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07/06/2017 | CJUE | N°T-258/16

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, Mediterranean Premium Spirits, SL contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle., 07/06/2017, T-258/16


DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 juin 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale GINRAW – Marques de l’Union européenne verbales antérieures RAW – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑258/16,

Mediterranean Premiu

m Spirits, SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par M^es J. A. Mora Granell et J. Romaní Lluch, avocats,

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 juin 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale GINRAW – Marques de l’Union européenne verbales antérieures RAW – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑258/16,

Mediterranean Premium Spirits, SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par M^es J. A. Mora Granell et J. Romaní Lluch, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral et M^me K. Sidat Humphreys, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

G-Star Raw CV, établie à Amsterdam (Pays-Bas), représentée par M^es L. Dijkman et J. van Manen, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 14 mars 2016 (affaire R 1583/2015‑4), relative à une procédure d’opposition entre G-Star Raw et Mediterranean Premium Spirits,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. A. M. Collins (rapporteur), président, M^me M. Kancheva et M. R. Barents, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 25 mai 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 28 septembre 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 26 septembre 2016,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

vu la décision du 26 avril 2017 rejetant la demande de suspension de la procédure introduite par la requérante,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        Le 16 décembre 2013, la requérante, Mediterranean Premium Spirits, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal GINRAW.

3        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 6/2014, du 13 janvier 2014.

4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 21 et 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 21 : « Ustensiles pour le ménage et la cuisine ; cristaux (verrerie) ; verrerie pour boissons ; produits en porcelaine et en faïence ; verres, récipients pour liquides et accessoires de bar ; cruchons ; seaux à bouteilles, seaux à glace, plateaux à glaçons ; plateaux de service, cabarets (plateaux), supports pour verres ; shakers, mélangeurs manuels (shakers pour cocktails), agitateurs pour cocktails, pailles pour cocktails, piques à cocktail, bâtonnets pour mélanger les
cocktails » ;

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; genièvre (eau-de-vie) ».

5        Le 19 mars 2014, l’intervenante, G-Star Raw CV, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 4 ci-dessus, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne verbale RAW, déposée le 16 janvier 2013 et enregistrée le 23 juin 2013 sous le numéro 11493103 pour les produits compris dans la classe 21 et correspondant à la description suivante : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine ; peignes et éponges ; brosses (à l’exception des pinceaux) ; matériaux pour la brosserie ; matériel de nettoyage ; paille de fer ; verre brut ou semi-ouvré (à l’exception du verre de construction) ; verrerie,
porcelaine et faïence non comprises dans d’autres classes » ;

–        la marque de l’Union européenne verbale RAW, déposée le 16 janvier 2013 et enregistrée le 12 janvier 2014 sous le numéro 11493012, pour les produits compris dans la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ».

7        Par décision du 17 juin 2015, la division d’opposition a accueilli l’opposition et a rejeté la demande de marque dans son intégralité.

8        Le 5 août 2015, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par décision du 14 mars 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. À titre liminaire, elle a estimé que le public pertinent était composé du grand public, qui ferait preuve d’un niveau d’attention moyen lors de l’achat des produits concernés. Ensuite, elle a considéré, en substance, que les produits pour lesquels l’enregistrement avait été demandé et ceux pour lesquels les marques antérieures avaient été enregistrées
étaient identiques, très similaires ou moyennement similaires. De plus, selon la chambre de recours, les signes en conflit avaient un degré moyen de similitudes visuelle et phonétique. Sur le plan conceptuel, elle a conclu que, pour une partie du public pertinent, à savoir le public anglophone, les signes étaient aussi conceptuellement similaires. Enfin, dans le cadre de son appréciation globale du risque de confusion, elle a constaté que le mot « gin », figurant au début de la marque demandée,
était descriptif des produits en cause et que, dès lors, les consommateurs se concentreraient sur l’élément « raw », qui était l’élément distinctif de cette marque. Les marques antérieures étant entièrement incluses dans la marque demandée, il existait, selon la chambre de recours, un risque de confusion aux yeux des consommateurs sur le territoire de l’Union européenne, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

II.    Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

11      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

A.      Sur la recevabilité des documents produits pour la première fois devant le Tribunal

12      L’intervenante soulève des objections quant à la recevabilité de certains éléments de preuve qui auraient été produits pour la première fois devant le Tribunal, notamment les annexes 5, 7 et 9 de la requête.

13      Il y a lieu de relever que les annexes 5 et 7 de la requête contiennent deux décisions de l’EUIPO. Quant à l’annexe 9 de la requête, elle consiste dans un extrait de deux sites Internet, dont Wikipedia. Aucune de ces trois annexes ne figure dans le dossier administratif.

14      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter comme irrecevable l’annexe 9 à la requête sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa force probante
[voir, en ce sens, arrêts du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, points 18 et 19, et du 18 mars 2016, Karl-May-Verlag/OHMI – Constantin Film Produktion (WINNETOU), T‑501/13, EU:T:2016:161, points 16 et 17].

15      S’agissant, en revanche, des annexes 5 et 7 de la requête, il convient de souligner que, quand bien même ces éléments auraient été produits par la requérante pour la première fois devant le Tribunal, elle est en droit de les invoquer. En effet, ces annexes ne constituent pas des preuves proprement dites, mais concernent la pratique décisionnelle de l’EUIPO, à laquelle une partie a le droit de se référer (voir, en ce sens, arrêts du 24 novembre 2005, ARTHUR ET FELICIE, T‑346/04,
EU:T:2005:420, point 20, et du 18 mars 2016, WINNETOU, T‑501/13, EU:T:2016:161, point 18).

B.      Sur le fond

16      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 75 du règlement n° 207/2009 et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. Il y a lieu d’examiner d’abord le second moyen.

1.      Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

17      Par son second moyen, la requérante invoque la violation de l’article 8,paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Ce moyen est divisé en trois branches concernant la comparaison des produits, la comparaison des signes et l’appréciation globale du risque de confusion.

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le
risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

19      Les marques sur lesquelles s’est fondée l’opposition étant des marques de l’Union européenne, le territoire au regard duquel le risque de confusion doit être apprécié est celui de l’Union, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au considérant 10 de la décision attaquée et sans que cela soit contesté par la requérante.

a)      Sur la comparaison des produits

20      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 33, à savoir les « boissons alcoolisées (à l’exception des bières) », soient identiques aux produits visés par les marques antérieures. Elle ne conteste pas non plus que certains produits relevant de la classe 21 soient identiques aux produits visés par les marques antérieures, notamment les
« ustensiles pour le ménage et la cuisine ; cristaux (verrerie) ; verrerie pour boissons ; produits en porcelaine et en faïence ; plateaux à glaçons ; plateaux de service, cabarets (plateaux), supports pour verres ». Enfin, elle ne conteste pas que certains produits relevant de la classe 21 et les produits visés par les marques antérieures, à savoir les « verres, récipients pour liquides et accessoires de bar ; cruchons », soient similaires.

21      En revanche, la requérante conteste que les « shakers, mélangeurs manuels (shakers pour cocktails), agitateurs pour cocktails, pailles pour cocktails, piques à cocktail, bâtonnets pour mélanger les cocktails », visés par la marque demandée, et les « ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine », visés par les marques antérieures, et relevant tous de la classe 21, soient similaires. Selon elle, les produits désignés dans sa demande d’enregistrement sont exclusivement liés à la
préparation de cocktails tandis que les ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine sont destinés à préparer ou à servir la nourriture. De plus, les fournisseurs, les canaux de distribution et les destinataires de ces produits seraient différents, en ce qu’ils seraient très spécialisés, à la différence des produits pour le ménage et la cuisine qui viseraient le grand public.

22      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

23      Il ressort de la jurisprudence que, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [arrêt du 11 juillet
2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37].

24      De plus, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, EU:T:2002:262, points 32 et 33, et du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM'S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 29].

25      En l’espèce, comme l’EUIPO et l’intervenante le soutiennent à juste titre, les produits désignés par les marques antérieures, à savoir les « ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine », constituent une catégorie générale incluant, notamment, les « shakers, mélangeurs manuels (shakers pour cocktails), agitateurs pour cocktails, pailles pour cocktails, piques à cocktail, bâtonnets pour mélanger les cocktails ». À cet égard, il convient de relever que, selon les notes
explicatives à la classe 21, les « ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine » comprennent en particulier les « shakers ». De plus, contrairement à ce que prétend la requérante, il n’existe aucune raison de considérer que les « ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine » incluent exclusivement des produits destinés à cuisiner ou à servir la nourriture, à l’exclusion de produits destinés à préparer des boissons. En effet, force est de constater que les « shakers,
mélangeurs manuels (shakers pour cocktails), agitateurs pour cocktails, pailles pour cocktails, piques à cocktail, bâtonnets pour mélanger les cocktails » sont des ustensiles et des récipients que l’on trouve typiquement dans les cuisines. Dès lors, compte tenu de leur nature, de leur destination et de leur utilisation, il y a lieu de conclure qu’il s’agit de produits identiques.

26      Par ailleurs, l’affirmation de la requérante selon laquelle les fournisseurs, les canaux de distribution et les destinataires des produits destinés à préparer et à servir les cocktails sont très « spécialisés » n’est étayée par aucun élément de preuve.

27      De surcroît, à supposer même que ces produits ne puissent être qualifiés d’identiques, quod non, ils seraient à tout le moins similaires en ce que les ustensiles de cuisine sont utilisés pour préparer des aliments ou des boissons, alors que les ustensiles pour cocktails en cause sont utilisés pour préparer des boissons, comme la décision attaquée l’indique en son considérant 11.

28      Au vu de ce qui précède, la première branche du second moyen doit être rejetée comme non fondée.

b)      Sur la comparaison des signes

29      Dans le cadre de la deuxième branche du second moyen, la requérante soutient, d’une part, que la marque antérieure RAW est descriptive ou n’a qu’un faible caractère distinctif pour le public anglophone, ce qui empêcherait que l’élément « raw » puisse être considéré comme étant l’élément dominant de la marque demandée. Selon elle, il y aurait lieu de comparer les marques en cause en les considérant dans leur ensemble et sans opérer une division artificielle. D’autre part, la requérante
soutient que la décision attaquée a conclu à tort que la marque demandée et les marques antérieures étaient similaires sur les plans visuel et phonétique et, pour une partie du public pertinent, à savoir le public anglophone, aussi sur le plan conceptuel.

30      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

1)      Sur la division artificielle de la marque demandée et le caractère descriptif de la marque antérieure

31      Il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le
consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35).

32      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou
plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du
12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, points 41 et 42, et du 29 septembre 2011, Procter & Gamble Manufacturing Cologne/OHMI – Natura Cosméticos (NATURAVIVA), T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551, point 27].

33      Lors de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe (arrêt du 29 septembre 2011, NATURAVIVA, T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551,
point 28).

34      En l’espèce, la comparaison porte sur les marques verbales antérieures RAW et la marque verbale demandée GINRAW.

35      Il convient d’examiner si, comme la requérante le soutient, la chambre de recours a opéré une division artificielle de la marque demandée en se concentrant sur le mot « raw » en raison du caractère descriptif du mot « gin ».

36      À cet égard, il y a lieu de noter que, en ses considérants 12 et 13, la décision attaquée reconnaît explicitement qu’il y a lieu de comparer les marques en cause dans leur ensemble. De plus, il ressort des considérants 14 à 16 de la décision attaquée que la chambre de recours a pris en compte le mot « gin » aux fins de cette comparaison. Dès lors, il ne saurait être reproché à cette dernière d’avoir omis de prendre en compte le mot « gin » dans son analyse.

37      Il résulte de la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus qu’il appartient à la chambre de recours de tenir compte des éléments distinctifs et dominants des marques en cause. En l’espèce, aux considérants 16 et 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le mot « gin » serait compris par la majorité des consommateurs de l’Union comme faisant référence à une boisson alcoolisée, à savoir le genièvre, et que, pour cette raison, ils accorderaient plus d’attention à
l’élément distinctif et dominant de la marque, à savoir le mot « raw ».

38      Ce raisonnement ne saurait être critiqué. Comme l’EUIPO le fait valoir à juste titre dans ses écritures, le mot « gin » est clairement descriptif des produits visés par la demande de marque et figurant dans la classe 33, à savoir les « boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; genièvre (eau-de-vie) ». De plus, ce constat vaut également pour les produits visés par la demande et compris dans la classe 21, qui peuvent être utilisés pour préparer et servir des boissons alcoolisées à
base de gin. Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que l’élément distinctif et dominant de la marque demandée était le mot « raw ».

39      En ce qui concerne le degré de caractère distinctif de la marque antérieure RAW, il convient de relever que la requérante accepte qu’il est moyen en ce qui concerne le public non anglophone puisque le mot « raw » est un terme de fantaisie, sans aucune signification, pour ce public. Dès lors, pour le public non anglophone, la requérante n’avance pas d’argument susceptible de remettre en question le caractère dominant du mot « raw » et le degré moyen de caractère distinctif de la marque
antérieure RAW.

40      S’agissant du public anglophone, la requérante soutient que le mot « raw » sert pour décrire au moins indirectement les caractéristiques des produits en cause, qui sont compris dans les classes 21 et 33.

41      Cet argument ne saurait être accueilli. Il ressort du considérant 16 de la décision attaquée que, en anglais, le mot « raw » signifie « dans un état inachevé, naturel ou non raffiné ; qui n’a pas été traité par des procédés de fabrication ou autres ; (en parlant d’aliments) non cuits ».

42      En ce qui concerne les produits visés et compris dans la classe 33, les boissons alcoolisées, qui ont fait l’objet d’un procédé de distillation, ne constituent pas des aliments crus ou non traités. Il ne s’agit pas non plus de produits se trouvant dans un état inachevé, naturel ou non raffiné.

43      À cet égard, il convient de rappeler que, pour qu’un signe soit regardé comme ayant un caractère descriptif, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [arrêts du 19 novembre 2009, Torresan/OHMI – Klosterbrauerei Weissenohe (CANNABIS), T‑234/06,
EU:T:2009:448, point 25 ; du 16 décembre 2015, Perfetti Van Melle Benelux/OHMI – Intercontinental Great Brands (TRIDENT PURE), T‑491/13, non publié, EU:T:2015:979, point 43, et du 14 décembre 2016, Grid applications/EUIPO (APlan), T‑154/16, non publié, EU:T:2016:731, point 23]. Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel le mot « raw » indique que les produits en cause contiennent des ingrédients non mélangés ou non traités ne saurait prospérer. Ce lien est, en effet, trop indirect pour
établir le caractère descriptif ou le faible caractère distinctif de la marque RAW pour ces produits.

44      S’agissant des produits visés et compris dans la classe 21, il ne s’agit pas de produits inachevés, naturels, non raffinés, non traités par des procédés de fabrication, ou de matières premières. En ce qui concerne les allégations de la requérante selon lesquelles certains de ces produits servent à préparer des aliments non cuisinés, et que le mot « raw » fournit des informations sur les matériaux dont sont composés d’autres de ces produits, à savoir des matériaux non traités et non
raffinés, il y a lieu de constater qu’un tel lien est trop indirect pour établir le caractère descriptif ou le faible caractère distinctif de la marque RAW pour ces produits, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 43 ci-dessus.

45      Par ailleurs, les arguments que la requérante tire des arrêts du 29 septembre 2011, NATURAVIVA (T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551), et du 31 janvier 2013, K2 Sports Europe/OHMI – Karhu Sport Iberica (SPORT) (T‑54/12, non publié, EU:T:2013:50), ne sauraient être accueillis. Dans la première de ces affaires, la chambre de recours avait considéré, à bon droit, que la marque demandée, NATURAVIVA, se présentait sous la forme d’un seul mot indivisible et que l’élément « viva » ne saurait
être l’élément dominant de cette marque, dans la mesure où il faisait allusion à la santé et au bien-être du corps, de sorte que son caractère distinctif était aussi faible que celui de l’élément « natura » (arrêt du 29 septembre 2011, NATURAVIVA, T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551, point 31). Ladite affaire se distingue du cas d’espèce en ce que, dans celui-ci, la chambre de recours a considéré sans commettre d’erreur que la marque demandée GINRAW ne constituait pas un seul mot indivisible.

46      Dans la seconde affaire citée au point 45 ci-dessus, à la différence du cas d’espèce, la chambre de recours avait considéré, à bon droit, que l’élément « sport », commun aux marques en conflit, était descriptif ou, à tout le moins, hautement allusif des produits désignés par ces marques (voir, en ce sens, arrêt du 31 janvier 2013, SPORT, T‑54/12, non publié, EU:T:2013:50, point 29). De plus, le Tribunal a rappelé que, en règle générale, le public ne considérera pas un élément descriptif
faisant partie d’une marque complexe comme l’élément distinctif et dominant dans l’impression d’ensemble (voir, en ce sens, arrêt du 31 janvier 2013, SPORT, T‑54/12, non publié, EU:T:2013:50, point 30). Or, dans le cas d’espèce, pour les raisons exposées aux points 41 à 44 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que le mot « raw » n’était pas descriptif des produits visés, compris dans les classes 21 et 33.

47      Dès lors, il y a lieu de rejeter les griefs de la requérante concernant le caractère descriptif ou le faible caractère distinctif des marques antérieures RAW.

48      Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel l’approche de la chambre de recours est en contradiction avec une pratique décisionnelle antérieure de l’EUIPO ne saurait être accueilli.

49      Il convient de rappeler que l’EUIPO est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe d’égalité de traitement et le principe de bonne administration. Eu égard à ces deux derniers principes, l’EUIPO doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur
la question de savoir s’il y a lieu, ou non, de décider dans le même sens. Cela étant, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect de la légalité. Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration,
l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P,
EU:C:2011:139, points 73 à 77).

50      En l’espèce, il est avéré que, indépendamment de ce qui a pu être le cas pour certaines demandes antérieures d’enregistrement de signes, y compris les marques de l’intervenante, et des considérations effectuées par l’EUIPO dans le cadre de ces demandes, la présente demande d’enregistrement se heurtait à l’un des motifs de refus énoncés au règlement n° 207/2009.

51      Enfin, il y a lieu de rejeter également l’argument de la requérante tiré de la pratique de l’United States Patent and Trademark Office (USPTO, office des brevets et des marques des États-Unis). En effet, le régime des marques de l’Union est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêt du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00,
EU:T:2000:283, point 47]. L’EUIPO et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue dans un État membre ou dans un pays tiers [arrêt du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, EU:T:2002:43, point 47].

52      Au vu de ce qui précède, le grief relatif à une prétendue division artificielle de la marque demandée et au prétendu caractère descriptif ou faiblement distinctif de la marque antérieure RAW doit être rejeté.

2)      Sur les erreurs dans l’analyse de la similarité des signes

53      La requérante invoque une série d’erreurs prétendument commises dans l’analyse de la similarité des signes en cause sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

54      En ce qui concerne la comparaison visuelle et phonétique, d’une part, la requérante relève que la marque demandée GINRAW a le double de lettres et de syllabes que la marque antérieure RAW. D’autre part, elle fait valoir que la marque demandée commence de manière différente, avec les lettres ou la syllabe « gin », et que les consommateurs prêtent normalement plus d’attention au début d’une marque qu’à sa fin.

55      À cet égard, il convient de rappeler que, même si la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir davantage l’attention du consommateur que les parties suivantes, cette considération ne saurait valoir dans tous les cas et ne saurait, en tout état de cause, remettre en cause le principe selon lequel l’examen de la similitude des signes doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par ceux-ci [arrêts du 10 mars 2016, credentis/OHMI – Aldi Karlslunde
(Curodont), T‑53/15, non publié, EU:T:2016:136, point 35, et du 14 juillet 2016, Preferisco Foods/EUIPO – Piccardo & Savore' (PREFERISCO), T‑371/15, non publié, EU:T:2016:414, point 20].

56      Par ailleurs, la chambre de recours pouvait valablement tenir compte, comme elle l’a fait aux considérants 14 et 15 de la décision attaquée, du fait que les marques antérieures étaient entièrement incluses dans la marque demandée. En effet, la circonstance selon laquelle une marque est composée exclusivement par la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé, constitue une indication de la similitude entre ces deux marques [arrêt du 4 mai 2005, Reemark/OHMI – Bluenet
(Westlife), T‑22/04, EU:T:2005:160, point 40].

57      Par conséquent, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un degré moyen de similitude sur les plan visuel et phonétique des marques en cause.

58      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la requérante soutient que la marque demandée GINRAW et les marques antérieures RAW ne peuvent pas être considérées comme similaires par le public anglophone. En particulier, elle fait valoir que la marque demandée devrait être considérée dans son ensemble. Dès lors, l’expression « ginraw » serait une création originale qui ne pourrait pas être considérée comme la simple juxtaposition des éléments « gin » et « raw ». Cette expression serait une
création grammaticalement incorrecte et dépourvue de toute signification. Ce ne serait que par exception à la règle générale que, dans certains cas, le consommateur pourrait décomposer le signe en cause en ses différents éléments. Dès lors, en tant qu’exception, elle devrait être interprétée de manière restrictive.

59      Cette argumentation ne saurait être retenue. Comme il résulte du point 31 ci-dessus, même s’il y a lieu de comparer les marques en cause dans leur ensemble, il appartient à la chambre de recours de tenir compte des éléments distinctifs et dominants. En l’espèce, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a conclu que les consommateurs accorderont plus d’attention à l’élément « raw » de la marque demandée, qui est dominant dans celle-ci, qu’à son élément « gin », qui a un
caractère descriptif, pour les raisons exposées en particulier aux points 35 à 38 et 41 à 47 ci-dessus.

60      Aucun des arguments avancés par la requérante au sujet de la comparaison conceptuelle ne saurait infirmer cette conclusion.

61      En particulier, le parallélisme que la requérante tente d’établir entre la présente affaire et celle ayant donné lieu à l’arrêt du 29 septembre 2011, NATURAVIVA (T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551), doit être rejeté. En effet, ainsi qu’il a été exposé au point 45 ci-dessus, eu égard aux circonstances de l’affaire en cause, la chambre de recours a pu considérer à bon droit que le signe NATURAVIVA se présentait sous la forme d’un seul mot indivisible et qu’aucun élément n’était dominant,
ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

62      Par ailleurs, contrairement à ce que la requérante suggère, il ne saurait être déduit de l’arrêt du 29 septembre 2011, NATURAVIVA (T‑107/10, non publié, EU:T:2011:551), une règle générale selon laquelle les signes visés par une demande de marque doivent être considérés en principe comme un ensemble indivisible. Il résulte du point 27 de cet arrêt, confirmé par une jurisprudence constante, que la comparaison des marques dans leur ensemble n’exclut pas que l’impression produite dans la
mémoire du public pertinent puisse être dominée par un ou plusieurs de leurs composants.

63      De surcroît, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, un consommateur, en percevant un signe verbal, le décomposera en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [arrêts du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 51, et du 6 octobre 2015, Monster Energy/OHMI – Balaguer (icexpresso + energy coffee), T‑61/14, non publié, EU:T:2015:750, point 62].
Dès lors, contrairement aux allégations de la requérante, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a décomposé la marque demandée en les éléments « gin » et « raw » aux fins de son analyse.

64      En ce qui concerne l’argument relatif à la structure prétendument grammaticalement incorrecte en anglais de la marque demandée en raison du fait que le substantif « gin » précède l’adjectif « raw », une incorrection grammaticale mineure, à supposer qu’elle soit acceptée, n’est pas susceptible de remettre en cause l’appréciation exposée ci-dessus [voir, par analogie, arrêts du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, EU:T:2005:201,
point 36, et du 12 mai 2016, GRE/EUIPO (Mark1), T‑844/14, non publié, EU:T:2016:289, point 38]. Par ailleurs, comme le fait valoir à juste titre l’intervenante, il ne saurait être exclu que le public pertinent puisse percevoir la marque demandée GINRAW comme signifiant « gin by raw » ou « genièvre par raw », l’élément « raw » étant l’indicateur de l’origine des produits plutôt qu’un adjectif.

65      Dans le même sens, s’agissant de l’argument tiré de ce qu’il n’y a aucune séparation entre les deux mots en cause, il y a lieu de rappeler que la simple juxtaposition des mots sans espace ne constitue pas en elle-même un élément d’ordre créatif susceptible de modifier la conclusion exposée ci-dessus (voir, par analogie, arrêts du 7 juin 2005, MunichFinancialServices, T‑316/03, EU:T:2005:201, point 37, et du 12 mai 2016, Mark1, T‑844/14, non publié, EU:T:2016:289, point 38). En effet,
l’omission d’espaces entre les termes est habituelle dans le monde de la publicité et du marketing [ordonnance du 26 janvier 2017, Topera/EUIPO (RHYTHMVIEW), T‑119/16, non publiée, EU:T:2017:38, point 24].

66      Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours est parvenue à la conclusion que les signes en cause étaient conceptuellement similaires pour le public anglophone.

67      En ce qui concerne le public non anglophone, il suffit de relever que la chambre de recours n’a pas conclu qu’il existait une similarité conceptuelle des marques en cause pour celui-ci, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les arguments avancés par la requérante à ce sujet.

68      Au vu de ce qui précède, la deuxième branche du second moyen doit être rejetée comme non fondée.

c)      Sur l’appréciation globale du risque de confusion

69      Dans le cadre de la troisième branche du second moyen, la requérante renvoie d’abord à ses arguments relatifs à l’absence de similarité de certains produits compris dans la classe 21 et à l’absence de similarité des signes en cause. Compte tenu de ces arguments, il serait inutile d’examiner l’existence d’un risque de confusion.

70      Par ailleurs, elle se réfère également à ses arguments selon lesquels la marque antérieure RAW est descriptive ou a un caractère distinctif faible pour le public anglophone, même si elle accepte que cette marque a un caractère distinctif normal pour le public non anglophone.

71      Enfin, la requérante renvoie également à ses considérations selon lesquelles la marque demandée GINRAW doit être considérée comme un ensemble aussi bien pour le public anglophone que pour le public non anglophone, même si c’est pour des raisons différentes.

72      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

73      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des
signes et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 32 et jurisprudence citée].

74      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [arrêts du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42, et du 14 juillet 2016, PREFERISCO, T‑371/15, non publié,
EU:T:2016:414, point 16].

75      Au nombre des facteurs pertinents mentionnés au point 73 ci-dessus figure également le caractère distinctif de la marque antérieure, qui découle des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée. Cependant, même en présence d’une marque antérieure ayant un caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, lorsque les produits ou services en cause sont identiques et les signes en conflit sont similaires [arrêts du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI –
Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70, et du 29 avril 2015, Hostel Tourist World/OHMI – WRI Nominees (HostelTouristWorld.com), T‑566/13, non publié, EU:T:2015:239, point 67].

76      C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner la présente branche.

77      En l’espèce, la chambre de recours a estimé que les produits en cause étaient identiques, hautement similaires ou similaires. Par ailleurs, elle a considéré que les signes étaient visuellement, phonétiquement et, pour une partie du public pertinent, conceptuellement similaires. Enfin, elle a estimé que la marque antérieure RAW possédait un degré moyen de caractère distinctif et que, compte tenu du fait que l’élément « gin » figurant dans la marque demandée était descriptif des produits
en cause, les consommateurs se concentreraient sur l’élément « raw » de celle-ci. Au vu de ces considérations, la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion.

78      Il y a lieu de constater que les considérations de la chambre de recours respectent pleinement les exigences de la jurisprudence citée aux points 73 à 75 ci-dessus. Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit s’agissant des produits relevant des classes 21 et 33, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

79      Aucun des arguments avancés par la requérante ne saurait infirmer cette conclusion.

80      Premièrement, doit être rejeté l’argument de la requérante selon lequel il est inutile d’examiner l’existence d’un risque de confusion compte tenu de l’absence de similarité de certains produits relevant de la classe 21 et de l’absence de similarité des signes, puisque, comme il résulte de l’examen des première et deuxième branches du second moyen ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans son analyse de la similarité des produits et des signes.

81      Deuxièmement, en ce qui concerne le prétendu caractère descriptif ou le faible caractère distinctif de la marque antérieure RAW, la requérante admet elle-même le caractère distinctif normal de la marque antérieure pour le public non anglophone.

82      À cet égard, il doit être rappelé que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76]. Dès lors, le risque de confusion en raison de la similarité des marques en
cause pour les produits visés aux yeux du seul public non anglophone suffirait pour fonder le refus d’enregistrement de la marque demandée.

83      Par ailleurs, en ce qui concerne le prétendu caractère descriptif ou le faible caractère distinctif de la marque antérieure RAW pour le public anglophone, cet argument doit être rejeté pour les raisons exposées aux points 41 à 46 ci-dessus.

84      Troisièmement, l’argument selon lequel la chambre de recours n’a pas analysé la marque demandée comme un ensemble doit être également rejeté. D’une part, la chambre de recours a effectivement comparé les signes en cause dans leur ensemble, ainsi qu’il a été exposé aux points 36 à 38 ci-dessus. D’autre part, dans la mesure où la requérante soutient que la chambre de recours aurait dû analyser la marque demandée comme un seul mot indivisible, il convient de rejeter cet argument pour les
raisons exposées aux points 61 à 66 ci-dessus.

85      Par conséquent, la troisième branche doit être écartée et, partant, le second moyen dans son ensemble.

2.      Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

86      Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’indique pas les raisons pour lesquelles elle a conclu, d’une part, que les marques antérieures RAW avaient un caractère distinctif normal et, d’autre part, que le mot « gin » avait un caractère descriptif quant aux produits désignés relevant de la classe 21.

87      L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, conteste les arguments de la requérante.

88      À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 75 du règlement n° 207/2009, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits
et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du
21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, EU:C:2004:649, points 63 à 65).

89      En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [arrêt du 15 janvier 2015, MEM/OHMI (MONACO), T‑197/13, EU:T:2015:16, point 19].

90      Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêt du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, EU:T:2008:268, point 55].

91      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que la division d’opposition avait correctement conclu qu’il existait un risque de confusion entre la marque verbale demandée GINRAW et les marques antérieures RAW pour l’ensemble des produits désignés, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Plus précisément, il ressort du considérant 11 de la décision attaquée, d’une part, que les produits litigieux et les produits de l’intervenante compris dans la classe
33 sont identiques et, d’autre part, que les produits litigieux et les produits de l’intervenante compris dans la classe 21 sont identiques, hautement similaires ou moyennement similaires. Aux termes des considérants 14 à 16 de la décision attaquée, les marques verbales en cause ont un degré moyen de similitude visuelle, phonétique et aussi, en ce qui concerne le public anglophone, conceptuelle. Dès lors, dans le cadre d’une appréciation globale, la chambre de recours a conclu qu’il existait un
risque de confusion entre les marques en conflit, pour les raisons exposées aux considérants 17 à 23 de la décision attaquée. Une telle motivation est, en principe, suffisante pour satisfaire aux exigences évoquées aux points 88 à 90 ci-dessus.

92      Premièrement, s’agissant, plus particulièrement, du grief relatif au prétendu défaut de motivation concernant les raisons pour lesquelles les marques antérieures RAW avaient un caractère distinctif normal, même si le considérant 23 de la décision attaquée se limite à faire ce constat, il convient toutefois de tenir compte de la motivation plus détaillée à ce titre contenue dans la décision de la division d’opposition. Étant donné que la chambre de recours a entériné cette décision dans
son intégralité, comme il ressort notamment du considérant 7 de la décision attaquée, et compte tenu de la continuité fonctionnelle entre la division d’opposition et la chambre de recours, cette décision ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, contexte qui est connu de la requérante et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité [arrêt du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI),
T‑512/15, EU:T:2016:527, point 46].

93      À cet égard, il convient de relever que, selon la décision de la division d’opposition, les marques antérieures RAW avaient un caractère distinctif inhérent normal, parce que, contrairement aux arguments de la requérante, le terme « raw » n’avait pas de signification précise ou élogieuse concernant les produits compris dans les classes 21 et 33.

94      Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée aux points 88 à 90 ci-dessus, la chambre de recours ne saurait être tenue de répondre spécifiquement à chacun des arguments soulevés ou de rejeter spécifiquement chacun des éléments de preuve avancés par la requérante.

95      Au vu de ce qui précède, la décision attaquée ne saurait être critiquée pour défaut de motivation en ce qui concerne le caractère distinctif normal des marques antérieures RAW.

96      Deuxièmement, s’agissant du grief tiré d’un défaut de motivation relatif au caractère descriptif du mot « gin » quant aux produits relevant de la classe 21, il y a lieu de relever que, en son considérant 23, la décision attaquée se limite à indiquer que ce mot est descriptif des produits, mentionnant explicitement le genièvre (eau-de-vie), qui est compris dans la classe 33. Or, comme il ressort de la jurisprudence citée au point 92 ci-dessus, la décision de la division d’opposition
ayant été confirmée par la chambre de recours, cette décision ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée.

97      À cet égard, il y a lieu de relever que la décision de la division d’opposition indique que le mot « gin » est descriptif d’une série de produits compris dans la classe 21, à savoir les « cristaux (verrerie) ; verrerie pour boissons ; verres, récipients pour liquides et accessoires de bar ; shakers, mélangeurs manuels (shakers pour cocktails), agitateurs pour cocktails, pailles pour cocktails, piques à cocktail, bâtonnets pour mélanger les cocktails ». Par ailleurs, la décision de la
division d’opposition ajoute que l’élément « gin » sera associé à une boisson spiritueuse distillée à partir de céréales ou de malt et aromatisée aux baies de genévrier. Dès lors, il est évident que la raison pour laquelle la division d’opposition a considéré que le mot « gin » était descriptif des produits mentionnés ci-dessus et compris dans la classe 21 était le fait qu’ils étaient liés à la préparation ou à la consommation de la boisson spiritueuse en cause. De plus, il ressort du point 44
de la requête que la requérante était en mesure de connaître le lien, qu’elle admet même, entre certains des produits mentionnés ci-dessus et compris dans la classe 21 et la préparation de boissons à la base de genièvre ou « gin ».

98      Par ailleurs, l’EUIPO relève que, compte tenu du fait que la requérante n’a pas contesté devant la chambre de recours le caractère descriptif du mot « gin » à l’égard des produits en cause compris dans la classe 21, la chambre de recours ne s’est pas attardée sur cette question et s’est bornée à faire siennes les conclusions de la division d’opposition. Force est de constater que non seulement la requérante n’a pas contesté devant la chambre de recours le caractère descriptif du mot
« gin » pour les produits compris dans la classe 21, mais elle a même admis explicitement ce caractère dans son recours contre la décision de la division d’opposition.

99      Dès lors, il y a lieu d’écarter le grief tiré d’un défaut de motivation concernant le caractère descriptif du mot « gin » pour les produits compris dans la classe 21.

100    Au vu de ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé. Partant, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

101    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

102    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de la partie intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mediterranean Premium Spirits, SL est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’EUIPO et G-Star Raw CV.

Collins Kancheva Barents

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juin 2017.

Signatures

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*      Langue de procédure : l’anglais.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : T-258/16
Date de la décision : 07/06/2017
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale GINRAW – Marques de l’Union européenne verbales antérieures RAW – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 – Éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal – Obligation de motivation.

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale

Marques


Parties
Demandeurs : Mediterranean Premium Spirits, SL
Défendeurs : Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Collins

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2017:375

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