans la demande confirmative, les six députés ont expressément visé lesdits termes.
42 Cela étant, la décision attaquée, qui expose les motifs qui justifieraient la non-divulgation, intégrale ou partielle, de toute une série de catégories d’informations dans les contrats en cause, y compris, à titre d’exemple, les définitions de « vaccin » (vaccine) et de « vaccin adapté » (adapted vaccine), ainsi que les stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation, ne laisse pas apparaître de manière expresse, ne serait-ce que de manière succincte, les motifs pour lesquels
d’autres définitions, et notamment les définitions des expressions « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7, expressément visées par les six députés dans leur demande confirmative, ont été occultées.
43 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argumentation développée par la Commission dans ses écritures et lors de l’audience, selon laquelle les définitions préciseraient le champ d’application des obligations convenues et détermineraient d’un point de vue matériel le contenu du contrat, de sorte qu’elles seraient « normatives », et selon laquelle les définitions de « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7
mettraient en jeu les intérêts commerciaux des entreprises concernées dès lors qu’elles pourraient engager la responsabilité contractuelle et non contractuelle de ces dernières.
44 En effet, ces explications n’ont pas été invoquées dans la décision attaquée et ne peuvent être déduites de celles qui y figurent, y compris au point 2.1.4 de ladite décision qui porte précisément sur l’engagement de la responsabilité des entreprises concernées. Or, le juge de l’Union n’est pas tenu de prendre en compte les explications complémentaires fournies seulement en cours d’instance par l’auteur de l’acte en cause pour apprécier le respect de l’obligation de motivation, sous peine de
porter atteinte à la répartition des compétences entre l’administration et le juge de l’Union et d’affaiblir le contrôle de légalité des actes de l’administration (voir arrêt du 6 juillet 2023, BEI et Commission/ClientEarth, C‑212/21 P et C‑223/21 P, EU:C:2023:546, point 43 et jurisprudence citée).
45 Il s’ensuit que les motifs de la décision attaquée ne permettent pas aux requérantes de comprendre les raisons spécifiques qui ont conduit à ces occultations, ni au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité desdites occultations, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 31, 34 et 36 ci-dessus.
46 Partant, c’est à bon droit que les requérantes font valoir que la Commission a méconnu l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 en ne fournissant pas des explications suffisantes permettant de savoir de quelle manière l’accès aux définitions en cause pourrait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux, respectivement, d’AstraZeneca et de Pfizer-BioNTech.
47 S’agissant du grief selon lequel la Commission a appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux aux définitions de manière incohérente, ce grief se recoupe avec le troisième moyen, de sorte qu’il convient de l’examiner dans le cadre dudit moyen.
B. Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de justification de l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux et de la violation du règlement no 1049/2001 en ce que la Commission ne se serait pas tenue à la stricte interprétation et application de l’exception susmentionnée
48 Par leur deuxième moyen, les requérantes critiquent la manière dont la Commission a appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux pour expurger les contrats en cause de certaines parties concernant six catégories d’informations, dont :
– la localisation des sites de production ;
– les droits de propriété intellectuelle ;
– les acomptes ou paiements anticipés ;
– les stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation ;
– les calendriers de livraison ;
– les stipulations relatives aux donations et aux reventes.
49 Les requérantes reprochent également à la Commission de ne pas avoir suffisamment justifié, dans la décision attaquée, l’application de ladite exception.
50 La Commission conteste cette argumentation.
1.  Sur le refus d’accès à la localisation des sites de production
51 Par la deuxième branche du deuxième moyen tel qu’adapté, les requérantes font valoir que l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux ne s’oppose pas à la divulgation des informations relatives à la localisation des sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées.
52 En outre, les requérantes contestent la suffisance de la motivation exposée dans la décision attaquée à cet égard et son bien-fondé. Celle-ci ne mentionnerait pas la circonstance que les informations en cause se trouvaient déjà dans le domaine public. Elle n’exposerait pas davantage les motifs pour lesquels ces informations, d’autres informations ou de plus amples informations concernant la localisation des sites de production devraient être considérées comme confidentielles, ni en quoi et
comment la divulgation de ces informations, qui concerneraient pourtant les 18 premiers mois de la pandémie, serait susceptible de porter atteinte aux intérêts commerciaux actuels des entreprises concernées.
53 Les requérantes ajoutent qu’elles ont un intérêt à la divulgation des sites mentionnés dans les contrats en cause qui se trouveraient déjà dans le domaine public aux fins de la comparaison avec ceux figurant dans les contrats en cause. De plus, leur divulgation serait importante afin que le public puisse vérifier où les fonds publics ont été investis et dans quelles conditions les premiers vaccins ont été développés, produits, stockés et transportés.
54 La Commission conteste cette argumentation.
55 En l’espèce, il convient de rejeter d’emblée, comme étant inopérante, l’argumentation des requérantes selon laquelle, en substance, la divulgation des informations relatives à la localisation des sites de production des entreprises concernées et à leurs relations commerciales avec leurs sous-traitants ne serait pas susceptible de porter atteinte aux intérêts commerciaux actuels des entreprises concernées.
56 En effet, l’appréciation du bien-fondé de l’application de l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 doit se faire au regard des faits existant à la date de l’adoption de la décision refusant l’accès aux documents sur la base de cette exception (voir arrêts du 11 mai 2017, Suède/Commission, C‑562/14 P, EU:C:2017:356, point 63 et jurisprudence citée, et du 6 février 2020, CompañÃa de TranvÃas de la Coruña/Commission, T‑485/18, EU:T:2020:35, point 36 et jurisprudence
citée) et des éléments d’information dont l’institution pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2018, CEE Bankwatch Network/Commission, T‑307/16, EU:T:2018:97, point 133 et jurisprudence citée), à savoir, en l’espèce, le 15 février 2022.
57 Ensuite, les requérantes soutiennent, en substance, que certaines informations relatives aux sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées se trouvent déjà dans le domaine public par le biais d’une carte interactive publiée sur le site Internet de la Commission et dans des rapports publics de l’Agence européenne des médicaments (EMA), si bien que de plus amples informations relatives à ces sites et aux relations commerciales desdites entreprises avec leurs sous-traitants,
occultées en l’espèce, ne seraient pas des informations commerciales sensibles. Elles reprochent à la Commission de ne pas avoir abordé ces considérations dans la décision attaquée.
58 À cet égard, il convient de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que le choix d’avoir un site de production dans un lieu donné ou de faire appel à un sous-traitant donné relevait de la stratégie commerciale interne des entreprises concernées et résultait d’un choix économique précis. L’identité desdits sites et leur relation économique ou industrielle avec l’entreprise concernée ne relèveraient pas du domaine public. Elle a conclu que la divulgation d’informations
portant sur les sites de production des entreprises concernées, notamment l’article I.6.3 du document 4 et les annexes de tous les contrats en cause portant sur les sous-traitants desdites entreprises, révélerait aux concurrents desdites entreprises des éléments importants de leurs capacités industrielles et pourrait porter préjudice à leurs capacités industrielles à produire le vaccin, voire, à terme, entraver pour des raisons économiques l’exécution intégrale des contrats conclus.
59 Ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate qu’ils exposent, avec un niveau de détail variable, l’identité et la localisation de sites de production des entreprises concernées et de leurs divers sous-traitants ou partenaires, ainsi que, selon le cas, l’attribution de tâches parmi les entités énumérées. En outre, dans certains cas, des modifications, telles que des ajouts ou des changements de sites ou de partenaires, ont été apportées au stade du contrat
d’achat par rapport au contrat d’achat anticipé.
60 Partant, c’est à juste titre que la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que les informations sur la localisation des sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées occultées dans les contrats en cause relevaient de leurs relations commerciales et, in fine, de leur capacité et de leur stratégie industrielle et commerciale.
61 Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 33 ci-dessus, la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 peut couvrir de telles informations.
62 Par ailleurs, les informations figurant dans les contrats en cause ne sauraient être considérées comme étant historiques (voir, en ce sens, arrêt du 7 juillet 2015, Axa Versicherung/Commission, T‑677/13, EU:T:2015:473, point 154 et jurisprudence citée, et ordonnance du 12 juillet 2018, RATP/Commission, T‑250/18 R, non publiée, EU:T:2018:458, points 55 et 57). En effet, ces données dataient de moins de deux ans et, ainsi qu’il ressort de la réponse de la Commission à une question posée à titre de
mesure d’organisation de la procédure, la plupart des contrats en cause étaient toujours en cours d’exécution au moment de l’adoption de la décision attaquée.
63 La conclusion figurant au point 60 ci-dessus n’est pas non plus infirmée par la publication, sur le site Internet de la Commission, d’une carte interactive illustrant les « capacités de production de vaccins contre la COVID-19 dans l’[Union] » (interactive map showing the production capacities of COVID-19 vaccines in the EU).
64 En effet, ainsi que la Commission l’a confirmé en réponse à une question posée par le Tribunal à titre de mesure d’organisation de la procédure, la carte interactive ne contient pas d’informations sur la localisation sur le territoire de l’Union des sites de production de vaccins contre la COVID-19 figurant dans les contrats en cause. Tout au plus, comme la Commission l’a concédé, l’application du filtre « contracted by APA manufacturer » (sous contrat avec un fabricant ayant conclu un contrat
d’achat anticipé) fait apparaître un seul site de production, situé en Allemagne, qui ne figure pas dans les contrats auxquels les requérantes ont demandé l’accès.
65 Partant, contrairement à ce que font valoir les requérantes, la carte interactive n’indique ni le lieu exact des sites de production des vaccins contre la COVID-19 faisant l’objet des contrats en cause, ni les noms des éventuels sous-traitants concernés.
66 Par ailleurs, si les rapports publics de l’EMA sur les différents vaccins contre la COVID-19 contiennent des informations sur des sites de production, cette circonstance n’est pas, en tant que telle, de nature à obliger la Commission à communiquer l’intégralité des informations sur la localisation des sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées [voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, BCE/EspÃrito Santo Financial (Portugal), C‑442/18 P, EU:C:2019:1117, point 56].
67 Il s’ensuit que la Commission n’a pas commis une erreur de droit en occultant des informations sur la localisation des sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées.
68 Enfin, étant donné que les informations sur la localisation des sites de production et des sous-traitants des entreprises concernées n’ont pas été divulguées par la Commission par le biais de la carte interactive, la décision attaquée n’est entachée d’aucune insuffisance de motivation à l’égard de ladite carte.
69 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la deuxième branche du deuxième moyen.
70 Enfin, dans la mesure où l’argumentation des requérantes portant sur l’intérêt à la divulgation des informations sur la localisation des sites de production occultées se recoupe avec celle soulevée dans le cadre du quatrième moyen, cette argumentation sera traitée dans le cadre dudit moyen (voir point 210 ci-après).
2.  Sur le refus partiel d’accès aux stipulations en matière de droit de propriété intellectuelle
71 Par la troisième branche de leur deuxième moyen, les requérantes contestent le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée et son bien-fondé pour justifier l’occultation partielle des stipulations en matière de propriété intellectuelle sur le fondement de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
72 Les requérantes estiment que sont hypothétiques les considérations exposées dans la décision attaquée selon lesquelles la divulgation des informations occultées présenterait un risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées dès lors qu’elle accroîtrait la pression exercée sur lesdites entreprises pour qu’elles mettent à disposition une partie de leur savoir-faire et aurait des effets négatifs sur leur capacité industrielle. En outre, elles soutiennent que la Commission n’a
pas indiqué les éléments des stipulations en matière de droit de propriété intellectuelle qui expliqueraient les motifs concrets et spécifiques de leur non-divulgation.
73 La Commission conteste cette argumentation.
a)  Sur la motivation de la décision attaquée
74 Le Tribunal relève que, dans la demande confirmative, les six députés ont expressément revendiqué la divulgation des stipulations en matière de droit de propriété intellectuelle.
75 En l’espèce, par la décision attaquée, la Commission a partiellement occulté les stipulations en matière de droits de propriété intellectuelle dans les documents 1, 4, 6, 7, 8, 11, 12 et 13.
76 Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que les informations occultées au titre de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux contenaient des éléments sensibles sur le plan commercial, tels que la propriété intellectuelle. Elle a également indiqué, dans la partie de cette décision consacrée aux risques relatifs à l’organisation et à la capacité industrielle des entreprises concernées, que la divulgation de la description des obligations mutuelles des parties aux
contrats en cause en matière de propriété intellectuelle révélerait aux concurrents des entreprises concernées des éléments importants de leurs capacités industrielles et pourrait porter préjudice à leurs capacités industrielles à produire le vaccin, voire, à terme, entraver pour des raisons économiques l’exécution intégrale des contrats conclus. Lesdites stipulations prévoiraient soit le droit exclusif pour l’entreprise concernée de bénéficier des droits de propriété intellectuelle issus de la
production du vaccin, soit l’octroi d’une licence sur une partie de ces droits. L’entreprise concernée pourrait se voir adresser des demandes d’accorder soit des dérogations à l’exclusivité en vue de tests cliniques ultérieurs, soit des licences supplémentaires, et être ainsi soumise à une pression grandissante de la part de ses concurrents pour rendre publique une partie de son savoir-faire. De telles demandes deviendraient plus fréquentes compte tenu des besoins croissants en vaccins liés à la
progression mondiale de la pandémie.
77 Il ressort de ces considérations que la Commission a fourni des explications succinctes, sans divulguer le contenu des phrases ou des membres de phrase occultés de sorte à priver l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux de sa finalité essentielle quant à la nature des stipulations en matière de droits de propriété intellectuelle partiellement occultées. De même, elle a fourni des explications circonstanciées quant à la manière dont leur divulgation pouvait porter concrètement
et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées.
78 Par ailleurs, si la Commission est tenue d’exposer les motifs qui justifient l’application à l’espèce d’une des exceptions au droit d’accès prévues par le règlement no 1049/2001, elle n’est pas dans l’obligation de fournir des renseignements allant au-delà de ce qui est nécessaire à la compréhension, par le demandeur d’accès, des raisons à l’origine de sa décision et au contrôle, par le Tribunal, de la légalité de cette dernière (arrêt du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission, T‑380/04, non
publié, EU:T:2008:19, point 119).
79 Il s’ensuit que les motifs de la décision attaquée permettent aux requérantes de comprendre les raisons spécifiques qui ont conduit la Commission à occulter, partiellement, dans les contrats en cause, les stipulations en matière de droits de propriété intellectuelle et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité desdites occultations, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 34, 35 et 78 ci-dessus.
80 Partant, le grief tiré de l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée à cet égard doit être rejeté.
b)  Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
81 S’agissant du bien-fondé des motifs avancés par la Commission dans la décision attaquée pour justifier l’occultation partielle des stipulations en matière de propriété intellectuelle, il convient de déterminer si la Commission a fourni des explications plausibles quant au point de savoir de quelle manière l’accès aux informations occultées pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées et si l’atteinte alléguée peut être
considérée comme raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir, en ce sens, arrêt du 25 novembre 2020, Bronckers/Commission, T‑166/19, EU:T:2020:557, point 58).
82 Conformément à la jurisprudence citée aux points 30 et 31 ci-dessus, la Commission n’est pas tenue d’établir l’existence d’un risque certain d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées.
83 Il suffit que la décision attaquée comporte des éléments tangibles permettant de conclure que le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées était, à la date de son adoption, raisonnablement prévisible et non purement hypothétique et fasse état de l’existence, à une telle date, de raisons objectives permettant de raisonnablement prévoir que de telles atteintes surviendraient en cas de divulgation des informations demandées par les requérantes (voir, en ce sens, arrêt du
7 juin 2011, Toland/Parlement, T‑471/08, EU:T:2011:252, points 78 et 79).
84 En l’espèce, ainsi qu’il est indiqué au point 76 ci-dessus, il ressort de la décision attaquée que la Commission a refusé l’accès intégral aux stipulations en question, afin de ne pas risquer de perturber les éventuelles prises de position stratégiques des entreprises concernées quant à l’exploitation de leurs droits, à une époque caractérisée par une forte demande pour les vaccins contre la COVID-19 et durant laquelle il était envisageable que des demandes d’octroi de licences par des sociétés
tierces soient introduites.
85 Ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate que si les stipulations en matière de propriété intellectuelle, que celles-ci figurent sous l’intitulé « Exploitation des résultats » du contrat et/ou sous l’intitulé « Droits de propriété intellectuelle », présentent des similarités, elles ne sont pas identiques, ce qui ressort, le cas échéant, de divers ajouts. En outre, les requérantes ne contestent ni le contexte de forte demande pour des vaccins contre la
COVID-19, ni la circonstance que des demandes d’octroi de licences étaient envisageables. Elles ne contestent pas davantage le fait que le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux d’une entreprise donnée lui serait individuel.
86 Par ailleurs, les explications de la Commission dans la décision attaquée démontrent qu’elle a effectué un examen concret et individuel de la demande d’accès aux contrats en cause et qu’elle s’est appuyée sur des circonstances propres à l’espèce et spécifiques aux entreprises concernées en ce qui concernait les stipulations en matière de droits de propriété intellectuelle pour accréditer l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non hypothétique d’atteinte à la protection des intérêts
commerciaux desdites entreprises.
87 Il découle de ce qui précède que les explications de la Commission dans la décision attaquée sur l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non hypothétique d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées relatif à la divulgation intégrale des stipulations en matière de propriété intellectuelle sont fondées.
88 S’agissant du grief selon lequel la Commission a appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux de manière incohérente, ce grief se recoupe avec le troisième moyen, de sorte qu’il convient de l’examiner dans le cadre dudit moyen.
89 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la troisième branche du deuxième moyen.
3.  Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés
90 Par la quatrième branche du deuxième moyen, les requérantes contestent le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée et son bien-fondé pour justifier l’occultation partielle des stipulations relatives aux acomptes (down payments) ou aux paiements anticipés (advance payments) de « certains » des contrats en cause sur le fondement de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
91 Les requérantes contestent les considérations invoquées dans la décision attaquée selon lesquelles la divulgation des informations occultées présenterait un risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées dès lors qu’elle permettrait de déterminer la valeur totale du contrat en question et le prix par dose et révélerait les stratégies et structures tarifaires desdites entreprises, ce qui pourrait nuire à leurs négociations sur le marché mondial et être exploité à leur
détriment par leurs concurrents. Elles relèvent que la Commission a divulgué le montant des acomptes ou paiements anticipés de « certains » contrats en cause et que « certains » desdits montants seraient connus en raison des fuites d’informations sur un réseau social et dans les médias (voir point 8 ci-dessus). Or, la Commission n’aurait pas confirmé qu’il était effectivement possible de calculer le prix par dose ou de tirer d’autres conclusions commercialement sensibles, notamment, quant aux
stratégies tarifaires des entreprises concernées, à partir des informations sur les acomptes ou les paiements anticipés occultés. Dans ce cadre, elles soulignent que le prix laissé à la charge des États membres n’a pas été divulgué. En tout état de cause, la Commission n’aurait pas expliqué en quoi le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées était prévisible et non hypothétique.
92 Les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir expliqué en quoi la divulgation des acomptes ou des paiements anticipés pourrait révéler des informations sur la situation actuelle des entreprises concernées et le marché pour les vaccins contre la COVID-19.
93 Les requérantes soutiennent que le risque de préjudice aux intérêts commerciaux des entreprises concernées relatif à leurs négociations avec des acheteurs de pays tiers ne serait pas couvert par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et serait hypothétique.
94 Les requérantes contestent les considérations invoquées dans la décision attaquée selon lesquelles la divulgation intégrale des stipulations des contrats d’achat anticipé sur les acomptes ou les paiements anticipés désavantagerait l’entreprise concernée à l’égard de ses concurrents, en dévoilant le degré de risque financier qu’elle aurait accepté en concluant le contrat en question et en donnant des indications sur sa stratégie tarifaire. Selon elles, ces éléments ne préciseraient pas en quoi la
divulgation de ces informations serait susceptible de porter concrètement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées ou de dévoiler des informations sensibles sur leurs structures des coûts.
95 Dans ce cadre, les requérantes soutiennent que, même s’il existait une quelconque justification à l’occultation des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés dans les contrats d’achat anticipé lorsque ces contrats étaient en vigueur, celle-ci n’aurait plus existé au moment de l’adoption de la décision attaquée. Par ailleurs, ces informations ne seraient pas susceptibles d’être pertinentes pour de futures négociations. Elles soulignent qu’elles n’ont pas demandé l’accès aux
contrats en cause avant que ces derniers ne soient signés et que les contrats d’achat avaient déjà été signés à la date de l’adoption de la décision attaquée.
96 Enfin, les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir mis en balance l’intérêt des entreprises concernées au maintien de la confidentialité des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés et l’intérêt public à la transparence et de ne pas avoir justifié que le premier primait sur le second.
97 La Commission conteste cette argumentation.
a)  Sur la motivation de la décision attaquée
98 Le Tribunal relève que, dans la demande confirmative, les six députés ont contesté les motifs du refus partiel d’accès aux informations sur les prix contenus dans les contrats en cause exposés dans la réponse du 9 juin 2021 à leur demande initiale.
99 En l’espèce, par la décision attaquée, la Commission a occulté partiellement les stipulations relatives aux prix et aux modalités de paiement dans tous les contrats en cause, exception faite du document 10, ce document n’abordant pas les prix. Ainsi, elle a occulté le montant des acomptes ou des paiements anticipés dans les documents 2, 3, 4, 12 et 13, mais l’a divulgué dans les documents 1, 5 et 6. Par ailleurs, elle a occulté diverses informations dans les contrats en cause portant, selon le
cas, notamment, sur le prix par dose, le prix à la livraison, le prix ou le coût total, le montant laissé à la charge des États membres et les échéanciers de paiements.
100 Dans la décision attaquée, tout d’abord, la Commission a indiqué que les informations occultées au titre de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux contenaient des éléments sensibles sur le plan commercial relatives, notamment, aux prix et aux prix individuels par dose, aux coûts totaux estimés des produits et à la méthodologie relative aux coûts. Elle a exposé que la divulgation des informations occultées pourrait nuire à la situation concurrentielle des entreprises
concernées sur le marché mondial pour la production et la commercialisation des vaccins contre la COVID-19.
101 Ensuite, dans une partie consacrée précisément aux risques financiers, la Commission a indiqué que les stipulations relatives aux prix et aux conditions d’achat figurant dans les contrats d’achat anticipé demeuraient pertinentes pour les contrats d’achats ultérieurs. Elle a expliqué que les informations sur les prix avaient été occultées, car leur divulgation permettrait aux tiers de tirer des conclusions quant aux stratégies commerciales et tarifaires des entreprises concernées, lesquelles
pourraient être utilisées par les concurrents de ces dernières afin de planifier leurs propres stratégies, ce qui porterait gravement atteinte aux négociations en cours et futures des entreprises concernées avec d’autres acheteurs à l’international.
102 S’agissant, plus particulièrement des acomptes ou des paiements anticipés dans les contrats d’achat anticipé, à savoir la contribution provenant des ressources de l’aide d’urgence (voir points 2 et 3 ci-dessus), la Commission a affirmé avoir divulgué ladite contribution pour presque tous les contrats concernés. Le montant total de ces acomptes s’élevait à  2,7 milliards d’euros approximativement. Elle a indiqué que, dans le cas des contrats dans lesquels l’acompte avait été occulté, les
entreprises concernées avaient indiqué des motifs concrets pour justifier le caractère commercial confidentiel dudit montant. Notamment, en disposant du montant de l’acompte, il serait possible d’évaluer, en fonction des pratiques du marché, et de déterminer la valeur totale du contrat et finalement le prix par dose, qui constitueraient des informations commerciales sensibles pour toutes les entreprises. Cela pourrait avoir un impact négatif sur les négociations des entreprises concernées avec
d’autres acheteurs et pourrait porter préjudice à l’ensemble des opérations desdites entreprises dans la mesure où leurs stratégies et structures tarifaires seraient révélées. De telles difficultés pour les entreprises concernées pourraient, à leur tour, porter préjudice à l’exécution des contrats en cause.
103 En outre, la Commission a exposé les motifs de certaines occultations spécifiques relatives aux acomptes, à savoir dans les documents 3 et 6. Ces occultations seraient liées à des aspects particuliers des contrats relatifs aux coûts liés au processus de production de l’entreprise concernée ou à la circonstance que des livraisons et des discussions étaient en cours avec l’entreprise concernée à la date de l’adoption de la décision attaquée. Ces occultations auraient eu pour objectif de permettre
la bonne exécution du contrat en question.
104 Ensuite, la Commission a relevé que, selon la jurisprudence, des informations commerciales sensibles relatives, notamment, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales étaient protégées par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Par ailleurs, les risques commerciaux potentiels, les prix appliqués et les seuils des engagements financiers convenus dans le cadre d’un contrat à caractère sensible pourraient également
constituer des éléments commerciaux sensibles, notamment pour des contrats qui seraient encore en cours d’exécution. En l’occurrence, la divulgation de tels passages des contrats d’achat anticipé désavantagerait clairement l’entreprise concernée à l’égard de ses concurrents, car le niveau de risque financier accepté par celle-ci et des informations sur sa stratégie tarifaire seraient ainsi portés à leur connaissance. Dans ces circonstances, la Commission a estimé que certains aspects financiers
des contrats devaient demeurer protégés en vertu de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux.
105 Enfin, la Commission a écarté la pertinence de la circonstance que trois contrats d’achat anticipé aient fait l’objet de fuites dans les médias.
106 Il ressort de ces considérations que la Commission a fourni des explications détaillées quant à la nature des informations relatives aux acomptes et aux paiements anticipés occultées et quant à la manière dont la divulgation desdites informations pouvait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, que ce soit entre elles ou entre elles et les sociétés pharmaceutiques tierces avec lesquelles elles seraient en concurrence. En outre, ces
explications ont tenu compte des échanges entre la Commission et les six députés. En effet, la Commission a indiqué les motifs pour lesquels les contrats d’achat anticipé seraient pertinents pour les contrats d’achat ultérieurs ainsi que dans le cadre de négociations avec des acheteurs de pays tiers et les motifs pour lesquels les informations qui avaient fait l’objet de fuites dans les médias ne sauraient justifier de déroger à la confidentialité desdites informations.
107 Il s’ensuit que les motifs de la décision attaquée permettent aux requérantes de comprendre les raisons spécifiques qui ont conduit la Commission à occulter, partiellement, dans les contrats en cause, les stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité desdites occultations, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 34, 35 et 78 ci-dessus.
108 Partant, le grief tiré de l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée à cet égard doit être rejeté.
b)  Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
109 S’agissant du bien-fondé des motifs avancés par la Commission pour justifier l’occultation partielle des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés, il convient de déterminer si, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 30, 31, 81 et 83 ci-dessus, elle a fourni des explications plausibles quant au fait que l’accès aux informations occultées pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées et
quant au fait que l’atteinte alléguée pourrait être considérée comme raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.
110 En l’espèce, ainsi qu’il est indiqué aux points 100 à  105 ci-dessus, il ressort de la décision attaquée que la Commission a refusé l’accès intégral aux stipulations en question, y compris aux échéanciers et aux modalités de paiement, afin de ne pas risquer de dévoiler des éléments financiers sensibles des contrats en cause, et, in fine, relatifs aux stratégies commerciales et tarifaires des entreprises concernées à une époque caractérisée par une forte demande pour les vaccins contre la COVID-19
et durant laquelle des négociations avec des acheteurs de pays tiers étaient en cours ou, à tout le moins, envisageables.
111 Ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate que les stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés ainsi que les modalités et les échéanciers de paiement sont différentes. Par ailleurs, les requérantes ne contestent ni le contexte de forte demande pour des vaccins contre la COVID-19, ni la circonstance que des négociations avec des acheteurs de pays tiers étaient en cours ou, à tout le moins, envisageables à la date de l’adoption de la
décision attaquée.
112 Contrairement à ce que font valoir les requérantes, la circonstance que les entreprises concernées aient pu bénéficier d’acomptes provenant de fonds publics afin de mettre au point des vaccins contre la COVID-19 n’est pas de nature, en tant que telle, à exclure le caractère commercialement sensible des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés ou à considérer que leurs intérêts commerciaux ne sont pas susceptibles d’être protégés.
113 À cet égard, selon la jurisprudence, si une entreprise à capitaux publics peut détenir des intérêts commerciaux susceptibles d’être protégés au même titre que ceux d’une entreprise privée (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2018, CEE Bankwatch Network/Commission, T‑307/16, EU:T:2018:97, point 108), il doit a fortiori en aller de même pour une entreprise privée, quand bien même celle-ci contribue à la réalisation de tâches d’intérêt public (arrêt du 5 décembre 2018, Falcon Technologies
International/Commission, T‑875/16, non publié, EU:T:2018:877, point 49).
114 De même, ainsi que le fait valoir la Commission, doit être rejeté l’argument des requérantes portant sur la circonstance que des informations relatives aux prix des vaccins avaient fait l’objet de fuites dans les médias.
115 En effet, la divulgation non autorisée d’un document ne peut avoir pour conséquence de rendre accessible au public un document couvert par une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 (arrêt du 25 octobre 2013, Beninca/Commission, T‑561/12, non publié, EU:T:2013:558, point 55).
116 De plus, ne saurait prospérer l’argument des requérantes portant sur la circonstance que, en septembre et en octobre 2022, à savoir plus de six mois après l’adoption de la décision attaquée, deux entreprises (AstraZeneca et CureVac) auraient respectivement soit déclaré ne pas avoir de difficulté avec la divulgation publique de leur contrat d’achat anticipé, soit révélé « tous les détails relatifs aux prix et à l’acompte reçu », ce qui, selon les requérantes, démontrerait que la divulgation des
informations sur les acomptes ne présenterait pas de risque pour les intérêts commerciaux de l’entreprise concernée.
117 En effet, comme cela est exposé au point 56 ci-dessus, l’appréciation du bien-fondé de l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux doit se faire au regard des faits existant à la date de l’adoption de la décision attaquée, et non au regard d’éventuelles déclarations d’un nombre limité des entreprises concernées faites plus de six mois après la date d’adoption de cette décision et dont le montant des acomptes respectifs a, en tout état de cause, été divulgué par
la Commission.
118 Il s’ensuit que c’est à juste titre que la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que la divulgation intégrale des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés pourrait fournir aux concurrents des entreprises concernées ainsi qu’à des acheteurs tiers des informations commercialement sensibles portant sur les stratégies commerciales et tarifaires des entreprises concernées.
119 Il découle de ce qui précède que les explications de la Commission dans la décision attaquée sur l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées en ce qui concerne la divulgation intégrale des stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés sont fondées.
120 S’agissant du grief selon lequel la Commission a appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux de manière incohérente, ce grief se recoupe avec le troisième moyen, de sorte qu’il convient de l’examiner dans le cadre dudit moyen.
121 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du deuxième moyen.
4.  Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation
122 Par la cinquième branche du deuxième moyen, les requérantes contestent le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée et son bien-fondé pour justifier le refus partiel d’accès aux stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation sur le fondement de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
123 Premièrement, les requérantes font valoir que l’hypothèse selon laquelle la divulgation intégrale des stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation pourrait engendrer de multiples actions en justice abusives et injustifiées n’est pas expliquée et que la Commission n’a pas précisé ni étayé en quoi leur divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées.
124 Deuxièmement, les requérantes contestent les considérations invoquées dans la décision attaquée selon lesquelles la divulgation intégrale des stipulations en question révélerait aux concurrents de l’entreprise concernée les « points faibles » de la couverture de sa responsabilité et fournirait auxdits concurrents un avantage concurrentiel qu’ils pourraient exploiter.
125 Troisièmement, les requérantes contestent que la divulgation intégrale des stipulations en question aurait un impact sur la réputation générale des entreprises concernées. La raison pour laquelle leur divulgation aurait un tel impact ne serait expliquée nulle part par la Commission. En effet, si une société est jugée responsable d’un dommage en lien avec un produit défectueux, l’atteinte à la réputation résulterait de ce dommage et non des stipulations négociées avec la Commission.
126 Quatrièmement, les requérantes estiment que ne sont pas non plus étayées trois considérations supplémentaires invoquées dans la décision attaquée, selon lesquelles la divulgation des informations occultées révélerait aux concurrents de l’entreprise concernée les coûts qu’une violation du contrat en cause pourrait engendrer ainsi que les bénéfices réels dudit contrat, et porterait atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, principalement en compromettant leur compétitivité sur
les marchés mondiaux. Selon elles, la Commission n’a pas apporté suffisamment d’éléments démontrant que la divulgation des informations en question permettrait de révéler la teneur de la stratégie commerciale des entreprises concernées ou affaiblirait leur position concurrentielle sur les marchés mondiaux. En outre, les exemples mentionnés dans la décision attaquée n’illustreraient pas le caractère sensible des informations occultées.
127 Par ailleurs, les requérantes soutiennent que l’argumentation de la Commission, selon laquelle les négociations sur les stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation auraient été individuelles, est trompeuse. Selon les requérantes, il ressortirait du point 76 du rapport spécial 19/2022 de la Cour des comptes européenne, intitulé « L’UE et l’acquisition de vaccins contre la COVID-19 », que ces stipulations seraient les mêmes dans les contrats en cause, de sorte que leur
divulgation ne pourrait pas affecter les intérêts commerciaux des entreprises concernées.
128 Au stade de la réplique, les requérantes font valoir que, même dans l’hypothèse où la Commission aurait prouvé que la divulgation des informations occultées porterait une atteinte concrète et effective aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, l’intérêt public que présente leur divulgation primerait lesdits intérêts commerciaux.
129 La Commission conteste cette argumentation.
130 La Commission soutient que les stipulations en question ont la même pertinence économique et financière que tout autre élément de coût pour l’entreprise concernée et ont fait l’objet de négociations individuelles.
131 Premièrement, la Commission estime qu’il est erroné d’affirmer que la divulgation desdites stipulations n’entraînerait pas de risque de recours en réparation de dommages stratégiques et spéculatifs à l’encontre des entreprises concernées.
132 Ainsi, selon la Commission, la divulgation intégrale des stipulations en question augmenterait le nombre de recours en réparation, qu’ils soient fondés ou non, contre l’entreprise concernée, car elle donnerait à la partie demanderesse davantage d’arguments sur lesquels tenter d’établir le caractère défectueux du vaccin. Par ailleurs, ce risque serait d’autant plus concret que la définition des dommages pour lesquels l’entreprise concernée pourrait être indemnisée a déjà été divulguée dans
certains contrats, à savoir dans le document 5. En outre, la divulgation des détails de l’indemnisation à la charge de l’État membre concerné pourrait avoir une incidence sur la charge de la preuve en ce qui concerne le caractère défectueux du produit. En effet, la connaissance de ces détails pourrait avoir pour effet de simplifier ou de rendre plus complexe la tâche consistant à démontrer la responsabilité du fabricant du vaccin. Elle estime donc que le risque d’un litige massif et des
conséquences financières très importantes pour une seule entreprise n’est pas abstrait.
133 Deuxièmement, la Commission soutient que la décision attaquée explique, à suffisance de droit, les raisons pour lesquelles la divulgation intégrale des stipulations en question aurait des répercussions commerciales négatives pour les entreprises concernées. En effet, lesdites stipulations ne seraient pas des « clauses types », mais auraient fait l’objet de négociations individuelles, dont la rédaction finale représenterait l’acceptation, par l’entreprise, d’un risque financier parmi d’autres
dans le cadre d’un accord complexe. Si elles étaient divulguées dans leur intégralité, une évaluation comparative pourrait donner lieu à une perception négative injustifiée de certains produits. En outre, la jurisprudence admettrait l’invocation de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux par la Commission en raison de l’atteinte à la réputation d’un opérateur actif sur un marché. Par ailleurs, la Commission soutient que même une clause d’indemnisation pleinement applicable
ne répare pas tous les dommages causés par une condamnation à verser des dommages et intérêts à une victime, notamment à l’image et à la réputation de l’entreprise condamnée. Ainsi, la divulgation intégrale des stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation, à savoir des situations dans lesquelles une entreprise est ou non indemnisée, aurait indéniablement une incidence sur ses intérêts commerciaux.
134 Troisièmement, la Commission relève que les requérantes soutiennent que, en l’espèce, l’atteinte effective et concrète aux intérêts commerciaux résultant de la divulgation desdites stipulations n’a pas été étayée et que, même si elle avait justifié une telle atteinte, il existerait un intérêt public supérieur justifiant leur divulgation. Selon la Commission, la décision attaquée explique les conséquences négatives que la divulgation de ces informations entraînerait en l’espèce pour les
entreprises concernées. Or, la circonstance que la décision attaquée invoquerait l’existence d’un risque d’atteinte effective et concrète aux intérêts commerciaux ne signifierait pas que ce risque ne serait pas étayé ou qu’il serait spéculatif. Par ailleurs, l’argumentation des requérantes serait contradictoire dans la mesure où elles affirment qu’il serait essentiel de savoir si les entreprises concernées seront tenues responsables des dommages en cas d’effets néfastes des vaccins, tout en
prétendant que les conséquences de la divulgation des stipulations en question pour lesdites entreprises, telles qu’invoquées par la Commission, seraient spéculatives et hypothétiques.
a)  Sur la motivation de la décision attaquée
135 En l’espèce, au point 2.1.1 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que les informations occultées au titre de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, contenaient des éléments sensibles sur le plan commercial relatives, notamment, à la responsabilité et à l’indemnisation. Elle a mentionné que la divulgation intégrale de telles informations pourrait dévoiler, aux concurrents de
l’entreprise concernée, le bénéfice précis résultant de la négociation pour ladite entreprise.
136 Ensuite, au point 2.1.4, tout d’abord, la Commission a abordé, en substance, la responsabilité non contractuelle des entreprises concernées à l’égard de tierces personnes, notamment pour des effets indésirables découlant de l’utilisation du vaccin, et les stipulations relatives à l’éventuelle indemnisation, à savoir le remboursement, par les États membres des entreprises concernées, dans l’hypothèse où ces dernières seraient condamnées à verser des dommages et intérêts à des personnes tierces au
titre de leur responsabilité non contractuelle. Ensuite, elle a abordé divers aspects de la responsabilité contractuelle des entreprises concernées.
137 Ainsi, la Commission a précisé que la divulgation intégrale des stipulations en question risquait de porter atteinte aux intérêts commerciaux desdites entreprises à trois égards.
138 Premièrement, une connaissance précise des limites de la responsabilité de l’entreprise concernée permettrait un comportement stratégique à son égard, dans la mesure où elle pourrait être confrontée aux conséquences économiques de multiples actions en justice, engagées de manière abusive et injustifiée, uniquement dans le but de recevoir une indemnisation liée à l’utilisation de son vaccin. Deuxièmement, la divulgation intégrale des stipulations relatives à l’indemnisation des entreprises
concernées par les États membres, en particulier celles définissant les conditions exactes dans lesquelles une indemnisation par l’État membre est exclue, révélerait inévitablement aux concurrents de l’entreprise concernée, y compris ceux ne produisant pas de vaccins, les « points faibles » de la couverture de sa responsabilité et leur fournirait un avantage concurrentiel qu’ils pourraient exploiter. Troisièmement, une connaissance précise des limites de la responsabilité de l’entreprise
concernée aurait également un impact sur sa réputation générale auprès des consommateurs et de ses partenaires commerciaux potentiels. Selon la Commission, ces motifs expliqueraient les raisons pour lesquelles certains passages relatifs à la dérogation à la stipulation relative à l’indemnisation, à savoir les conditions dans lesquelles une entreprise concernée donnée ne sera pas indemnisée, ne sauraient être divulgués. Dans ce cadre, elle a fait référence, à titre d’exemple, aux occultations
dans la stipulation I.12 du document 4.
139 Ensuite, la Commission a indiqué que certaines stipulations portant sur la responsabilité contractuelle revêtiraient une dimension commerciale évaluée et négociée avec l’entreprise concernée, dont la divulgation révélerait aux concurrents de cette dernière des informations concernant sa capacité et sa stratégie internes, en particulier dans la mesure où ces informations seraient de nature à permettre de connaître avec précision les coûts qu’une rupture de contrat pourrait engendrer pour cette
entreprise. La Commission a illustré ses propos par des exemples de stipulations précises.
140 La Commission a précisé que les informations occultées étaient sensibles sur le plan commercial. D’une part, la divulgation de ces informations permettrait de connaître avec précision les coûts qu’une violation du contrat pourrait engendrer pour les entreprises concernées. D’autre part, la divulgation de ces informations pourrait se révéler préjudiciable aux entreprises concernées, car elles donneraient aux concurrents de ces dernières une idée très réaliste des bénéfices réels obtenus en vertu
du contrat en cause, alors que, au moment de l’adoption de la décision attaquée, ces mêmes entreprises négociaient des contrats pour la livraison de vaccins contre la COVID-19 avec des acheteurs de pays tiers, la concurrence à cet égard s’exerçant sur un marché mondial. La Commission a encore précisé que ce conflit potentiel avec les intérêts commerciaux des entreprises concernées serait d’autant plus préjudiciable que l’exécution de certains contrats était sur le point de démarrer, comme cela
était le cas, au moment de l’adoption de la décision attaquée, notamment, des documents 7 et 11.
141 Enfin, la Commission a souligné que, dans ce contexte, le marché mondial sur lequel les entreprises concernées menaient leurs activités devait être pris en considération dans l’évaluation des effets de la divulgation des stipulations en question au titre du règlement no 1049/2001. Elle a indiqué que, lors de l’évaluation de l’applicabilité de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, différents facteurs avaient été pris en considération, notamment la situation particulière
de chaque fabricant de vaccins sur le marché, ses caractéristiques, ses relations avec d’autres acteurs commerciaux, ses stratégies de marché et d’entreprise et l’usage que ses concurrents pourraient faire des informations divulguées. Elle en a conclu que la divulgation intégrale des contrats conclus avec les entreprises concernées constituerait une atteinte aux intérêts commerciaux de ces dernières, essentiellement en compromettant leur compétitivité sur les marchés mondiaux.
142 Il ressort de ces considérations que la Commission a fourni des explications quant au caractère commercialement sensible des informations contenues dans les stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation. De même, la Commission a expliqué, à suffisance de droit, comment, selon elle, la divulgation intégrale desdites stipulations pourrait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, que ce soit entre elles ou entre elles et
des tiers avec lesquels elles seraient en concurrence.
143 Il s’ensuit que les motifs de la décision attaquée permettent aux requérantes de comprendre les raisons spécifiques qui ont conduit la Commission à occulter, partiellement, dans les contrats en cause, les stipulations relatives à la responsabilité des entreprises concernées, tant contractuelle que non contractuelle, ainsi que les stipulations relatives à l’éventuelle indemnisation par les États membres d’éventuelles obligations encourues par les entreprises concernées en cas de mise en cause de
leur responsabilité non contractuelle et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité desdites occultations, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 34, 35 et 78 ci-dessus.
144 Partant, le grief tiré de l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée à cet égard doit être rejeté.
b)  Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
145 S’agissant du bien-fondé des motifs avancés par la Commission pour justifier l’occultation partielle des stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation, il convient de déterminer si, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 30, 31, 81 et 83 ci-dessus, elle a fourni des explications plausibles quant au fait que l’accès aux informations occultées pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées et
quant au fait que l’atteinte alléguée pourrait être considérée comme raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.
1) Sur les stipulations relatives à la responsabilité contractuelle
146 En l’espèce, ainsi qu’il est indiqué aux points 139 à  141 ci-dessus, il ressort de la décision attaquée que la Commission a refusé l’accès intégral aux stipulations relatives à la responsabilité contractuelle des entreprises concernées afin de ne pas risquer de dévoiler des informations prétendument commercialement sensibles relatives aux risques identifiés concernant la mise en Å“uvre des contrats en cause et aux seuils financiers acceptés à l’égard desdits risques par lesdites entreprises, Ã
une époque caractérisée par une forte demande pour les vaccins contre la COVID-19 et durant laquelle des négociations avec des acheteurs de pays tiers étaient en cours ou, à tout le moins, envisageables.
147 Ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate que les stipulations relatives à la responsabilité des entreprises concernées en cas de violation, de résiliation ou de suspension desdits contrats, notamment en lien avec des retards de livraison ou des livraisons manquantes, sont différentes. Par ailleurs, les requérantes ne contestent ni le contexte de forte demande pour des vaccins contre la COVID-19, ni la circonstance que des négociations avec des acheteurs
de pays tiers étaient en cours ou, à tout le moins, envisageables.
148 Il s’ensuit que c’est à juste titre que la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que la divulgation intégrale desdites stipulations pourrait fournir aux concurrents des entreprises concernées ainsi qu’à des acheteurs tiers des informations commercialement sensibles portant sur des éléments de coûts, sur leurs capacités et leurs stratégies internes et sur les seuils financiers acceptés (voir, en ce sens, arrêt du 12 octobre 2022, Saure/Commission, T‑524/21, EU:T:2022:632, points 99
à  102).
149 Il découle de ce qui précède que les explications de la Commission dans la décision attaquée sur l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non hypothétique d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées en ce qui concerne la divulgation intégrale des stipulations relatives à la responsabilité contractuelle desdites entreprises sont fondées.
150 S’agissant du grief selon lequel la Commission a appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux de manière incohérente, ce grief se recoupe avec le troisième moyen, de sorte qu’il convient de l’examiner dans le cadre dudit moyen.
2) Sur les stipulations relatives à l’indemnisation
151 À titre liminaire, il importe de relever que, selon les articles 1er et 12 de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux (JO 1985, L 210, p. 29), le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit et sa responsabilité ne peut être limitée ou écartée à l’égard de la victime par une clause
limitative ou exonératoire de responsabilité. Ainsi, comme cela a été reconnu par la Commission à l’audience, en l’absence de modification de la directive 85/374, ni la Commission ni les États membres n’étaient en droit de déroger aux dispositions de ladite directive.
152 Par ailleurs, aucune disposition de la directive 85/374 n’interdit qu’un tiers, en l’espèce un État membre, rembourse les dommages et intérêts qu’un producteur aurait versés en raison de la défectuosité de son produit.
153 En outre, le Tribunal observe que l’article 6, troisième alinéa, de l’accord du 16 juin 2020 sur l’achat de vaccins contre la COVID-19 conclu entre la Commission et les États membres a été publié sur le site Internet de la Commission le 7 septembre 2020 et entièrement divulgué en tant qu’annexe aux contrats en cause, exception faite du document 1. Cette disposition envisage un mécanisme d’indemnisation des entreprises concernées par les États membres des coûts économiques, à savoir d’éventuels
dommages et intérêts, qui incomberaient normalement auxdites entreprises au titre de leur responsabilité pour leurs vaccins. De même, la communication COM(2020) 245 final, mentionnée au point 3 ci-dessus, énonce que ce mécanisme devait s’analyser comme une « police d’assurance », consistant à transférer une partie du risque économique qui pesait sur l’industrie pharmaceutique vers les autorités publiques, en échange de quoi les États membres étaient assurés de bénéficier d’un accès équitable et
abordable à un vaccin, s’il venait à être trouvé.
154 Il découle de ce qui précède que, d’une part, le mécanisme d’indemnisation des entreprises concernées par les États membres n’affecte en rien le régime de la responsabilité juridique desdites entreprises au titre de la directive 85/374 et, d’autre part, cette information relevait déjà du domaine public au moment du dépôt de la demande initiale d’accès et de l’adoption de la décision attaquée.
155 Ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate que, si les contrats d’achat anticipé et les contrats d’achat contiennent tous une stipulation relative à l’indemnisation, à l’instar de ce qui avait été prévu par l’article 6 de l’accord du 16 juin 2020 sur l’achat de vaccins contre la COVID-19 conclu entre la Commission et les États membres, le contenu détaillé desdites stipulations n’est pas identique. Dans ce cadre, le Tribunal relève l’existence de
différences en ce qui concerne, premièrement, les situations précises dans lesquelles il a été convenu que l’indemnisation par l’État membre ne serait pas applicable, la plupart desdites situations demeurant néanmoins globalement similaires dans les contrats en cause, deuxièmement, le champ d’application temporel ou matériel de l’indemnisation éventuelle et, troisièmement, les modalités de gestion de la défense d’éventuels recours en réparation et de mise en œuvre d’une éventuelle indemnisation.
156 Ces précisions étant faites, il reste à déterminer si c’est à juste titre que la Commission a refusé la divulgation plus large, voire intégrale, des stipulations relatives à l’indemnisation.
157 À cet égard, ne saurait être retenu le premier motif invoqué dans la décision attaquée, à savoir qu’une connaissance précise des limites de la responsabilité de l’entreprise concernée permettrait un comportement stratégique à son égard, dans la mesure où elle pourrait être confrontée aux conséquences économiques de multiples actions en justice, engagées de manière abusive et injustifiée, uniquement dans le but de recevoir une indemnisation liée à l’utilisation de son vaccin.
158 En effet, même si le fait, pour une société, de se voir exposée à des actions en réparation peut indubitablement avoir pour conséquence des coûts élevés, que ce soit en termes de ressources économiques, de temps ou de personnel, y compris dans l’hypothèse où de telles actions seraient ultérieurement rejetées comme non fondées, le droit des personnes tierces éventuellement lésées par un vaccin défectueux d’introduire des recours en responsabilité contre les entreprises concernées repose sur la
législation nationale transposant la directive 85/374. Ce droit de recours est indépendant de l’existence et du contenu des stipulations relatives à l’indemnisation.
159 En outre, l’intérêt des entreprises concernées d’éviter de telles actions en réparation, dans l’hypothèse où elles auraient effectivement produit et mis en circulation un vaccin défectueux, ne saurait être qualifié d’intérêt commercial et, en tout état de cause, ne constitue pas un intérêt digne de protection, eu égard notamment au droit qu’a toute personne de demander réparation du dommage que lui aurait causé un produit défectueux (voir, par analogie, arrêt du 15 décembre 2011, CDC Hydrogene
Peroxide/Commission, T‑437/08, EU:T:2011:752, point 49 et jurisprudence citée). De même, le souhait d’éviter d’être exposé à des coûts plus importants liés à une procédure judiciaire ne constitue pas un intérêt protégé au titre de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2019, Intercept Pharma et Intercept Pharmaceuticals/EMA, T‑377/18, non publié, EU:T:2019:456, points 55 et 56).
160 En outre, la décision attaquée ne comporte aucun élément permettant de conclure que la divulgation plus large du mécanisme d’indemnisation des entreprises concernées pourrait être à l’origine de recours introduits à l’encontre de ces dernières. En effet, de tels recours auront toujours pour objet la condamnation du producteur de vaccins à la réparation du dommage subi, quelle que soit l’identité de l’entité qui, finalement, supportera les dommages et intérêts versés.
161 Dans ces conditions, le Tribunal considère que le premier motif invoqué dans la décision attaquée pour refuser la divulgation plus large de la stipulation relative à l’indemnisation ne démontre pas, comme le requiert la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, l’existence d’un risque prévisible et non purement hypothétique pour les intérêts commerciaux des entreprises concernées.
162 Le deuxième motif invoqué dans la décision attaquée pour refuser la divulgation intégrale des stipulations relatives à l’indemnisation, en particulier celles définissant les conditions exactes dans lesquelles une indemnisation par l’État membre est exclue, est qu’une telle divulgation révélerait inévitablement aux concurrents de l’entreprise concernée, y compris ceux ne produisant pas de vaccins, les « points faibles » de la couverture de sa responsabilité et leur fournirait un avantage
concurrentiel qu’ils pourraient exploiter, par exemple, dans des annonces publicitaires et des publicités comparatives.
163 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la raison pour laquelle les stipulations relatives à l’indemnisation ont été intégrées aux contrats en cause, à savoir compenser les risques encourus par les entreprises concernées liés au raccourcissement du délai de mise au point des vaccins, relevait du domaine public avant l’adoption de la décision attaquée.
164 En outre, tous les contrats en cause contiennent une stipulation relative à l’indemnisation qui, par ailleurs, énumère, de manière globalement similaire, les situations spécifiques principales dans lesquelles l’indemnisation de l’entreprise concernée par l’État membre est exclue.
165 Dès lors que toutes les entreprises concernées bénéficiaient, pour un motif identifié et légitime, d’une stipulation relative à l’indemnisation, la décision attaquée ne comporte aucun élément permettant de conclure que, en cas de divulgation plus large de la stipulation relative à l’indemnisation, le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, notamment en procurant un avantage concurrentiel auxdites entreprises entre elles, était, à la date de son adoption,
raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.
166 Dans ces conditions, le Tribunal considère que le deuxième motif invoqué dans la décision attaquée pour refuser la divulgation plus large de la stipulation relative à l’indemnisation ne démontre pas, comme le requiert la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, l’existence d’un risque prévisible et non purement hypothétique pour les intérêts commerciaux des entreprises concernées.
167 S’agissant du troisième motif invoqué dans la décision attaquée pour refuser la divulgation intégrale de la stipulation relative à l’indemnisation, notamment des conditions dans lesquelles l’indemnisation par l’État membre est exclue, à savoir qu’une connaissance précise des limites de la responsabilité des entreprises concernées aurait des répercussions sur leurs réputations auprès des consommateurs et de leurs partenaires commerciaux éventuels, il convient de relever que, contrairement à ce
qu’affirment les requérantes, une atteinte à la réputation d’une entreprise constitue assurément une atteinte à ses intérêts commerciaux dans la mesure où la réputation de tout opérateur actif sur un marché est essentielle pour la réalisation de ses activités économiques sur le marché (voir, en ce sens, arrêt du 5 décembre 2018, Falcon Technologies International/Commission, T‑875/16, non publié, EU:T:2018:877, points 51 et 53).
168 Néanmoins, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 163 à  165 ci-dessus, la décision attaquée ne comporte aucun élément permettant raisonnablement de conclure que, en cas de divulgation plus large de la stipulation relative à l’indemnisation, le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, notamment à leur réputation, était, à la date de son adoption, raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.
169 Dans ces conditions, le Tribunal considère que le troisième motif invoqué dans la décision attaquée pour refuser la divulgation plus large de la stipulation relative à l’indemnisation ne démontre pas, comme le requiert la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, l’existence d’un risque prévisible et non purement hypothétique pour les intérêts commerciaux des entreprises concernées.
170 Au vu de ce qui précède, la cinquième branche du deuxième moyen est fondée en ce qui concerne les stipulations relatives à l’indemnisation des contrats en cause.
171 Il s’ensuit qu’il convient d’accueillir en partie la cinquième branche du deuxième moyen en ce qui concerne les stipulations relatives à l’indemnisation et de la rejeter en partie en ce qui concerne les stipulations relatives à la responsabilité contractuelle des entreprises concernées.
5.  Sur le refus partiel d’accès aux calendriers de livraison
172 Par la sixième branche du deuxième moyen, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir occulté les calendriers de livraison des vaccins des entreprises concernées et de ne pas avoir suffisamment justifié l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à cet égard. Selon elles, lesdites informations ne constitueraient pas des informations commercialement sensibles et le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées serait hypothétique.
173 La Commission conteste cette argumentation.
174 En l’espèce, par la décision attaquée, la Commission a occulté les calendriers de livraison, au sens strict, à savoir le volume de doses et la périodicité des livraisons, dans les documents 3 et 8 à  13.
175 Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que les calendriers de livraison ainsi que les obligations contractuelles s’y rattachant constituaient des informations commercialement sensibles pour les entreprises concernées, dont la divulgation révélerait à leurs concurrents éventuels des informations concernant leurs capacités et leurs stratégies commerciales internes. Se trouveraient dans cette catégorie, par exemple, les articles I.4.7.1 et suivants du document 12, l’article II.14 du
document 13 et l’article I.4.7 du document 8. Elle a également indiqué que ces informations révéleraient, avec précision, les coûts qu’une violation du contrat pourrait engendrer pour l’entreprise concernée, dès lors qu’elles contiennent, le cas échéant, des règles relatives à des dommages et intérêts forfaitaires en cas de retard de livraison ou de livraison manquante. Ces informations seraient d’autant plus sensibles compte tenu du contexte très concurrentiel dans lequel interviennent les
entreprises concernées, en ce que ces entreprises négocient et se concurrencent au niveau mondial en vue de fournir des vaccins contre la COVID-19 également à des acquéreurs situés hors de l’Union. Ce conflit potentiel avec les intérêts commerciaux des entreprises concernées serait d’autant plus préjudiciable que l’exécution des contrats était sur le point de démarrer, comme c’était le cas, au moment de l’adoption de la décision attaquée, par exemple, des documents 7 et 11. Par ailleurs, la
Commission a précisé que, lors de l’évaluation de l’applicabilité de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, elle avait pris en considération la situation particulière des entreprises concernées ainsi que le stade d’exécution du contrat en question.
176 À cet égard, le Tribunal considère que les éléments avancés par la Commission justifient de considérer les informations sur les calendriers de livraison occultées comme constituant des informations commerciales sensibles et suffisent pour permettre de conclure à l’existence d’un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique que la divulgation de ces informations porte atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées (voir, en ce sens, arrêt du
3 juillet 2014, Conseil/in’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 52 et jurisprudence citée).
177 En effet, ayant consulté les versions intégrales des contrats en cause, le Tribunal constate que les informations sur les calendriers de livraison occultées donnent un aperçu d’éléments pertinents et récents relatifs aux capacités et stratégies commerciales internes des entreprises concernées, des conditions des livraisons et des modalités, volumes et périodicités de livraison, ainsi qu’aux conséquences pour lesdites entreprises en cas de livraisons manquantes ou retardées. Ainsi, au moment de
l’adoption de la décision attaquée, l’existence possible d’un risque raisonnablement prévisible et non purement hypothétique d’atteinte aux stratégies commerciales internes des entreprises concernées ne pouvait être écartée.
178 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la sixième branche du deuxième moyen.
6.  Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives aux donations et aux reventes
179 Par la septième branche du deuxième moyen, et à l’instar du premier moyen (voir points 17 et 25 ci-dessus), les requérantes reprochent à la Commission d’avoir largement occulté les stipulations relatives aux donations et aux reventes de vaccins dans les contrats en cause et de ne pas avoir suffisamment justifié l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à cet égard. Selon elles, un risque d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées serait
hypothétique. Par ailleurs, ces informations seraient d’un grand intérêt pour la santé publique de pays tiers. La Commission aurait dû mettre en balance l’hypothétique atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées avec l’intérêt public à la transparence, dès lors que la vaccination à l’échelle mondiale serait de la plus grande importance pour la protection de la santé humaine au sein de l’Union et dans les pays tiers.
180 La Commission conteste cette argumentation.
181 Selon la Commission, compte tenu du contexte dans lequel les contrats en cause ont été négociés, les stipulations relatives aux donations et aux reventes concerneraient le cÅ“ur des transactions commerciales et leur divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux légitimes des entreprises concernées, notamment à l’égard de leurs capacités et de leurs stratégies commerciales internes, ainsi que cela est invoqué dans la décision attaquée. Elle soutient que leur non-divulgation vise Ã
conserver le pouvoir d’appréciation de l’État membre et de l’entreprise concernée s’agissant de l’évaluation d’une éventuelle revente ou donation et dans le cadre d’éventuels accords trilatéraux avec des pays tiers. Or, une divulgation intégrale desdites stipulations subordonnerait de telles décisions à des éléments étrangers aux intérêts commerciaux et pourrait avoir des conséquences financières importantes pour l’entreprise concernée, notamment en matière d’indemnisation, et fournirait aux
concurrents de celle-ci des informations commerciales utiles qu’ils pourraient exploiter contre l’entreprise dans les pays tiers. Ces stipulations revêtiraient donc une dimension commerciale. Elle conteste l’argumentation des requérantes selon laquelle lesdites stipulations ne sauraient être considérées comme étant commercialement confidentielles en raison de l’intérêt majeur pour la santé publique en dehors de l’Union, dès lors que des considérations liées à la santé publique ne sauraient être
l’élément déterminant à cet égard.
182 En l’espèce, par la décision attaquée, la Commission a intégralement occulté les stipulations relatives aux donations et aux reventes dans les documents 7 et 11. Elle a partiellement expurgé les documents 3, 4, 6, 8, 9, 12 et 13 de ces stipulations.
183 Pourtant, la décision attaquée, qui expose les motifs qui justifieraient la non-divulgation, intégrale ou partielle, de toute une série de catégories d’informations dans les contrats en cause, ne laisse pas apparaître de manière expresse, ne serait-ce que de manière succincte, les motifs pour lesquels les stipulations relatives aux donations et aux reventes ont été occultées.
184 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argumentation développée par la Commission dans ses écritures, selon laquelle les stipulations relatives aux donations et aux reventes revêtiraient une dimension commerciale sensible pour les entreprises concernées en relation avec d’éventuels accords trilatéraux, notamment en matière tarifaire, d’indemnisation et de prise en charge de coûts, et, par conséquent, avec leurs relations commerciales potentielles futures. En effet, ces
explications n’ont pas été invoquées dans la décision attaquée et ne peuvent être déduites de celles qui y figurent.
185 De même, cette conclusion ne saurait davantage être remise en cause par l’affirmation de la Commission, lors de l’audience, selon laquelle le point 2.1.1 de la décision attaquée contiendrait un début de motivation à l’égard des stipulations relatives aux donations et aux reventes. Certes, ce point expose que « les passages expurgés des contrats auxquels [les requérantes] demand[ent] l’accès contiennent des informations qui, si elles sont divulguées, pourraient nuire à la compétitivité des
entreprises concernées sur le marché mondial de la production et de la commercialisation des produits pharmaceutiques en question ». Néanmoins, cette phrase est à ce point générale qu’elle pourrait se référer à presque toutes les stipulations des contrats en cause et ne laisse pas entrevoir les préoccupations concrètes des entreprises concernées, voire des États membres, relatives à l’évaluation d’éventuelles donations ou reventes en cas de divulgation plus large des stipulations en question.
186 Il s’ensuit que la Commission n’a pas fourni d’explications suffisantes permettant de savoir de quelle manière l’accès aux stipulations relatives aux donations et aux reventes pourrait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées.
187 Au vu de ce qui précède, c’est donc à bon droit que les requérantes font valoir que la Commission a méconnu l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 en refusant de donner accès aux stipulations relatives aux donations et aux reventes.
188 Il s’ensuit qu’il convient d’accueillir la septième branche du deuxième moyen.
7.  Conclusion sur le deuxième moyen
189 Pour les motifs exposés aux points 151 à  171 et aux points 182 à  187 ci-dessus, les cinquième et septième branches du deuxième moyen doivent être accueillies et la décision attaquée annulée en ce qui concerne les stipulations relatives à l’indemnisation ainsi qu’aux donations et aux reventes, et le deuxième moyen doit être rejeté pour le surplus.
C. Sur le troisième moyen, tiré de l’application incohérente du règlement no 1049/2001 ayant conduit à une violation de celui-ci et d’une violation du principe de bonne administration, en ce que la Commission n’a pas occulté, dans la même mesure, des stipulations ou des informations de même nature
190 Par leur troisième moyen, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir occulté de manière incohérente certaines dispositions et informations de même nature, voire identiques, dans certains des contrats en cause et non dans d’autres. Par ailleurs, la Commission n’aurait expliqué ni la raison de telles divergences, ni en quoi la divulgation des informations occultées aurait porté atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées. Elles estiment que les incohérences dans les
occultations montreraient que la Commission aurait simplement suivi l’avis de l’entreprise concernée et soutiennent, au stade de la réplique, que ces incohérences constitueraient un manquement au principe de bonne administration.
191 Dans ce cadre, les requérantes mettent en exergue, d’une part, les stipulations relatives aux droits de propriété intellectuelle et les stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés.
192 Les requérantes invoquent des griefs analogues dans le cadre du premier moyen relatif aux définitions ainsi que dans le cadre des troisième à cinquième branches du deuxième moyen relatives aux stipulations en matière de propriété intellectuelle, aux acomptes et aux paiements anticipés et aux stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation.
193 La Commission conteste cette argumentation.
194 À cet égard, le Tribunal rappelle que l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte dispose que le droit à une bonne administration comporte l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions.
195 En outre, s’agissant des documents émanant de tiers, l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001 précise que l’institution de l’Union consulte le tiers afin de déterminer si les exceptions prévues par l’article 4, paragraphe 1 ou 2, dudit règlement peuvent s’appliquer à moins qu’il ne soit clair que le document doive ou ne doive pas être divulgué. Si l’institution concernée considère qu’il est clair qu’un refus d’accès à un document émanant d’un tiers doit être opposé sur le fondement
des exceptions prévues au paragraphe 1 ou 2 du même article, elle refuse l’accès au demandeur sans même devoir consulter le tiers dont émane le document, que ce tiers se soit ou non antérieurement opposé à une demande d’accès aux mêmes documents formulée sur le fondement de ce règlement.
196 S’agissant de la marge d’appréciation des institutions de l’Union dans le cadre du traitement des demandes d’accès aux documents provenant de tiers, il convient de préciser que les dispositions du règlement no 1049/2001 établissant, sous réserve des exceptions qu’il énonce, le droit d’accès à tous les documents détenus par une institution, elles doivent être effectivement mises en œuvre par l’institution à laquelle la demande d’accès est adressée (arrêt du 14 février 2012, Allemagne/Commission,
T‑59/09, EU:T:2012:75, point 48).
197 Dès lors, dans le cas de documents émanant d’un tiers, si la consultation de ce dernier est, certes, obligatoire avant de divulguer le document duquel il émane, c’est à la Commission qu’il revient d’apprécier les risques pouvant résulter de la divulgation de ces documents. En particulier, elle ne peut pas considérer l’opposition de ce tiers comme signifiant automatiquement que la divulgation ne peut avoir lieu en raison d’un risque d’atteinte à la protection des intérêts commerciaux, mais doit
analyser de manière indépendante toutes les circonstances pertinentes et prendre une décision dans le cadre de sa marge d’appréciation.
198 Ainsi, conformément à l’article 8 du règlement no 1049/2001, la responsabilité finale de la bonne application de ce règlement incombe à l’institution de l’Union à laquelle il appartient également de défendre la validité de la décision refusant l’accès aux documents provenant d’un tiers devant les juridictions de l’Union ou le Médiateur européen. Si, dans l’hypothèse de documents provenant de tiers, l’institution devait automatiquement suivre la motivation avancée par le tiers concerné, elle
serait contrainte de défendre à l’égard de la personne ayant formulé la demande d’accès et, le cas échéant, devant ces instances de contrôle, des positions qu’elle ne considère pas elle‑même défendables (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 février 2012, Allemagne/Commission, T‑59/09, EU:T:2012:75, point 47).
199 En l’espèce, la décision attaquée indique que, conformément à l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001, la Commission a mené auprès des entreprises concernées de nouvelles consultations, qualifiées de « vastes », portant sur la possibilité d’une divulgation plus large des contrats en cause à la suite de la demande confirmative. Cette décision explique qu’il résultait desdites consultations que des parties des contrats en cause nécessitaient encore une protection, car elles étaient
commercialement sensibles et leur divulgation pouvait porter atteinte aux intérêts commerciaux légitimes des entreprises concernées. La décision attaquée précise qu’un accès partiel plus large a été accordé aux contrats en cause après que l’institution avait pris en considération les réponses des entreprises concernées et l’évaluation faite par elle-même. La décision attaquée expose également que l’étendue des expurgations variait, notamment, en fonction de la situation propre à chaque
entreprise concernée, de ses caractéristiques, de ses relations avec d’autres acteurs commerciaux, de ses stratégies de marché et d’entreprise, de l’usage que ses concurrents pourraient faire de l’information divulguée et du stade d’exécution du contrat en question.
200 Il s’ensuit que les requérantes ont été pleinement mises en mesure de comprendre les raisons expliquant les divergences relatives aux expurgations des contrats en cause et en quoi, selon la Commission, la divulgation intégrale des différentes parties occultées de ces documents risquait d’avoir un impact différent sur les intérêts commerciaux des entreprises concernées. Dès lors, la décision attaquée n’est pas entachée d’un défaut de motivation à cet égard.
201 En outre, il ressort de la décision attaquée et de la lecture des contrats en cause que si, certes, ces documents portent tous sur un même objet matériel, à savoir l’achat de vaccins contre la COVID-19, et contiennent des stipulations relatives aux obligations mutuelles des parties contractantes à cet effet, l’objet juridique de chacun des contrats en cause est différent, l’entreprise concernée et le vaccin particulier étant différents. Ainsi, chaque contrat en cause est un document autonome.
202 Or, les requérantes se sont limitées, en substance, à considérer comme étant peu crédible le fait qu’une information donnée soit sensible pour une entreprise donnée et non pour une autre. Néanmoins, elles n’ont fourni aucun indice pertinent de nature à réfuter les explications fournies par la Commission dans la décision attaquée selon lesquelles elle s’est fondée, pour refuser l’accès aux informations occultées, sur une analyse des éléments relatifs au contenu spécifique de chaque contrat en
cause et de la situation individuelle de chaque entreprise concernée.
203 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.
D. Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, en ce que la Commission n’a pas pris en compte l’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des informations demandées
204 Par leur quatrième moyen, tel qu’adapté, les requérantes contestent, en substance, le bien-fondé et le caractère suffisant des motifs avancés par la Commission dans la décision attaquée quant à l’absence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation intégrale des contrats en cause, au sens de l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001.
205 Selon les requérantes, il existe un intérêt public supérieur en la divulgation intégrale des contrats en cause afin d’instaurer la confiance du public dans le rôle joué par la Commission relatif à la passation conjointe de marchés pour l’achat des vaccins contre la COVID-19 et l’utilisation de fonds publics à cet égard, ainsi qu’afin d’instaurer la confiance du public dans les vaccins eux-mêmes, et ce afin de lutter contre un phénomène de réticence vaccinale et la désinformation.
206 De même, les requérantes soutiennent qu’il existerait un lien entre le phénomène de réticence vaccinale et la méfiance du public dans les institutions et l’absence de divulgation de certaines informations contenues dans les contrats en cause, à savoir la structure des coûts de la production des différents vaccins, les prix, les lieux de production, les accords en matière de propriété intellectuelle, les stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation et les stipulations relatives
à l’accès au vaccin.
207 Les requérantes contestent n’avoir avancé que des arguments de nature générale pour justifier la divulgation des informations occultées. Elles reprochent à la Commission de ne pas avoir mis en balance les intérêts commerciaux des entreprises concernées et l’intérêt public supérieur de la santé favorisé par la transparence. La Commission aurait simplement écarté les arguments des requérantes sans préciser clairement les raisons pour lesquelles il n’y avait pas d’intérêt public supérieur Ã
divulguer les informations en cause.
208 Enfin, dans leur mémoire en adaptation, les requérantes répertorient les raisons pour lesquelles la divulgation de certaines informations spécifiques occultées dans les contrats en cause serait nécessaire. Premièrement, elles soutiennent que la divulgation des définitions serait une condition préalable à la compréhension des contrats en question et, par conséquent, à la transparence et à la confiance, de sorte à présenter un intérêt public supérieur. Deuxièmement, la divulgation de la
localisation des sites de production des vaccins serait nécessaire pour l’organisation des campagnes de vaccination dans les États membres et pour que le public puisse apprécier s’il faut s’attendre à d’éventuels retards de livraison et vérifier si les capacités sont suffisantes pour délivrer les vaccins en temps utile. Troisièmement, la divulgation des stipulations relatives aux donations et aux reventes serait nécessaire afin de savoir comment l’Union et les États membres contribuent Ã
combattre la COVID-19 à l’échelle mondiale. Quatrièmement, la divulgation des prix par doses et des calendriers de livraison serait nécessaire afin de redonner confiance au public dans la passation conjointe de marchés pour les vaccins et d’expliquer les différents choix de vaccins des États membres et les difficultés de livraison rencontrées, notamment par AstraZeneca. Cinquièmement, la divulgation des stipulations relatives aux acomptes et aux paiements anticipés serait importante pour que le
public ait confiance dans les vaccins et dans les investissements de fonds publics par la Commission et puisse les analyser et tirer des conclusions sur la passation conjointe des marchés pour les vaccins et les éventuels bénéfices réalisés par les entreprises concernées. Sixièmement, la divulgation des stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation serait essentielle afin d’accroître la confiance dans les vaccins, de lutter contre la désinformation et de savoir qui est
responsable et qui sera indemnisé en cas d’effets secondaires liés à la vaccination.
209 La Commission conteste cette argumentation.
210 À cet égard, à titre liminaire, le Tribunal rappelle que le premier moyen et la première branche du deuxième moyen ainsi que les cinquième et septième branches du deuxième moyen doivent être accueillis en ce que la Commission n’a pas fourni d’explications suffisantes permettant de savoir de quelle manière l’accès aux définitions des expressions « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7 et aux stipulations relatives aux
donations et reventes pourrait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, et en ce que les motifs pour refuser la divulgation plus large des stipulations relatives à l’indemnisation ne démontrent pas l’existence d’un risque prévisible et non purement hypothétique d’atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées, en violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Il s’ensuit que l’examen du
quatrième moyen ne concerne pas lesdits aspects de la décision attaquée.
211 Conformément à l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001, les institutions refusent l’accès à un document lorsque sa divulgation porterait atteinte, notamment, à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée « à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé ». Il en ressort que les institutions de l’Union ne peuvent refuser l’accès à un document lorsque sa divulgation est justifiée par
un intérêt public supérieur, même si celle-ci pourrait porter atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée.
212 Dans ce contexte, il y a lieu de mettre en balance, d’une part, l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et, d’autre part, notamment, l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible, eu égard aux avantages découlant, ainsi qu’il est précisé au considérant 2 du règlement no 1049/2001, d’une transparence accrue, à savoir une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel ainsi qu’une plus grande légitimité, efficacité et
responsabilité de l’administration des citoyens dans un système démocratique (voir arrêt du 21 octobre 2010, Agapiou Joséphidès/Commission et EACEA, T‑439/08, non publié, EU:T:2010:442, point 136 et jurisprudence citée ; arrêt du 5 février 2018, PTC Therapeutics International/EMA, T‑718/15, EU:T:2018:66, point 107).
213 Il incombe au demandeur d’invoquer de manière concrète des circonstances fondant un intérêt public supérieur qui justifie la divulgation des documents concernés (voir arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 94 et jurisprudence citée, et du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 90 et jurisprudence citée). En effet, c’est à ceux qui soutiennent l’existence d’un intérêt public supérieur au sens du
dernier membre de phrase de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 qu’il incombe de le démontrer (arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑306/12, EU:T:2014:816, point 97).
214 L’intérêt public supérieur susceptible de justifier la divulgation d’un document ne doit pas nécessairement être distinct des principes qui sous-tendent le règlement no 1049/2001. Cependant, des considérations générales ne sauraient être retenues pour justifier l’accès aux documents demandés, lequel exige que le principe de transparence présente, dans la situation donnée, une acuité particulière qui prime les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en question (voir, en ce sens,
arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 92 et 93 et jurisprudence citée, et du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, points 92 et 93).
215 En l’espèce, dans la demande confirmative, les six députés ont invoqué un intérêt public supérieur justifiant, selon eux, la divulgation des contrats en cause articulé en substance autour de cinq branches, à savoir, premièrement, la transparence aux fins d’instaurer la confiance du public dans les actions de la Commission concernant l’acquisition de vaccins contre la COVID-19 et en raison de l’utilisation de fonds publics à cet égard, deuxièmement, la transparence aux fins de la confiance du
public dans les vaccins eux-mêmes et pour contrer un phénomène de réticence vaccinale, troisièmement, diverses déclarations du Parlement réclamant plus de transparence, quatrièmement, la dimension mondiale de la pandémie et, cinquièmement, la Charte et leur double fonction en tant que citoyens de l’Union et membres du Parlement.
216 Dans la décision attaquée, par laquelle la Commission a accordé un accès partiel plus large aux documents 1 à  8 et 11, précédemment divulgués, ainsi qu’un accès partiel aux documents 9, 10, 12 et 13, lesquels n’avaient jusqu’alors pas été divulgués publiquement sous une forme expurgée, la Commission a indiqué souscrire à l’importance de la confiance du public dans ses actions en ce qui concernait l’achat des vaccins et reconnaître le degré élevé de transparence exigé. Elle a rappelé qu’elle
avait communiqué de manière régulière des informations sur l’état d’avancement des négociations avec les entreprises concernées et les diverses démarches entreprises, y compris auprès du Parlement, afin d’assurer la transparence. Elle a exposé avoir consulté les entreprises concernées en vue d’accorder l’accès le plus large possible aux contrats en cause. Elle a souligné toutefois que, à la date de la décision attaquée, la crise sanitaire se poursuivait et que le droit d’accès aux documents
n’était pas un droit général et absolu. Elle a ensuite relevé la nature générale de l’argumentation figurant dans la demande confirmative portant sur une éventuelle réticence vaccinale, les diverses déclarations du Parlement, la Charte et la dimension mondiale de la pandémie et a rappelé que des considérations générales, y compris sur la protection de la santé humaine, n’étaient pas suffisantes pour justifier un intérêt public supérieur, sans précisions sur les motifs concrets justifiant dans
quelle mesure la divulgation servirait cet intérêt public. Elle a précisé qu’elle n’avait pas été en mesure d’identifier un quelconque intérêt public susceptible de primer l’intérêt public et privé protégé par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Elle a rejeté la pertinence de considérations fondées sur la circonstance que trois contrats d’achat anticipé conclus avaient fait l’objet de fuites dans les médias. Enfin, elle a considéré que le fait que les contrats en
cause se rapportaient à une procédure administrative et non à des actes législatifs renforçait la conclusion selon laquelle aucun intérêt public supérieur ne justifierait la divulgation des passages occultés.
217 Il ressort de ces considérations que la Commission a fourni des explications succinctes permettant aux requérantes de comprendre les raisons qui l’avaient conduite à écarter l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation intégrale des contrats en cause, au sens de l’article 4, paragraphe 2, dernier membre de phrase, du règlement no 1049/2001.
218 Partant, le grief tiré de l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée doit être rejeté.
219 S’agissant du bien-fondé de la motivation de la décision attaquée, l’appréciation de la Commission n’est entachée d’aucune erreur de droit au regard de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
220 En effet, en l’espèce, la circonstance que les entreprises concernées aient participé à la réalisation de tâches d’intérêt public, notamment la mise au point de vaccins contre la COVID-19 par le biais d’acomptes ou de paiements anticipés provenant de fonds publics et versés au titre des contrats en cause négociés par la Commission au nom des États membres, est, en principe, de nature à révéler l’existence d’un intérêt réel du public à l’accès à des informations relatives auxdits vaccins et
contrats (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2023, Breyer/REA, C‑135/22 P, EU:C:2023:640, point 77).
221 Par ailleurs, la transparence du processus suivi par la Commission lors des négociations avec les fabricants de vaccins contre la COVID‑19 et de la conclusion des contrats en cause au nom des États membres est susceptible de contribuer à augmenter la confiance des citoyens de l’Union à l’égard de la stratégie vaccinale promue par cette institution et, par suite, à notamment lutter contre la diffusion de fausses informations en ce qui concerne les conditions entourant la négociation et la
conclusion desdits contrats (voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2022, Saure/Commission, T‑448/21, non publié, EU:T:2022:525, point 45, et du 7 septembre 2022, Saure/Commission, T‑651/21, non publié, EU:T:2022:526, point 46).
222 Dans ce cadre, il convient de constater que la Commission n’a pas dénié l’existence d’un intérêt du public à recevoir des informations relatives à l’achat des vaccins et aux contrats en cause, mais a estimé, dans la décision attaquée, que cet intérêt était satisfait par les diverses démarches entreprises pour assurer la transparence, dont la publication d’informations actualisées sur l’état d’avancement des négociations et la communication d’informations au Parlement de vive voix et par écrit.
Il convient de constater également que les informations occultées ne contiennent pas d’indications scientifiques relatives à l’efficacité et à la sécurité des vaccins qui porteraient sur les éventuelles préoccupations du public en ce qui concerne l’utilisation des vaccins.
223 Toutefois, des considérations aussi générales que celles invoquées par les requérantes, à savoir la nécessité d’instaurer la confiance du public envers les actions de la Commission concernant l’achat de vaccins contre la COVID-19 et la nécessité d’instaurer la confiance dans les vaccins eux-mêmes pour contrer un phénomène de réticence vaccinale, ne sauraient être de nature à établir que l’intérêt tenant à la transparence présentait, en l’espèce, une acuité particulière qui aurait pu primer les
raisons justifiant le refus de divulgation des parties occultées des contrats en cause.
224 Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments plus détaillés des requérantes figurant dans leur mémoire en adaptation.
225 Premièrement, les requérantes n’ont aucunement étayé en quoi la divulgation à elles-mêmes et, in fine, au public, des informations sur la localisation des sites de production des entreprises concernées serait nécessaire pour l’organisation des campagnes de vaccination dans les États membres, lesdites campagnes étant mises en œuvre par les autorités compétentes nationales. De même, elles n’ont pas expliqué de quelle manière la divulgation de ces informations permettrait au public de se forger un
avis éclairé quant au risque d’éventuels retards de livraison et quant à la capacité de production desdits sites.
226 Deuxièmement, en ce que les requérantes font valoir que la divulgation des prix par doses et des calendriers de livraison permettrait de redonner confiance à une plus grande partie du public dans l’achat des vaccins et d’expliquer les différents choix de vaccins des États membres et les difficultés de livraison rencontrées, force est de constater qu’elles n’étayent pas leurs propos. En particulier, elles n’expliquent pas en quoi la confiance du public dans la passation conjointe des marchés pour
les vaccins contre la COVID-19 serait renforcée par la divulgation d’éléments financiers sensibles des contrats en cause, susceptibles d’être utilisés à l’encontre des entreprises concernées dans leurs négociations avec des acheteurs de pays tiers, voire même à l’encontre de la Commission et des États membres dans le cadre de contrats d’achat ultérieurs. Elles n’expliquent pas davantage comment les prix par doses seuls seraient susceptibles de révéler les motifs sous-tendant les décisions des
États membres quant aux vaccins utilisés dans leurs campagnes de vaccination contre la COVID-19. Or, lesdites décisions sont susceptibles d’être influencées, outre par le choix de l’État membre de participer ou non au contrat en cause et par le prix, par diverses considérations, telles que les caractéristiques du vaccin, sa disponibilité et le délai de livraison. Par ailleurs, à l’instar de ce que fait valoir la Commission, la divulgation des calendriers de livraison n’éclairerait en rien les
causes d’éventuelles difficultés de livraison rencontrées.
227 Troisièmement, en ce que les requérantes soutiennent que la divulgation des stipulations relatives aux acomptes et aux paiements anticipés permettrait de renforcer la confiance du public dans les vaccins et dans les investissements de fonds publics effectués en lui permettant d’analyser et de tirer des conclusions sur les négociations et investissements de la Commission et les éventuels bénéfices des entreprises concernées, il y a lieu de relever que les éléments financiers sensibles des
contrats en cause n’ont aucun lien avec l’efficacité ou la sécurité des vaccins contre la COVID-19. En outre, à supposer même que la divulgation plus large des stipulations occultées dans les documents 2 à  4, 12 et 13 permette effectivement de tirer des conclusions sur la négociation desdits contrats, l’utilisation de fonds publics et les bénéfices des entreprises concernées, à l’instar de ce qui a été constaté au point 226 ci-dessus, les requérantes n’expliquent pas en quoi la confiance du
public serait renforcée par la divulgation des éléments occultés alors qu’ils seraient susceptibles d’affecter négativement des négociations en cours ou ultérieures.
228 Quatrièmement, le mécanisme d’indemnisation des entreprises concernées par les États membres n’affectant en rien le régime de la responsabilité juridique desdites entreprises au titre de la directive 85/374 et cette information relevant déjà du domaine public au moment du dépôt de la demande initiale d’accès, les requérantes restent en défaut d’expliquer comment la divulgation des stipulations relatives à la responsabilité contractuelle des entreprises concernées en cas de violation, de
résiliation ou de suspension des contrats en cause, notamment en lien avec des retards de livraison ou des livraisons manquantes, permettrait d’accroître la confiance dans les vaccins et de lutter contre la désinformation.
229 Enfin, et ainsi que la Commission l’a indiqué dans la décision attaquée, son activité administrative n’exige pas la même étendue d’accès aux documents que celle requise par l’activité législative d’une institution de l’Union (voir, par analogie, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 60, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 91).
230 Or, en l’espèce, les contrats en cause s’inscrivent dans le cadre d’une activité administrative.
231 Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur de droit que, à la date d’adoption de la décision attaquée, la Commission s’est prévalue de l’exception afférente à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées, étant entendu toutefois que, ainsi qu’il ressort de l’article 4, paragraphe 7, du règlement no 1049/2001, cette exception n’a pas vocation à s’appliquer pendant une période illimitée, mais seulement aussi longtemps que cette protection se justifie eu égard au
contenu du document en cause (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, points 56 et 57).
232 Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé.
E. Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 42 et de l’article 52, paragraphe 3, de la Charte ainsi que de l’article 10, paragraphe 1, de la CEDH
233 Par leur cinquième moyen, les requérantes rappellent que la Commission est tenue de prendre en compte tant le droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 11, paragraphe 1, de la Charte, que le droit d’accès aux documents, protégé par l’article 42 de celle-ci. Elles reprochent à la Commission de ne pas avoir examiné si et dans quelle mesure l’accès uniquement partiel accordé aux contrats en cause constituait une ingérence dans l’exercice de leur droit à la liberté d’expression, prévu Ã
l’article 11, paragraphe 1, de la Charte, et qui comprend la liberté de recevoir des informations, en violation de l’article 52, paragraphe 3, de ladite Charte et de l’article 10, paragraphe 1, de la CEDH. Au stade de la réplique, elles ajoutent que, en ne respectant pas les limites posées à l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, la Commission a également violé l’article 42 de la Charte.
234 La Commission conteste cette argumentation.
235 D’une part, l’allégation relative à l’article 42 de la Charte, soulevée au stade de la réplique, serait nouvelle et irrecevable en l’absence de tout argument présenté à son soutien et, en tout état de cause, non fondée. D’autre part, le droit d’accès aux documents consacré à l’article 42 de la Charte ne serait pas inconditionnel, mais s’exercerait, conformément à l’article 52, paragraphe 2, de la Charte, dans les conditions et les limites définies par les traités. Partant, en refusant d’accorder
l’accès à certaines parties des contrats en cause en application des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, la Commission n’aurait pas violé la liberté d’expression des requérantes.
236 Il convient de comprendre le cinquième moyen des requérantes comme visant à essentiellement reprocher à la Commission d’avoir violé tant l’article 11, paragraphe 1, que l’article 42 de la Charte dans la mesure où, ainsi qu’il résulterait de l’examen des autres moyens invoqués à l’appui du présent recours, la Commission n’a pas suffisamment examiné si et dans quelle mesure le refus partiel d’accès aux contrats en cause serait susceptible de constituer une ingérence à leur droit d’accès aux
documents et à leur liberté d’expression et d’information.
237 En outre, il y a lieu de relever que les requérantes ne présentent pas d’arguments spécifiques visant à démontrer comment, concrètement, le refus partiel d’accès viole leurs droit et liberté fondamentaux, mais font essentiellement dépendre le constat d’une telle violation à l’accueil des moyens examinés précédemment.
238 Dans ces conditions, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 39 à  46, 151 à  171 et 182 à  188 ci-dessus, il convient de constater une violation de l’article 11, paragraphe 1, et de l’article 42 de la Charte, s’agissant de l’occultation des définitions des expressions « faute intentionnelle » et « tous les efforts raisonnables possibles » dans les documents 4 et 7 et des stipulations relatives aux donations et aux reventes ainsi qu’aux stipulations relatives à l’indemnisation dans les
contrats en cause.
239 En revanche, les requérantes n’ayant présenté aucun argument autonome à ceux avancés dans les premier à quatrième moyens examinés précédemment aux fins de contester le refus d’accès aux informations autres que celles mentionnées au point 238 ci-dessus, il convient de rejeter le cinquième moyen en ce qui concerne de telles informations.
240 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir, en partie, le cinquième moyen.
F. Sur le sixième moyen, tiré de la violation des articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, en ce que par la décision attaquée la Commission a occulté certaines informations qu’elle avait divulguées auparavant
241 Par leur sixième moyen, les requérantes soutiennent que la Commission a méconnu les articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001 en expurgeant les documents 7 et 11 de certaines informations qu’elle avait pourtant divulguées en réponse à la demande initiale. Selon elles, la Commission ne saurait valablement divulguer moins d’informations en réponse à la demande confirmative.
242 La Commission conteste cette argumentation.
243 À cet égard, sans qu’il soit besoin de prendre position sur la question de savoir si la Commission, en réponse à une demande confirmative, peut retirer l’accès à certaines informations divulguées dans sa prise de position initiale, il suffit de constater que, en l’occurrence, elle n’a pas entendu retirer l’accès aux informations des documents 7 et 11 divulguées dans sa prise de position initiale.
244 En effet, d’une part, la Commission a certes occulté certaines informations des documents 7 et 11 qu’elle avait pourtant divulguées en réponse à la demande initiale. Toutefois, la décision attaquée ne fait pas du tout mention d’un tel retrait. D’autre part, devant le Tribunal, la Commission s’est explicitement prévalue du fait que les requérantes n’avaient pas un intérêt à soulever un tel moyen au motif qu’elles « [avaient] déjà obtenu légalement […] un accès aux parties des documents qui ont
été divulguées au stade initial ». Enfin, la Commission n’a pas adressé de demande aux requérantes visant à ce qu’elles s’engagent à effacer les données qui leur avaient été communiquées.
245 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les requérantes ont conservé l’accès à certaines informations des documents 7 et 11 obtenues en réponse à leur demande initiale.
246 Par conséquent, le sixième moyen doit être écarté comme étant inopérant.
247 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’accès plus large, premièrement, aux définitions des expressions « faute intentionnelle » dans le document 1 et « tous les efforts possibles » dans les documents 4 et 7, deuxièmement, aux stipulations relatives aux donations et aux reventes et, troisièmement, aux stipulations relatives à l’indemnisation.
248 Dans ce cadre, il convient de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de se substituer à la Commission et d’indiquer les parties de documents auxquels un accès total ou partiel aurait dû être accordé, l’institution étant tenue, lors de l’exécution du présent arrêt et conformément à l’article 266 TFUE, de prendre en considération les motifs exposés à cet égard dans celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 133).
IV. Sur les dépens
249 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions des requérantes.
 Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
 1) La décision C(2022) 1038 final de la Commission européenne, du 15 février 2022, est annulée pour autant que la Commission a refusé un accès plus large, premièrement, aux définitions des expressions « faute intentionnelle » (wilful misconduct) dans le contrat d’achat anticipé conclu entre elle et AstraZeneca et « tous les efforts raisonnables possibles » (best reasonable efforts) dans le contrat d’achat anticipé conclu entre la Commission et Pfizer-BioNTech et dans le contrat d’achat conclu
entre la Commission et Pfizer-BioNTech, deuxièmement, aux stipulations relatives aux donations et aux reventes et, troisièmement, aux stipulations relatives à l’indemnisation dans les contrats d’achat anticipé et les contrats d’achat conclus entre elle et les sociétés pharmaceutiques concernées pour l’achat de vaccins contre la COVID-19 sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif Ã
l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.
 2) Le recours est rejeté pour le surplus.
 3) La Commission est condamnée aux dépens, y compris les dépens afférents à la requête dans sa version initiale.
Svenningsen
Mac Eochaidh
 MartÃn y Pérez de Nanclares
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 juillet 2024
Signatures
Table des matières
 I. Antécédents du litige
 II. Conclusions des parties
 III. En droit
 A. Sur le premier moyen et sur la première branche du deuxième moyen, tirés de l’application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux à des informations ne relevant pas de ladite exception, d’un défaut de motivation à cet égard ainsi que d’une application incohérente de ladite exception
 1. Observations liminaires
 2. Sur la motivation de la décision attaquée s’agissant de l’occultation partielle des définitions
 B. Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de justification de l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux et de la violation du règlement no 1049/2001 en ce que la Commission ne se serait pas tenue à la stricte interprétation et application de l’exception susmentionnée
 1. Sur le refus d’accès à la localisation des sites de production
 2. Sur le refus partiel d’accès aux stipulations en matière de droit de propriété intellectuelle
 a) Sur la motivation de la décision attaquée
 b) Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
 3. Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives aux acomptes ou aux paiements anticipés
 a) Sur la motivation de la décision attaquée
 b) Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
 4. Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives à la responsabilité et à l’indemnisation
 a) Sur la motivation de la décision attaquée
 b) Sur le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée
 1) Sur les stipulations relatives à la responsabilité contractuelle
 2) Sur les stipulations relatives à l’indemnisation
 5. Sur le refus partiel d’accès aux calendriers de livraison
 6. Sur le refus partiel d’accès aux stipulations relatives aux donations et aux reventes
 7. Conclusion sur le deuxième moyen
 C. Sur le troisième moyen, tiré de l’application incohérente du règlement no 1049/2001 ayant conduit à une violation de celui-ci et d’une violation du principe de bonne administration, en ce que la Commission n’a pas occulté, dans la même mesure, des stipulations ou des informations de même nature
 D. Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, en ce que la Commission n’a pas pris en compte l’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des informations demandées
 E. Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 42 et de l’article 52, paragraphe 3, de la Charte ainsi que de l’article 10, paragraphe 1, de la CEDH
 F. Sur le sixième moyen, tiré de la violation des articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, en ce que par la décision attaquée la Commission a occulté certaines informations qu’elle avait divulguées auparavant
 IV. Sur les dépens
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.